High-Growth et ses déterminants
On sait que plusieurs facteurs déterminent la forte croissance des PME. Par exemple, Kay (2014) cite l’entrepreneur et son désir de croître, la PME et ses caractéristiques et le besoin d’ accès aux ressources. Dans une étude menée auprès des PME à fortes croissances en Italie, Bramanti (2001) évoque trois principaux facteurs expliquant les succès des entreprises italiennes: les facteurs externes, internes et la motivation personnelle du dirigeant. Dans un même ordre d’idées, Filion (2014) assume que la croissance ou encore la forte croissance est la résultante d’un ensemble de facteurs tant individuels que sociaux; dans le sens que l’entreprise est un microsystème social, qui s’ insère dans un macro système social plus large, où les valeurs de la famille et des milieux influencent les valeurs, la définition de soi, les aspirations ainsi que les niveaux d’ambition des entrepreneurs. L’auteur avance plus loin que « penser croissance » signifie « penser innovation » et « penser autrement » la conception des produits ainsi que l’ utilisation des ressources. Cependant, les facteurs les plus déterminants pour la croissance d’ une entreprise sont au nombre de sept (7) : la volonté de faire croître, la vision, la capacité, la mobilisation, l’écosystème entrepreneurial, l’agilité et le doigté (Filion, 2017). Par ailleurs, comme Julien (20 14a) l’a démontré, l’apport limité du milieu, en plus de la faible capabilité de la direction, et de la faible capabilité de l’organisation constitue des barrières potentielles à la croissance des PME. En accord avec Kouada, Aldebert et Amabile (2018), cette étude cherche à appréhender la forte croissance selon trois niveaux : l’individu (entrepreneur), son entreprise (la firme) et son environnement (l’écosystème). 2.1.1.1. L’entrepreneur
La naissance, de même que la croissance ou la forte croissance d’une PME, serait attribuée à une action humaine -l’entrepreneur (Industrie Canada, 20 J 5; Julien et Cadieux, 20 II ; St-Jean et Duhamel, 2018); le preneur de décision (Dew, Sarasathy, Read, et Wiltbank, 2009; Sarasvathy, 2001). Cela témoigne de son importance en tant que générateur de valeur par la création ou l’expansion d’activités économiques dans une dynamique entrepreneuriale au sein d’une région (Chabaud et Sammut, 2016). La dynamique entrepreneuriale est définie comme l’ensemble du processus qui tend à favoriser la création et le développement des entreprises (Chakroun, 2007). Plusieurs auteurs ont mis en évidence l’influence des attributs de l’entrepreneur : son trait personnel (Filion, 1999); son profil (c.-à-d. objectifs, motivation, éducation, expérience) (St-Pierre et Cadieux, 2011); sa représentation de la croissance (sa vision) (Tari lion, 2017). En effet, son rôle est primordial dans la stimulation de l’hypercroissance de son entreprise (Ambroise et al., 2010; Kouada et al., 2018). Avant tout, « croître ou ne pas croître? » relève de ses objectifs PIC (Pérennité, Indépendance, Croissance) ou CAP (Croissance, Autonomie, Pérennité) et de ses ambitions (Chabaud et Degeorge, 2016). D’où la nécessité, pour ces derniers, de prendre en compte le dirigeant; ses valeurs; ses projets, voire sa personnalité, pour décrypter la croissance et la performance des entreprises et penser à une politique publique efficace.
La firme
La forte croissance peut être appréhendée au nIveau de la firme. Les déterminants, tels que l’équipe managériale; les ressources financières; la R&D; le marketing, la GRH; la localisation géographique et la stratégie de la firme constituent des facteurs stimulant l’hypercroissance de la PME (Ambroise et al., 2010; Kouada et al., 2018; Zupic et Giudici, 2018).
v’ L ‘équipe managériale La théorie des échelons supérieurs de Séville et Wirtz (2010) illumine sur la dynamique de l’équipe de direction, ses caractéristiques et le processus de l’ hypercroissance. Leur contribution a été double. Premièrement, leur étude corrobore sur l’influence des caractéristiques du TMT (Top Management Team), le déclenchement ou le maintien de l’ hypercroissance. Deuxièmement, ils suggèrent l’effet du processus de l’hypercroissance sur la dynamique de l’ équipe de direction. Dans une perspective d’ innovation, Julien (2014b) supporte, d’ une part, l’ importance d’une organisation efficiente et décentralisée; apprenante et participante; pour régulièrement absorber les changements organisationnels et participer à l’ évolution des routines, cela afin de mieux répondre au marché en expansion et à l’arrivée continue de nouvelles ressources. D’autre part, il mentionne l’ importance d ‘ une équipe managériale de qualité et diversifiée (Julien, 2014a). La variété des compétences (autant techniques qu ‘ heuristiques), de même que la capacité de faire travailler ensemble ces compétences pour en tirer du savoir et du savoirfaire spécifique pour la production est cruciale si l’ entreprise désire croître.
