Traitement chirurgical du cancer de l’ovaire
Modes d’extension
Les cellules cancéreuses migrent et colonisent par contiguïté les organes voisins (ovaire, trompe, utérus). Elles peuvent également s’exfolier à partir de la surface ovarienne et s’implanter sur le péritoine. Le flux péritonéal, sous l’influence des mouvements respiratoires, Traitement chirurgical du cancer de l’ovaire à l’Institut Joliot Curie de Dakar : A propose de 81 cas 21 Rappels entraîne des localisations péritonéales diffuses allant du pelvis en direction des coupoles diaphragmatiques. Les tumeurs épithéliales malignes de l’ovaire sont très lymphophiles et la dissémination lymphatique peut se faire selon trois voies : – La principale suit les vaisseaux gonadiques et aboutit aux ganglions du groupe lomboaortique ; – La deuxième suit les ligaments larges et aboutit aux ganglions iliaques externes et inter-iliaques ; – La dernière, la moins fréquemment envahie, suit le ligament rond et atteint les ganglions inguinaux. Une dissémination par voie hématogène est également possible et survient plus tardivement au cours de l’évolution tumorale : Elle explique les localisations secondaires hépatiques, pulmonaires, spléniques, surrénaliennes, rénales ou cérébrales.
Diagnostic
Diagnostic positif
Signes fonctionnels Elles peuvent être symptomatiques par des douleurs abdominales, la sensation de pesanteur abdominale, des troubles du transit, la constipation. La découverte peut se faire à l’occasion des complications surtout au stade avancé par : – Une augmentation du volume de l’abdomen par une ascite ou par le volume tumoral ; – Des métrorragies ; – Des signes urinaires : Pollakiurie ou dysurie ; – Des signes généraux : Amaigrissement, altération de l’état général (AEG) ; – Un syndrome paranéoplasique : Thrombophlébite, dermatomyosite, syndrome cérébelleux ; – Des douleurs lombaires. Traitement chirurgical du cancer de l’ovaire à l’Institut Joliot Curie de Dakar : A propose de 81 cas 22 Rappels La découverte peut être fortuite lors d’un dépistage pour autre pathologie à l’échographie pelvienne ou à la tomodensitométrie (TDM) retrouvant une masse annexielle unilatérale ou bilatérale.
Examen physique
L’examen gynécologique permet de mettre en évidence une masse latéro-utérine arrondie, séparée de l’utérus par un sillon, mobile, ne suivant pas les mouvements imprimés au col. Cette masse est le plus souvent indolore, de volume et consistance variables. Elle est pelvienne ou abdomino-pelvienne et présente les critères cliniques de malignité suivants : Tumeur dure, irrégulière, hétérogène, fixée à l’utérus ou aux parois pelviennes, parfois bilatérale ou associée à une ascite. Au début et parfois pendant longtemps, l’examen clinique peut être normal. La patiente ne s’en rend compte que lorsque la tumeur commence à être perceptible au niveau de la paroi abdominale. Classiquement, la convexité supérieure de la tumeur la fait différencier de la convexité inférieure de l’ascite. Le liquide d’ascite peut atteindre plusieurs litres. VIII-1-3- Para-clinique
Echographies pelvienne et abdominale
Elle est le meilleur examen à visée diagnostique pratiquée en première intention. Elle repère ainsi l’ovaire, apprécie ses caractéristiques. L’exploration vaginale permet de mieux préciser ces derniers surtout pour les tumeurs de petite taille ou douteuses (Figure 11). Les critères échographiques de malignité d’une tumeur ovarienne sont : une taille de plus de 10 cm, hétérogène avec des cloisons et ou intra-kystiques et une paroi épaisse. La tumeur est souvent bilatérale. VIII-1-3-2- Echographie vaginale avec évaluation doppler Elle a une bonne sensibilité à l’ordre de 81%. Elle conduit à un certain nombre de faux positif (1,1%), et donc, donne parfois à des opérations abdominales inutiles. Cependant, elle a l’intérêt de préciser la présence ou non de végétations endo-kystiques, de donner les mensurations de la tumeur. A l’évaluation doppler, l’hyper-vascularisation est un signe de malignité [12]. Traitement chirurgical du cancer de l’ovaire à l’Institut Joliot Curie de Dakar : A propose de 81 cas 23 Rappels Figure 11 : Echographie endovaginale d’un cystadénocarcinome séreux : Formation kystique à contour finement échogène présentant des végétations au contact de la paroi interne
Marqueurs tumoraux
C’est un déterminent antigénique d’une glycoprotéine de poids moléculaire élevé, exprimé à la surface de l’ovaire et reconnu par l’anticorps monoclonal « AC-125 ». Le CA-125 est le marqueur tumoral sérique essentiel des cancers épithéliaux de l’ovaire. En effet, environ 50% des patientes ayant un cancer de l’ovaire de stade FIGO 1 et 90% des patientes de stade FIGO II à IV ont une augmentation du CA-125. La plupart des études retient le seuil de 35 UI/ml comme limite supérieure à la normale. – Place du CA-125 dansle diagnostic du cancer de l’ovaire Le dosage du CA-125 peut intervenir à deux niveaux lors du diagnostic du cancer de l’ovaire : Dans le cadre du dépistage de masse dans une population asymptomatique et lors de la découverte d’une lésion ovarienne afin de préciser son risque de malignité. Le dosage du CA-125 est un standard avant toute chirurgie ovarienne. Il permet de proposer une approche moins invasive en cas de tumeurs supposées bénignes