Théorie, méthode et présentation de l’étude

Théorie et présentation

L’enseignement supérieur connaît un bouleversement historique. La demande en études postsecondaires est à son apogée, aussi bien pour les étudiants dit traditionnels que non traditionnels ; les prestataires à but lucratif, proposant des certificats, deviennent la règle et non l’exception ; l’enseignement à distance prolifère dans les institutions de tous types et l’enseignement supérieur devient un commerce qui traverse les frontières politiques et géographiques.
Il a souvent été dit que l’enseignement supérieur a pour but d’aider les étudiants à acquérir les compétences nécessaires à l’obtention d’un emploi et à devenir ainsi des membres productifs de la société. Même si l’embauche est l’un des objectifs premiers de l’enseignement supérieur, il n’est certainement pas le plus important.
En 1854, John Henry Newman décrivait l’Université comme « l’endroit où un millier d’écoles confluent ; où l’intellect peut se laisser aller et spéculer en toute sécurité, certain de rencontrer son égal dans telle ou telle activité antagoniste et son juge au tribunal de la vérité ». Newman, pour qui l’Université était « le lieu où l’investigation est menée encore plus loin et où les découvertes sont vérifiées et perfectionnées, […] et où l’erreur est démasquée par l’affrontement des esprits et des savoirs », considérait que l’enseignement universitaire avait pour but le « simple culte de l’intellect […], et pour objet, l’excellence intellectuelle ». Newman voyait l’excellence intellectuelle comme un bien en soi, sans aucune autre justification. Il ne voulait pas dire par là que l’excellence intellectuelle n’avait aucune utilité. Il insistait sur le fait qu’ « il n’y a rien de plus absurde que de négliger dans l’enseignement ces sujets qui sont nécessaires à un appel [d’un étudiant] futur. » 11 À partir de 1945, l’enseignement supérieur suit la trajectoire de l’expansion massive à laquelle ont contribué « le déclin mondial dans l’agriculture, changeant les structures de l’emploi, le boom économique de l’après-guerre et, au Sud, le besoin de former les prestataires locaux après la décolonisation ».
Au cours des décennies qui suivirent, le système universitaire fut confronté à une augmentation considérable de l’interaction avec la société en général. À partir du début des années soixante, la massification modifia les relations entre l’enseignement supérieur, d’une part, la société et l’économie, d’autre part. Comme Scott12 le souligne : « Les politiciens croient, à tort ou à raison, que l’investissement dans l’enseignement supérieur peut se traduire en avantage économique, une croyance soutenue par les théories de la société post-industrielle qui suggèrent que la connaissance est devenue la principale ressource des économies avancées. »
Avec son expansion et l’augmentation de son budget respectif, l’enseignement supérieur n’est plus associé à un petit nombre de privilégiés, mais à la politique économique nationale générale. Selon Denman (2000), il existe actuellement dans le monde au moins 8 022 universités et 7 182 établissements d’enseignement supérieur. Le nombre d’étudiants est passé de 51 millions, en 1980, à 82 millions, en 1995. Dans les pays fortement industrialisés, près de 50 % des 18-23 ans sont inscrits dans plusieurs types d’enseignement supérieur. 13Avec un système de masse de ce genre et les vastes sommes d’argent public impliquées, les sociétés ne peuvent plus traiter les universités comme des « tours d’ivoire » isolées. Le corps étudiant est à présent bien plus diversifié et la plupart des étudiants ne poursuivent des études universitaires que dans le but de trouver un emploi bien rémunéré après l’obtention de leur diplôme.
Il existe une recrudescence de la pression exercée sur l’enseignement supérieur pour développer la relation entre l’académie et la performance économique. Comme Barr le précise : « Dans le passé, l’enseignement supérieur existait pour poursuivre la connaissance pour “ la connaissance  » et était principalement un bien de consommation pour l’élite intellectuelle de la classe moyenne. Il n’avait d’importance ni pour les opportunités en matière de revenus, ni pour la performance économique nationale. Cette époque rappelle à bon nombre de personnes une époque idyllique. Mais cette époque est terminée. L’enseignement supérieur a toujours ces objectifs mais ils ne sont
plus les seuls ; il présente un intérêt tant sur le plan personnel que national, pour la performance économique. »14 Par conséquent, les établissements d’enseignement supérieur sont utilisés pour mettre en œuvre cette politique gouvernementale. Plus loin, dans le monde des affaires et des technologies, les discours mettent l’accent sur l’enseignement supérieur comme un élément clé de la stratégie vers une économie de la connaissance.
Après ce chemin de massification et d’instrumentalisation, on trouve la marchandisation de l’enseignement supérieur. Les universités traditionnelles ne sont plus les prestataires exclusifs, ni même dominants, de l’enseignement. De nouveaux types d’institutions émergent pour répondre aux besoins des nouveaux étudiants, qui doivent recevoir un enseignement plus efficace et dans des formations qui se rapprochent davantage du monde du travail15 .
L’univers parallèle de la formation des sociétés à but lucratif est entré dans l’arène de l’enseignement supérieur en proposant un enseignement et une formation dans des technologies plus avancées et, plus que jamais, en fonctionnant en dehors du système officiel de reconnaissance et d’accréditation des cursus universitaires. En l’an 2000, les sociétés mondiales des technologies de l’information « ont certifié » 1,6 million d’étudiants dans le monde ; Cisco a fourni une formation certifiée à 400 000 étudiants, dans 150 pays (Perkinson, 2004). L’un des acteurs à but lucratif les plus importants dans l’enseignement supérieur, Apollo Group, opérateur de la University of Phoenix compte, rien que dans cette université, 201 381 étudiants inscrits, parmi lesquels 99 457 fréquentent le campus en ligne de l’université.16
En 1997, les universités « traditionnelles » américaines ont enregistré une baisse de 11 % dans le nombre de licences en commerce, alors que le nombre d’étudiants inscrits dans de tels programmes au sein d’institutions à but lucratif a augmenté de près de 180 %17.

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