TRAITEMENT CHIRURGICAL DE LA DILATATION KYSTIQUE DU CHOLEDOQUE
Introduction
La DCK est une malformation congénitale rare. Son incidence est variable selon les populations. Elle est de l’ordre de 1/100000 à 1/150000 naissances dans les pays occidentaux et de 1/1000 dans les pays asiatiques [36, 48]. En Afrique, à notre connaissance aucune étude n’a évalué l’incidence de cette anomalie à ce jour. Cette malformation dont la cause reste inconnue, constitue la seconde cause de malformations congénitales des voies biliaires après l’atrésie des voies biliaires. Elle prédomine dans le sexe féminin [54]. Cette pathologie peut rester asymptomatique pendant très longtemps. Le diagnostic de certitude pré-opératoire, autrefois exceptionnel, est actuellement constant à l’échographie et à la bili-IRM et son caractère congénital est souligné par la découverte de certains cas à l’échographie anténatale [47]. La classification de Todani est actuellement la plus utilisée ; elle classe cette pathologie en cinq types en fonction du siège, de l’étendue et du type de dilatation des voies biliaires. Le type I est le plus fréquemment retrouvé, dans 80% des cas [47]. Le plus grand problème est le risque de dégénérescence après plusieurs années d’évolution, d’où la nécessité d’un traitement chirurgical basé sur la résection du kyste suivie de la dérivation bilio-digestive [47, 73]. A notre connaissance il n’y a pas de travaux réalisés au Sénégal concernant ce sujet. C’est la raison pour laquelle nous avions réalisé ce travail dont le but était d’évaluer la prise en charge chirurgicale de la DKC dans notre contexte et de comparer nos résultats aux données de la littérature.
PREMIERE PARTIE : RAPPELS ET REVUE DE LA LITTERATURE
Embryologie des voies biliaires
L’épithélium des voies biliaires est d’origine endodermique : l’épithélium de la vésicule et l’épithélium de la voie biliaire principale dérivent du bourgeon biliaire, alors que celui des conduits biliaires intrahépatiques dérive comme les hépatocytes du bourgeon hépatique proprement dit et ils résultent d’interactions épithélio-mésenchymateuses. Les cellules épithéliales forment un cercle (plaque ductale) centré par la veinule porte. Les conduits s’individualisent de cette plaque qui va ensuite disparaître. Vers la fin de la 3e semaine, le diverticule cystique, d’origine endodermique, se forme sous le diverticule hépatique au niveau du duodénum. Ceci formera la vésicule biliaire et le conduit cystique. Celui-ci s’abouche au conduit hépatique et s’éloigne du duodénum suite à la croissance secondaire du cholédoque (Figure 1). 4 Figure 1: Ébauches hépatobiliaires et pancréatiques (à environ 35 jours) [57]. III-Anatomie [15] 1-Voies biliaires intrahépatiques Ce sont des canalicules intra-lobulaires, cheminant entre les cellules, qui se réunissent en canaux péri-lobulaires; ces canalicules et ces canaux ont les mêmes divisions et les mêmes trajets que les branches terminales de la veine porte. Ces canaux péri-lobaires se regroupent entre eux pour former le canal biliaire hépatique droit (draine le foie droit) et le canal biliaire gauche (draine le foie gauche). Postérieur Cranial 5 2-Voies biliaires extra hépatiques (Figure 2)
Voie biliaire principale
