Synthèse de réactifs multifonctionnels et d’analogues de mycotoxine

Généralités sur les mycotoxines

Les mycotoxines sont des métabolites secondaires de moisissures produites par différentes espèces de champignons. Selon l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail), on recense plus de 300 variétés de mycotoxines dont une trentaine sont toxiques pour l’Homme et l’animal. Ces mycotoxines ont une durée de vie plus importante que les moisissures elles-mêmes. Elles sont thermostables à des températures conventionnelles de transformation entre 80°C et 100°C. De ce fait, elles résistent à bon nombre de traitements comme les procédés habituels de cuisson et de stérilisation (mais ceci varie aussi selon le type de toxine).
Elles présentent des effets antinutritionnels et sont définies comme des substances délétères pour les animaux d’élevage et les êtres humains.
Le risque associé aux mycotoxines peut être aigu ou chronique. Le risque aigu au contact de fortes concentrations de mycotoxines est modéré chez l’Homme et concerne plutôt la filière animale. Cette contamination peut se faire d’une manière directe par la consommation des végétaux comme les céréales et leurs produits dérivés (la bière), les grains, les fruits secs (amandes, noix, arachides), les fruits y compris leurs jus et les compotes pour les nourrissons ainsi que leurs produits de fermentation tels que les vins et le cidre.
Sur cette liste, nous pouvons également ajouter le café, le cacao et les épices. La contamination peut également se faire d’une manière indirecte par la consommation d’aliments d’origine animale contaminés suite à l’ingestion de fourrages contaminés. L’exposition peut également être chronique et dans ce cas les concentrations en toxines sont beaucoup plus faibles. Cependant, du fait de leur persistance, ces mycotoxines peuvent s’accumuler dans l’organisme en se liant aux protéines plasmatiques. Elles peuvent causer des maladies chroniques appelées « mycotoxicoses », voire conduire aux décès des personnes contaminées. Les populations dont l’alimentation est peu variée sont les principales victimes de ces pathologies.

Les différents types des mycotoxines dans la nature

Une étude récente a montré que 25% des denrées alimentaires destinées à l’homme et aux animaux sont contaminées tous les ans par des mycotoxines. Ces dernières sont principalement produites par des moisissures appartenant aux genres Aspergillus, Penicillium et Fusarinium et de fait sont classées selon leurs origines biologiques et leurs structures.
Les principales mycotoxines produites et présentes dans nos aliments sont les aflatoxines (AF) B1, B2, G1, G2, l’ochratoxine A (OTA), les fumonisines (FB) B1, B2, B3, les trichothécènes (TCT), les zéaralénones (ZEA) et la patuline (PAT). toutes les mycotoxines ne présentent pas la même toxicité.

