Un comportement conforme à la qualification
L’arbitrage financier apparaît clairement comme étant un comportement particulier n’apportant pas une attention particulièrement développée à la société dans laquelle ils détiennent une participation. Ce comportement n’est pas forcément en inadéquation avec la vision du droit pour autant. Le droit des offres publiques est né il y a plus de vingt ans624 et n’a cessé d’évoluer depuis625. Cette évolution a touché la vision qu’on avait de la place et du rôle de l’actionnaire lors d’une telle offre. L’actionnaire a toujours été plus ou moins au cœur de l’offre étant donné qu’il en est le destinataire principal. Avec l’évolution découlant du droit européen, il a définitivement été sacré comme étant l’alpha et l’oméga de l’offre publique. Le collège des actionnaires, sans distinction aucune entre ces derniers, est le juge unique pour décider du destin de l’offre et aucune force extérieure ne doit l’influencer. L’arbitragiste est donc, en apparence tout du moins, totalement légitime pour adopter un tel comportement (§1). Cette légitimité juridique peut être remise en question aux vues des résultats produits par l’arbitrage, notamment par rapport à d’autres comportements et particulièrement par rapport à l’activisme. L’activisme actionnarial participe indéniablement à la création de valeur actionnariale de manière générale et tout particulièrement pendant les offres publiques. Audelà même de la valeur actionnariale, l’activisme dégage un bilan plutôt positif dans le cadre des offres publiques. Il en va différemment pour l’arbitrage financier. Si ce dernier dégage un bilan essentiellement positif pour les actionnaires le pratiquant, il n’est pas certains que ce retour financier profite réellement à l’ensemble des actionnaires. Paradoxalement, cette pratique a acquis une place absolument déterminante dans les offres publiques et constitue un phénomène majeur. Surtout, la relation entre l’arbitrage et le succès ou l’échec de l’offre est absolument limpide. Ce comportement actionnarial, dont les résultats doivent encore être démontrés, détermine clairement l’évolution d’une offre publique et sa destinée (§2).
Un comportement à priori conforme au droit actuel
Un actionnaire pratiquant l’arbitrage financier adopte un comportement particulier mais est propriétaire des titres et reste donc actionnaire de la société. L’actionnaire s’est vu mis au cœur des offres publiques par l’évolution de la réglementation. Cette dernière a du choisir entre les différents intérêts à défendre lors des offres publiques et effectuer un choix. Le législateur a choisi de placer l’actionnaire comme le juge ultime de l’offre publique et de placer la défense de ses intérêts au centre de cette réglementation. Dès lors, les actionnaires sont les juges ultimes de l’offre publique qui sera lancée sur la société dont ils sont les propriétaires. L’arbitrage financier correspond parfaitement à cette évolution de la philosophie sous tendant la réglementation étant donné que l’arbitragiste reste un actionnaire de la société (A). Ces actionnaires adoptant ce comportement se retrouvent donc au centre d’une réglementation spécialement adaptée à eux. Cette dernière se fonde notamment sur des principes généraux venant encadrer le déroulement des offres publiques. Ces derniers sont totalement tournés vers la protection des actionnaires pour que l’offre se déroule au mieux de leurs intérêts. Il apparaît donc extrêmement délicat de tirer profit de la réglementation pour neutraliser une stratégie arbitragiste qui nuirait à la société. Ces principes ont une vocation de protection de l’ensemble des actionnaires et ne posent pas de contrainte sur ces derniers (B).
La place de l’actionnaire dans les offres publiques
La réglementation sur les offres publiques est née suite à l’apparition de cette pratique et à la nécessité de l’encadrer. Un arbitrage fondamental à dû être effectué entre les intérêts à protéger pendant cette période cruciale pour la vie de la société et notamment sur le rôle de l’actionnaire à ce moment. Il y a donc eu toute une évolution historique qui a été couronnée par la directive européenne qui est venue placer l’actionnaire au cœur du mécanisme de l’offre (1). L’actionnaire pratiquant l’arbitrage financier adopte un comportement lié à sa qualité d’actionnaire et a donc une pratique qui est, à priori, conforme à la législation actuelle (2). 157 1. L’actionnaire au centre de l’offre. 225. La réglementation des offres publiques a évolué au fil du temps et n’a cessé de chercher à trouver un équilibre entre les différents intérêts à protéger en période d’offre (a). Elle s’est finalement fixée, tant au niveau national et européen, pour venir placer l’actionnaire au cœur du processus (b).
L’évolution historique
La réglementation des offres publiques. La première question peut déjà être de se demander si la réglementation des offres publiques est nécessaire. Les pouvoirs publics, dans l’ensemble des juridictions, ont apporté une réponse doublement positive à cette question. La première raison tient à la nécessité de protéger l’ensemble des actionnaires quel que soit leur niveau de participation au capital. Cette idée est centrale dans la raison d’une réglementation des offres publiques, elle implique qu’aucune distinction ne soit faite entre les différents actionnaires et qu’ils soient tous traités sur un pied d’égalité626. L’autre raison d’être d’une réglementation des offres publiques est aussi de protéger ces mêmes actionnaires et d’avoir un processus ordonné. Une offre publique ne doit pas pouvoir donner prétexte aux dirigeants pour modifier la consistance de l’entreprise en cherchant à protéger l’entreprise contre un rapprochement qui n’irait pas dans un sens qu’ils jugeraient pertinent. 227. Cette réglementation des offres publiques porte sur des enjeux différents627. En premier lieu, « L’objectif de toute politique législative en matière d’offre publique est, dans une économie libérale où les mouvements de capitaux sont libres, de permettre les regroupements de sociétés entre elles afin de les rendre plus compétitives dans un monde concurrentiel »628. Les phénomènes de rapprochement des entreprises sont absolument vitaux pour le dynamisme d’une économie et, économiquement, les sociétés cotées en bourse doivent aussi pouvoir être en mesure de se rapprocher avec d’autres entreprises.