SUSPENSION DES IMPORTATIONS DE PRODUITS AVICOLES ET COMPETITIVITE

SUSPENSION DES IMPORTATIONS DE PRODUITS AVICOLES ET COMPETITIVITE

INTRODUCTION

 En Afrique, les productions avicoles sont encore dominées par le système traditionnel, du fait de sa large expansion en milieu rural. Les effectifs sont estimés à 400 000 000 en Afrique de l’Ouest (OCDE, 2008). Au Sénégal, l’aviculture est pratiquée dans toutes les régions où, l’effectif des volailles familiales représente plus de 80% du cheptel total (DIREL, 2006). Les productions de volaille ont dans l’ensemble suivi une évolution à la hausse, en particulier la volaille industrielle à la faveur des mesures prises par l’Etat, visant à protéger la filière, et de la politique d’arrêt des importations de produits avicoles pour cause de grippe aviaire. Ainsi, l’effectif de la volaille familiale a augmenté de 0,3 %, tandis que celui de la volaille industrielle a crû de 70% en passant de 7 500 000 têtes en 2006 à 13 000 000 têtes en 2007. La production de viande est passée en 2006 de 102 591 tonnes à 98 808 tonnes en 2007 soit une baisse de 3,7%. Cette situation est liée à la baisse du taux d’abattage des bovins. Car la production est essentiellement composée de viande de bovins (63%), d’ovins (20%) et de caprins (12%) (DIREL, 2007). Dans un tel contexte, l’élevage à cycle court de volaille occupe une place de choix, compte tenu de son importance socio-économique, d’une part, et d’autre part, de sa capacité à produire de la viande en quantités importantes et en un temps assez court. De ce fait l’aviculture qui est une source de produits carnés, permet également de satisfaire les besoins en protéines animales de la population qui est en constante augmentation. Malgré son importance, la filière avicole n’occupe pas encore une place importante dans la politique du gouvernement en matière d’élevage alors qu’elle constitue un maillon dynamique de l’économie nationale (GAYE, 2004). En effet, la filière avicole est confrontée à des contraintes de différentes natures. Elle ne bénéficie pas d’un secteur « aval » développé avec notamment des unités d’abattage, de transformation et de conditionnement (emballage, présentation, qualité, etc.) de poulets de chair. Le risque de pandémie de grippe aviaire a poussé les autorités à suspendre les importations de produits avicoles venant de pays infectés. Mais la nature de la mesure de suspension et le contexte de la mondialisation, exigent de la filière avicole d’être plus compétitive pour sa survie. Avant la suspension des importations de produits avicoles, la filière a connu d’importantes difficultés liées à l’envahissement du marché par les découpes de poulets qui a eu des conséquences graves sur l’économie de la filière, en l’occurrence perte d’emplois et de parts de marché,, fermeture d’unités 2 industrielles, etc.). Toutefois, l’aviculture moderne s’est considérablement développée au cours ces dix dernières années principalement en périphérie des grands centres urbains à la suite de la suspension des importations de volailles. La relance de l’aviculture moderne s’explique par l’augmentation de 23% du nombre de poussins mis en élevage entre 2005 et 2006 (CNA, 2006). Cette croissance a été favorisée par les opportunités de mise en marché offertes à la production locale suite à l’interdiction des importations de produits avicoles en raison de la grippe aviaire. Ce travail est structuré sur deux parties. Une première partie qui présente la problématique de l’étude, la filière avicole au Sénégal et la grippe aviaire. Dans cette partie, le premier chapitre décrit, la filière, ses acteurs et les dynamiques qui y sont développées. Le deuxième chapitre s’intéresse à l’historique de la grippe aviaire, les risques sanitaires et donne un état des lieux actuels au Sénégal. La deuxième partie de ce travail explique la méthodologie utilisée et les résultats obtenus. Elle est composée d’un premier chapitre qui décrit comment les recherchées sont effectuées en insistant sur l’approche et les méthodes d’investigations. Le deuxième chapitre de la deuxième partie analyse et discute les résultats obtenus et fait des recommandations aux différents acteurs concernés par la problématique.

