SYNDROME DREPANOCYTAIRE MAJEUR
GROUPES SANGUINS ERYTHROCYTAIRES
Les groupes sanguins érythrocytaires peuvent être définis comme l’ensemble des variations allotypiques, génétiquement transmises, détectées par des anticorps à la surface de la membrane érythrocytaire (Figure 1). Le système de groupe sanguin ABO a été le premier découvert en 1900 par Karl Landsteiner, ensuite les systèmes MNS et P1 et enfin après le développement du test à l’antiglobuline permettant la détection des anticorps « non agglutinants », les découvertes des autres antigènes vont s’enchaîner. La Société Internationale de Transfusion Sanguine (SITS) recense aujourd’hui plus de 330 antigènes de groupes sanguins, classés dans 34 systèmes [5]. En fonction de la nature biochimique de leurs épitopes, on distingue classiquement des systèmes dont les molécules sont de nature glucidique et portées par des glycoprotéines ou des glycolipides (ABO par exemple) et des systèmes dont les molécules sont de nature peptidique et portées par des protéines ancrées dans la membrane érythrocytaire via un domaine (Duffy par exemple) ou plusieurs segments (Rhésus par exemple) transmembranaires (TM).
Systèmes de groupes sanguins de nature glucidique
Système ABO
La détermination des groupes sanguins est basée sur la présence ou l’absence des antigènes A et/ou B à la surface des hématies et la présence « régulière » d’agglutinines « naturelles » anti-A et anti-B correspondant aux antigènes absents des hématies. Le groupage sanguin ABO comporte donc deux étapes : la recherche des antigènes érythrocytaires à l’aide de sérums-tests monoclonaux anti-A, anti-B, anti-A, B (Beth-Vincent) et la recherche des anticorps plasmatiques à l’aide d’hématies-tests A et B (Simonin). Les quatre phénotypes érythrocytaires ABO principaux se déduisent selon ces règles (Tableau I) [4]. Les antigènes A et B ne sont pas produits directement par l’expression d’un gène, mais sont plutôt définis par des sucres N-acétyl-galactosamine (GalNAc) pour l’antigène A et Galactose (Gal) pour l’antigène B, attachés à un ou jusqu’à quatre différents types de chaînes d’oligosaccharides, qui elles sont portées par des glycosphingolipides et des glycoprotéines [7]. Le locus ABO a été localisé en 1976 sur le bras long du chromosome 9 (9q34.1-q34.2). En 1990, Yamamoto a cloné le gène ABO qui comprend sept exons et six introns. Les exons 6 et 7 codent 91 % des acides aminés (aa) du site catalytique de l’enzyme (Figure 2). Les groupes sanguins ABO sont essentiellement impliqués en clinique transfusionnelle, où le respect de leur compatibilité est obligatoire. En effet, les anticorps du receveur peuvent, après fixation sur les hématies incompatibles transfusées, aboutir à un choc hémolytique avec coagulation intra-vasculaire disséminée [4]. Phénotypes Génotypes Antigène(s) présent(s) sur le globule rouge Anticorps présent (s) dans le plasma A A/A ou A/O A Anti-B B B/B ou B/O B Anti-A O O ni A, ni B Anti-A et anti-B AB AB A et B ni anti-A, ni anti-B 6 Biosynthèse ABH Biosynthèse dans les érythrocytes Leur synthèse, qui se déroule dans le réticulum endoplasmique et dans l’appareil de Golgi, comporte trois étapes : l’initiation, l’élongation et la terminaison. L’étape d’initiation est représentée par la fixation du premier motif monosaccharidique sur la molécule protéique ou lipidique. En ce qui concerne les glycoprotéines, deux types de liaisons peuvent être retrouvés. Des liaisons N-glycosidiques caractérisées par la fixation d’un N-acétyl-glucosamine (GlcNAc) à une asparagine et des liaisons Oglycosidiques caractérisées par la fixation d’un N-acétyl-galactosamine (GalNAc) à une sérine ou une thréonine. En ce qui