Variabilité climatique récente dans la zone sylvo-pastorale de 1951 aux années 2010
Analyse de la situation pluviométrique
En Afrique au Sud du Sahara, la pluviométrie constitue le paramètre climatique le plus important dans la vie des populations. Elle permet non seulement de déterminer l’évolution des ressources naturelles, mais aussi l’économie des pays. La pluviométrie est ainsi perçue comme l’élément prépondérant pour étudier et analyser la variabilité du climat en Afrique. La zone sylvopastorale a un climat de type sahélien caractérisé par un régime uni-modal marqué par l’alternance d’une longue saison sèche s’étendant d’octobre à juin/ juillet et d’une courte saison des pluies allant de juin/juillet à octobre. En effet, l’évolution pluviométrique dans ce milieu se singularise par une forte fluctuation à la fois temporelle et spatiale. La tendance générale qui se dégage est la diminution des totaux saisonniers depuis les années 1970. C’est dans ce contexte qu’une étude sur l’évolution de la pluviométrie est réalisée au niveau des différentes stations : Linguère, Louga, Matam, Podor et des postes de Sagatta Djolof et de Yang-Yang. Nous étudions d’abord l’évolution de la pluiviométrie de 1951 à 2013. Ensuite, nous analysons la distribution spatiale des pluies, les caractéristiques des saisons pluvieuses ainsi que les jours de pluie avant de mener une détection de rupture dans les séries. 3.1. Analyse de l’évolution de la pluviométrique Dans cette partie nous allons analyser l’aspect évolutif de la pluviométrie. L’objectif visé est d’examiner sa dynamique au cours de la période 1951-2013, dans le temps et dans l’espace. Puis, traiter dans un premier temps la variabilité des pluies. Cela se fait à partir de l’évolution interannuelle et interdécennale. L’analyse de la variabilté des pluies est aussi réalisée à partir des méthodes statistiques des écarts normalisés et de l’Indice de Pluviométrie Standardisé (IPS).
Etude de la variabilité interannuelle de la pluviométrie
Les fluctuations interannuelles de la pluviométrie, dans notre domaine d’étude, sont un fait avéré. Toutes les études ont montré que cette variabilité est très forte, et cela dans le temps, mais également dans l’espace. Les cumuls pluviométriques d’une année à une autre entre 1951 à 2013, varient en dents de scie (figure 20 et 21). Ces analyses identifient différentes séquences : Durant la première phase (1951-1969), les stations de Linguère et de Podor comptabilisent plus d’années sèches par rapport aux autres stations durant cette phase (cinq années). Pour Linguère, nous avons 1956, 1962, 1963, 1965 et 1968 ; à Podor se sont les années 1954, 1959, 1962, 1966 et 1968. Louga et Yang-Yang totalisent chacune trois dont respectivement : 1956, 1962 et 1968 ; et 1956, 1962 et 1965. Matam dénombre moins d’années sèches avec deux seulement (1976 et 1968) durant cette phase. L’ensemble des stations a connu globalement des pluies excédentaires. 134 Les maxima pluviométriques sont notés durant cette séquence en 1952 pour Louga avec 865,3mm ; en 1955 pour Podor (793,4 mm), en 1965 pour Matam (700,6 mm) et 1969 pour Linguère et Yang-Yang avec 679 mm pour la première et 790,3 mm pour la deuxième. Le minimum intervient dans toutes les stations en 1968 à l’exception de Podor où il est enregistré en 1962. Nous observons une évolution pluviométrique identique pour les années 1968 et 1969. L’année 1968 est, pour l’ensemble des stations, déficitaire contrairement à l’année 1969 qui est partout humide. Dans la deuxième séquence, nous constatons une évolution différenciée selon la station. Après 1969 survient la période la plus intense et la plus longue qu’ait connue le milieu depuis l’origine des relevés. Cette époque est caractérisée par des successions continues de plusieurs années de mauvaise pluviométrie (tableau 15). Ainsi, à Linguère elle va de 1969 à 2007. Là nous observons trois phases déficitaires dont la durée : cinq (5) années : 1970-1974, six (6) de 1976-1981 et 1990-1995 et huit (8) de 2000- 2007. Dans cette même dynamique, le poste pluviométrique de Sagatta Djolof est aussi matérialisé par des années sèches sans interruption. Ainsi, de 1989 à 1997 (soit 9 années) le milieu est déficitaire. A Louga, cette phase sèche va jusqu’en 2003. Elle fait partie des stations où la succession continue d’années déficitaires est plus importante. Ainsi, de 1975 à 1987 soit 13 années de déficit et de 1990 à 1998 soit 9 années de mauvaise pluviométrie. A la station de Matam, la succession d’années déficitaires est plus importante par rapport aux autres stations. Par conséquent, la localité est sèche de 1972 à 1986 soit 15 années. Cette évolution est aussi observée de 1989 à 1993 soit 5 années et de 1995 à 1998 (4 années). La station est sèche au cours de la période 1968-1998. A Podor, cette tendance va de 1968 à 1999. Elle est caractérisée par des périodes de sécheresse continues : de 1971 à 1975 soit 5 années et de 1979 à 1987 soit 9 années déficitaires et cela de manière successive. Enfin, Yang-Yang présente les mêmes caractéristiques : c’est-à-dire une évolution matérialisée par une succession de plusieurs années sèches. Ainsi, 11 années sont déficitaires de 1970 à 1980. Cette tendance est également remarquée de 1982 à 1986 soit 5 années, 1990 à 1997 et 2001 à 2007 soit 8 années.