 PREMIERE PARTIE : LA FILIERE AVICOLE AU SENEGAL PROBLEMATIQUE 

La grippe aviaire a affecté la production mondiale, en dépit d’une progression de 1,5 % en 2006, à 83,5 millions de tec. (OFIVAL, 2006). Cette dynamique a été portée en premier lieu par les producteurs des régions épargnées par l’épizootie, à savoir les Etats-Unis et le Brésil. Les baisses de consommation et les barrières sanitaires qui ont accompagné la propagation de l’épizootie d’influenza aviaire ont pesé sur les échanges internationaux de viandes de volailles en 2006. Avec un volume d’environ 7,45 millions de tec (9% de la production mondiale), le marché s’est contracté de 1,6 % par rapport à l’année 2005(GCRAI, 2006). Malgré cette baisse du volume des échanges, la consommation individuelle mondiale de viandes de volailles est restée presque constante (12,7 kg/habit/an en 2005, 12,8 kg/habit/an en 2006). Sur le plan sanitaire, l’émergence ou la réémergence d’autres pathologies aviaires constitue un risque sérieux d’apparition de maladies zoonotiques. Ce risque est favorisé par l’absence de normes dans l’implantation des fermes avicoles, un environnement souvent polluant lié aux activités avicoles et la pauvreté. 3 Au plan économique, l’importation massive de découpes de poulets à des prix très concurrentiels contribue à désorganiser les filières avicoles locales naissantes. Selon la FAO en 2008, environ 50% des poussées des importations de volaille enregistrées dans les pays en développement se produisent en Afrique, dont 24 % en Afrique occidentale, 11 pour cent en Afrique centrale et, 10 pour cent en Afrique australe. Bien que l’Afrique ne représente que 5% du commerce avicole, l’impact des importations, pourrait être importante car la consommation augmente de façon spectaculaire depuis 1995 et est passée de 8% à quelque 18% en 2006. Malgré tout, la contribution de la filière avicole au PIB de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) reste relativement importante et elle est estimée à cent milliards de F CFA en 2000 sans compter son apport sur le plan social en termes de lutte contre la faim et la pauvreté. Au Sénégal, l’aviculture sénégalaise est aussi en pleine mutation depuis la fin des années 80. Elle a connu une rapide croissance incitant les privés (accouveurs, provendiers, éleveurs) à augmenter considérablement leurs investissements dans cette filière. Mais, cet essor de la filière avicole a été brutalement freiné par la hausse des importations de viande congelée. En effet, le Sénégal importait 1150 tonnes de viandes de volaille congelées en 1999 (CNA, 2000). En 2000, les importations ont doublé atteignant 2400 tonnes. (CNA, 2001). Cette brusque augmentation s’est poursuivie les années suivantes avec une croissance annuelle des volumes importés entre 50 et 110% (AMBASSADE DE FRANCE, 2000). En 2005, avec l’avènement de l’influenza aviaire, le Gouvernement sénégalais a décidé de suspendre les importations de produits avicoles en provenance des pays atteints. Cette situation a relancé la filière poulet de chair en favorisant un redémarrage des élevages (NDIAYE, 2006). Ainsi en 2007, la production de poussins a atteint environ 13 000 000, d’unités soit une augmentation de 35% comparativement à 2006 (CNA, 2007). Dans ce contexte de suspension, l’aviculture se trouve confrontée à une série de défis telles que sa compétitivité, sa durabilité, l’existence d’un minimum de biosécurité et sa rentabilité pour continuer de rester un des leviers de promotion socio-économiques. En effet, la compétitivité des filières agricoles est définie comme la capacité des acteurs de la filière de bâtir une stratégie leur permettant de conquérir et de maintenir sur le long terme des parts de marché aussi bien sur le plan national qu’à l’étranger (FRAVAL, 2000). Pour une meilleure compétitivité de la filière, deux déterminants devront être maitrisés : le prix et la qualité des poulets de chair commercialisés. Ainsi la 4 compétitivité donne une appréciation positive d’une politique économique nationale qui privilégie l’achat à l’extérieur de produits relativement peu chers et la production nationale de produits fortement valorisés par le marché international. De même, le besoin de biosécurité alimentaire et agricole s’est accru avec la mondialisation de l’économie, le développement rapide des communications, des transports et du commerce. Au plan international, c’est l’Accord sur l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires ou Accords SPS de l’OMC qui fournit la couverture la plus complète à cet égard. Le terme «biosécurité» a été largement utilisé dans le débat sur la lutte contre la grippe aviaire. Il est décrit soit comme une situation idéale dans laquelle des mesures efficaces sont mises en œuvre pour prévenir et contrôler la propagation du virus, soit comme l’approche ou les principes utilisés pour parvenir à cette situation. La biosécurité dans le secteur avicole est en effet mise en œuvre de manière progressive et selon un ordre d’importance décroissante ; les risques principaux sont traités en priorité. Dans le cadre de ce travail la biosécurité est définie comme l’ensemble des mesures de prophylaxie sanitaire et médicale, des mesures structurelles (pédiluves) et des autres mesures de prévention (circulation, achat de masque, tenues, bottes). Le présent travail vise l’analyse des rapports entre activités de production de poulet de chair, biosécurité et compétitivité dans le contexte de suspension des importations. Il s’agit de déterminer si la suspension des importations est indépendante de la compétitivité, d’une part et, d’autre part, d’évaluer les niveaux de biosécurité des exploitations avicoles.