Elle est constituée de deux segments canalaires. Le conduit hépatique commun, né de la convergence des conduits hépatiques droit et gauche, se termine à l’abouchement du conduit cystique, au niveau du bord supérieur du duodénum. Le conduit cholédoque est constitué de la fusion des conduits cystiques et hépatiques communs. Il se termine dans la partie descendante du duodénum. Le trajet du cholédoque, est oblique en bas, à droite et en arrière, formant une courbe à concavité antérieure et droite. Elle est longue de 8 à 10 cm ; son calibre est variable de 4 à 10 mm. Elle descend dans le bord droit du petit épiploon, à la partie antérieure du pédicule hépatique, à la face antérieure de la veine porte dont elle rejoint progressivement le bord droit. L’artère hépatique est à gauche de la voie biliaire sur le même plan. La bifurcation en branche artérielle droite et gauche a lieu au-dessous de la convergence biliaire, à une hauteur variable, et la branche droite croise la voie biliaire principale en passant habituellement en arrière d’elle (mais, dans 13 % des cas, en avant). Dans son segment rétro-pancréatique, la voie biliaire principale est en rapport avec la face postérieure de la tête du pancréas, soit dans une gouttière, soit dans un véritable tunnel. Son trajet est croisé par les arcades artérielles et veineuses pancréatiques postérieures. En arrière, par l’intermédiaire du fascia de Treitz, dans le clivage du décollement duodéno-pancréatique, la voie biliaire principale répond à la veine cave inférieure. 6 Dans sa partie terminale, le cholédoque traverse plus ou moins obliquement la paroi duodénale à la partie moyenne du deuxième duodénum. Des variations sont possibles dans la hauteur d’abouchement qui peut se situer sur toute la hauteur du deuxième duodénum : la papille se situe en position haute dans 16 % des cas, en position moyenne dans 61 % des cas, en position basse dans 22 %des cas. Dans son segment terminal, la voie biliaire principale est en rapport avec le canal de Wirsung, qui lui est parallèle, sous-jacent, et dans un plan antérieur. Les deux canaux se jettent dans le duodénum au fond de l’ampoule de Vater, petite cavité conoïde creusée dans l’épaisseur de la paroi duodénale (Figure 2). La papille est entourée par une couronne de fibres musculaires lisses, distincte de celle de la paroi duodénale, qui constitue le sphincter d’Oddi. La vascularisation des voies biliaires hilaires est assurée par de fins rameaux artériels issus des branches droite et gauche de l’artère hépatique. Celle de la voie biliaire principale se fait par l’intermédiaire d’artères axiales longeant les bords droit et gauche de la voie biliaire. Ces artères axiales sont elles-mêmes issues de l’artère hépatique droite et de l’artère gastro-duodénale, constituant un réseau anastomotique entre ces deux artères.
Voie biliaire accessoire Elle est constituée par la vésicule biliaire et le canal cystique.
Vésicule biliaire C’est un réservoir musculo-membraneux. La vésicule biliaire est appliquée à la face inférieure ou viscérale du foie, à la limite des foies droit et gauche, dans une fossette dont elle est séparée par un espace celluleux plus ou moins lâche, traversé par des veines et qui constitue un plan de clivage. Elle a une longueur de 8 à 10 cm et une largeur de 3 à 4 cm. La vésicule biliaire a une morphologie très variable. On lui distingue classiquement trois portions : le fond, le corps et le collet. 7 La vascularisation de la vésicule est assurée par l’artère cystique qui naît le plus souvent de la branche droite de l’artère hépatique, souvent dans le triangle de Calot formé par canal cystique à droite, la voie biliaire principale à gauche, le foie en haut.
