UNE MODELE ORIGINAL DE L’EVOLUTION DES VALLEES

UNE MODELE ORIGINAL DE L’EVOLUTION DES VALLEES

NOS CHOIX DE MODELISATION

Les enjeux du projet de recherche auquel nous avons participé étaient de pouvoir réaliser une série d’estimations chiffrées de l’évolution du relief de la vallée de la Marne et du plateau de Bure, entre la côte de Meuse et la côte des Bars, à partir de différents scénarios climatiques. Dans ce contexte, l’un des objectifs de cette étude est de choisir, ou de concevoir, un modèle de l’évolution du fond de la vallée et des versants qui la borde, puis de valider les paramètres utilisés en reproduisant de façon satisfaisante la topographie du paysage au cours du dernier million d’années, afin de pouvoir réaliser plus tard des simulations prospectives. L’analyse des différents modèles d’évolution du paysage, de leurs objectifs, et de leurs méthodes de résolution et de mise en œuvre, permet d’avoir une vision assez large des outils qui sont proposés pour tenter de répondre à notre problématique. Cependant, aucun modèle ne semble entièrement adapté à notre besoin : y Les modèles qui proposent une évaluation du relief à l’échelle continentale peuvent nous servir de support mais ne peuvent pas être utilisés directement car le maillage du domaine modélisé est trop lâche et ne permet pas de distinguer les rivières des versants. Les modèles 2D d’évolution d’un bassin versant plus petit, utilisent un maillage plus fin, adapté à notre démarche, mais leur application à des cas réels est difficile car ils reposent sur un grand nombre de coefficients. Ces modèles ont généralement été construits pour analyser les relations complexes qu’il existe entre les différents paramètres régissant l’érosion, mais non pour évaluer quantitativement des cas concrets. Enfin, même si la taille des mailles utilisées dans notre modèle est du même ordre de grandeur que la superficie des parcelles étudiées dans le cas des modèles microscopiques, ce type d’approche ne permet pas d’évaluer l’évolution des paysages à long terme. Enfin, les modèles empiriques sont conçus pour une échelle locale, et ils ne permettent pas de quantifier l’évolution de la topographie à long terme des versants ou la forme plus ou moins élargie de la vallée, mais seulement d’estimer la quantité globale de sédiments perdue par la parcelle. y D’autre part, aucun des modèles présentés dans ce chapitre ne prend en compte en même temps les variations climatiques et eustatiques, l’influence des dépôts estuariens sur l’équilibre du profil longitudinal d’un fleuve, la modélisation de l’évolution transversale de la vallée en réponse à l’érosion latérale de la rivière, la surrection tectonique et les processus de versants. Les études initiées par Veldkamp et van Dijke (1998 et 2000) restent à développer. Nous avons donc été amenés à concevoir un modèle original d’évolution de la topographie d’une vallée qui prend en considération : y l’incision fluviatile suivant les alternances climatiques et la lithologie du profil y les variations de largeur de zone de dépôts ou d’érosion au fond de la vallée y la mise en place de terrasses emboîtées ou étagées suivant la région géographique, l’activité tectonique et les variations eustatiques, y l’influence des dépôts estuariens y l’évolution de la pente des versants Notre modèle doit être conçu pour pouvoir être appliqué à des cas réels, sa paramétrisation doit donc être réalisable à partir des données de terrain. Les lois hydrauliques ou les lois de transport sur lesquelles il repose vont utiliser des variables physiques mesurables et mesurées. Les résultats fournis pas ce modèle doivent également être facilement comparables aux observations de terrain disponibles dans la bibliographie.

LES EQUATIONS DE NOTRE MODELE

Notre modèle est composé de trois modules qui visent à évaluer l’érosion, le transport et les dépôts de sédiments ainsi que leur action sur la topographie. Nous avons ainsi développé une nouvelle équation de l’érosion fluviatile, que nous avons couplée à une équation d’érosion des versants et à un modèle géométrique des dépôts estuariens. Nous présentons donc dans un premier temps ces trois modèles élémentaires. Nous exposons dans une seconde partie la mise en œuvre du modèle global résultant de l’action combinée des trois modules. Cependant, il nous faut d’abord rappeler les variables et paramètres que nous avons utilisés puis expliciter et définir précisément la variable originale que nous avons introduite dans notre modèle : la largeur d’action de la rivière. 

