Principales propriétés du papier
Les propriétés de texture correspondent aux propriétés comme le gram mage, la porosité ou encore la perméabilité à l’air ou aux liquides. Le grammage, exprimé en g/m2, est notamment relié à la souplesse du papier. Un papier avec un faible grammage sera plus souple ce qui risque par exemple d’augmenter les chances de bourrage dans une imprimante conventionnelle. Le grammage est donc une donnée importante du papier et varie suivant le type de papier produit. On retrouve par exemple un gram mage d’environ 45 g/m2 pour le papier journal standard tandis qu’ un papier d’ impressions se situe aux alentours de 80 à 90 g/m2 [25]. La porosité est responsable de la qualité de l’ impression. Un papier peu poreux aura tendance à être un papier de meilleure qualité pour l’ impression. Des procédés de couchage ou de calandrage sont parfois effectués pour améliorer la qualité du papier pour l’ impression [25]. Les propriétés mécaniques sont des mesures de la résistance du papier face à différentes contraintes. On retrouve ainsi la rési stance à la traction, à la déchirure, à l’ éclatement ou encore au pliage. Ces propriétés sont ainsi responsables de l’aptitude au froissement du papier ou encore de sa dégradation vis-à-vis des différentes contraintes physiques qui lui sont appliquées.
Les principales propriétés mécaniques que l’on va étudier sont l’ indice de rupture et l’ indice de déchirure. L’ indice de rupture, exprimé en N.m/g, est influencé par la longueur des fibres et la cohésion entre les fibres. L’ indice de déchirure, exprimé en mN.m2/g, est lui aussi dépendant de la longueur des fibres et de la cohésion entre ces fibres mais aussi de la force intrinsèque des fibres [6]. Pour un papier d’ impression composé de PTM de bois mou, on obtient un indice de rupture de l’ordre de 52 N.m/g et un indice de déchirure d’environ 7,2 mN.m2/g [6]. Enfin, il y a les propriétés optiques du papier. La brillance, la blancheur, la couleur ou le coefficient de diffusion de la lumière sont toutes des propriétés qu’ il peut être nécessaire de prendre en considération dans certains grades papetier. Les papiers journaux auront une blancheur plus faible (- 60% ISO) alors que dans des magazines, on peut chercher une blancheur beaucoup plus importante (- 85% ISO) [6]. Les propriétés optiques sont très importantes et peuvent limiter l’ utilisation de certaines pâtes pour des applications spécifiques. Ainsi, il est parfois nécessaire de blanchir la pâte ou d’ajouter des pigments pour améliorer les propriétés optiques du papier.
Les modifications chimiques des pâtes à papier
Il existe plusieurs modifications chimiques possibles de la pâte à papier favorisant diverses applications [4, 5]. Les quatre transformations chimiques majeures des pâtes à papier sont l’éthérification, l’ estérification, la substitution nucléophile et l’oxydation. Ces transformations modifient la nature des composés de la pâte ce qui modifie ses propriétés initiales. Dans notre étude, c’est la réaction d’oxydation de la pâte qui est étudiée pour sa capacité à améliorer le potentiel de liaison entre les fibres dans le papier et à faciliter la production de nanofibres. Majoritairement étudiée sur la cellulose, l’oxydation d’une unité d’anhydroglucose peut s’ effectuer sur le carbone 6 (C6) ou sur les carbones 2 et 3 (C2 et C3) (Figure 2.17) [5]. L’oxydation en C6 conduit à la formation d’un groupement aldéhyde puis d’un groupement carboxylique. L’oxydation en C2 et C3 va, de la même manière, former deux groupements aldéhydes puis deux groupements carboxyliques. Cependant, l’oxydation des C2 et C3 engendre une rupture de cycle qui conduit à la dépolymérisation de la cellulose et à la diminution de la force intrinsèque des fibres [5]. Ce type de transformation a pour but d’ améliorer les propriétés mécaniques du papier [15]. L’oxydation va pouvoir augmenter les résistances mécaniques du papier selon deux principes. Le premier est de former des groupements aldéhydiques qui permettent la création de liaisons hémiacétales covalentes entre un hydroxyle et un aldéhyde de deux fibres différentes.
Ce type de liaison augmente grandement les résistances mécaniques du papier notamment en présence d’eau, car la liaison n’est pas affectée par la présence de molécules d’eau, contrairement aux liaisons hydrogènes, généralement responsables des liens entre les fibres. Le second principe pour améliorer les résistances du papier est d’augmenter le potentiel de liaison hydrogène entre les fibres. La création des groupements carboxyliques dans la pâte par une oxydation permet d’accroitre ce potentiel de liaison lorsque la quantité de ces groupements n’est pas trop élevée [31 , 32]. Lorsque la pâte contient une grande quantité de groupements carboxyliques, les microfibrilles vont avoir tendance à se repousser! à cause des fortes charges négatives induites ce qui favorise la production de microfibres et nanofibres par dispersion mécanique. Cette méthode n’est pas la seule permettant de produire de la nanocellulose, mais elle a l’avantage de produire des sites fonctionnels sur la pâte et ainsi d’améliorer les interactions avec des polymères.
