Une nouvelle conception de la qualité comme solution à la commoditisation du café

Une nouvelle conception de la qualité comme solution à la commoditisation du café

Les commodities sont souvent perçus comme incapable de promouvoir un développement soutenu des économies nationales notamment à cause des brusques fluctuations prenant place sur les marchés internationaux et d’une supposée baisse tendancielle des termes de l’échange des matières premières sur le long terme. Longtemps, le modèle institutionnel international en vigueur sur le modèle caféier a permis de limiter le phénomène de fluctuation des cours, mais les modifications structurelles prenant place après 1989 ont eu des effets dramatiques sur le niveau des cours internationaux et le mode de gouvernance de la chaîne de valeur. La recommoditisation de l’activité caféière a eu des effets particulièrement négatifs sur le niveau de vie des populations paysannes, dont l’offre est très faiblement corrélée au niveau de la demande internationale. Mais, pour autant que les acteurs des filières de matières premières agricoles semblent adopter des stratégies identiques, une étude concernant les acteurs des filières café au Brésil, en Colombie et au Vietnam suffit à se rendre compte que de multiples stratégies permettent d’être compétitifs sur des marchés de matières premières agricoles. De plus, l’apparition de nouvelles tendances de consommation, reposant sur une nouvelle approche de la qualité, a permis une relative décommoditisation de l’activité caféière (césure partielle avec les cours internationaux, mise en place de modèles contra cyclique,…) et offrent à un nombre croissant de caféiculteurs de nouvelles possibilités de valorisation.

1989 constitue une année charnière dans l’histoire du marché du café. Tenter de niveau le plus avantageux possible au cours du XXéme siècle. L’A.I.C ne constitue pas une nouveauté en tant qu’accord au sein de l’économie caféière : en 1936 fut adopté un accord entre le Brésil et la Colombie; en 1940 apparaît l’Accord Interaméricain du Café ; et en 1957 le Convenio de Mexico. Cependant, aucun d’entre eux ne permit aux pays producteurs participants d’atteindre leur objectif prioritaire : maintenir les cours au niveau le plus élevé possible et avec des fluctuations peu marquées. Le plus souvent, les efforts de rétention ou de réduction de la production se traduisaient effectivement à court terme par une hausse des cours internationaux. Mais celle-ci provoquait soit l’entrée de nouveaux pays producteurs, soit un comportement de free riding de la part des pays producteurs n’ayant pas souscrit l’accord qui rendait caduque la capacité des participants à atteindre leur objectif. Le véritable succès d’un accord caféier interviendra en 1962 avec la mise en place de l’Organisation Internationale du Café (OIC) et de l’A.I.C. Ce dernier, contrairement aux expériences précédemment citées, se révéla particulièrement efficace quant à sa fonction d’adéquation de l’offre et de la demande mondiales puisqu’il mettait directement en relation les principaux pays producteurs et consommateurs. Le principe de l’A.I.C était relativement simple : pour chaque période définie, les pays producteurs et consommateurs déterminaient conjointement un quota d’exportation et d’importation accordé à chaque nation, garantissant des fluctuations houleux entre les différents membres162. S’il est aisé de comprendre pourquoi les principaux pays producteurs étaient favorables à un tel accord, la participation des pays consommateurs est plus surprenante. Qu’avaient à gagner les firmes de négoce et les grands torréfacteurs des pays consommateurs? Si les pays consommateurs ont joué un rôle actif et crucial dans la mise en place de l’A.I.C c’est probablement pour des raisons de sécurité (guerre froide) mais aussi parce que les principaux acteurs de la filière y trouvaient un intérêt. Ainsi, le marché du café aux Etats-Unis s’apparentait déjà à un oligopole à cette époque et les firmes dominant le marché états-unien pouvaient tirer profit de cette nouvelle situation (offre limitée, quota d’exportation et d’importation et hausse des prix) afin d’accentuer leur position dominante.

La période d’application de l’A.I.C peut-être considérée comme un âge d’or pour les acteurs des pays producteurs pour au moins deux raisons : stabilité des cours et répartition des revenus plus ou moins fixes entre pays producteurs et consommateurs. De plus, le comportement de free riding qui avait tant nui aux accords précédents, même s’il existait, restait somme toute limité étant donné la participation active des principaux pays consommateurs qui ont le plus souvent correctement exercé leur fonction de contrôle des importations. Nous pouvons facilement distinguer deux phases distinctes lors de la période en vigueur de l’A.I.C. La première, allant de 1963 à 1976 où la production mondiale de café fluctue considérablement alors que la surface mondiale cultivée diminue constamment et la seconde allant de 1977 à 1989 où la production et la surface cultivée mondiales augmentent conjointement. Ce que nous pouvons constater sur le graphique III.1.  Les fluctuations en cours lors de la première phase sont le résultat de divers phénomènes à l’œuvre au sein des pays producteurs d’Amériques : programmes de diversification, aléas climatique ou encore adoption de modèles économiques particuliers, parfois contraire aux intérêts agricoles. Les acteurs de cette région dominaient à un tel point la production caféière mondiale que les fluctuations qui y étaient à l’œuvre avaient des conséquences considérables sur l’offre mondiale malgré une forte croissance de la production au sein des autres continents, comme nous pouvons le constater sur le graphique III.2.

 

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