TRAITEMENT DES MALFORMATIONS VASCULAIRES DU
THALAMUS
Angio-architecture
Le terme angio-architecture désigne des caractéristiques anatomiques d’une malformation donnée. Cette angio-architecture est très variable d’une MAV à l’autre. La connaissance et l’étude détaillée de cette angio-architecture est capitale pour l’estimation du risque hémorragique et la planification ainsi que la réalisation du traitement (quelle qu’en soit la modalité). Les différents composants qui caractérisent une l’angio-architecture d’une MAV sont : les artères afférentes, le nidus et les veines de drainage. Les artères afférentes en générale des branches piales. La plupart du temps multiples, les afférences artérielles peuvent être dilatées du fait de l’hyperdébit lié au shunt. Parfois, quand la MAV est de topographie sulcale, la présence d’afférences durales peut s’observer [56]. De fines branches alimentant la MAV abandonnée sur son trajet par une artère corticale vascularisant du tissu cérébral sain peuvent également être présentes. Cette configuration s’appelle des branches en passant, elles limitent les possibilités du traitement endo-vasculaire. Le nidus (du Latin ≪ nidus ≫ = nid) est la structure centrale de la MAV. En effet, c’est au niveau du nidus que s’effectue le shunt arterio-veineux. Il constituera donc la cible du traitement, quelle qu’en soit la modalité. Le nidus est un réseau de vaisseaux dysplasiques enchevêtrés. Histologiquement, ces vaisseaux possèdent à la fois des caractéristiques d’artère et de veine [57]. Cette ―ambiguïté‖ histologique explique un surcroit de fragilité de ces vaisseaux, favorisant la rupture de ces structures vasculaires dysplasiques. Le nidus peut être uni-compartimental, c’est-à-dire compose d’un seul compartiment alimente par une ou un groupes restreints d’artères afférentes, ou au contraire multi-compartimental, surtout 8 pour les MAV de grande taille. La reconnaissance et la compréhension de ces compartiments sont capitales aussi bien pour le traitement endovasculaire que chirurgical [58]. Le nidus peut présenter plusieurs configurations. Il peut ainsi prendre l’aspect d’un peloton et est alors dénomme nidus plexiforme. Parfois, au contraire, il peut présenter un aspect purement fistuleux. Certains nidus ont une configuration mixte. Enfin, les nidus pléxiformes peuvent présenter un aspect compact ou au contraire éparse. La taille du nidus des MAV est variable, allant de la micro-MAV, parfois nonvisible en angiographie et uniquement diagnostiquée en anatomopathologie quand elle reséquée dans le même temps que l’évacuation d’un hématome lobaire compressif, a la MAV holo-hémisphérique, intéressant la totalité ou la quasi-totalité d’un hémisphère cérébral [59]. La forme extrême correspond à l’angiopathie proliférative, avec un nidus éparse, étendu a plusieurs lobes cérébraux. Cette forme est plus fréquente chez la femme jeune, et se manifeste le plus souvent par des épisodes comitiaux, des céphalées invalidantes ou des déficits neurologiques focaux. Dans cette entité, les manifestations hémorragiques sont exceptionnelles [60]. La localisation des MAV est variable : elles peuvent être corticales, sous corticales ou profondes. Les MAV corticales peuvent être à la surface du cerveau, en position sous-piale. Elles sont dénommées MAV sulcales car elles épousent le fond d’un sillon cortical [61]. Au contraire, elles peuvent être plus profondément enchâssées dans le parenchyme, et sont alors appelées MAV gyrales [61]. Cette distinction a une importance car elle influe sur la technique opératoire, aussi bien pour l’embolisation que pour la microchirurgie. Les MAV de localisations profondes sont définies comme étant situées au niveau des noyaux gris centraux, de la capsule interne, du thalamus, de l’hypothalamus, du système limbique ou du corps calleux. 