Synthèse et caractérisation des matériaux PT:Mg et LN:Mg/Ho en vue de fabrication de fibres cristallines
La structure pérovskite ABO3
Le mot perovskite est le nom minéral du titanate de calcium (CaTiO3) mais de nombreux matériaux de formule générale ABO3, avec A et B deux éléments atomiques, cristallisent dans une structure de type perovskite. Cette structure est constituée d’un réseau d’octaèdres BO6 reliés entre eux par les sommets. La phase prototype idéale correspondant à la structure de plus haute symétrie est centrosymétrique, de symétrie cubique et de groupe ponctuel m3m. Mais les matériaux perovskites peuvent présenter une grande variété de symétries, s’éloignant de la structure idéale à cause de distorsion, rotation et déformation des mailles élémentaires ou décalage des ions A et B par rapport à leurs positions idéales. La formule chimique générale d’une phase pérovskite est ABO3, où la valence des cations A est comprise entre 1 et 2 (Ba, Ca, Pb, Rb, Sr, Na, K, Li…), et / ou la valence des cations B est comprise entre 3 et 5 (Ti, Sn, W, Zr, Nb, Ta, Nb…). La structure pérovskite idéale présente une maille cubique simple de groupe d’espace Pm3m. Les atomes A occupent les sommets du cube, les atomes B le centre et les atomes d’oxygène O les centres des faces. Lorsque l’on considère l’origine en site B, les atomes A occupent le centre du cube, les atomes B les sommets et les atomes d’oxygènes la moitié des arrêtes du cube (Figure I.9.a et b). Figure I.9:(a) Structure pérovskite. (b) Arrangement des octaèdres d’oxygène dans la structure perovskite de type ABO3 . Dans la symétrie Pm3m correspondant à la structure perovskite idéale, les perovskites sont non polaires. Mais les structures non idéales existent et sont alors polaires. Elles correspondent à des symétries plus basses, leurs mailles présentent de légères déformations de type quadratique, orthorhombique où rhomboédrique, dues à une très faible modification des paramètres de la maille cubique (la maille peut être distordue et non polaire, ex. : CaSnO3). Ces distorsions correspondent à une déformation des octaèdres d’oxygène avec un décentrage de l’ion B[28-31]. Une classification des perovskites peut également être proposée en fonction de la nature des sites A et B qui la compose. On peut distinguer deux types de pérovskites: •Les pérovskites simples dont les sites A ou B sont occupés par un seul type d’atome : BaTiO3, KNbO3, NaTaO3, PbTiO3…. •Les pérovskites complexes dont l’un des deux sites A ou B est occupé par deux types d’atomes : PbMg1/3Nb2/3O3, PbSc1/2Ta1/2O3, Na1/2Bi1/2TiO3,… La répartition des divers cations dans les sites du réseau cationique B dépend de plusieurs facteurs, notamment de leur charge et de leur rayon ionique.
Condition de stabilité de la phase pérovskite
La stabilité de la structure pérovskite dépend essentiellement de deux paramètres nommés facteur de Goldschmidt et l’électronégativité. a-Facteur de Goldschmidt Le premier facteur dit de Goldschmidt est le facteur de tolérance. Il est donné par l’équation: Où A r , B r et O r sont les rayons ioniques des atomes A, B et O. D’après Poix [32], la structure n’est stable que pour 0.8≤ t ≤ 1.08 .Toutefois, la pérovskite sera d’autant plus stable que t est proche de 1. Pour t=1 : tous les ions sont en contact, on aura un empilement compact parfait. Pour t>1 : l’ion B peut être mobile dans le réseau. Pour t<1 : l’ion A peut-être mobile dans le réseau. (I.7) (2 ) B O A O r r r r t + + = Chapitre I Généralités sur les matériaux ferroélectriques 23 b-Electronégativité Le second critère de stabilité de structure est l’iconicité des liaisons. Le nombre de liaisons ioniques est proportionnel à la différence d’électronégativité entre les cations et les anions. Elle est déterminée par l’électronégativité moyenne: ( ) 2 1 χ = χ −OA +χ −OB (I.8) Où χ −OA et χ −OB sont les différences d’électronégativité entre les cations des sites A et B et les oxygènes associés. La structure pérovskite idéale a un caractère ionique prononcé.