Analyse de la variabilité inter-décennale de la pluviométrie
Le tableau 16 nous donne une idée du comportement décennal de la pluviométrie dans notre domaine d’étude. Certaines ressemblances sont remarquées au niveau des décennies dites humides ou sèches. En effet, la caractéristique générale qui se dégage est sa forte irrégularité. Tableau 16 : Pluviométrie moyenne décennale Stations 1951- 1960 1961- 1970 1971- 1980 1981- 1990 1991- 2000 2001- 2010 Moyenne de la série Linguère 572,0 452,6 341,6 409,0 387,4 437,6 433,5 Louga 535,1 410,0 292,2 283,7 289,0 313,4 353,4 Matam 546,1 469,4 285,9 344,8 372,4 438,0 408,3 Podor 360,1 287,1 192,7 181,7 216,5 291,8 253,6 Sagatta Djolof ——- ——– 360,7 326,1 405,5 364,1 369,1 Yang-Yang 567,3 429,8 289,7 355,9 304,5 376,5 385,2 Pour analyser l’évolution inter-décennale des pluies, la série est scindée en six (6) décennies et une courte période de trois ans
La décennie 1951-1960
Elle est marquée par une pluviométrie importante. Nous remarquons que durant cette période beaucoup de stations ont observé des cumuls supérieurs à la moyenne de la série. Vu la moyenne décennale des différentes stations ainsi que le nombre d’années excédentaires par rapport à celles déficitaires, nous pouvons affirmer qu’elle est la décennie la plus pluvieuse. 139 Cependant, au cours de cette période, la distribution spatiale de la pluviométrie sur l’ensemble du milieu est différente d’une station à une autre. Certaines n’ont enregistré aucune saison déficitaire alors que d’autres observent plus de deux années déficitaires. Ainsi, la station n’ayant pas d’année déficitaire, soit 100% d’excédents est : Matam. Le maximum pluviométrique est noté en 1951 avec 681,2 mm. Les stations qui enregistrent 10% de déficits contre 90% d’années excédentaires sont Linguère, Louga et Yang-Yang. Leur maximum pluviométrique intervient à Louga en 1952 avec 865,3 mm, à Linguère avec 677, 5 mm en 1951 et à Yang-Yang 726, 8 mm en 1957. Alors que leur minimum est observé à Louga en 1956 avec 339,8 mm, à Linguère et à Yang-Yang en 1956 avec respectivement 333,2 mm et 382 mm. La station qui a enregistré 80% d’années excédentaires est Podor. Elle a connu 20% d’années déficitaires avec un maximum durant cette période en 1955 s’étendant à 793,4 mm. L’étude décennale du comportement pluviométrique de 1951 à 1960 met en évidence l’inégale répartition spatiale. Ainsi, les totaux annuels les plus importants sont repérés dans les stations de Matam, Linguère et Yang-Yang alors que les plus faibles sont enregistrées au niveau de la station de Podor. L’analyse de cette décennie permet de voir que l’année 1956 a été déficitaire dans toutes les stations à l’exception de Matam et Podor. La première a relevé 100% d’excédent alors que Podor a observé ses déficits en 1954 et 1959 c’est-à-dire 80% d’excédent.
