Influence du solvant sur la viscosité des solutions
La viscosité des solutions de cellulose/EMIMAc est 5 à 6 fois plus élevée que celle des solutions de cellulose/BMIMCl à température égale [Sescousse 2010]. La Figure II-5 représente la viscosité relative (où est la viscosité de la solution et celle du solvant) pour deux solutions de cellulose/EMIMAc de concentrations différentes. Sur cette même figure, nous avons tracé les résultats sur des solutions de cellulose/BMIMCl de concentrations identiques [Sescousse 2010]. Il est remarquable que les courbes se superposent parfaitement pour les deux solvants dans l’écart de température commun aux deux solutions. Cela signifie que la différence de viscosité observée entre les solutions issues des deux solvants (EMIMAc et BMIMCl) est uniquement due à la différence de viscosité entre les solvants. Cette différence de viscosité est visible dans la Figure II-3 à 70°C. Les hautes valeurs de viscosité absolue des solutions de cellulose/BMIMCl peuvent simplement être dues au fait que les températures étudiées sont bien plus proches de la température de fusion de BMIMCl (70°C d’après le fabriquant, 55°C d’après les mesures par DSC réalisées par K Anh Le) comparé à EMIMAc pour lequel la température de fusion est très basse (elle n’a d’ailleurs pas été reportée ni par le fabriquant, ni dans la littérature).
Viscosité intrinsèque
Méthode de détermination
L’une des propriétés les plus importantes d’un polymère dissout est sa viscosité intrinsèque qui est directement corrélée au rayon de giration de la macromolécule et reflète la qualité thermodynamique du solvant.
La technique traditionnelle pour la détermination de la viscosité intrinsèque est la suivante : les temps d’écoulement du solvant et des solutions de différentes concentrations à travers un capillaire de viscosimètre Ubbelohde sont mesurés. Les viscosités du solvant et de la solution sont alors directement liées au temps d’écoulement par une constante de proportionnalité. Cette constante est définie par la géométrie (le diamètre) du capillaire calibrée par le constructeur.
Evolution avec la température
L’influence de la température sur la viscosité intrinsèque de la cellulose dans le solvant EMIMAc est présentée sur la Figure II-7. La viscosité intrinsèque de la cellulose dans le solvant BMIMCl est représentée sur la même Figure II-à titre de comparaison [Sescousse 2010]. Pour les deux solvants, les valeurs des viscosités intrinsèques diminuent lorsque la température augmente, ce qui indique une diminution de la qualité thermodynamique du solvant. Un tel comportement a déjà été remarqué pour les systèmes de cellulose microcrystalline dissoute dans le solvant NaOH9%, au dessus de la concentration de recouvrement [Roy 2003] mais aussi pour le solvant EMIMAc, pour des celluloses de plus haute masse moléculaire [Gericke 2009]. Dans le cas des systèmes cellulose/NaOH/eau, il est maintenant connu que les solutions gélifient avec l’augmentation de la température pour une concentration supérieure à la concentration de recouvrement. Ce phénomène de gélification, pour ces systèmes, accompagné d’une micro-séparation de phase, est attribué à la diminution de la qualité thermodynamique du solvant, les interactions cellulose-cellulose devenant prépondérantes sur les interactions cellulose-solvants lorsque la température augmente [Roy 2003][Gavillon 2008]. Cependant, la gélification et la microséparation de phase n’apparaissent pas pour les systèmes cellulose/liquides ioniques. Pour une même température, les viscosités intrinsèques de la cellulose dissoute dans BMIMCl sont égales, aux erreurs expérimentales prés, à celles de la cellulose dissoute dans le solvant EMIMAc.
Evolution des paramètres avec la concentration
Tout comme l’énergie d’activation, B et 0 dépendent de la concentration. Il est intéressant de comprendre et de prédire leur comportement avec la concentration : comparer B(C) avec VI (C) dont les valeurs sont montrées dans la Figure II-12. Les résultats sont donnés dans les Figures 15 et 16 pour B(C) et pour T0 (C) respectivement. B augmente et T0 diminue faiblement avec l’augmentation de la concentration en cellulose.