Les ferroélectriques classiques et les relaxeurs
Finalement, une classification des matériaux ferroélectriques de type perovskite, basée sur les caractéristiques de la transition de phase présentés dans le paragraphe I.1.11 et sur les diverses propriétés qui lui sont associées permet de distinguer deux types composés (Figure I.8): – Les pérovskites normales ou classiques Les pérovskites normales ou classiques sont pour la plupart des pérovskites simples de type ABO3 et leurs solutions solides. Elles sont caractérisées par une transition de phase ferroélectrique-paraélectrique du 1er ordre ou (et) du 2ème ordre au point de Curie. La courbe f T )( ε r = d’un ferroélectrique classique présente un maximum étroit à la température de Curie TC où se produit la transition ferroélectrique-paraélectrique. Au-dessus de TC, la constante diélectrique suit une loi de Curie-Weiss, Equation I.6. Par ailleurs, dans un ferroélectrique classique, la valeur maximum que peut atteindre εr est indépendante de la fréquence de mesure, et un minimum des pertes diélectriques [tan(δ)] apparaît à la température de transition. – Les pérovskites relaxeurs Le comportement relaxeur apparaît dans les composés pérovskites pour lesquels au moins un site cristallographique est occupé par au moins deux cations de valences différentes. La courbe f T )( ε r = d’un ferroélectrique relaxeurs présente un pic de transition diffuse dans une gamme de température relativement large, Tm, où se produit la transition ferroélectrique-paraélectrique. Au-dessus de Tm, la permittivité diélectrique ne suit pas la loi de Curie-Weiss. Pour un relaxeur, le maximum diffus de r ε obtenu à une certaine fréquence se trouve déplacé vers des températures supérieures lorsque la fréquence augmente (figure I.8.a). Par ailleurs, l’évolution des pertes diélectriques fait également apparaître un pic de transition élargi. De plus la température du maximum de tanδ est sensiblement différente de celle de r ε . La température du maximum de tanδ se déplace avec la fréquence de manière comparable au déplacement de r ε . Figure I.8: Ferroélectrique classique et relaxeur : (a) permittivités diélectriques réelle et imaginaire en fonction de la température, (b) permittivité diélectrique en fonction de la fréquence, (c) permittivité diélectrique réciproque en fonction de la température, et (d) Cycle d’hystérésis [33]. Chapitre I Généralités sur les matériaux ferroélectriques 26 I.3 Classification des dopants Les matériaux ferroélectriques sont rarement utilisés pour des applications techniques ou très spécifiques dans leur formulation simple : Afin d’optimiser leur intégration dans les dispositifs, ils sont généralement modifiés par l’ajout d’un ou plusieurs cation étrangers qui vont se substituer aux sites A ou B de la structure pérovskite ABO3 et parfois par des anions en remplacement de l’oxygène. Les dopants sont généralement classés en trois catégories [34,35]. I.3.1 Dopants isovalents Ce sont les ions ayant la même valence et des rayons ioniques généralement voisins. Ainsi les dopants les plus connus qui peuvent remplacer l’ion A (en référence, Pb2+) sont Mg2+, Ba2+, Sr2+. La substitution de Pb2+ par ces éléments permet d’augmenter le caractère ionique de la maille pérovskite, d’abaisser la quadracité c/a, d’améliorer les propriétés diélectriques et de diminuer la température de curie Tc [35].
Dopants accepteurs
Les additifs accepteurs sont communément appelés dopants durs. On peut citer K+ et Na+ en site A et Fe2+ , Fe3+, Co2+, Co3+, Mn2+, Mn3+, Ni2+, Mg2+, Ho3+, Al3+, Ga3+, In3+, Cr3+et Sc3+ en site B de la structure pérovskite. En effet, ces dopants provoquent une augmentation du champ coercitif, du facteur de qualité mécanique, de la conductivité, et une diminution de la permittivité, des pertes diélectriques et des coefficients de couplage [1]. I.3.3 Dopants donneurs Les additifs donneurs ou dopants doux, sont des ions dont la valence est supérieure à celle de l’ion substitué. Parmi les dopants doux, on peut citer Ho3+ , La3+, Nd3+, Bi3+, Sb3+et d’autres terres rares en site A, ainsi que Nb5+, Sb5+, et W6+ en site B. Le principal effet, induit par les dopants donneurs, est l’augmentation des coefficients de couplage, de la permittivité et des pertes diélectriques. On observe également une diminution de la conductivité, du champ coercitif, du point de Curie et des facteurs de qualité mécanique.
Dopants polyvalents
Ce sont les dopants qui possèdent une valence variable, tel que le manganèse et l’uranium. Ces additifs peuvent changer de valence (nombre d’oxydation variable) pour s’adapter à la valence du site vacant à occuper [2]. Chapitre I Généralités sur les matériaux ferroélectriques 27 I.4 Conclusion Dans ce chapitre, nous avons commencé par un rappelle sur les propriétés des matériaux ferroélectriques, leurs structure pérovskite et leurs applications industrielles. Nous avons également présenté une classification des dopants en lien avec les propriétés physiques qu’ils modifient et que l’on choisi en fonction des applications envisagées. Nous pouvons constater suite à cette étude tout l’intérêt et toute la potentialité fonctionnelle des matériaux ferroélectriques, particulièrement ceux de structure pérovskite, et par conséquent, l’intérêt de concevoir de nouveaux matériaux appartenant à cette famille. L’étude faite dans ce chapitre introductif permet également d’introduire les notions indispensables et utiles pour notre étude qui seront ainsi reprises dans les chapitres suivants.
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