Symptômes cliniques propres à l’ARSACS
Les symptômes cliniques liés à l’ARSACS ont fait l’objet de peu d’études. Récemment, en 2013, une recherche menée par Duquette et al. (2013) sur les symptômes cliniques de 71 patients atteints de l’ARSACS a vu le jour. Durant plusieurs années, tous les patients ont été suivis à la clinique neuromusculaire de Saguenay, par le neurologue Jean Mathieu. L’étude présente l’analyse des signes cliniques de l’ARSACS lors de la première consultation, avant l’âge de 18 ans, et à l’âge de 18 ans.
Les symptômes cliniques de l’ARSACS conduiront à une perte de capacité physique qui, à terme, affectera la capacité fonctionnelle et, par conséquent, la qualité de vie (Stevenson, 2010). Son évolution est lente et diffère beaucoup entre les individus (Duquette et al., 2013). Dès le tout jeune âge, il est possible de remarquer des chutes fréquentes et une démarche non coordonnée lors de la locomotion bipède de l’enfant. Ce sont les premiers symptômes de l’ataxie qui continueront de se développer (Bouchard et al., 1998; Dupré et al., 2006; Duquette et al., 2013). En fait, les symptômes ataxiques tels que l’ataxie appendiculaire (absence de coordination des mains et oeil-main) ou la démarche ataxique sont présents chez 65% des patients, avant 18 ans. Au même âge, les symptômes pyramidaux sont remarqués chez 80% des personnes sous forme d’augmentation des réflexes tendineux (hyper réflexie tendineuse) ou de spasticité et contribuent au mauvais patron moteur lors de la marche (Duquette et al., 2013). L’étude de Duquette et al. (2013) dénote une présence moins marquée des symptômes tels que la spasticité (45%) et la réponse cutanée plantaire (37,5%) et plus importante de l’hyper-réflexie (67,5%) chez les enfants. Parmi les patients de l’étude, trois ne possèdent aucun signe de spasticité avant l’âge de 18 ans. Toutefois, ceux-ci sont causés par la même mutation génétique c.8844delT.
L’hyper-réflexie tendineuse se remarque en premier et n’est pas toujours accompagnée de la réponse cutanée plantaire (signe de Babinski) et de la spasticité qui se présentent plus tardivement. Elle aurait donc un rôle particulier dans les problèmes de locomotion à l’enfance (Duquette et al., 2013). Généralement, les signes pyramidaux et cérébelleux tendent à progresser, atteignant 92,5% des jeunes vers l’âge de 10 ans. À l’âge scolaire, l’enfant aura de la difficulté avec sa motricité fine (écriture et travaux manuels) et sa motricité globale (saut, course, escalier). Il sera susceptible d’avoir besoin d’assistance supplémentaire ou de développer une difficulté d’apprentissage modérée (Bouchard et al., 1998; Dupré et al., 2006; Duquette et al., 2013). Nonobstant ces difficultés, il ne semble pas y avoir de retard mental observé à l’âge adulte (Bouchard et al., 1998; Bouhlal et al., 2011; Dupré et al., 2006; Takiyama, 2006).
À l’adolescence, la spasticité et une raideur des membres inférieurs rendront le patron de marche problématique. En plus, de nouveaux signes cérébelleux tels que la dysarthrie et le nystagmus feront leur apparition (Duquette et al., 2013). Certaines déformations des pieds et des mains (contractures) se manifesteront (Bouchard et al., 1998). Ce sont les premiers signes de la neuropathie axonale qui s’accentueront vers la fin de l’adolescence. La perte proprioceptive et la pallesthésie6 seront perçues à l’âge adulte (Duquette et al., 2013). Les problèmes de locomotion des gens atteints de la maladie seront prédominants et atteindront plusieurs stades. Pour un cas typique, suite à l’adolescence, le jeune adulte utilisera la canne ou le déambulateur. Puis, un peu avant ses 40 ans, la personne devra avoir recours au fauteuil roulant (Bouchard et al., 1998; Bouhlal et al., 2011). Une diminution de l’espérance de vie est également remarquée chez cette clientèle (Bouchard et al., 1998).