v’ La gestion financière La gestion financière fait référence à l’ensemble de pratiques à court ou à long terme que l’entreprise adopte pour atteindre les objectifs de performance financière et de croissance qu’elle s’est fixée (Etchri, 2002). Plusieurs auteurs ont cherché à démystifier la complexité de ce déterminant chez les PME manufacturières. Il apparait que plus la croissance de la PME progresse à travers les étapes variées de son cycle de vie, plus les dimensions financières de ses opérations tendent à devenir de plus en plus problématiques (Mcmahon, 2001). La contribution de l’auteur a aidé à comprendre l’ impact direct et indirect des caractéristiques de la gestion financière et des caractéristiques des PME manufacturières australiennes sur leur croissance et leur performance. Bien que les récentes études (Lee, 2018) avancent que le financement interne, ou flux de trésorerie, serait un indicateur de la rentabilité future et de l’ investissement, donc de la croissance de la firme; il semblerait, selon les résultats de Mcmahon (2001) que la dépendance financière externe et les conseils financiers externes impactent directement et indirectement la croissance et la performance des PME manufacturières. Quant à Boujlida (2002), son étude empirique auprès de 210 PME manufacturières québécoises a mis en évidence la validité de trois dimensions financières de cette performance financière. D’après son résultat, il existe une corrélation significative entre le concept de performance financière et la rentabilité, la liquidité, le financement de ces PME .
La R&D La littérature existante signale l’ influence de la R&D sur la performance de la firme (Clark et Griliches, 1984; Coad et Rao, 2010; Morbey et Reithner, 1990). L’ incidence de la R-D sur la productivité a été élucidée dès l’année 1970. À cette époque, l’ intérêt des chercheurs (Clark et Griliches, 1984) était de mettre en évidence l’existence possible de liens positifs entre le processus de développement des produits, le choix de la technologie et la croissance de la productivité. En ce sens, les recherches récentes (Co ad et Rao, 2010; Morbey et Reithner, 1990) concluent également une forte association entre la croissance des ventes et de l’emploi et la croissance de la R&D. Cela s’explique par l’existence d’ une relation directe entre l’ intensité de R&D (R&D par ventes) et la croissance ultérieure des ventes; de même par l’existence d’ une relation étroite entre les dépenses de R&D par employé et la productivité subséquente de l’entreprise, mesurée en ventes par employé (Morbey et Reithner, 1990). Cependant, d’après leur analyse, la rentabilité est plutôt liée à la R&D par employé qu’à l’ intensité de la R&D. L’absence de liens significatifs entre le profit marginal et l’ intensité de la R&D semble être attribuable au contexte et à l’environnement institutionnel et commercial et à divers autres facteurs (ex. crise financière) (Lee, 2018).
Lafirme – une entité de connaissances
Une troisième approche de la croissance réside dans la vision de la firme comme une entité de savoir en adéquation avec le modèle dynamique de la croissance endogène de Romer (Romer, 1986, 1994). À l’opposé du modèle classique d’une firme axée sur l’équipe de production comme input; cette croissance est axée sur le capital humain et la R&D, comme source de connaissances, et donc la croissance économique (Audretsch, 2004). Au regard de ce contexte, Romer (1994) soutient que les profits monopolistiques associés aux modèles de croissance endogène motivent l’ innovation. Malgré l’abondance des recherches sur ces modèles, nous nous concentrons uniquement sur deux types de modèles de croissance endogène, identifiés par Romer, les modèles Spillover et les modèles linéaires. En ce qui concerne les modèles Spillover, Romer (1986) suppose que ce sont les retombées des efforts de recherches privés qui mènent à des améliorations du stock public de connaissances. Ces modèles reconnaissaient que les entreprises faisaient de la R&D intentionnellement et que les retombées pertinentes ou les droits de propriété incomplets étaient associés aux résultats de la R&D.
Le cadre de la prise de prix sans pouvoir monopolistique suppose une homogénéité dans tous les intrants du modèle de la croissance endogène (Romer, 1986, 1994). Aussi, à l’opposé du modèle Spillover, la branche des modèles linéaires de la théorie de la croissance endogène suggère une fonction de production homogène de degré un, qui considère la recherche (R) ; le capital physique (K) ; et le capital humain (H) étant comme des intrants ordinaires. S’ il n’ y a pas de marchandises non concurrentes, il n’ y a pas de rendements croissants (Romer, 1994). Ces modèles accordent de l’importance aux biens rivaux dans l’atteinte du « long-run growth » en termes de croissance économique. Actuellement, l’ activité R&D peut être menée à l’ interne (R&D intramurale) ou à l’externe (R&D extramural) (Aghion, Bergeaud, Blundell, et Griffith, 2017), selon l’orientation stratégique de la firme. Le soutien du gouvernement semble jouer un rôle important dans le financement de cette activité, de même que sur la performance de la PME (Audretsch, 2004; Doh et Kim, 2014; Hall et Josh, 2009; Pergelova et Angulo-Ruiz, 2014).
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