Méthodes analytiques pour la détection des mycotoxines

Les techniques chromatographiques sont principalement utilisées pour doser les mycotoxines. Ces techniques combinent une étape de séparation (extraction) des analytes présents dans un mélange complexe et une étape de détection. Les techniques chromatographiques utilisées sont la CCM (Chromatographie sur Couche Mince), la CPG (Chromatographie en Phase Gazeuse), la CLHP ou HPLC (Chromatographie Liquide à Haute Performance) et l’UHPLC (Chromatographie liquide à ultra haute performance).
Chromatographie liquide sur couche mince (CCM) : Au début des années 70, la chromatographie sur couche mince (CCM) est reportée par l’équipe de Gimeno comme la première technique reconnue et recommandée pour la détection des mycotoxines.61 Cette technique permet, en jouant avec les solvants d’élutions, de séparer des mycotoxines en fonction de leurs rapports frontaux (Rf) différents.
Cette méthode a été utilisée pour des analyses unidimensionnelles et bidimensionnelles. Les techniques de détection varient en fonction des mycotoxines à détecter : les substances colorées sont visualisées sous la lumière visible. Les mycotoxines fluorescentes sont examinées sous la lumière UV. Tandis que pour les toxines non fluorescentes des réactifs de pulvérisation spécifiques chromogéniques ou fluorogéniques sont utilisés pour relever des couleurs ou de la fluorescence. L’évolution des technologies a permis à la chromatographie sur couche mince à haute performance (HPTLC «High Performance Thin Layer Chromatography») d’accéder à une analyse rapide, sensible, quantitative et moins consommatrice de solvants que la CCM.
Cependant, cette technique manque de précision et de spécificité surtout lorsque l’on analyse des matrices complexes. De plus, l’appareil de mesure doit être équipé d’un densimètre (instrument pour la mesure de la densité du fluide) qui est très coûteux.
La chromatographie gazeuse (CPG ou GC) : La chromatographie en phase gazeuse est une technique qui peut être couplée à une méthode de détection comme la spectrométrie de masse (MS), la détection par ionisation de flamme (FID) ou la spectroscopie infrarouge (FTIR) pour identifier des substances volatiles issues des mycotoxines.
Elle a été appliquée à l’analyse des mycotoxines dans les années 90 suite aux travaux de Tarter et Scott.66 En 2004, l’équipe japonaise de Tabata a développé une méthode GC/MS pour l’analyse et la détection de la Patuline dans le jus de pomme. Les travaux de Markaki ont permis d’atteindre, avec cette technique, des limites de détection de 5,8 µg/kg de patuline dans les jus de fruits. Malgré les efforts pour simplifier les préparations des échantillons, cette technique requiert une étape de dérivatisation obligatoire avant analyse pour les mycotoxines non volatiles. Cette dérivatisation peut s’effectuer soit par silylation ou par polyfluoroacylation.
La chromatographie liquide à haute performance (HPLC) : L’HPLC peut être utilisée en phase normale ou en phase inverse pour analyser des mycotoxines. Elle a été couplée à différentes méthodes de détection telles que les détections par spectrophotométrie d’absorption mono- ou multilongueur d’onde, la spectrophotométrie en émission de fluorescence (FLD) et la spectrométrie de masse. Ceci donne la possibilité de séparer et purifier une large gamme d’espèces fongiques avec une bonne sensibilité et une bonne sélectivité. L’HPLC-FLD étant particulièrement bien adaptée pour analyser des mycotoxines naturellement fluorescentes, comme les Aflatoxines AFs ou l’Ochratoxine OTA.

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Méthodes d’immobilisation des biorécepteurs sur surface

La nécessité de l’immobilisation des bioéléments de reconnaissance sur une surface dans les tests ELISA ou dans le développement des biocapteurs vient de l’objectif d’obtenir une localisation de la reconnaissance au niveau de l’interface solide-liquide. La technique d’immobilisation doit permettre d’assurer une spécificité de reconnaissance du biorécepteur et sa cible tout en limitant sa dénaturation sur une surface solide. De plus, elle doit garantir l’accessibilité maximale de l’analyte au biorécepteur qui est introduit à une concentration connue. Ceci facilite la séparation et la purification des complexes de reconnaissance des réactifs en excès. D’un point de vue industriel et pratique, la méthode choisie pour immobiliser des biomolécules doit être facilement reproductible à grande échelle et à faible coût. Elle doit assurer une bonne longévité du capteur et si possible la régénération de la surface en vue d’une réutilisation.
Une étape de préconcentration des analytes d’intérêt peut être ajoutée au biocapteur pour améliorer la sensibilité et réduire le risque de faux positif. Différentes méthodes d’immobilisation physico-chimiques, faciles à mettre en œuvre, simples et transposables sont utilisées dans le cadre du développement des biocapteurs qui permettent d’avoir un maximum de cibles biologiques fixées.
Nous distinguons deux catégories : Des méthodes d’immobilisation physiques (l’adsorption et l’inclusion) qui sont basées sur des liaisons faibles, rapides et réversibles.
Des méthodes d’immobilisation chimiques (la réticulation et le couplage covalent) qui sont basées sur des liaisons covalentes. Ce sont, tous deux, des procédés lents et irréversibles.