Le modèle algébrique le plus simple pour décrire la dépendance de la pseudo énergie d’activation (et de l’énergie d’activation, comme il sera montré par la suite) avec la concentration est une loi puissance, dans la mesure où l’énergie d’activation devrait être proportionnelle au nombre de barrières de potentiel élémentaire à franchir pour commencer un flux visqueux. Pour la pseudoénergie d’activation, cette dépendance peut être écrite de la manière suivante.
Partie expérimentale
Matériel
Cellulose
La cellulose utilisée est la cellulose microcrystalline Avicel. Elle possède un faible DP (170) nécessaire à une bonne dissolution dans le solvant NaOH8%. Elle a été fournie par FMC corporation.
Solvants
NaOH
Le solvant NaOH est fournit par Sigma Aldrich sous forme de pastilles. L’hydroxyde de sodium est dissout dans de l’eau distillée. La concentration utilisée dans un premier temps est 12%. Cette concentration sera ramenée à 8% lors du processus de dissolution de la cellulose.
EMIMAc
Le solvant EMIMAc est fournit par Sigma Aldrich. Son nom complet est le 1-ethyl-3 methylimidazolium acetate. Il se trouve sous forme liquide à température ambiante.
BMIMCl
Le solvant BMIMCl est fournit par Sigma Aldrich. Son nom complet est le 1-butyl-3 methylimidazolium chloride. Il se trouve sous formede cristaux à température ambiante.
Coagulants
Eau
L’eau utilisée comme coagulant, pour la dilution deNaOH et pour la dilution de l’acide acétique est de l’eau distillée.
Acide acétique
L’acide acétique est fournit par Sigma Aldrich sous forme de bouteilles d’acide dilué, de concentration 1M. Les différentes concentrations utilisées sont obtenues par dilution avec de l’eau distillée.
Méthodes
Préparation des échantillons
Nous expliquons dans un premier temps le protocole de dissolution de la cellulose dans les différents solvants utilisés. Puis, nous verrons par la suite qu’il est indispensable de donner une forme géométrique de dimension connue des échantillons pour le calcul du coefficient de diffusion. Pour des raisons pratiques, la forme plan semi-infini a été retenue. Il s’agit de donner à l’échantillon une forme de cylindre plat dont le diamètre est au moins dix dois supérieur à l’épaisseur. Nous détaillerons donc la méthode utilisée pour donner cette forme aux gels et aux solutions de cellulose.
Dissolution de la cellulose dans NaOH 8%
Le protocole de dissolution est le suivant. De l’eau distillée est ajoutée à la cellulose afin d’amorcer le gonflement, puis refroidie à +5°C. Une solution de NaOH 12% est préparée et stockée à -6°C. Une fois que le mélange cellulose/eau et NaOH 12% ont atteint leur température de stockage respectif,NaOH12% est versé dans le bécher contenant le mélange cellulose/eau. La quantité de NaOH versée est égale à deux fois la quantité d’eau présente dans le bécher contenant la cellulose, de manière à ce que la concentration finale en NaOH soit 8%. Le bécher est ensuite placé dans un bain réfrigérant à -6°C et le système est mélangé à l’aide d’un mélangeur à 1000 tour/min pendant 2h. La solution obtenue, d’une couleur translucide légèrement jaunâtre est stockée au réfrigérateur (entre 2 et 6°C) afin de limiter la gélification. A cette température, la solution peut être utilisée pendant plusieurs semaines avant de se gélifier.
Dissolution de la cellulose dans les liquides ioniques EMIMAc et BMIMCl
La cellulose et le liquide ionique sont mis dans un ballon. Celui-ci est immédiatement refermé de manière hermétique afin que l’humidité de l’air ne soit pas adsorbée dans le liquide ionique. Le système est chauffé à une température de 80-90°C sous faible agitation mécanique pendant une durée minimale de 12h. Une fois que la solution esttransparente et limpide, le processus est arrêté.
La solution est stockée dans un dessiccateur afin de la préserver de l’humidité de l’air.
