Syndrome de Détresse Respiratoire Aigu chez le
militaire en opérations extérieures
Le SDRA en OPEX
L’armée française projette au cours des OPEX des moyens humains, dont le SSA assure le soutien sanitaire et l’évacuation médicale en métropole (Annexe 1). Ce milieu d’exercice est caractérisé par la rusticité du terrain, ainsi que l’isolement géographique (Annexe 2). Le blessé de guerre est un traumatisé sévère le plus souvent lié à un traumatisme pénétrant. Les blessures de guerre sont hémorragiques ce qui impose des transfusions massives. Selon les données de la littérature, le SDRA chez le blessé de guerre est fréquent avec une incidence évaluée de 26 à 33% et une mortalité globale considérable de 30 à 40 % (1,2). L’origine du SDRA est multi factorielle. Les facteurs conduisant à ce syndrome incluent une atteinte pulmonaire directe par des traumatismes thoraciques pénétrants, des compressions atmosphériques de type blast, des contusions pulmonaires ; et indirecte : la transfusion massive, et le SIRS post traumatique. Edens et al. ont mis en évidence les facteurs prédictifs de SDRA dans une étude prospective observationnelle américaine (2). Dans ce travail, 33% de leurs patients polytraumatisés développaient un SDRA. Les facteurs de risque indépendants d’un SDRA étaient un ISS élevé, la présence d’un traumatisme thoracique pénétrant, la nécessité d’une transfusion massive. La brûlure est également un facteur de risque : 10% des blessés de guerre sont brûlés (3–5) ; et plus de 32% d’entre eux vont développer un SDRA avec une mortalité de 16,5% (6,7). La présence d’un SDRA chez le blessé de guerre est associée à une surmortalité : Un travail de Belencky et al. montrait parmi 876 blessés de guerre brûlés une mortalité significativement plus importante pour ceux qui développaient un SDRA modéré et sévère ; respectivement un OR de 4,42
Moyens de prise en charge du SDRA en OPEX
La définition du SDRA a été réactualisée lors de la conférence de consensus de Berlin de 2012 (9). Compte tenu de la catégorisation du SDRA en 3 niveaux de gravité (mineur, modéré, sévère), il a été proposé une stratification de l’intensité de la stratégie ventilatoire (10) : – Pour tous : une ventilation protectrice (11). Elle consiste en une mise en place de ventilation mécanique à volumes courants limités à 6-8mL/kg pour réduire le risque de volotraumatisme, une PEP supérieure à 5 cmH20 pour limiter l’atelectrauma, et enfin un monitorage de la pression de plateau pour limiter le risque de barotrauma (6,8,12,13). – Pour les SDRA modérés : une curarisation, une PEP plus élevée. – Concernant les SDRA plus sévères : le DV, NOi, l’almitrine, et l’ECMO veino veineuse. (Annexe 3). En OPEX, les moyens en dotation du rôle 2 permettent la mise en place d’une stratégie de ventilation protectrice (Ventilateur de type Elysée 350 – Annexe 4). Pour les SDRA modérés et sévères, la curarisation est disponible. Le cisatracurium est en dotation. C’est cette molécule qui a été étudiée dans l’étude ACURASYS démontrant le bénéfice de la curarisation chez les patients en SDRA précocement pour une durée de 48 heures (14). Un débat persiste pour savoir s’il s’agit d’un bénéfice lié au contrôle des volumes courants délivrés au cours de la phase précoce du SDRA et donc une limitation du volotraumatisme (le patient non curarisé peut « déclencher » et inspirer des volumes courants élevés au cours de ces efforts inspiratoires), ou s’il s’agit d’un effet antiinflammatoire du cisatracurium (15). L’essai plus récent ROSE remettait en question l’utilisation systématique de cisatracurium chez des patients présentant un SDRA avec un rapport PaO2/FiO2 inférieur à 150 (16). Celle-ci ne diminuait pas la mortalité chez ces patients chez qui l’optimisation de la ventilation, le niveau de PEP, ainsi que le recours au 6 décubitus ventral étaient différents de l’étude ACURASYS.
Problèmes posés par la prise en charge du SDRA en OPEX
. Le recours au décubitus ventral a également été montré bénéfique au cours du SDRA. L’étude PROSEVA de Guérin et al. montrait qu’au moins une séance de 18 heures en cas de rapport PaO2/FiO2 inférieur à 150 permettait de diminuer la mortalité (17). L’amélioration de l’hématose est probablement liée à un recrutement des zones pulmonaires postéro basales conduisant à une baisse du strain et du stress alvéolaire. Cependant, ce traitement postural n’est pas réalisable en OPEX du fait d’une ergonomie non favorable (Annexe 5). Cependant, d’autres thérapeutiques ont été étudiées : – le NOi et l’almitrine améliorent l’hématose sans diminuer la mortalité des patients atteints de SDRA modérés à sévères (18,19). Dans l’expérience française, ces moyens ne sont pas disponibles en opération extérieure pour des raisons logistiques (Annexe 5). – L’ECMO VV. Chez des patients présentant un rapport PaO2/FiO2 inférieur à 50 mmHg pendant plus de 3 heures, ou bien inférieur à 80 mmHg pendant plus de 6 heures, l’ECMO VV diminuait la mortalité mais de manière non significative (20).
But de l’étude
L’objectif primaire de cette étude était d’évaluer l’incidence et la sévérité des SDRA chez les patients évacués d’opération extérieure. Les objectifs secondaires étaient d’évaluer les moyens disponibles et mis en œuvre pour prendre en charge ces SDRA, la durée de ventilation invasive, la durée de séjour en réanimation ainsi que la mortalité à 1 mois et 3 mois.
1. Introduction |