VALORISATION DES BOUES DE VIDANGE DANS L’AGRICULTURE
Généralité sur le compostage
Cadre conceptuel
Le compost est un mélange de débris organiques en décomposition et de matières minérales, destinés à nourrir et à alléger le sol qu’il enrichit en humus (Couplan et Marmy, 2009). Quant au co-compostage il désigne le compostage en mélange de matières organiques d’origine agricole (effluents d’élevage) et de résidus végétaux extérieurs permettant d’obtenir par fermentation aérobie un produit fini (le compost) constituant un amendement organique riche en composés humiques (Agricultures et Territoires, 2011).
But du compostage
Le compostage est un processus de transformation des résidus organiques en un fertilisant malléable, de couleur marron foncée. L’application du produit obtenu (le compost) fournit au sol de la matière organique (Charland, 2001).
Avantages du compost
Le compost présente plusieurs avantages aussi bien pour le développement des espèces agricoles que pour la structuration du sol. Entre autres avantages on peut citer : l’augmentation du pH des sols acides en raison des bases échangeables (Ca2+, Mg2+ , K + , Na+ ) du complexes argilo-humiques ; l’amélioration du pouvoir tampon du sol aux variations du pH ; la stimulation de l’activité biologique dans les sols (apport en matière organique) ; l’apport d’éléments nutritifs aux microorganismes du sol ; l’amélioration des propriétés physiques du sol (drainage, aération, rétention de l’eau) ; la prévention contre l’érosion ; etc.
Utilisations du compost
L’utilisation du compost demeure une nécessité dans plusieurs domaines comme : l’agriculture/horticulture ; la biorestauration de sites dégradés ou contaminés ; la stabilisation de pentes ;
Matériaux compostables
Tous les déchets organiques peuvent être compostés seuls ou avec un co-substrat. Dans certains cas, des constituants minéraux peuvent éventuellement être ajoutés pour corriger la composition du compost. La littérature fait état des différents exemples suivant les déchets compostés ou co-compostés : Les déchets de cuisine : épluchures, coquilles d’œufs, marc de café, filtres en papier, pain, laitages, croûtes de fromages, fanes de légumes, fruits et légumes abîmés, etc (Chaintron et al, 2013) ; Les déchets de jardin : tontes de gazon, feuilles, fleurs fanées, mauvaises herbes, etc. (ADEME, 2012); Les déchets de maison : mouchoirs en papier et essuie-tout, cendres de bois, sciures et copeaux, papier journaux, plantes d’intérieur, etc. ( Chaintron et al, 2013); Boues: en raison de leur très forte humidité, les boues doivent être mélangées, pour être co-compostées avec un structurant qui peut être constitué de déchets verts, ou de palettes de bois (ADEME, 2012): Compostage déchets organiques solides avec boues de vidange (Cofie et al., 2009); Compostage boues d’épuration avec des déchets verts plus des écorces (Albrecht, 2007).
Facteurs biologiques, physiques, chimiques dans la formation du compost
Les facteurs biologiques
Le processus de compostage ne peut avoir lieu sans les activités des microrganismes (bactéries, champignons, parasites divers, etc.) qui agissent sur les éléments nutritifs dont les plantes ont besoin. Un tel travail ne peut se faire que dans certaines conditions de pH, d’humidité, de température, etc. qui influencent la qualité du produit fini.
Micro-organismes
Bactéries
Les bactéries sont toujours présentes dans la masse des déchets organiques et ce dès le début du processus de compostage. Elles restent actives durant tout le compostage et en particulier à haute température. Parmi ces bactéries nous avons les coliformes totaux et les entérocoques fécaux.
Coliformes totaux
Les coliformes totaux regroupent plusieurs espèces bactériennes de la famille des entérobactéries (Centre d’expertise en analyse environnementale du Quebec, 2011). On les retrouve fréquemment dans le sol ou la végétation, ainsi que dans les intestins des mammifères, dont les êtres humains. Les coliformes totaux n’entraînent guère, en général aucune maladie, mais leur présence indique qu’une source d’approvisionnement en eau peut être contaminée par des micro-organismes plus nuisibles (Chevalier, 2002).
