TRAITEMENT DU PIED BOT VARUS EQUIN PAR LA METHODE DE PONSETI
DEVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE NORMAL DU PIED
Embryologie
Les bourgeons des membres apparaissent au début de la 5ème semaine de vie gestationnelle sous forme d’évagination de la paroi ventro-latérale du corps (feuillets ectoblastiques et mésoblastiques) (Fig. 4). Primitivement, ces bourgeons sont constitués d’un axe mésenchymateux qui dérive de la somatopleure et formera l’os et les parties molles du membre. Cet axe est recouvert d’un feuillet ectoblastique de cellules cuboïdes qui donnera de l’épiderme et qui, en s’épaississant formera la crête épiblastique apicale à l’extrémité distale du bourgeon : la coiffe apicale. Celle ci exerce une action inductrice sur les cellules mésenchymateuses sous jacentes qui se multiplient intensément en superficie à son contact et se différencient en cartilage et muscles. La séquence qui conduit à la forme osseuse définitive commence par une condensation des cellules mésenchymateuses puis par chondrification, cette condensation se transforme en maquette cartilagineuse qui, secondairement va s’ossifier ; on parle alors d’ossification de type endochondrale. Pour les os du tarse, la croissance se fait du centre vers la périphérie. Au niveau des orteils et des métatarsiens, il s’agit d’une croissance proximo-distale. A la 6ème semaine, on peut reconnaître les matrices cartilagineuses qui préfigurent les os des membres. Au niveau du pied, il semble exister 2 condensations mésenchymateuses : Une condensation distale qui donnera les orteils, les métatarsiens, les cunéiformes et le cuboïde; Une condensation plus proximale qui apparaît avec un petit retard et qui donnera naissance au talus, au calcanéus et au scaphoïde. Fig. 28 : Les différentes étapes de l’embryogenèse du pied .Les tendons et les masses charnues musculaires dérivent aussi des éléments mésenchymateux. Les tendons sont très précocement en place, dès le stade de la palette. La formation des muscles s’accompagne de l’arrivée massive des vaisseaux. Les premières contractions musculaires s’observent vers la 9ème semaine. Les articulations se forment entre les différentes maquettes cartilagineuses. Embryon humain à la 8ème semaine de la gestation (10ème semaine d’aménorrhée) individualisation des différents rayons Embryon humain de 10 semaines. Arrière-pied. Les différents éléments anatomiques ont achevé leur morphogenèse Embryon humain de 10 semaines. Avant-pied. Les petits détails anatomiques sont présents. A ce stade, les anomalies du pied bot doivent déjà être représentées a b c 8 Ce sont des cellules mésenchymateuses qui se différencient en synoviale, ligaments et périchondre. Ces cellules viennent de la superficie de l’ébauche du pied, elles se retrouvent en profondeur par migration mais aussi par le phénomène de croissance explosive du membre. La formation des cavités articulaires est due à des morts cellulaires programmées. La formation des culs de sac articulaires est sous la dépendance des premières contractions musculaires.
Morphogenèse
La morphogenèse des membres se déroule entre la 5ème et la 10ème semaine de gestation. Le premier mouvement morphogénétique que l’on peut décrire se déroule dans la région de la hanche et correspond à un mouvement d’adduction. Initialement, le membre est rectiligne avec un grand axe dans le plan frontal perpendiculaire à la colonne. Il se retrouve ensuite dans une position d’adduction progressive de hanche et de flexion de hanche. Le genou reste en extension, le pied en équin, puis le genou amorce un mouvement de flexion. Pendant ce temps, se réalise un mouvement complexe qui amène le genou qui regardait vers le dehors dans une position où il regarde vers l’avant. Le dernier mouvement morphogénétique est le relèvement du pied qui lui permet de passer de la position d’équin à celle d’appui plantaire. Dans le même temps, les métatarsiens qui étaient disposés en éventail s’alignent. Kawashima a particulièrement décrit le développement intra-utérin du pied à partir de l’étude anatomique et histologique de 147 embryons et fœtus de 8 à 21 semaines [17] : Jusqu’au début de la 8ème semaine, le pied est en équin maximal, aligné dans l’axe de la jambe, en supination modérée, puis l’équin diminue progressivement pour atteindre une position neutre (position d’appui plantaire) à la fin de la 11ème semaine, alors que la supination augmente encore jusqu’à la 10ème semaine pour ensuite régresser progressivement Pendant ces mouvements, les métatarsiens ont tendance à s’aligner. 9 On retrouve également à la 9ème semaine, une croissance plus rapide du bord latéral du tibia entraînant un varus du talus et du calcanéus qui se rétablit ensuite, à cette même période. L’adduction du pied est bien marquée pour diminuer à la 10ème et 11ème semaine. Par contre, il n’est jamais retrouvé d’adduction due à une subluxation talo-naviculaire pendant le développement normal du pied. En ce qui concerne le talus, on retrouve des anomalies dans la forme : la tête et le col sont déviés médialement à la 9ème semaine. Une forme normale du talus est retrouvée à la fin de la 10ème semaine. Ainsi, pendant le développement intra-utérin, le pied normal passe à la 9ème et 10ème semaine par un stade de pied bot varus équin physiologique. 10 ETIOPATHOGENIE De nombreuses hypothèses ont tenté d’expliquer la pathogénie des déformations, depuis la malposition in utéro, jusqu’aux théories faisant intervenir une anomalie primitive du tissu germinatif pré-osseux, du système neuromusculaire localisé ou des parties molles postérointernes.
