Une brève introduction aux cristaux phononiques
L’étude de la propagation des ondes élastiques dans les milieux périodiques a connu un renou- veau considérable au cours des dix dernières années du fait de l’introduction du concept de cristal phononique, des matériaux composites présentant des variations périodiques de leurs constantes élastiques et de leur densité. Ils détiennent de ce fait la particularité de pouvoir prohiber la pro- pagation des ondes élastiques dans une gamme de longueurs d’ondes de l’ordre de la période de la structure. On parle alors, comme en physique du solide, d’un phénomène de bande interdite. Ce regain d’intérêt est directement lié à celui qui a été dédié à la propagation des ondes dans les milieux périodiques au sens large, du fait de l’étude et de la réalisation de matériaux micro- et nano-structurés pour l’optique. L’émergence de ces structures articielles, dites cristaux pho- toniques a ouvert un champ d’investigation nouveau : au niveau fondamental, d’abord, du fait de possibilités inédites de contrôle de la propagation des ondes optiques qu’elles autorisent ; et applicatif ensuite, certains dispositifs photoniques parvenant même à s’imposer comme des com- posants optiques viables. Les cristaux phononiques s’annoncent tout aussi prometteurs, comme en témoigne le nombre de travaux consacrés à cette activité de recherche.
Cet état de l’art revient sur les concepts nécessaires à l’appréhension des matériaux à bandes interdites élastiques. À ce titre, il s’évertue dans un premier temps à fournir quelques notions sur la propagation des ondes dans les milieux périodiques, avant de s’attarder plus en détail sur les cristaux photoniques puis phononiques. Les diérences fondamentales entre ondes élas- tiques et optiques dans ces structures périodiques y sont d’ailleurs soulignées. Quelques rappels généraux sur la propagation des ondes élastiques dans les milieux homogènes ainsi que sur la piézoélectricité sont ensuite donnés, de sorte à pouvoir aborder plus sereinement les phénomènes de propagation d’ondes dans les cristaux phononiques. Ces derniers sont d’ailleurs mis en exergue dans une troisième partie, où l’on s’eorce de montrer les potentialités oertes par ces matériaux composites. Enn, dans une dernière partie, il est montré qu’il est possible de mettre à proAvant de nous pencher plus en avant sur la notion de cristal phononique, nous introduisons ici quelques notions très générales sur la propagation des ondes dans les milieux périodiques. À ce titre, nous opérons un bref retour sur quelques principes de base de la physique de la matière condensée, mais aussi sur l’idée fondatrice de la diraction de Bragg.
Propagation des ondes dans les milieux périodiques
L’étude de la propagation des ondes dans les structures périodiques est un champ d’inves- tigation commun à maints domaines de la physique. Elle intervient par exemple lors de l’étude de la propagation des vibrations dues aux phonons se propageant dans une maille cristalline, de la diraction des rayons X ou des ondes optiques en milieu solide ou liquide, des systèmes dits multicouches ou super-réseaux, très prisés dans les domaines optiques comme acoustiques ou encore la physique des semi-conducteurs. Dans tous ces éléments, on retrouve la notion de bande d’arrêt, qui dénit une gamme angulaire ou fréquentielle pour laquelle toute propagation d’ondes est rendue impossible. Le principe fondateur sous-jacent à l’apparition de ces bandes interdites de quelque nature qu’elles soient (électroniques, électromagnétiques ou encore élastiques), est la diraction de Bragg. La loi de Bragg a été mise en évidence lors d’expériences consistant à étudier la réexion de rayons X incidents sur la surface d’un cristal. Elle peut toutefois être observée dans toute structure périodique articielle, comme nous aurons l’occasion de le constater dans le cas des composites diélectriques ou élastiques. W.H. Bragg et W.L. Bragg ont ainsi observé en 1913 l’apparition de pics de réexion intenses pour certains angles d’incidence à des longueurs d’ondes spéciques. Ils ont interprété ces résultats en assimilant le cristal à une structure consistant en un arrangement périodique de plans parallèles, expliquant ainsi le spectre en réexion obtenu par un phénomène d’interférences entre ondes X. Les ondes rééchies par les couches successives n’interfèrent constructivement que si la diérence de chemin de propagation est multiple de 2π,