Les variables

La figure 2.16 reprend la définition des variables. Figure 2.16. Définition des variables utilisées dans notre modèle Nous rappelons que : y x et y sont respectivement l’abscisse curviligne longitudinale et transversale y zf est l’altitude d’un point sur le profil longitudinal de la rivière y zv est l’altitude d’un point sur le profil transversal y zBEDROCK est l’altitude du substrat sur le versant y w est la largeur de la rivière Le long du cours d’eau Sur les versants .

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Largeur caractéristique du bassin versant lBV

Cette largeur l_BV caractérise la croissance du bassin versant. Comme nous le montre la figure 2.17 ci -près, bien que la forme réelle d’un bassin versant présente une largeur plus fine vers l’exutoire qu’en amont, l’aire drainée est pourtant une fonction strictement croissante de l’abscisse curviligne x du profil longitudinal du cours d’eau. La largeur caractéristique est donc elle aussi croissante et est définie comme suit : x BV lBV ∂ ∂ = [Eq. 32] Figure 2.17. Définition des variables utilisées dans notre modèle

La largeur d’action

Nous avons choisi ce terme « largeur d’action », que l’on note par la suite lA pour parler d’une surface moyenne au fond de la vallée sur laquelle agit la rivière sur une longue période de plusieurs millénaires. C’est par exemple la région qui est le siège de dépôts au cours d’un stade froid ou celle qui est incisée lors d’une période de transition climatique. Cette largeur d’action est donc un intermédiaire entre la plaine alluviale à un instant donné et la largeur du fond de la vallée, qui regroupe les zones touchées par les processus de versants et les processus fluviatiles. Le schéma ci-dessous résume ce concept : Figure 2.18. Définition de la largeur d’action rivière x 119 AB est ici la largeur du fond de la vallée, CD la largeur d’action de la rivière, c’est à dire l’extension maximale à droite et à gauche qu’ont eu la rivière et sa plaine alluviale, avec leurs migrations latérales, au cours d’une période climatique, et EF est la largeur de la plaine alluviale au temps t représenté. Cette variable varie en fonction du temps et de l’espace. Cet espace d’érosion et de dépôts, distinct du lit de la rivière ou des versants, est très souvent négligé dans les modèles d’érosion fluviatile ou même d’évolution du paysage. Dans le modèle de l’érosion fluviatile qui a servi de base à nos travaux (Gargani, 2004, Stab, 2005), les dépôts n’étaient pas répartis dans toute la plaine alluviale mais uniquement sur la largeur de la rivière. Dans leur modèle, Bogaart et son équipe (2000) ont également fait varier une largeur équivalente à notre largeur d’action dans le temps (ils ont reconstitué l’évolution de ce paramètre dans le passé à partir de données de terrain) mais sans prendre en compte les fluctuations de la largeur occupée par la rivière et sa plaine alluviale sur un millénaire ou plus. C’est pourtant une zone fondamentale qu’il ne faut pas oublier dans le calcul de la profondeur d’une incision ou dans celui de l’épaisseur des dépôts : la prise en compte de ce paramètre modifie de façon non négligeable l’évolution de l’altitude du fond de la rivière. Cependant, il est très difficile de modéliser l’action des processus qui conduit à l’évolution de cette largeur d’action. En effet, il faudrait prendre en compte la topographie locale, la lithologie, les paramètres hydrauliques, la fréquence de crues, l’état d’humidité du sous-sol, etc, mais également faire intervenir des processus stochastiques pour bien modéliser les migrations de la rivière. Ce n’est pas le but ici. Nous sommes donc amenés à poser une hypothèse simplificatrice. Nous avons considéré que l’axe d’écoulement de la rivière était toujours au milieu de la vallée, confondu avec l’axe du fond de la vallée. La rivière ne migre donc pas latéralement mais sa largeur d’action, symétrique par rapport à l’axe de l’écoulement, évolue au cours du temps. Ceci implique que les dépôts fluviatiles dans le fond de vallée seront eux aussi symétriques par rapport à cet axe de l’écoulement. Il ne nous est donc pas utile de connaître la largeur de la plaine alluviale à un temps donné, ou en chaque point du profil, pour reconstituer l’évolution de la largeur d’action dans le temps. Nous considèrerons seulement la surface globale occupée au cours d’une période climatique. Nous sommes donc en présence de trois espaces géographiques différents emboîtés : le bassin versant BV et sa largeur lBV, la zone d’action de la rivière et sa largeur lA, et enfin la rivière et sa largeur w. 

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