Canal cystique
Il prolonge le col vésiculaire, en faisant avec le bassinet un angle ouvert en dedans. De longueur variable, entre 20 et 50 mm, il se dirige en bas et en dedans pour rejoindre le conduit hépatique commun. Le diamètre est de 4 mm environ, sa muqueuse spiralée forme la valvule de Heister (pli spiral), sa musculeuse forme un sphincter : le sphincter de Lütkens. Figure 2: Voies biliaires extra-hépatiques et ses rapports [68] 1. Niveau supérieur, dans les limites de la plaque hilaire; 2. Niveau moyen, péritonéal, intra épiploïque, pédiculaire; 3. Niveau inférieur, dans la loge duodéno pancréatique Cholédoque Duodénum Confluence biliaire auche Gauche Gauche Gauche Canal cystique stique auche G Gauche Gauche Gauche Gauche Gauche Gauche Canal de wirsung auche Gauche Gauche Gauche pancréas auche Gauche CHC auche Gauche Gauche Gauche VP auche Gauche Gauche Gauche VB AHC AC CC Foie auch e Gauche Gauche Gauche Gauche Cranial 8 3-Variations anatomiques des voies biliaires extra-hépatiques
Anomalies de la vésicule biliaire
Il peut s’agir d’une anomalie morphologique (vésicule cloisonnée ou multilobée) ou d’une anomalie numérique (agénésie vésiculaire) qui est rare chez l’homme. La vésicule biliaire intra-hépatique et la vésicule à gauche sont des anomalies topographiques exceptionnelles rapportées. 3-2-Anomalies du canal cystique [9] L’anomalie peut être une variation du nombre (absence de conduit cystique, canal cystique double) ou de Variation du trajet et d’abouchement. Il peut s’agir, dans ce dernier cas, d’une disposition habituelle ou inhabituelle ; le canal cystique peut être à gauche (0,1%), il peut être long (25%), court (20%), double (à gauche et au milieu : en H, à droite : en Y) ou en spirale (8-20%).
Anomalies de la voie biliaire principale
-Variations de la partie haute de la voie biliaire principale et de la convergence [57] Il peut s’agir de l’absence du conduit droit (confluent à trois branches) ou d’une convergence étagée (glissement). Le canal droit postérieur peut être en position sous portale. On peut retrouver une variation du conduit gauche ou une existence d’un conduit hépato-cystique.
Variations de la partie moyenne et inférieure de la voie biliaire principale [9] La voie biliaire principale peut avoir une forme en disposition modale, en crochet, rectiligne, à deux courbes ou à trois courbes 3-3-3-Anomalies numériques de la voie biliaire principale [9] Elles sont classées en 5 types selon le tableau I. 9 Tableau I: Anomalies numériques de la voie biliaire principale [9] Type I Voie biliaire principale avec un septum intraluminal. Type II Bifurcation terminale avec abouchements indépendants. Type III Duplication complète de la voie biliaire principale sans communication extrahépatique, sans (type IIIa) ou avec (type III b) communication intrahépatique. Type IV Duplication complète de la voie biliaire principale avec un ou plusieurs canaux de communications extrahépatique. Type V Duplication de la voie biliaire principale avec drainage terminal simple, sans (type Va) ou avec (type Vb) canaux de communication. IV-Anatomopathologie 1-Classification de Todani Nous évoquerons essentiellement la classification de Todani qui est la plus utilisée [86] (Figure 3). Type I Il représente près de 90% des DKCVBP. L’anomalie se développe sur la voie biliaire extra hépatique au-dessous des voies biliaires hépatiques et au-dessus de la portion pancréatique du canal biliaire. Le volume de la poche est variable ; il peut contenir jusqu’à plusieurs litres de bile. Ce type comprend 3 sous-groupes : – Type Ia : dilatation sacciforme. – Type Ib : dilatation segmentaire. – Type Ic : dilatation fusiforme. Type II C’est un diverticule de la voie biliaire principale, rattaché par un pédicule habituellement court et étroit à une voie biliaire principale non kystique. 10 Type III Il Correspond au cholédococèle, c’est à Wheeler en 1940 que nous devons ce terme et c’est une dilatation kystique de la portion terminale du canal cholédoque faisant saillie dans la lumière duodénale : la voie biliaire principale sus-jacente est le plus souvent normale ou dilatée mais non kystique. Type IV Il Comprend deux formes différentes : – IVa : dilatation kystique de la voie biliaire principale, quel que soit son type, associée à des dilatations kystiques intra hépatiques. – IVb : est une dilatation kystique multiple des voies biliaires uniquement extra hépatiques pouvant regrouper plusieurs des types précédents. -Type V : la maladie de Caroli C’est une dilatation congénitale non obstructive qui intéresse uniquement les voies biliaires intra hépatiques. C’est une maladie autosomique récessive rare, dont la prévalence ne dépasse pas 1/1000000 de la population. Jusqu’en 1984, juste 162 cas qui ont été rapportés.
I-INTRODUCTION |