Coliformes fécaux et entérocoques
Coliformes fécaux
Les coliformes fécaux (CF) et les Escherichia coli sont des bactéries qui font partie du groupe des coliformes totaux et qui constituent les seuls membres de ce groupe que l’on trouve majoritairement dans les matières fécales des humains et des animaux. Les CF ont en effet une température optimale de croissance de 37°C, bien que tolérant 45°C, et ne peuvent survivre à des pH au-delà de 9, leur optimum de survie se situant autour de 6,0-7,0 (Tremblay, 2006). On peut trouver d’autres formes de coliformes fécaux comme le Clostridium perfringens. Ce dernier est une bactérie qui produit une toxine alpha (Hordé, 2011). Elles ont la forme bâtonnet larges, immobiles, extrémités carrées, a Gram positif et anaérobies strict mais aérotolerants. C. perfringens sporule rarement dans les milieux usuels de culture, mais uniquement dans des milieux spéciaux de sporulation (Popoff et Poumeyrol, 2006). Entérocoques Ce sont des germes commensaux intestinaux humains et animaux. On les trouve habituellement dans la flore du tube digestif, et colonisent fréquemment la peau et les voies Valorisation des boues de vidange dans l’agriculture : etude du co-compostage de boues de vidange de Camberene (Dakar-Senegal) et de feuilles de Typha domingensis. Ce sont des bactéries à gram positif qui se présentent sous forme de coques en courtes chaînes (Chevalier, 2002).
Parasites
Un parasite est un organisme animal ou végétal qui se nourrit strictement aux dépens d’un organisme hôte d’une espèce différente, de façon permanente ou pendant une phase de son cycle vital. Parmi ces parasites que nous pouvons rencontrer dans les boues, nous avons les helminthes. Cette catégorie comprend les trématodes (douves, bilharzies), les nématodes (Ascaris, oxyures, etc..) et les cestodes (ténia, bothriocéphales). Ces parasites présents dans les eaux usées et les boues sont fréquemment rencontrés dans les pays en développement à des concentrations élevées (OMS, 2012). Parmi eux nous pouvons citer les œufs d’Ascaris, de trichocéphale, d’ankylostome, de ténia, de schistosome etc. Ils sont à l’origine de plusieurs maladies parasitaires dans les pays du tiers monde. La forme inactive ou active des helminthes dépendent fortement des différentes conditions auxquelles elles sont soumises (Maya et al., 2012). Pour Kone et al. (2007), une exposition à des températures supérieures à 45°C pendant plus de 5 jours peut inactiver les œufs d’Ascaris. L’étude menée par Maya et al. (2012) sur l’inactivation des œufs d’helminthes a montré qu’une température supérieure à 45°C combinée à un PH de 5,3 et une siccité de 90% conduit à l’inactivation des œufs d’helminthes. Par ailleurs, le contrôle de l’humidité peut influer sur la survie des larves d’anguillule, d’ankylostome et d’Ascaris selon Sanguinetti et al. (2005). Ces auteurs ont en effet, trouvé qu’une diminution de la teneur en humidité entraine la destruction de ces larves.
Champignons
Ils sont présents uniquement en fin du processus du compostage. Les champignons ont une digestion plus fine qui offre au compost une douceur au toucher (Farcy, 2007). Avec les bactéries, ils sont les décomposeurs qui participent le plus à la dégradation de la matière organique. Un niveau modérément élevé d’azote est généralement nécessaire pour la croissance fongique bien que quelques champignons, dits de la pourriture blanche, se développent à des taux d’azote bas. En effet, selon Albrecht (2007), un milieu pauvre en azote est souvent un préalable à la dégradation de la lignine. Valorisation des boues de vidange dans l’agriculture .
Vers fréquemment rencontrées
Plusieurs vers jouent un rôle actif dans les systèmes de compostage. Les vers des champs (Allolobophora caliginosa) et les lombrics (Lumbricus terrestris) attaquent la matière organique par en dessous, donc effectuent, en quelque sorte, un travail préliminaire de préparation à la décomposition mais ces vers en question ne se développent pas au cours du compostage actif proprement dit. Ces vers sont éliminés plus facilement que les autres à des températures élevées. Par ailleurs, Eisenia andrei, un ver un peu plus rouge et prolifique est aussi utilisé pour le vermicompostage (Delavie, 2012).
Les aspects physico-chimiques (compostage en tas)
Humidité
L’humidité est nécessaire pour assurer l’activité métabolique des micro-organismes. Un taux d’humidité trop faible entraine une baisse de l’activité des micro-organismes. Un taux d’humidité trop important conduit à des obstructions des espaces lacunaires, et une diminution de la quantité d’air disponible (CIRAD, 2004). Un compost doit avoir une teneur en eau de 40 à 65%. Lorsque le tas est trop sec, le processus de compostage devient lent, et au-delà de 65 % des conditions anaérobies apparaissent. Il est recommandé de débuter avec une teneur comprise entre 50 et 60% pour enfin finir avec 30 % d’humidité. Une couverture, toiture ou bâche permet de protéger le tas contre les pluies et chaleurs (Misra et al., 2005).