 CHAPITRE 1 : PRESENTATION DE LA FILIERE AVICOLE SENEGALAISE

 Selon la FAO (REVUE DU SECTEUR AVICOLE, 2007), il existe quatre secteurs de productions avicoles dans le monde en fonction de leur niveau de biosécurité et de leur niveau d’intégration. Ces quatre secteurs sont : Secteur 1: système industriel et intégré avec un haut niveau de biosécurité et des oiseaux ou produits vendus dans des circuits formels (exemple des fermes qui sont une partie une intégration de leurs exploitations de poulets de chair avec des manuels de procédures standards de biosécurité clairement définis et exécutés). Ce système intensif commence à se développer. Il regroupe moins d’une dizaine de producteurs presque tous installés à Dakar. Toutefois, un aviculteur intensif est installé à Saint-Louis (260 Km au nord de Dakar) et exploite un cheptel de 5 ponte d’environ 30 000 sujets. Le nombre de ces éleveurs n’a pas beaucoup varié au cours des cinq dernières années. Secteur 2: Système commercial d’aviculture avec un niveau modéré à élevé de biosécurité et des oiseaux ou produits destinés habituellement au marché local (exemple des fermes avec des oiseaux en permanence élevés en confinement; empêchant rigoureusement tout contact avec d’autres volailles ou faune sauvage). Ce secteur de haute production regroupe l’essentiel des aviculteurs dits du secteur moderne (Plus de 80% des effectifs avicoles élevés). Les producteurs de ce groupe se rencontrent surtout dans la zone des Niayes de Dakar et de Thiès. Le plus souvent, ce type d’élevage est pratiqué par des salariés ou des privés qui engagent des fermiers pour s’occuper de la gestion de leurs fermes. Secteur 3: Système commercial d’aviculture avec un niveau faible à minimal de biosécurité et des oiseaux ou produits vendus au niveau des marchés de volailles vivantes (exemple une exploitation de pondeuses en cage avec des oiseaux dans des logements ouverts; une ferme avec des oiseaux ayant accès au plein air; une ferme où sont élevés des poulets et des palmipèdes). Les élevages semi intensifs et ou élevages amateurs de volaille se rencontrent essentiellement dans les habitations en centre-ville dans les quartiers périphériques des grandes villes, et autour de quelques autres agglomérations et communes rurales. Ce type d’élevage est pratiqué également par des salariés et des entrepreneurs ou exerçant dans le tertiaire qui engagent des fermiers comme ouvriers agricoles pour s’occuper de la gestion de leurs fermes. Secteur 4: Élevage villageois et de basse-cour avec un niveau minimal de biosécurité et des oiseaux ou produits consommés localement. Ce type d élevage est pratiqué dans tout le pays car ne nécessitant pas d’efforts et adapté à nos climats chauds. Au Sénégal, l’aviculture comprend une traditionnelle ou familiale et une autre dite semi-industrielle ou moderne qui toutes se retrouvent dans des quatre secteurs. 

