Suivi de cible non-communicante dans un environnement hétérogène
Algorithmes de suivi réactifs
Comme nous l’avons expliqué dans les chapitres précédents, les travaux sur le suivi de cible peuvent être classifiés en deux principales catégories : réactives et proactives. Ce travail, de même que le précédent, s’intéresse aux solutions réactives sauf que nous nous concentrons cette fois sur les solutions impliquant une cible non-communicante. Nous allons donc commencer par présenter quelques solutions réactives impliquant des cibles non-communicantes, ensuite nous parlerons des solutions de suivi pour le même type de cible mais utilisant des réseaux hétérogènes. Dans [33], les auteurs présentent une solution pour le suivi de cible non-communicante dans un réseau de capteurs sans fil. Les capteurs ne pouvant pas rester actif en permanence, un réveil cyclique est implémenté. Une fois la cible détectée, une méthode probabiliste basée sur le modèle de mobilité de celle-ci est proposée afin de sélectionner les capteurs à réveiller. Les auteurs de [74] ont quant à eux opté pour une architecture hiérarchique qui vise à optimiser la communication entre les composants du réseau. Dans la solution proposée nommée OCO (Optimized Communication and Organisation), le processus de suivi est décomposé en quatre phases : collecte d’informations, traitement, suivi et maintenance. Lors de la première phase les positions de tous les capteurs déployés sont récupérées et centralisées au niveau du nœud racine. Dans la seconde, les données redondantes sont éliminées et les routes vers les nœuds feuilles sont établies. Le suivi est réalisé dans la troisième phase en détectant les objets pénétrant dans la zone d’intérêt et en relayant l’information de nœud en nœud sous la supervision du nœud racine. La dernière phase s’exécute uniquement lorsqu’un nœud tombe en panne, dans ce cas une re-configuration du réseau est nécessaire. Les solutions présentées ci-dessus impliques l’utilisation de mécanismes de réveil (exemple : réveil cyclique) pour la phase de détection. Le risque est que la cible pénètre la zone d’intérêt sans être immédiatement détectée par un capteur. Pour certaines applications de suivi critique, ce risque ne peut être assumé. SensEye [38] est à notre connaissance la première solution de suivi de cible introduisant le concept d’hétérogénéité dans les réseaux de capteurs sans fil. Dans le réseau déployé, l’hétérogénéité réside dans les différents types de capteurs multimédia déployés. Les auteurs proposent un réseau de capteurs caméras sans fil à trois niveaux. Chaque niveau est en charge d’une tâche spécifique : le premier niveau gère la partie détection et localisation de la cible, le deuxième gère l’identification de celle-ci, enfin, le troisième gère le suivi en tant que tel, en fusionnant les données. Bien que l’approche proposée soit très intéressante, SensEye ne peut être utilisé que dans des environnements indoor où l’énergie n’est pas une contrainte. En effet, un des tiers composant le réseau doit être connecté à une source énergétique en permanence. Cette contrainte limite considérablement le champ applicatif de cette solution. Dans ce chapitre nous nous intéressons au suivi de cible non-communicante dans un environnement hétérogène. L’hétérogénéité consiste en l’utilisation de différents types de capteurs sans fil ; des capteurs scalaires pour la partie détection et des capteurs multimédia pour la partie localisation. La solution proposée est détaillée dans la prochaine section.
Algorithme de suivi de cible non-communicante dans un environnement hétérogène-CTA
Dans cette section, nous allons décrire plus en détail le réseau déployé. Nous nous attarderons ensuite sur la stratégie de déploiement proposée. Enfin, nous présenterons CTA notre algorithme de suivi.
