MEMOIRE POUR L’OBTENTION DU DIPLOME D’ETUDES SPECIALISEES EN ORTHOPEDIE – TRAUMATOLOGIE
TRANSFERT DU TENDON TIBIAL POSTERIEUR DANS LES PARALYSIES DU NERF FIBULAIRE COMMUN
GENERALITES
Un transfert tendineux est défini comme l’action de déplacer l’insertion terminale d’un tendon afin de remplacer une action musculaire perdue. Le transfert tendineux du muscle tibial postérieur est le traitement palliatif le plus réalisé pour pallier le déficit neurologique des releveurs du pied.
Historique
La paralysie du nerf fibulaire commun entraîne un déficit moteur des muscles releveurs du pied (tibial antérieur, long extenseur de l’hallux, long extenseurs des orteils et les muscles fibulaires) entrainant un « pied tombant » responsable d’une démarche caractéristique dite avec « steppage ». Les transferts tendineux représentent un progrès considérable dans la chirurgie orthopédique et réparatrice et leurs champs d’applications ainsi que leurs aspects techniques ne cessent de se développer . Plusieurs techniques de transfert ont été décrites pour traiter le pied tombant paralytique .Comme l’ont rapporté WATKINS et al., CODIVILLA en 1899 et PUTTI en 1914 sont considérés comme les pionniers de la transposition antérieure du tendon tibial postérieur au dos du pied. Cette technique a été largement utilisée, devenant la méthode de reconstruction la plus acceptée pour corriger le pied tombant. Cependant, cette technique présente plusieurs inconvénients liés à une longueur insuffisante du tendon après le prélèvement, empêchant l’insertion facile du tendon à l’os sur la face dorsale du pied, nécessitant souvent une flexion maximale de la cheville ou une modification du plan de localisation ou la méthode d’insertion du tendon. En 1933, OBER décrivit un transfert du tendon du tibial postérieur sur le tarse antérieur en contournant le tibia (transfert par voie circumtibiale) .Une technique classique voit le jour, décrit pour la première fois par MAYER. Elle consiste à dérouter le tendon du tibial postérieur avec un trajet trans- 6 membranaire entre le tibia et la fibula (transfert par voie interosseuse) et une insertion directe sur les os du tarse. Cette technique chirurgicale la plus rapportée dans la littérature [9] a été décrite aussi par les auteurs anglais dont WATKINS en 1954 et utilisée dans la lèpre en 1957 par FRITSCHI et BRAND. Les inconvénients sont représentés par la difficulté de réalisation de l’ancrage osseux, une durée d’immobilisation de six semaines et surtout une fixation incertaine du tendon sur des os de mauvaise qualité souvent rencontrés dans la lèpre [5]. Cependant, le temps osseux sur le tarse antérieur a été source d’échecs et de mauvais résultats et ce sont CARAYON et al., à la même époque qui ont décrit une suture tendineuse en amont de la cheville [16]. En 1953, CARAYON propose le double transfert, qui consiste à réanimer les muscles releveurs du pied par le déroutement des tendons de deux muscles sains de la loge postérieure de la jambe (tibial postérieur et long fléchisseur des orteils) qui sont passés à travers la membrane interosseuse entre le tibia et la fibula. Ils sont fixés sur les tendons paralysés du tibial antérieur, du long extenseur des orteils et du long extenseur de l’hallux [15, 5, 11]. GREEN en 1983, a proposé un transfert bifurqué du tibial postérieur, avec une bandelette insérée sur le tibial antérieur et une autre sur le long extenseur des orteils et le long extenseur de l’hallux, afin d’obtenir une position finale équilibrée du pied.
ANATOMIE DESCRIPTIVE
Nerf fibulaire commun
Origine Le nerf fibulaire commun (figure 1) prend son origine dans le plexus lombosacré des racines L4 à S3. Il s’agit de la branche de bifurcation externe du nerf grand sciatique. C’est un nerf mixte appelé également nerf sciatique poplité externe (SPE) ou nerf péronier. Dans le nerf grand sciatique, il a un trajet 7 commun avec le nerf tibial encore appelé nerf sciatique poplité interne (SPI). Parfois ces deux nerfs se séparent à la hauteur de la hanche, mais le plus souvent ils cheminent dans la même gaine jusqu’à l’angle supérieur du creux poplité. Trajet et rapports anatomiques Le nerf fibulaire commun se dirige en bas et en dehors longeant le bord interne du muscle biceps crural puis du tendon où il est relié par sa gaine jusqu’à son insertion fibulaire. Il croise le muscle jumeau externe et atteint le col de la fibula qu’il contourne. Dans cette portion il est très superficiel, recouvert uniquement par l’aponévrose superficielle, le tissu cellulaire sous cutané et la peau. Il descend ensuite en arrière de l’articulation tibio-fibulaire supérieure, croise en arrière le chef péronier du muscle soléaire et se dirige en avant, en dehors et oblique en bas. Au niveau de la face postéro-externe du genou, il existe une bandelette fibreuse unissant le long fibulaire latéral et l’aponévrose du soléaire. Le nerf fibulaire commun pénètre dans la loge des muscles fibulaires au contact de l’os en perforant la cloison intermusculaire externe et passe dans un tunnel ostéo-musculaire qui est limité en dedans par le col de la fibula, où le nerf est en contact étroit et très superficiel, et en dehors par le long fibulaire latéral. A l’intérieur de ce muscle, le nerf se divise en un nerf fibulaire superficiel et un nerf fibulaire profond. Nerf fibulaire profond C’est la branche de bifurcation médiale du NFC. Il perfore la cloison intermusculaire antérieure de la jambe. Il est satellite des vaisseaux tibiaux entre le muscle tibial antérieur en dedans et le long extenseur des orteils en dehors. Il longe au début le bord latéral de l’artère tibiale antérieure, puis la croise en avant pour longer son bord médial. A la cheville, le nerf fibulaire profond et l’artère tibiale antérieure passent sous le rétinaculum des extenseurs, entre les tendons des muscles longs extenseurs des orteils et de l’hallux. Ce nerf, avant tout moteur, innerve les muscles extenseurs (muscle tibial antérieur, long 8 extenseur des orteils, long extenseur de l’hallux) qui assurent l’extension du pied et des orteils. Nerf fibulaire superficiel (nerf musculo-cutané) Le nerf fibulaire superficiel, surtout sensitif, innerve les muscles fibulaires (long et court fibulaire) qui entraînent une éversion du pied. C’est la branche de bifurcation latérale du NFC. Il se dirige en bas et un peu en avant appliqué sur la face externe du corps de la fibula, entre les insertions du long fibulaire latéral où il donne ses collatéraux. Il perfore l’aponévrose superficiel à l’union des tiers moyen et inférieur de la jambe pour devenir sous cutané.