Préparation des échantillons de gels de cellulose5%/NaOH8%
Une couronne en téflon, de diamètre et d’épaisseur bien déterminés repose sur une pastille de téflon. Le diamètre de la pastille est identique audiamètre extérieur de la couronne (Figure III-1). La solution de cellulose5%/NaOH8% est versée à l’intérieur du récipient formé par la pastille et la couronne. Une pastille supplémentaire, identique à la première est ensuite posée sur la couronne contenant la solution afin d’éviter l’évaporation du solvant. Le système est maintenu par un poids, puis est mis à l’étuve à la température de 50 ou 80°C. Au bout d’un certain temps (15 mn, 90 mn, 2h ou 20h), le système est sorti de l’étuve. L’échantillon gélifié a épousé la forme de l’intérieur de la couronne (cylindre plat). Il est retiré délicatement du moule et pesé. Le gel est ensuite délicatement plongé dans le bain de régénération.
Préparation des échantillons de solutions de cellulose
5%/NaOH8%, de cellulose/EMIMAc et de cellulose/BMIMCl
Il n’est pas possible de déterminer le coefficient de diffusion du solvant vers le non-solvant par une approximation de la loi de Fick si la forme de l’échantillon ne respecte pas une certaine géométrie : plan semi-infini, sphère ou cylindre allongé. Si les solutions non gélifiées sont versées ou plongées dans le non solvant sans précaution particulière, il n’est pas possible de contrôler les dimensions de l’échantillon. C’est pour cela que les solutions decellulose sont contenues dans un moule possédant les caractéristiques géométriques souhaitables (en forme de pastilles cylindriques, pour l’approximation plan semi-infini). Les solutions decellulose dans les solvants NaOH8%, EMIMAc et BMIMCl sont très visqueuses. Nous avons exploité cette caractéristique afin d’élaborer un moule adapté à l’étude de la cinétique de régénération. La fonction de ce moule est de retenir la solution de cellulose alors que les molécules de non-solvant peuvent aisément pénétrer et circuler à l’intérieur de celui-ci. Les parois du moule sont composées de mailles en acier inoxydable dont la taille des motifs est de 50 µm. Les mailles sont suffisamment serrées pour éviter la fuite de la solution visqueuse pendant la préparation de l’échantillon.
La solution est versée dans le moule cylindrique en maille d’acier inoxydable (Figure III-2). Un couvercle équipé de mailles identiques au moule est posé de manière à recouvrir la solution. Des pinces en acier inoxydable maintiennent fermement le système, qui est pesé puis plongé dans le bain de régénération.
Calibration par pH-métrie
Cette méthode a été utilisée pour la détermination du coefficient de diffusion de NaOH8% vers le bain de régénération eau ou acide.
La courbe de calibration utilisée est une courbe de dosage d’un acide faible par une base forte par pH-métrie. Le volume exact de non-solvant qui sera utilisé pour la cinétique de régénération est contenu dans un bécher sous agitation magnétique. L’électrode d’un pH-mètre plonge dans le bain. Des volumes précis de NaOH8% sont ajoutés dans un bécher contenant le volume et la concentration du coagulant qui seront utilisés pour la régénération. Le pH est relevé en fonction du volume cumulé de NaOH 8%.
La courbe pH en fonction du volume NaOH 8% ajouté est caractéristique d’un dosage acide faible par une base forte dont la forme et l’expression théorique sont bien connues (Figure III-3). Afin de limiter les erreurs qui seraient éventuellement commises lors du saut de pH à l’approche de l’équivalence, notre choix s’est porté sur la restriction de cettecourbe bien avant l’équivalence. Le ratio du volume 3 mm 3 cm 50 µm Solution de cellulose de l’échantillon sur le volume du bain d’acide est choisi de manière à ne pas dépasser le virage précédent l’équivalence.
L’expression théorique du pH en fonction du volume de NaOH8% ajouté est proche de la courbe de calibration, mais pas suffisamment pour pouvoir l’utiliser comme conversion pH-V NaOH8% libéré. Pour cette raison, la correspondance entre le volume de NaOH8% ajouté et le pH est donnée par une translation de l’expression théorique du pH (théorique retouché dans l’encart de la figure III-3).
Calibration par conductimétrie
Cette méthode a été utilisée pour la détermination du coefficient de diffusion de NaOH8% vers le bain de régénération eau. Nous avons procédé de la même manière que la calibration par pH métrie.
