Utilités progressives dynamiques

Utilités progressives dynamiques

Dans ce chapitre nous discutons de quelques problématiques et in- cohérences dans les problèmes d’optimisation de portefeuille étudiés dans les chapitres 2 et 3. Nous discutons essentiellement des questions d’intertempora- lité, dematurités multiples et de cohérence avec l’univers d’investissement. Pour répondre à ces interrogations, il s’avère que la seule alternative est de considérerdes utilités dynamiques indépendantes de l’horizon d’investissement. Nous nous intéressons très particulièrement à des utilités dites progressives ou encore des utilités forward, introduites pour la première fois par Marek Musiela et Thaleia Zariphopoulou en 2002 [84]. L’avantage de ces utilités ainsi que des richesses optimales associées est qu’elles sont indépendantes de tout horizon d’investisse- ment et s’adaptent au mieux avec le marché financier.Dans ce chapitre, nous considérons une définition des utilités progressives lé- gèrement différente de celle de Zariphopoulou. Nous donnons ensuite quelques exemples simples de ces utilités à l’aide de certains outils, à la fois simples et efficaces, basés sur le changement de numéraire ainsi que le changement de probabilités. Ces exemples d’utilités que nous proposons d’étudier sont par défi- nition croissantes strictement concaves. Nous montrons alors que, malgré leur simplicité, il est difficile de vérifier la condition de compatibilité avec l’univers d’investissement (une condition nécessaire dans la définition 4.3 de ces utilités progressives).Enfin, nous montrons que ces utilités dynamiques vérifient une équation aux dé- rivées partielles stochastiques (4.32) de second ordre complètement non linéaire que nous allons retrouver dans un cadre beaucoup plus général.

Mais dans l’une ou l’autre de ces deux méthodes aussi intéressantes et puissantes qu’elles soient, il est très difficile de spécifier la fonction valeur, à l’exception de quelques exemples markoviens ainsi que des cas particuliers des utilités expo- nentielles, puissances et logarithmiques. De plus, cette fonction valeurs s’avère loin d’être intuitive et elle est en général assez compliquée à interpréter. Les utilités classiques sont choisies sans rapport avec l’univers d’investisse- ment.En effet, dans ce même cadre classique, si l’investisseur a fixé son utilité, donc son aversion au risque, en t = 0 pour la date T , une fois sa stratégie optimale établie, pour les cinq ans à venir par exemple, il n’aura en pratique qu’à suivre cette stratégie jusqu’à la maturité. Donc le portefeuille ainsi construit à une date intermédiaire, par exemple deux ans, dépend non seulement de l’horizon mais surtout d’un choix que l’investisseur a fait il y a deux ans, ne tenant pas compte du nouvel état du marché à une telle date intermédiaire, un marché financier qui ne cesse d’évoluer de manière très significative, et ne tenant pas compte des contraintes d’investissements imposées à cet agent. En particulier, ceci n’est pas cohérent avec les périodes de crises assez fréquentes ces dernières années et qui peuvent influer de manière importante les choix et les préférences de tout agent par rapport à des produits qui deviennent beaucoup trop risqués ou plus rentables. L’investisseur se retrouve alors prisonnier de sa propre straté- gie. D’un autre côté, il n’est pas cohérent de représenter ses préférences dans un tel marché très dynamique par une simple fonction déterministe indépendante en général du temps.

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Pour pouvoir remédier à cette incohérence, il est très important que nous puis- sions avoir un degré de liberté de plus qui permettra de changer de stratégie si nécessaire et surtout réajuster l’utilité de l’agent si ses préférences changent au cours du temps. Pour ce, il est plus naturel de considérer des utilités stochas- tiques et dynamiques .La question que nous posons ici est la question d’un agent qui choisit d’in- vestir sa richesse initiale dans des produits financiers de différentes maturités et tente de d’identifier sa stratégie optimale par critère d’utilité espérée. Le pro- blème qui se pose est, alors, comment cet agent définit son utilité ? Doit-elle être la même pour les différents horizons d’investissement ou non ?Pour mieux comprendre les difficultés que nous pouvons rencontrer dans ce genre de problème, nous considérons les deux cas de figure suivants :richesses optimales différentes. En effet, deux fonctions valeurs différentes (donc des satisfactions différentes pour un même gain) ou des richesses optimales dif- férentes ne peuvent correspondre aux mêmes préférences d’un seul agent. Cela signifie aussi que si nous décidons d’arrêter d’investir à une date intermédiaire TI quelconque, nous sommes certains que la richesse réalisée à cette date est encore optimale, dans le sens où elle coïncide avec celle que nous aurions pu réaliser si nous avions considéré le problème d’optimisation de portefeuille à horizon TI . En d’autres termes, la richesse optimale ne doit pas dépendre de l’horizon d’investissement. Or, en général, ceci n’est pas le cas pour la raison suivante : du fait que l’utilité est déterministe et ne tient pas compte de l’évo- lution du marché, l’agent n’a pas le même point de vue sur sa fonction d’utilité dans sept ans que celui qu’il aura dans cinq ans pour une maturité de deux ans, c-à-d que son utilité pour les sept années à venir n’intègre pas l’évolution du marché et des préférences dans cinq ans.

 

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