Muscle tibial postérieur
Le muscle tibial postérieur est fléchisseur, adducteur et supinateur du pied. Le tendon du muscle tibial postérieur joue un rôle majeur dans la statique et la dynamique du pied en assurant la stabilisation de l’arrière pied et de la voûte plantaire lors de la marche. Il s’agit d’un puissant tendon, antagoniste des tendons fibulaires. Il est situé entre le long fléchisseur des orteils et le long fléchisseur de l’hallux. Il est charnu et prismatique à sa partie supérieure; plus bas, il devient aplati et tendineux, pour se terminer en s’épanouissant sur toute la partie moyenne de la face plantaire du squelette du pied (figure 2). Il naît du tibia, de la fibula, du ligament interosseux et des cloisons qui le séparent du long fléchisseur des orteils et du long fléchisseur de l’hallux. Les origines tibiales se font sur la lèvre inférieure de la moitié externe de la ligne oblique et au tiers moyen de la face postérieure. Les insertions fibulaires se font sur la capsule de l’articulation tibio-fibulaire supérieure, sur la face interne de la tête de la fibula, et sur la partie de la face interne du corps de l’os située en arrière du ligament interosseux, au niveau des deux tiers supérieurs de cette face. Les origines interosseuses se font sur toute la largeur du ligament, au niveau de la partie supérieure de celui-ci, et n’occupent plus que sa portion externe au niveau de sa partie inférieure. Ces origines se font par l’implantation directe des fibres charnues. Celles-ci se portent en bas en formant deux groupes, l’un externe oblique en bas et en dedans, l’autre interne oblique en bas et en dehors, qui convergent pour aller s’attacher sur les bords latéraux de l’aponévrose de terminaison, en se disposant de façon à donner au muscle un aspect nettement bipenne (figure3). L’aponévrose de terminaison est orientée dans le sens sagittal. Son bord postérieur apparaît libre à la partie moyenne de la face postérieure du muscle. Cette aponévrose se condense d’ailleurs bientôt en un tendon résistant, qui passe au-dessous du tendon du long fléchisseur des orteils. Elle gagne la face 11 postérieure de la malléole, contourne son sommet, croise obliquement le ligament latéral interne et arrive, après avoir cheminé par l’intermédiaire de ce ligament, sur la partie interne du col du talus, au niveau du bord interne du pied. Le tendon du tibial postérieur se renfle et présente, à ce niveau, dans son épaisseur, un os sésamoïde, puis il s’épanouit en formant un véritable bouquet tendineux, à insertions multiples. Les fibres antérieures très nombreuses se dirigent directement en avant pour s’insérer sur le tubercule de l’os naviculaire; sur la capsule de la première articulation scapho-cunénne et sur la face inférieure du premier cunéiforme. Les fibres moyennes vont s’attacher sur la face inférieure du cuboïde, au niveau de l’extrémité interne de la crête de cet os, en se confondant plus ou moins avec les fibres du grand ligament calcanéo-cuboïdien; sur le bord inférieur du premier et du deuxième cunéiforme et sur l’extrémité postérieure des deuxième, troisième et quatrième métatarsiens. Les fibres postérieures, beaucoup moins nombreuses que les précédentes, se portent en arrière et en dehors en suivant un trajet presque récurrent. Ils vont s’attacher sur le sommet de la petite apophyse du calcanéum. Rapports A la jambe, il est recouvert par le muscle soléaire, le long fléchisseur des orteils et le long fléchisseur de l’hallux. Il recouvre l’aponévrose interosseuse et la partie adjacente des deux os de la jambe. Son tendon est d’abord situé en avant et en dedans de celui du long fléchisseur des orteils; puis en avant et au-dessus de lui, à la plante.
INTRODUCTION |