Description du système
Nous déployons un réseau de capteurs hétérogènes composé de capteurs de mouvement et de capteurs multimédia. Les capteurs de mouvement, qu’on appellera CM sont des capteurs scalaires équipés de détecteurs de mouvement infrarouge. Chacun dispose d’un champ de détection de forme circulaire d’une portée RD. Les capteurs caméra qu’on nommera CC sont quant à eux des capteurs multimédia équipés de caméra vidéo. Chacun dispose d’un champ visuel de forme conique d’une portée RV et d’un angle d’ouverture 2α. À titre d’exemple l’imote2 [2] peut intégrer à la fois un capteur PIR (Passive infrared Sensor) et une caméra à faible résolution (640×480). La figure 4.1 illustre cet exemple avec le champ de détection d’un CM et le champ visuel d’un CC. Chaque capteur peut communiquer avec un autre, indépendamment de son type, à condition qu’il se trouve à sa portée de transmission RT . Nous supposons que chaque CM connait sa position et que chaque CC connait sa position et son orientation en utilisant une des méthodes de géo-localisation existantes dans la littérature [27]. Tous les CCs sont initialement en hibernation et tous les CMs sont actifs pour surveiller la zone d’intérêt. Une seule cible non-communicante à la fois traverse la zone d’intérêt en empruntant une trajectoire aléatoire.
Stratégie de déploiement
L’hétérogénéité nécessite un placement optimisé des capteurs afin d’exploiter au mieux les caractéristiques et les ressources de chaque type de capteur. Nous avons par ailleurs démontré dans le chapitre précédent, l’utilité d’une stratégie de déploiement 4.3. Algorithme de suivi de cible non-communicante dans un environnement hétérogène-CTA 59 Figure 4.2 – Exemple illustratif du découpage de sous-zone critique. dans notre contexte général de suivi de cible. Cette stratégie, W-VFA, reste néanmoins inadaptée aux réseaux hétérogènes car elle a pour principal objectif de maximiser la couverture étant donné un nombre de capteurs connus. Dans ce travail, le contexte étant différent, les objectifs de la stratégie de déploiement doivent le prendre en considération. En effet, la cible n’étant pas communicante il faut couvrir au maximum la zone d’intérêt avec les capteurs de mouvement afin d’assurer sa détection. Il faut donc déployer le nombre de CMs permettant d’assurer cet objectif tout en évitant les chevauchements, la redondances de données et par conséquent la perte inutile de ressources. Pour les capteurs multimédia, l’objectif est de couvrir en priorité les zones à fort intérêt, la couverture visuelle n’étant pas requise dans 100% de la zone d’intérêt. Nous proposons donc une stratégie de déploiement pour chaque type de nœud où le principe de sous-zones critiques reste présent. Le processus de suivi étant conditionné par la collaboration entre les deux types de capteurs, il faut aussi prendre en considération la distance entre ceux-ci.
Déploiement initial
Dans un premier temps, nous nous intéressons au placement des CMs, nous proposons pour cela le découpage de la zone d’intérêt en cellules. La taille de chaque coté d’une cellule correspond au diamètre de la portée de détection 2 × RD. Les CMs sont ensuite placés au centre de chaque cellule afin d’éviter les chevauchements et donc la redondance de données. Leur nombre dépend donc du nombre de cellules. Pour ce qui suit, nous reprenons le concept de sous-zones critiques expliqué dans le chapitre précédent. Pour rappel, ce concept s’inspire des environnements réels où certaines sous-zones sont plus importantes à couvrir que d’autres. Le nombre de CCs à déployer dépend donc du nombre de celles-ci. Nous supposons que ces sous-zones ont une forme rectangulaire. En effet, les locaux, les bureaux, les corridors sont généralement de cette forme. En raison du coût des capteurs multimédia, nous ne pouvons pas en déployer assez pour couvrir toute la zone d’intérêt. L’idée donc est de privilégier les zones à plus grande importance et d’en déployer assez pour les couvrir. Dans ce travail, nous partons donc de l’hypothèse que les sous-zones critiques sont plus importantes à couvrir que le reste de la zone, c’est pourquoi nous plaçons les CCs avec une orientation aléatoire à chaque coin de ces sous-zones.