AVICULTURE TRADITIONNELLE OU FAMILIALE

 L’élevage avicole traditionnel est réparti dans tout le territoire. Il est surtout pratiqué en milieu rural mais aussi en zone périurbaine de Dakar. Cette activité correspond à l’élevage de la poule commune ou poule domestique appelé Gallus gallus domesticus de petite taille, très rustique, vigoureuse à la chair bien appréciée. Cette espèce de volailles s’est parfaitement adaptée aux dures conditions climatiques et environnementales défavorables de la zone soudanosahélienne. Au Sénégal, on trouve selon les régions 5 à 20 poules en moyenne par exploitation (GUEYE, 1997). 6 L’aviculture familiale constitue une importante composante de l’économie agricole et des ménages. Elle contribue également à une génération de revenus pour les petits producteurs généralement dotés de peu de ressources, particulièrement les femmes (GUEYE, 2002). Cependant, il n’y a jamais eu de recensement sur lequel s’appuyer pour voir l’évolution pendant ces cinq dernières années du cheptel rural. L’effectif est seulement estimé à hauteur de 21 millions (DIREL 2004). L’aviculture familiale n’a pas toujours bénéficié d’une plus grande attention de la part des autorités ; mais un début de prise en charge par ces dernières est noté à travers des campagnes nationales de vaccination des volailles contre la maladie de Newcastle diligentées par le Projet d’appui à l’élevage (PAPEL). Cette pathologie est la plus fréquente en milieu rural et est responsable de beaucoup de mortalités chez la volaille traditionnelle. 

AVICULTURE SEMI-INDUSTRIELLE OU MODERNE

 L’aviculture semi-industrielle a débuté dans les années 60 et a connu un essor considérable à partir des années 80 (OUANTINAM, 2001). Elle est localisée surtout dans la périphérie des grandes villes comme Dakar, Thiès et Saint-Louis. Ce type d’aviculture se caractérise par l’élevage des volailles de souches exotiques. Elle est surtout concentrée dans la zone agro-écologique des Niayes. La région de Dakar abrite plus de 80% des activités, la région de Thiès environ 15% et la région de Saint-Louis 3% (TRAORE, 2006). Elle enregistre de bonnes performances comparables, chez certains éleveurs, à celles obtenues dans les pays développés à climat tempéré: un poids moyen de 1,5 à 2 kg en 45 jours d’élevage pour les poulets de chair et une ponte annuelle qui varie entre 260 et 280 œufs par poule et par année de ponte (RIDAF, 2006). La zone des Niayes présente, durant certaines périodes de l’année, des conditions climatiques favorables presque identiques à celles d’Europe et d’Amérique du Sud d’où proviennent ces souches utilisées. La filière avicole dite moderne compte actuellement un effectif de 8 millions de sujets composé de poulets de chair et de poules pondeuses réformées (CNA, 2006). 

Table des matières

INTRODUCTION
PROBLEMATIQUE
CHAPITRE 1 : PRESENTATION DE LA FILIERE AVICOLE SENEGALAISE
1.1. AVICULTURE TRADITIONNELLE OU FAMILIALE
1.2. AVICULTURE SEMI-INDUSTRIELLE OU MODERNE
1.2.1. Historique de l’aviculture semi-industrielle
1.2.2. Importance socio-économique
1.2.3. Contraintes sanitaires
1.2.4. Les acteurs de la filière avicole semi-industrielle
1.2.5. Evolution de la production de la viande de poulet de chair
1.2.7. Intégration de la filière poulet de chair
CHAPITRE 2. HISTORIQUE DE LA SUSPENSION DES IMPORTATIONS
2.1. RISQUES DE PANDEMIE DE GRIPPE AVIAIRE
2.2. SITUATION ACTUELLE
CHAPITRE 3 : CONCEPTS ET METHODE DE RECHERCHE
3.1. CARACTERISATION DE LA ZONE D’ETUDE
3.1.1. Localisation et caractéristiques physiques
3.1.2. Dynamique démographique
3.2. CONCEPTS ET DEFINITIONS
3.2.1. Approche filière
3.2.2. Analyse de la rentabilité
3.3. METHODES DE RECHERCHE
3.3.1. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE ET COLLECTE DE DONNEES STATISTIQUES
3.2.2. ENTRETIENS SEMI-DIRECTIFS
3.3.3. ENQUETES DE TERRAIN
3.3.4. TRAITEMENT ET ANALYSE DES DONNEES
CHAPITRE 4 : RESULTATS ET DISCUSSIONS
4.1. TYPOLOGIE DES EXPLOITATION
4.2. ESTIMATION DES COUTS
4.2.1. COUTS DE PRODUCTION
4.2. 2. COUTS DE BIOSECURITE
4.3. RENTABILITE ET COMPETITIVITE DES ELEVAGES
4.3.1. COMPTES DE RESULTAT
4.3.2. ANALYSE DE LA RENTABILITE
4.3.3. ANALYSE DE LA COMPETITIVITE
4.4. RECOMMANDATIONS
4.4.1. AU NIVEAU REGIONAL
4.4.2. AU NIVEAU NATIONAL
4.4.3. AU NIVEAU DES ACTEURS
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

 

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