Une électrode reliée à un conductimètre plonge dansun bain d’eau. La conductivité est relevée en fonction du volume cumulé de NaOH8%.
La conductivité d’une solution augmente linéairement avec la concentration d’ion (Figure III-4). La correspondance entre la concentration et la conductivité est donnée par l’équation de la courbe de tendance linéaire.
Calibration par réfractométrie
Cette méthode a été utilisée pour la détermination du coefficient de diffusion des liquides ioniques (BMIMCl et EMIMAc) vers le bain de régénération eau. Des solutions aqueuses de BMIMCl et de EMIMAc de diverses concentrations (jusqu’à 38%) ont été réalisées. Un prélèvement de quelques gouttes est posé sur l’optique d’un réfractomètre. L’indice de réfraction est déterminé visuellement.
L’indice de refraction na été relevé en fonction de la concentration de liquides ioniques BMIMCl et EMIMAc. Celui-ci augmente linéairement avec la concentration en liquide ionique comme le montre la Figure III-5. La correspondance entre la concentration et l’indice de réfraction est donnée par l’équation de la courbe de tendance linéaire.
Mesure de la quantité de solvant libérée en fonction du temps
L’échantillon de gel ou de solution de cellulose est plongé dans un bécher contenant un volume précis de coagulant. Le coagulant est mis sous agitation magnétique, à 400 tours/mn afin de rendre la concentration du solvant homogène dans le bécher. L’échantillon repose sur un plan troué dans le but de le protéger de l’aimant en rotation. Afin dedéterminer la quantité de solvant qui est libérée en fonction du temps, la méthode varie selon le solvant et le coagulant utilisé. La Figure III-6 illustre les méthodes utilisées décrites ci-dessous.
Pour le solvant NaOH8% et les coagulants acide et eau, le pH est relevé au cours du temps grâce à une électrode plongée dans le bain reliée à un pH-mètre. La quantité de solvant est ensuite calculée grâce à l’expression de la courbe théorique retouchée de la calibration (Figure III-3).
Pour le solvant NaOH8% et le coagulant eau, une cellule de conductimètre plonge dans le bain de régénération. La conductivité du bain est relevée au cours du temps. La quantité de solvant libérée est ensuite calculée à l’aide de la courbe de calibration (Figure III-4). Les mesures par conductimétrie et par pH-métrie ont été couplées pour le coagulant eau. Les résultats obtenus par les deuxméthodes sont identiques.
Pour les solvants EMIMAc ou BMIMCl et le coagulant eau, environ 0,5 g sont prélevés du bain de régénération à intervalles de temps réguliers. A lafin de la régénération, la concentration maximum en liquide ionique est inférieure à 3%. Entre le début et la fin de la régénération, l’indice de réfraction varie (d’après la Figure III-5) entre 1,33 et 1,34. La précision du réfractomètre (0,001) est insuffisante pour suivre avec précision l’évolution de la quantité de solvant diffusée dans le bain.
Pour accroître la précision, nous avons donc procédé à l’évaporation contrôlée de l’eau contenue dans les prélèvements. Ces prélèvements sont mis dans une étuve chauffée à 80°C, afin d’évaporer l’eau jusqu’à ce que leurs masses diminuent de 90%.Une fois leurs nouvelles masses pesées, l’indice de réfraction des prélèvements est mesuré. La concentration initiale du prélèvement est calculée grâce à la courbe de calibration et de la différence de masse avant et après l’évaporation de l’eau.
Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE I-ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE
CHAPITRE II-VISCOSITE DES SOLUTIONS DE CELLULOSE DANS UN LIQUIDEIONIQUE: EMIMAC
CHAPITRE III-CINETIQUE DE REGENERATION DE LA CELLULOSE A PARTIR DE
CELLULOSE/NAOH 8% ET CELLULOSE/LIQUIDES IONIQUES
CHAPITRE IV-CARACTERISATION DES AEROCELLULOSES ET DES AEROCELLULOSES PYROLYSES
CHAPITRE V-APPLICATIONS DES MATERIAUX CELLULOSE REGENEREE ET AEROCELLULOSE PYROLYSE
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
ANNEXES