Ataxie
L’ataxie est un manque de coordination remarqué des membres supérieurs et inférieurs. Elle affecte la performance du contrôle volontaire du mouvement. C’est un symptôme cérébelleux qui se manifeste hâtivement dans l’ARSACS (Duquette et al., 2013; Thiffault et al., 2013). Il est le résultat d’une atteinte du système nerveux central (SNC), plus particulièrement du cervelet et de la moelle épinière (voie spinocérébelleuse), engendrant un manque de coordination des mouvements volontaires. Dans l’ARSACS, l’ataxie s’exprime principalement par une ataxie appendiculaire et une démarche ataxique qui se développeront tout au long de l’enfance. Le cervelet a pour fonction de planifier et de programmer le mouvement, selon les messages afférents reçus. Comme l’expliquent Girard et al. (2012), « les cellules de Purkinje transforment les signaux afférents excitateurs en signaux inhibiteurs efférents qui ciblent les neurones des noyaux profonds du cervelet et des noyaux vestibulaires. Ces voies sont une condition préalable pour la fonction motrice normale, et même des perturbations mineures causent des mouvements non coordonnés et l’ataxie ». Elles jouent un rôle clef dans le contrôle moteur des influx nerveux sortant du cervelet (Dupré et al., 2006).
Les voies extrapyramidales correspondent principalement aux structures du tronc cérébral qui agissent de pair avec le cervelet pour coordonner la posture, l’équilibre et la marche. Les dommages d’une structure de la voie descendante du tronc cérébral, engendrant une perte de fonction, sont compensés par une activité plus importante de la voie corticospinale et vice-versa (Vander, Sherman & Luciano, 2001). Ce phénomène conduit à l’apparition de certains symptômes dont la spasticité.
Syndrome du motoneurone supérieur ou syndrome pyramidal
Le syndrome du motoneurone supérieur est constitué d’un ensemble de symptômes. Il est causé par une atteinte du neurone moteur supérieur appartenant à la voie corticospinale (Mukherjee & Chakravarty, 2010). Celle-ci est constituée d’axones (voie nerveuse pyramidale) provenant de certaines structures du cortex cérébral dont le cortex moteur (aire 4), l’aire prémotrice (aire 6) et l’aire motrice supplémentaire (aire 6) (Bear, Connors & Paradiso, 2007; Donoghue & Sanes, 1994; Mukherjee & Chakravarty, 2010). La spasticité n’apparaît pas lorsque seule la voie corticospinale est lésée. Toutefois, jumelée à l’atteinte des voies descendantes du cortex cérébral et des ganglions de la bases, par les voies réticulospinales (médial et dorsal) et vestibulospinales, elle provoque la spasticité (Bhakta, 2000; Mukherjee & Chakravarty, 2010; A. D. Pandyan, Price C. IM., Barnes, M. P., Johnson, G. R., 2003). Ces aires motrices constituent la base du mouvement volontaire et acheminent les influx efférents par les motoneurones alpha jusqu’aux muscles squelettiques. Une perte d’influx nerveux de la part du SNC, créé par la dégénération de la voie corticospinale (Martin et al., 2007), perturbe les structures supramédullaires et médullaires. Ceci affecte les mouvements volontaires et rend difficiles les gestes fonctionnels. Le syndrome pyramidal comprend habituellement plus d’un symptôme affectant la neuromotricité.
Spasticité
La définition et les mécanismes physiopathologiques sous-jacents à la spasticité posent encore une problématique importante au sein du milieu scientifique (Girard et al., 2012). Tout d’abord, voici une introduction à la spasticité, par la citation de Lance (1980), qui représente un incontournable parmi les auteurs traitant du sujet. Elle y est décrite comme « un trouble moteur caractérisé par une augmentation sensible de la vitesse des réflexes d’étirement toniques (hypertonie musculaire), associée à une exagération des réflexes tendineux, lié à l’hyperexcitabilité de l’arc réflexe myotatique, formant une composante du syndrome pyramidal ». La recherche sur la spasticité relative à l’ARSACS est peu élaborée. Toutefois, celles portant sur des pathologies comprenant une étiologie comparable à l’ARSACS et provoquant les symptômes de spasticité permettent de bien documenter le phénomène. Entre autres, on y trouve la lésion de la moelle épinière (Adams & Hicks, 2011; Dietz & Sinkjaer, 2007), les accidents vasculaires cérébraux (Bohannon, 2007; Logan, 2011; Teixeira-Salmela, Olney, Nadeau & Brouwer, 1999), l’infirmité motrice cérébrale (Ahlborg, Andersson & Julin, 2006; Reid, Hamer, Alderson & Lloyd, 2010; Sakzewski et al., 2012) , la sclérose en plaques (Barnes, Kent, Semlyen & McMullen, 2003; Petajan et al., 1996) et diverses formes de dystrophie (dystrophie musculaire, dystrophie musculaire congénitale et dystrophie musculaire de type 1) (Fortin, en rédaction; Mercuri & Longman, 2005).
INTRODUCTION |