Oxygène
Puisque les micro-organismes aérobies sont responsables du processus de compostage, leur besoin en oxygène doit être assuré par l’oxygène de l’air. En même temps, le dioxyde de carbone produit par la respiration microbienne doit être évacué. A cet effet, la teneur minimum en oxygène et la teneur maximum en dioxyde de carbone doivent être environ de 10% (Marchaim, 1994). L’aérobiose est maintenue tant que le taux d’oxygène ne descend pas en dessous de 5 %, bien que la limite réelle de l’anaérobiose soit de 1 %. Pour éviter l’anaérobiose des valeurs des espaces lacunaires sont exigées. Le CIRAD (2004) recommande que des valeurs de 30 à 36 % d’espaces lacunaires sont optimales dans la masse en fermentation.
Température
Dans le compost, le développement des micro-organismes devient de plus en plus rapide. L’activité des bactéries thermophiles entraine une augmentation de la température. Des études montrent que la taille du tas influe considérablement sur l’élévation de la température. Dans un tas volumineux (2m x 2m x 1,5m par exemple) la température peut atteindre 70°C (Hamilton et al., 2000). Une étude réalisée par Marchaim (1994) montre qu’elle peut monter jusqu’à 80°C. Dans un tas plus petit, elle arrive à 40°C environ. Le plus fort taux de dégradation est obtenu avec les micro-organismes thermophiles, à une température de 50 à 60°C (Hamilton et al., 2000). La température peut constituer un facteur limitant selon la population microbienne présente dans le compost. Avec l’élévation de la température la population des décomposeurs se modifie, les formes thermophiles prennent la place des organismes présents à l’origine. Le passage du peuplement microbien mésophile au peuplement microbien thermophile s’explique par une inhibition de l’activité microbienne des peuplements mésophile (Hamilton et al., 2000). Dans le compost la température varie suivant la durée du compostage. Pendant les deux premiers jours, la température monte à 40-50°C, détruisant les sucres et autres substances facilement biodégradables (Wightman, 2006). La température idéale pour la phase initiale de compostage est de 20 à 45°C, par la suite, les organismes thermophiles prennent le contrôle des étapes ultérieures (Misra et al., 2005).
Eléments nutritifs
Les micro-organismes ont besoin de carbone (C), d’azote (N), phosphore (P) et potassium (K) comme principaux éléments nutritifs. Au début du processus de compostage, le rapport C/N est un facteur particulièrement important pour aboutir à une production optimale de l’humus (compost). Le rapport C/N optimal se situe entre 25 et 30 bien que des valeurs situées entre 20 et 40 soient aussi acceptables. Quand le C/N est supérieur à 40, la croissance des microorganismes est limitée, et implique une durée de compostage plus longue. Un rapport C/N inférieur à 20 entraîne une sous-utilisation de l’azote et le surplus d’azote pourra alors être perdu dans l’atmosphère sous forme d’ammoniac ou d’oxyde nitreux. Le rapport final C/N doit se situer entre 10 et 15 ou être inférieur à 12 (Bernal et al., 1998). Valorisation des boues de vidange dans l’agriculture : etude du co-compostage de boues de vidange de Camberene (Dakar-Senegal) et de feuilles de Typha domingensis Bacar ABDOUSSOIMADOU ~ 11 ~ Mémoire de Master ISE, 2015 34ème Promotion Environnement
pH
Le pH du compost se modifie dans le tas avec le temps. Le pH initial est en général légèrement acide, d’environ 6 comme pour la plupart des liquides végétaux. Pendant les premiers stades de décomposition, la production d’acide organique augmente l’acidité et le pH descend jusqu’à 4,5 ou 5. Le pH augmente cependant avec l’élévation de la température et le compost atteint finalement des valeurs légèrement alcalines, entre 7,5 et 8,5 (Hamilton et al., 2000). En général, un pH de 7 est requis mais la décomposition est possible dans des gammes de pH situées entre 3 et 9. A des pH plus élevés, une plus grande quantité d’ammoniac est générée et risque d’être perdue dans l’atmosphère. Les pH faibles sont typiques pour les composts non mûrs (Avnimelech et al., 1996).
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