concerne les glycosphingolipides, ils associent un élément glucidique à une céramide. En fonction de la chaîne glucidique, on distingue trois séries de glycolipides : lacto-, globo- ou gangliocéramide. Les antigènes A, B et H prédominent sur la série de type lacto- bien qu’ils puissent être détectés sur les autres. L’étape d’élongation est caractérisée par l’adjonction successive et répétée du motif galactose (Gal) et N-acétyl-glucosamine : Galβ 1→ 4 et GlcNAcβ 1→ 3. Enfin, l’étape de terminaison représente l’adjonction des sucres terminaux spécifiques des antigènes A, B et H sur la partie périphérique de ces chaînes qui est constituée de précurseurs disaccharidiques dont six types ont été identifiés. Dans le tissu érythroïde, la plupart des déterminants A, B et H sont composés d’oligosaccharides de type 2. Toutefois, ces antigènes peuvent aussi s’exprimer, en petite quantité, sur des chaînes de type 4 portées uniquement par des glycolipides. De plus, si l’hématie est de groupe A, la biosynthèse peut être réalisée à partir de chaînes de type 3 répétitif. Ce type 3 (Galb1-3GalNAca1-R) ne peut exister que sur une hématie A dans la mesure où sa synthèse repose sur l’adjonction d’un Gal au GalNAc d’un A type 2. L’étape subterminale est caractérisée par l’addition d’un fucose sur ces précurseurs qui aboutit à la formation de l’antigène H dit de type 2, 3 ou 4 en fonction du disaccharide de base. Enfin, la poursuite de la biosynthèse est fonction du génotype ABO du sujet. Si l’individu possède un allèle O en double dose, tout s’arrête là et l’hématie n’exprime que de l’antigène H à sa surface. Si l’individu possède au moins un gène A et/ou B les glycosyltransférases correspondantes interviennent pour aboutir à la biosynthèse des antigènes A et B. L’alpha (1,3) Nacétylgalactosaminyltransférase codée par l’allèle A2 catalyse la synthèse de l’antigène A par fixation d’une N-acétylgalactosamine sur le carbone 3 du galactose 7 des déterminants H de type 2 et de type 4. Si l’allèle A1 est présent, l’enzyme aura la capacité de convertir également les substrats H de type 3 répétitif supports de l’antigénicité A. L’alpha (1,3) galactosyltransférase codée par l’allèle B catalyse la fixation d’un galactose et aboutit à la formation de l’antigène B (Figure 3) [3 ;4]. Biosynthèse dans les autres tissus Des glycoprotéines et des glycosphingolipides porteurs d’antigènes ABH sont présents dans le plasma quel que soit le statut sécréteur de l’individu. Si celui-ci est porteur de l’allèle Se, les antigènes sont synthétisés à partir de disaccharides de type 1 et 2 alors que si cet allèle est absent (non sécréteur) seuls les types 2 sont utilisés. Très rapidement après leur découverte à la surface des globules rouges, les antigènes ABH ont été mis en évidence dans la salive, puis dans de nombreux tissus humains, en particulier dans les cellules endothéliales et épithéliales. Les lymphocytes et les plaquettes expriment des antigènes ABH qui ont été acquis, par adsorption, à partir du plasma puisque aussi bien le gène du fucose (FUT), FUT1 que FUT2 sont inactifs dans ces cellules. Dans les tissus dérivés du mésoderme et de l’ectoderme (tissu hématopoïétique, cellules endothéliales, épiderme, glomérules rénaux et neurones sensoriels), les antigènes ABH sont contrôlés par les gènes FUT1 (H) et ABO. Ils s’expriment sur des substrats de type 2. Dans les tissus dérivés de l’endoderme (muqueuse digestive, tractus respiratoire, épithélium urinaire et rénal) les antigènes ABH sont de type 1 et 2 et contrôlés par le locus FUT2 (Se). Les antigènes Lewis sont exprimés sur des substrats de types 1 et 2 et contrôlés par le locus FUT3 Lewis (LE) .
INTRODUCTION |