La France compte aujourd’hui 5775 sites industriels dont le sous-sol est pollué par des métaux lourds ou des hydrocarbures, qui présentent un risque pour la santé ou l’environnement et nécessitent la mise en œuvre de travaux de réhabilitation [BASOL- Ministère de l’Écologie, 2014].
Des traitements in situ comme la biodégradation, basée sur la dégradation des contaminants organiques par des micro-organismes, peuvent être envisagés dans le cadre de la dépollution. Il s’agit de techniques prometteuses mais qui nécessitent d’améliorer les outils de suivi de l’évolution de la décontamination. Actuellement, la surveillance se fait principalement à l’aide d’analyses d’échantillons prélevés dans des forages. Ces analyses permettent de déterminer avec précision le niveau de contamination. Cependant, les informations obtenues sont ponctuelles et leur représentativité à l’échelle de la zone étudiée est souvent difficile à déterminer. En outre, pour des raisons principalement économiques, le nombre de forages et d’analyses est souvent limité.
Dans le but de pallier le manque d’informations entre les forages et de proposer un suivi plus léger et à moindre coût, il serait avantageux d’utiliser des techniques non destructrices et rapides qui permettent d’obtenir des données sur de larges surfaces. Les méthodes géophysiques, qui possèdent un caractère intégrateur, répondent à ces contraintes et offrent la possibilité de mesurer différents paramètres susceptibles d’être influencés par la variation des propriétés physico-chimiques du sous-sol. De ce fait, après avoir été largement utilisées en prospection pétrolière ou minière par exemple, elles sont de plus en plus mises en œuvre sur des sites pollués afin de délimiter les zones contaminées et de suivre leur dépollution.
De plus, les approches classiques basées sur le suivi de la concentration des polluants sont parfois insuffisantes pour démontrer formellement la biodégradation des polluants. En effet, cette diminution peut être due à des effets de sorption, de dilution, de dégazage… Seule la dégradation provoque une perte nette des polluants et la réduction durable de la pollution. Une approche isotopique, comme l’analyse de l’isotopie du carbone du CO₂ provenant de la biodégradation d’hydrocarbures, permettrait d’obtenir les informations nécessaires pour estimer l’efficacité des processus de dégradation.
Les sols pollués sont, le plus souvent, la conséquence d’activités industrielles plus ou moins récentes. La pollution anthropogénique est liée à l’énergie consommée (hydrocarbures) et aux divers procédés de transformation et de fabrication (par exemple, récupération métallurgique, traitement des métaux, fabrication de peinture,…). Les polluants se concentrent dans le sol, par infiltration, suite à des déversements ou à des fuites accidentelles de produits toxiques. Ce n’est pas uniquement la présence de polluants dans le sol qui pose un problème, mais le fait qu’ils puissent être mobiles, partiellement ou totalement solubles, et puissent atteindre sous forme de panache de pollution les eaux souterraines, voire les captages d’alimentation en eau potable (AEP) avec tous les risques que cela implique sur la faune, la flore et la santé des populations locales.
RÉHABILITATION DES SOLS ET DES EAUX SOUTERRAINES : LA RÉGLEMENTATION ET LE MARCHÉ FRANÇAIS DE LA DÉPOLLUTION
L’ensemble des sites pollués français est inscrit dans la base de données BASOL du Ministère de l’Environnement, créée dans les années 1990 (Arrêté du 17 octobre 1994 – JO n° 254 du 1er novembre 1994). Cette inscription peut survenir lors d’une inspection des services de l’Etat, au moment d’une cessation d’activité ou à l’initiative des exploitants en cas de pollution accidentelle.
En France, la grande majorité de ces sites se trouvent dans des anciennes régions minières ou les régions les plus urbanisées comme l’Ile-de-France, le Nord-Pas-de Calais ou la région Rhône-Alpes. Les polluants les plus souvent retrouvés dans les nappes phréatiques contaminées sont les hydrocarbures (25 % des sites contaminés recensés), dont les hydrocarbures aromatiques polycycliques ou HAP (11 % des sites), les solvants halogénés (9,5%), et les métaux lourds (plomb 12 %, chrome 9,5 %, cuivre 9,5 %, arsenic 9 %, nickel 6,5 %, mercure 3,5 %) [BASOL – Ministère de l’Écologie, 2014].
Un peu plus de 11 % des 5775 sites recensés en 2014 ont été dépollués et entièrement banalisés. Une fois les sites nettoyés, ils sont supprimés de l’inventaire BASOL et rejoignent une autre banque de données, gérée par le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières), qui garde en mémoire l’ensemble des endroits ayant connu une pollution d’origine industrielle (BASIAS – Arrêté du 10 décembre 1998 – J.O. Numéro 89 du 16 avril 1999).
Après le recensement des sites qui permet d’identifier la nature des contaminants, des chantiers de réhabilitation peuvent être enclenchés. Théoriquement, c’est à l’exploitant responsable de la pollution ou, à défaut, le propriétaire du terrain, de procéder à la dépollution de la zone (Directive Européenne 2004/35/CE du 21 avril 2004). Mais, il arrive que les propriétaires restent introuvables. Ces sites, appelés «sites à propriétaires défaillants ou sites orphelins » sont de la responsabilité de la collectivité, et ils sont gérés par l’ADEME.
La politique de réhabilitation et de traitement des sites est une politique de gestion des risques en fonction de l’usage : le traitement d’un site doit être fait en fonction de son impact sur l’environnement et de l’usage auquel il est destiné. Ainsi, la circulaire du 10 décembre 1999 relative aux sites et sols pollués et aux principes de fixation des objectifs de réhabilitation, donne les outils pour le diagnostic approfondi et l’évaluation détaillée des risques (EDR). Cette politique fixe les usages des sols compatibles avec les pollutions résiduelles après traitement du site et elle instaure des actions de prévention et de surveillance de l’environnement autour des installations classées [Ministère de l’Ecologie].
Le chiffre d’affaires du marché de la dépollution des sols a été estimé à plus de 325 millions d’euros pour l’année 2010 [ADEME, 2012]. La demande était répartie comme suit : environ 70 % des terres polluées traitées provenaient de chantiers pour des clients industriels ; environ 30 % des terres polluées provenaient de chantiers d’aménagement : 17 % pour des aménageurs privés et 13 % pour des aménageurs publics. En ce qui concerne les chantiers de dépollution des eaux souterraines, 99% de la demande émanait des industriels.
Indépendamment de la réglementation française qui pousse les industriels à traiter les pollutions, la demande du secteur immobilier est un autre facteur important de ce secteur d’activités. En effet, en 2010, le nombre des permis de construire a augmenté de 14 % par rapport à 2009, ce qui reflète cette demande. En outre, la tendance actuelle en faveur du développement durable vise à limiter l’étalement urbain et favorise la réhabilitation de sites plutôt que l’aménagement de nouveaux sites naturels.
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