et d’informer au mieux les patientes sur les modalités chirurgicales. En effet, le CA-125 apparaît être un bon élément Traitement chirurgical du cancer de l’ovaire à l’Institut Joliot Curie de Dakar : A propose de 81 cas 24 Rappels discriminant entre les tumeurs bénignes et malignes, en revanche il n’est pas performant dans la différenciation du type histologique des tumeurs. Par ailleurs, le dosage du CA-125 s’avère moins pertinent en cas de cancer de l’ovaire de type mucineux. En effet, ces patientes ont souvent un marqueur moins élevé en comparaison aux cancers de type séreux ou indifférenciés. – CA-125 et évaluation de la résécabilité chirurgicale La question de la possibilité de cytoréduction complète lors du geste chirurgical se posant essentiellement pour les cancers de l’ovaire de stade avancé. Le seuil préopératoire le plus souvent retenu dans les études, permettant l’association de la meilleure sensibilité et spécificité, est 500 UI/ml. Un taux préopératoire inférieur à 500 UI/ml est associé à 84,2% de résection optimale alors qu’un taux supérieur à 500 UI/ml est associé à 14,6% de résection optimale. – Place du CA-125 dansle diagnostic des récidives Le CA-125 est fréquemment utilisé dans la surveillance des cancers de l’ovaire. L’élévation du marqueur précède les récidives de 4,5 mois en moyenne. Le Gynecologic Cancer Intergroup (GCIG) propose une définition en fonction du taux de CA-125 (après traitement de première intention) : – Si le CA-125 est normalisé, la récidive est définie par une valeur supérieure à deux fois la limite normale ; – Si le CA-125 n’est pas normalisé, la récidive est définie par une valeur supérieure à deux fois le nadir.
Autres marqueurs
Les autres marqueurs tumoraux sont : CA 19-9, ACE, HCG, L’alphafœtoprotéine (AFP), l’inhibine, la protéine humaine épididymaire 4 (HE4), et les autoanticorps associés aux tumeurs [1]. Traitement chirurgical du cancer de l’ovaire à l’Institut Joliot Curie de Dakar : A propose de 81 cas 25 Rappels
Diagnostic d’extension
Radiographie pulmonaire Elle recherche des métastases pulmonaires ou pleurales ou un épanchement pleural métastatique.
Echographie abdomino-pelvienne
L’échographie permet de rechercher une ascite, avec ou sans métastases épiploïques, ainsi que des métastases intra-hépatiques rares ou plus fréquemment sur la capsule de Glisson (Figure 12). Figure 12 : Image échographique d’une métastase hépatique
Imagerie par résonance magnétique
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) peut apporter un complément d’information, mais est-elle suffisante pour compléter les informations données par la TDM. La spécificité de l’IRM varie entre 80 et 92%, la sensibilité entre 52 et 96 % en fonction des sites étudiés [24]. Elle donne une iconographie en 3 dimensions. Elle précise l’extension de la tumeur aux organes de voisinage et le degré de nécrose de la tumeur, la composante liquide par rapport solide et le caractère rigide des parois (Figure 13). Traitement chirurgical du cancer de l’ovaire à l’Institut Joliot Curie de Dakar : A propose de 81 cas 26 Rappels Haut Arrière Figure 13 : IRM pelvienne en T2 en coupe sagittale : masse solidokystique aux dépens de l’ovaire droit. En rouge, les 2 grands axes de la tumeur [25].
TDM abdomino-pelvien
En pré-opératoire, nous réalisons souvent le bilan d’imagerie le plus complet possible afin d’affiner au mieux la possibilité du geste chirurgical et de prédire les différents sites atteints. Une TDM thoraco-abdomino-pelvien sans et avec injection est le plus souvent prescrite, complétée par une IRM, comme elle est d’accès facile même en urgence. Elle trouve sa place dans le bilan d’extension préalable à l’intervention. Elle est intéressante dans la surveillance et le diagnostic précoce des récidives avec une sensibilité et spécificité comparable à l’échographie. Elle peut mettre en évidence une extension intestinale, des adénopathies profondes, des métastases hépatiques non repérées par l’échographie, ou déterminer le siège d’une obstruction urétérale (Figures 14a et 14b). Traitement chirurgical du cancer de l’ovaire à l’Institut Joliot Curie de Dakar : A propose de 81 cas 27 Rappels Haut Masse Gauche Figure 14a : TDM : Coupe frontale montrant une tumeur ovarienne [23]. Antérieur Gauche Masse Figure 14b : TDM : Coupe transversale montrant une tumeur ovarienne .
Cœlioscopie diagnostique
La cœlioscopie diagnostique (Figure 15) est de toute première importance si les éléments cliniques et l’imagerie ne sont pas formellement en faveur de la malignité. Elle permet : – D’évaluer en partie l’index péritonéal de la carcinose (PCI), de faire des prélèvements biopsiques ou de confirmer la résécabilité ou non de la tumeur ; – En cas de tumeur kystique, une kystectomie avec examen histologique extemporané permet de fixer le degré de malignité et d’établir le stade ; – Cœlioscopie diagnostique et cœliochirurgie pour l’établissement du stade (Cœliochirurgie de stadification). En effet, la diffusion des métastases péritonéales au niveau des coupoles diaphragmatiques est une des caractéristiques des tumeurs malignes des ovaires. La biopsie des localisations péritonéales permettra de préciser s’il s’agit d’implants invasifs ou non.
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