9 Le drainage veineux profond est défini comme un drainage se dirigeant vers la veine de Galien, la veine cérébrale interne, la veine basale de Rosenthal ou la veine (cérébelleuse) précentrale. Par défaut, tous les autres modes de drainages sont considérés comme superficiels. A l’étage sous‐tentoriel, toute veine se drainant ailleurs que dans le sinus droit, le torcular ou le sinus transverse, sera considérée comme empruntant un drainage veineux profond. Le drainage veineux peut être cortical exclusif, superficiel exclusif ou mixte [62]. Certains types de drainage veineux sont associes a un sur-risque hémorragique dans l’histoire naturelle de la maladie : un drainage veineux unique, un drainage veineux ralenti ou un drainage veineux profond exclusif [63]. Certaines véritables MAV peuvent également emprunter une anomalie veineuse de développement (AVD) comme veine de drainage principale [64‐66]. Aussi, cette forme particulière d’AVD expose‐t-elle a un risque hémorragique, et doit être prise en charge comme une vraie MAV [64]. Certaines observations ayant montré une prolifération capillaire autour d’AVD (≪ capillary stain ≫) ont fait classer ces AVD atypiques comme des formes transitionnelles entre les AVD classiques et celles Participant à l’angio-architecture de vraie MAV [.
Modes de révélation des MAV
Le mode de révélation le plus fréquent des MAV est l’hémorragie (environ 50% des cas) [39]. Le deuxième mode de révélation en termes de fréquence est l’épilepsie [54]. En effet, elle est observée dans 16 à 53% des cas (en moyenne 34% des cas). Il faut distinguer les épilepsies secondaires a une séquelle hémorragique sur rupture de la MAV de celles purement dues à la MAV. Environ 1% des crises comitiales inaugurales sont dues à une MAV [67]. Dans la cohorte prospective écossaise (SIVMS), le risque à 5 ans de survenue d’une crise d’épilepsie chez un patient porteur d’une MAV de découverte asymptomatique était de 8% [68]. La majorité des crises comitiales liées aux 10 MAV se manifestent sous la forme de crises généralisées (environ 3/5 des MAV révélées par une crise comitiale [54], et 27 à 35% des MAV symptomatiques [69,70]. Les crises partielles ou partielles complexes sont quant à elles plus rares et s’observent dans un peu plus de 20% des épilepsies sur MAV et chez environ 10% des MAV symptomatiques [71]. Si la corrélation entre topographie corticale et épilepsie dans les MAV est évidente, la présence de crises comitiales a également été clairement corrélée à la localisation de la MAV (lobes temporal, frontal, et pariétal) ainsi qu’a grande taille du nidus [62]. Selon une étude sur les facteurs angiographiques associes aux manifestations comitiales, plusieurs caractéristiques des MAV étaient associées à la présence d’une épilepsie, dont notamment la localisation corticale et la présence d’ectasies veineuses focales [72]. D’autres études se sont focalisées sur les mécanismes physiopathologiques concourant à la survenue d’épisodes comitiaux dans les MAV [73,74].Hacein-Bey et al. [39], sur les résultats d’une étude perfusionnelle en SPECT (single-photon emission CT), ont émis l’hypothèse que l’hypoxie chronique des territoires adjacents a la MAV, du fait de l’hémodetournement lié au shunt, pouvait conduire à la formation d’une gliose, précipitant la survenue d’une comitialité. Des céphalées sont le symptôme révélateur de la MAV dans 7 à 48% des cas mais aucun élément tel que la fréquence, la durée ou la sévérité des céphalées n’oriente spécifiquement vers le diagnostic de MAV. Une possible association entre migraine atypique ou céphalées récurrentes et MAV a été infirmée par plusieurs travaux [76,77]. Les MAV peuvent également être responsables de déficits neurologiques focaux par phénomène de vol vasculaire (flux redirigé vers le shunt à haut débit de la MAV).Ces phénomènes ont été confirmés par certaines études de perfusion. Néanmoins, Mast et al. [78] ont remis en question l’existence de ces phénomènes de vols 11 vasculaires sur la foi de données vélocimétriques évaluées à l’échographie Doppler, ne montrant pas de différence en termes de vélocités artérielles et d’index de pulsatilité entre patients porteurs de déficit neurologique focal et ceux exempts de ce type de symptômes. Rarement, des phénomènes compressifs par un volumineux nidus ou une veine de drainage ectasique peuvent s’observer. Ils peuvent conduire à des crises comitiales, des déficits neurologiques focaux voire même des tableaux d’hydrocéphalie [79]. De façon exceptionnelle, les MAV peuvent se révéler par un déclin cognitif [80], voire un tableau de pseudo-démence en cas de compromission majeure drainage veineux cérébral. Enfin, il est à noter qu’au moment du diagnostic, 15% des MAV sont asymptomatiques
Hémorragie intra-crânienne : fréquence et impact
Les MAV représentent environ 2% des étiologies des saignements intracérébraux [81]. Environ 1/3 des hématomes des sujets jeunes sont lies à une rupture de MAV [67]. La fréquence des manifestations hémorragiques dans les MAV est rapportée entre 30 et 82% dans la littérature 55. Le chiffre le plus communément admis est une fréquence voisine de 50% [82,83]. Ainsi, dans la série publiée par Hofmeister et al. [54] l’hémorragie intra-crânienne était-elle le mode de présentation le plus fréquent des MAV (53%, IC 95% 51%-56%), suivi par les crises comitiales (40%) et les déficits neurologiques focaux (≈15%). De même, dans la méta-analyse de Gross et al. [55] une présentation hémorragique était rapportée avec une fréquence de 52%. La topographie des hémorragies liées aux ruptures de MAV est la plupart du temps intra-parenchymateuse (54 à 82%). 12 Dans un peu plus de 10% des cas, une hémorragie sous-arachnoïdienne y est associée [83]. Une inondation ventriculaire plus ou moins associée à une hémorragie sous arachnoïdienne est observée dans environ 15% des cas [83]. Une hémorragie sous-arachnoïdienne isolée est observée dans 5% des MAV rompues [83]. Une étude prospective a montré que les hémorragies intra-ventriculaires ou sous-arachnoïdiennes pures avaient un pronostic neurologique meilleur que les hémorragies intra- parenchymateuses [84]. Le taux de mortalité sur rupture de MAV est estime entre 10 et 29% d’après des études rétrospectives, et la morbidité globale peut atteindre 50% [85-87]. Le taux de rupture annuel pour les MAV non-rompues est d’environ 2% contre plus de 4% pour les MAV rompues [88]. Il est à noter que le risque de re-rupture pour une MAV ayant déjà saigné est maximal la première année, avec un taux de resaignement dans cette période variant dans la littérature entre 6 et 15% [89]. Un antécédent hémorragique est associe à un hazard ratio de 3,2 pour un nouvel épisode hémorragique Gross et al. [55]. Les complications précoces de la rupture de MAV, en dehors de l’effet de masse lie à l’hématome et des phénomènes compressifs qui en résultent, sont principalement le vasospasme artériel et l’hydrocéphalie. Le vasospasme est une complication potentiellement grave car il peut conduire à des lésions ischémiques parfois étendues et invalidantes, voire même au décès. Le vasospasme est observé dans environ 6% des cas (1,9 à 17%) sur les ruptures de MAV ; les ischémies liées au vasospasme jusque dans 8% des cas [90]. Le sexe féminin, l’âge jeune, et un score de Glasgow bas à l’admission sont des facteurs de risque de survenue de vasospasme sur les ruptures de MAV [90]. L’hydrocéphalie est une autre complication des ruptures de MAV. Elle est principalement en rapport avec la présence d’une inondation ventriculaire
Introduction |