Théorie génétique
Plusieurs arguments plaident en faveur d’une origine génétique : La fréquence des pieds bots est différente d’une ethnie à l’autre : 7 ‰ en Polynésie, et 1,2 ‰ en Europe occidentale ; Le sexe masculin représente 70% des cas ; L’existence des familles à « pied bot » où la transmission paraît être polygénique à pénétrance incomplète. L’étude des pieds bots chez les jumeaux permet de constater que si l’un des jumeaux est atteint, l’autre présente un pied bot dans 32,5% des cas s’il s’agit de jumeaux monozygotes et dans 2,9% des cas s’il s’agit de jumeaux dizygotes. Le pied bot varus équin ne serait donc pas une affection à transmission génétique mais une anomalie congénitale transmissible sur le mode polygénique à pénétrance incomplète et serait le terrain favorable à la survenue du pied bot qui serait à transmission génétique.
Théorie génétique et environnement
La génétique n’arrive pas seule à expliquer la survenue du pied bot. Elle n’explique d’ailleurs pas pourquoi l’anomalie peut se développer d’un côté et pas de l’autre, alors que les anomalies morphologiques à transmission génétique sont habituellement bilatérales et symétriques. C’est pourquoi, comme souvent, il a été invoqué la conjonction entre terrain génétique prédisposant et des facteurs d’environnement. Wynne-Davies [4] a fait remarquer qu’une transmission polygénique est plus sensible à l’environnement qu’une transmission simple. Les facteurs d’environnement impliqués selon les dernières publications sont la consommation d’alcool, le tabagisme et l’influence saisonnière (élévation de température).
Théorie positionnelle intra-utérine
Cette théorie est très ancienne. En réalité, la découverte en échographie de pieds bots dès la 12ème semaine d’aménorrhée alors que le fœtus flotte librement dans le liquide amniotique est en contradiction avec cette hypothèse. Cependant, il ne faut pas sous-estimer les contraintes mécaniques intra-utérines de la fin de la grossesse qui peuvent aggraver l’enraidissement du pied bot (Fig. 5). Fig.29 : Les anomalies positionnelles intra-utérine
Théorie neuromusculaire
Des altérations constantes des fibres musculaires ont été retrouvées, autant dans les muscles postérieurs de la jambe que dans les muscles péroniers latéraux et, dans certains muscles intrinsèques du pied dont l’adducteur du gros orteil. L’amyotrophie serait liée soit à une diminution de diamètre des fibres soit à une diminution de leur nombre (Fig. 6). La microscopie électronique a révélé des signes traduisant une dénervation tels que les replis de la membrane synoviale, l’épaississement et l’irrégularité d’alignement des stries Z, les regroupements des fibres de type 1. L’augmentation du nombre des fibres de type 1 par rapport aux fibres de type 2 a été reconnue et quantifiée. Fig. 30 : L’amyotrophie des muscles de la jambe [26] Ces constatations sont en faveur d’une origine neurologique du PBVE qui pourrait être considérée comme une forme périphérique et localisée d’arthrogrypose, même si les études éléctromyographiques faites après la naissance se révèlent actuellement insuffisamment précises pour authentifier les phénomènes de dénervation.
Théorie de l’asymétrie de croissance osseuse
Vers la 7ème semaine de gestation, Clavert puis Victoria Diaz ont confirmé qu’il existait un asynchronisme de la croissance des deux os de la jambe : dans un premier temps, le péroné grandit plus vite que le tibia et déforme le pied en varus, puis la croissance tibiale s’accélère et le pied se corrige. Ainsi un processus pathologique qui agirait pendant la phase de croissance péronière pourrait provoquer une déformation du pied en varus, dont la sévérité dépendrait de la date de l’effet nocif.
Théorie de la fibrose rétractile des parties molles postéro-internes
Des études histologiques ont montré que le tissu fibreux était abondant dans les muscles, les fascias et les gaines tendineuses des régions postéro-internes du cou-de-pied en raison d’une synthèse accru du collagène. Des anomalies cellulaires quantitatives ont été rapportées au niveau des gaines des tendons jambiers antérieur et postérieur. Des anomalies qualitatives ont été observées au niveau du versant interne du pied : des mastocytes auraient une action contractile sur des myofibroblastes par libération d’un médiateur chimique histaminique. La cause du pied bot pourrait être une maladie rétractile postéro-interne du pied comparable à la maladie de Dupuytren. Ces phénomènes de rétraction et de contractilité des parties molles d’origine probablement neurologique, seraient ensuite responsables d’une anomalie de la croissance.
INTRODUCTION |