L’oxydation aTEMPO sur la pâte thermomécanique
L’ oxydation avec le système aTEMPO/NaBr/NaClO sur une pâte contenant à la fois de la cellulose, des hémicelluloses et de la lignine a été l’ objet de quelques études. Toutes les recherchent montrent qu’une modification chimique de la pâte thermomécanique est possible avec ce système réactionnel [13, 14]. Cependant, les résultats montrent que l’oxydation ne devient plus uniquement sélective à l’alcool pnmalre de la cellulose puisqu ‘ il y a un effet de dégradation de la lignine et des hémicelluloses [13]. Toutefois, la dégradation des constituants semble pouvoir être contrôlée suivant les conditions réactionnelles [47]. Le facteur ayant le plus fort impact sur la quantité finale de lignine et d’hémicelluloses est l’hypochlorite de sodium [48, 49]. Celui-ci est en effet connu pour sa capacité de blanchiment des pâtes mécaniques, ce qui va engendrer une compétitivité entre la réaction d’ oxydation et la dégradation des composés [49]. La quantité d’ hypochlorite de sodium nécessaire pour obtenir une même quantité de groupements carboxyliques sera donc plus importante lors de l’oxydation d’ une pâte thermomécanique comparativement à l’ oxydation de la pâte Kraft.
De plus, un des avantages du procédé de mise en pâte thermomécanique est son fort rendement de production, il faudra donc limiter la perte de composés que peut occasionner la dégradation des différents constituants de la pâte. La pâte thermomécanique aTEMPO oxydée a d’abord été étudiée dans le cadre du renfort papetier [14-16, 31 , 32]. L’oxydation permet d’augmenter la quantité de groupements carboxyliques de la pâte et ainsi d’améliorer le potentiel de liaison entre les fibres conduisant à une augmentation des résistances à la rupture et à l’éclatement [16, 50, 51]. L’ oxydation a également pour effet de diminuer la force intrinsèque des fibres ce qui va engendrer une diminution de la résistance du papier face à la déchirure [15, 16, 51]. Des essais d’incorporation de pâte aTEMPO oxydée avec une PTM non oxydée ont montré qu’ il est possible de favoriser l’ensemble des résistances mécaniques du papier [32, 52] permettant même le remplacement de pâte Kraft dans certains grades papetiers [32]. De plus, la présence de groupements carboxyliques dans la pâte semble limiter la quantité de solides dissous des eaux utilisées lors de la formation des feuilles, sans affecter les propriétés du papier [31].
Une autre voie d’ application étudiée de la PTM aTEMPO oxydée est la formation de nanofibres. Les nanofibres sont considérées comme des fibres dont au moins une dimension est de l’ordre du nanomètre [53]. Les études se sont davantage basées sur l’utilisation de la nanocellulose pour le développement de nouvelles applications dans un grand nombre de domaines comme la médecine [54], les matériaux composites [55], l’emballage alimentaires ou encore le renfort papetier [32]. Toutefois, pour plusieurs de ces applications, il peut être envisageable de remplacer la nanocellulose de pâte Kraft par des nanofibres de pâte thermomécanique. Par exemple, la nanocellulose peut être associée au polypyrrole pour obtenir un matériau conducteur [58]. Dans ce cas, le matériau est noir à cause du polypyrrole. La coloration jaune de la lignine n’ est donc pas un problème mais le comportement des nanofibres vis-à-vis du polypyrrole risque de changer. Pour une autre application, comme des détecteurs d’humidité [59], remplacer la nanocellulose hydrophile par les nanofibres de PTM contenant de la lignine hydrophobe peut être intéressant économiquement pour des capteurs nécessitant une plus faible sensibilité. Des recherches ont montré qu’il est possible d’obtenir des nanofibres de pâte thermomécanique uniquement par traitement mécanique [60]. Toutefois, l’ utilisation de l’ oxydation aTEMPO permet de produire des nanofibres avec un traitement mécanique moins exigeant [13]. Lorsque la réaction aTEMPO est effectuée dans ce but et que l’on souhaite produire des nanofibres de TMP se rapprochant de la nanocellulose de pâte Kraft, la quantité d’ hypochlorite de sodium nécessaire pour la réaction est très importante de manière à solubiliser au maximum la lignine et les hémicelluloses et permettre l’ incorporation du plus grand nombre de groupements carboxyliques sur les chaînes de cellulose [13]. Cependant, cela fait perdre le principal avantage de la PTM à savoir son fort rendement. Il serait donc intéressant d’étudier les paramètres de l’oxydation aTEMPO pour produire une pâte à haute teneur en groupements carboxyliques permettant d’ obtenir des matériaux composés de nanofibres avec la plus faible perte de rendement possible..
Avant-propos |