La décennie 1961-1970
La décennie reste humide, mais une nette diminution des cumuls pluviométriques annuels y est observée. Durant cette séquence, aucune station n’a enregistré 100 % d’années excédentaires comme ce fut le cas pour la décennie précédente. Les stations les plus arrosées sont Louga, de Matam, de Podor où nous avons 70 % d’années excédentaires. Celles les plus pluvieuses sont 1965 pour Matam avec 700, 6 mm et 1969 pour Louga et Podor avec respectivement 599 mm et 431,4 mm. Les stations de Louga et de Podor connaissent 70% d’années excédentaires. Celle la plus pluvieuse est 1969 pour Louga et Podor avec respectivement 599 mm et 431,4 mm. Les stations de Linguère et le poste de Yang-Yang sont les moins pluvieux au cours de cette période. Ainsi, Yang-Yang a observé 60% d’excédent alors que Linguère n’a que 50%. Au cours de cette décennie, le maximum de l’année pluviométrique est enregistré pour toutes les stations en 1969 à l’exception de Matam où il est noté en 1965. Dans cette séquence, l’année 1968 a connu dans toutes les stations un déficit pluviométrique. 140 L’année 1970 est presque partout l’année où le minimum pluviométrique a été enregistré mise à part les stations de Louga et de Podor où ils sont remarqués en 1968 et en 1962. 3.1.2.3- La décennie 1971-1980 L’évolution de la pluviométrie dans la décennie 1971-1980 est totalement différente de celle des décennies précédentes. Toutes les stations du milieu ont enregistré de forts déficits durant cette période. Dans toutes les stations, nous remarquons des déficits extrêmes jusque-là jamais égalés. Ainsi, le poste pluviométrique de Yang-Yang se particularise puisque n’ayant aucune année excédentaire soit 100 % d’années déficitaires. Les stations de Linguère et de Matam totalisent 90% d’années déficitaires. Elles ne connaissent qu’une seule année excédentaire. Cette dernière intervient en 1975 pour Linguère avec un excédent de 42,8mm et en 1971 pour Matam avec 22,7 mm. 80% d’années déficitaires sont relevées à Louga et Podor. Les excédents pluviométriques sont repérés durant cette décennie respectivement en 1974 avec 47, 1 mm, 1978 avec 61 mm. En ce qui concerne les déficits, ils sont intervenus en 1972 dans ces stations où le déficit s’élève à 205 mm pour Louga, 143,9 mm pour Podor. Le poste de Sagatta-Djolof compte 50% d’années déficitaires. L’excédent pluviométrique est égal à 128,9 mm en 1975 alors que déficit est 205,8 mm en 1977. Au cours de la décennie 1971-1980, les années déficitaires sont supérieures ou égalent à 80% à l’exception de Sagatta Djolof (50%) ; ce qui témoigne de l’intensité et de la sévérité de la sécheresse durant cette phase. Certaines années ont été particulièrement sèches comme 1972 et 1977. Elles ont connu dans toutes les stations des cumuls pluviométriques en dessus de la moyenne de la série. Le rapport entre l’année la plus pluvieuse et son opposée montre une forte variation des totaux. L’analyse du nombre d’années déficitaires par rapport à celles excédentaires, dans les différentes stations montre que cette période est un « véritable recul pluviométrique auquel on assiste au cours de cette décennie » (Dione. O, 1996).
La décennie 1981-1990
Nous observons, durant cette phase une accentuation du phénomène déficitaire qui concerne la quasitotalité des stations. Ainsi, la tendance à la déficience pluviométrique déjà visible dans la décennie précédente atteint son paroxysme. Les années 1983 et 1984 sont en effet, déficitaires dans toutes les stations étudiées et cela avec des déficits extrêmes. La situation de siccité s’est traduite au cours de cette séquence par des taux de déficit très élevés dans certaines localités. C’est le cas des stations de Matam et de Podor qui sont déficitaires à 80%. Les années de bonne pluviométrie concernent 1987 et 1988 pour Matam alors que pour Podor, elles interviennent en 1988 et 1989. Les excédents de pluies les plus importants sont notés en 1988 à Podor (86,7 mm) et en 1987 (50,7 mm). L’année 1984 est la moins pluvieuse à Matam et à Podor avec respectivement moins de 49,2 mm et 74,1 mm.
1. Introduction générale |