Applications aux capteurs à base de fluorescence

Phénomène de FRET : Le FRET est un transfert d’énergie non radiatif par interaction dipôle-dipôle entre un donneur d’énergie et un accepteur d’énergie. Dans le cadre de la détection utilisant ce phénomène de FRET, le transfert d’énergie a lieu entre le fluorophore et un autre chromophore, appelé «quencher», qui va dissiper l’énergie qui lui est transmise de façon non émissive.134 Dans ce cas, c’est le fluorophore (F) qui joue le rôle de donneur d’énergie et le quencher (Q) celui d’accepteur d’énergie.
Deux paramètres sont primordiaux pour que le phénomène de FRET soit efficace : le premier consiste dans la distance physique « d » séparant les deux partenaires qui doivent être spatialement proches, la distance pouvant être comprise entre 10 Å et 100 Å. En effet, selon la théorie de Förster, l’efficacité du phénomène de transfert d’énergie FRET décroit proportionnellement à 1/d6 . Il diminue donc rapidement avec la distance entre les deux chromophores Le deuxième paramètre réside dans le recouvrement spectral entre le spectre d’émission du fluorophore et le spectre d’absorption du quencher.
Immunocapteurs à base de fluorescence : Une nouvelle révolution s’est annoncée dans le domaine agroalimentaire et spécifiquement dans la détection des mycotoxines dans les résidus alimentaires. La combinaison entre la nanotechnologie104 et les méthodes de fluorescence ainsi que l’utilisation des immunodosages a joué un rôle dans cette évolution. Ces immunocapteurs décrits sont non seulement en passe de révolutionner les méthodes de détection des mycotoxines mais ils participent également au développement des micropuces. D’ailleurs, nous ne pouvons pas parler de l’évolution des biocapteurs sans porter l’accent sur le rôle crucial des nanomatériaux dans le développement de ces biocapteurs. Plusieurs types de nanomatériaux sont appliqués comme les nanoparticules métalliques (Au/Ag NPs), les quantums dots (QDs), le graphène et ses formes oxydés.

Etapes de fonctionnement du SPIT-FRI

L’élaboration d’un tel dispositif nécessite plusieurs parties indépendantes à étudier. Dans cette partie, nous nous focaliserons sur les étapes distinctes nécessaires pour son développement ainsi que la compréhension du fonctionnement de la méthode SPIT-FRI.
Synthèse du réactif hétérotrifonctionnel appelé « tripode », ainsi que le greffage des analogues de toxines et du fluorophore.
Etude de fonctionnalisation par l’immobilisation du « cross-linker » synthétisé sur un support solide. Activation en présence des anticorps marqués par un quencher. Compétition immunologique par des tests d’affinité anticorps/analogue de toxine et anticorps/mycotoxine en solution. Tests microbiologiques avec des solutions contenant l’analyte à détecter.

Table des matières

Introduction 
A. Généralités sur les mycotoxines
A.I Les différents types des mycotoxines dans la nature 
A.II Réglementation internationale sur les mycotoxines 
B. Méthodes connues pour la détection des mycotoxines
B.I Méthodes analytiques pour la détection des mycotoxines
B.II Méthodes immunochimiques
B.III Les biocapteurs
C. Principe du SPIT-FRI
C.I Etapes de fonctionnement du SPIT-FRI
C.II L’orthogonalité et la chimiosélectivité 
C.III Fonctionnalisation de la phase solide
C.IV Activation
C.V Compétition immunologique
C.VI Réactivation
D. Objectifs du projet de thèse
Chapitre 1 : Synthèse des réactifs multifonctionnels
A. Etat de l’art
A.I Généralités des différents composés hétérofonctionnels décrits dans la littérature
B. Résultats et discussions
B.I Stratégie de la synthèse des tripodes T4-P et T5-P
B.II Synthèse des réactifs hétérobifonctionnels D4-P et D5-P
C. Conclusion 
Chapitre 2 : Application des réactifs multifonctionnels au SPIT-FRI 
A. Etat de l’art
A.I Choix du fluorophore
A.II Analogues de mycotoxines
A.III Les anticorps
A.IV Choix du quencher
B. Résultats et discussion
C. Conclusion
Chapitre 3 : Stratégie de fonctionnalisation de surface 
A. Etat de l’art
A.I Monocouches auto-assemblées (SAM)
A.II Fonctionnalisation d’une surface d’or
B. Résultats et discussion
B.I Stratégie et protocole de fonctionnalisation du tripode T4-R6G
B.II Stratégie et protocole de la fonctionnalisation du tripode T5
C. Conclusion
Conclusion générale et perspectives
Partie expérimentale
Matériels et méthodes

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