STRUCTURE MOLECULAIRE DU POLYPROPYLENE
Le polypropylène (PP) est une polyoléfine linéaire obtenue par catalyse stéréospécifique du propène. Ce type de catalyse autorise la synthèse de polypropylène isotactique (plus récemment syndiotactique) qui, seul, présente les propriétés requises à un usage structural. Lors de la synthèse, l’encombrement stérique du groupe méthyle favorise l’enchaînement tête-queue, ce qui donne une grande régularité chimique à la chaîne de polypropylène. Ainsi le polypropylène isotactique peut adopter quatre conformations hélicoïdales stables d’égale énergie (Fig. I-1) dites de type 31 ou encore × 3/12 (trois motifs monomères de deux atomes de carbone par pas d’hélice). La position des groupes méthyle par rapport à l’axe de la macromolécule permet de distinguer des hélices isoclines ou anticlines suivant le sens « montant » ou « descendant » des hélices.
STRUCTURES CRISTALLINES DU POLYPROPYLENE
La régularité de la chaîne du polypropylène permet à ce matériau d’être semi cristallin à l’état solide. Il présente toutefois un polymorphisme cristallin. Aujourd’hui, quatre structures cristallines sont identifiées [2] : α monoclinique, β hexagonale, γ triclinique et smectique. Une cinquième phase cristalline δ existe dans le polypropylène à grande proportion de phase amorphe et serait liée à la phase non isotactique du PP [3]. Ces formes étudiées par diffraction des rayons X présentent des diffractogrammes très différents et peuvent être discernées (Fig. I-2). Le polymorphisme du polypropylène isotactique est étroitement lié aux conditions de température et de pression au cours de la cristallisation mais est également affecté par les défauts introduits le long de la chaîne. Les formes α , et dans une moindre mesure β , sont largement prédominantes dans les polymères industriels. Varga [4] a montré que l’apparition de la structure β est inhibée par des conditions de cristallisation isotherme et de vitesse de refroidissement importante. Par contre, des vitesses de refroidissement très lentes et la présence de contraintes internes [5] favorisent la formation de structures β . La structure α monoclinique est la plus courante (Fig. I-3 ). Les paramètres de maille sont donnés d’après Turner-Jones et al. dans Cheng et al.[3] : a = 6,66 A b ; = 20,78 A c ; = 6,495 A ; β = 99,62 ° et α = γ = 90 ° .La masse volumique du cristal α est de 0,946 g/cm3 . Chaque chaîne est en contact avec trois hélices énantiomorphes et deux hélices isomorphes (Fig. I-3). L’ordre cristallographique peut être altéré par l’introduction d’hélices isoclines et anticlines réparties aléatoirement. Par diffraction des rayons X et par calorimétrie différentielle, plusieurs auteurs [3] ont montré que la phase α pouvait être recristallisée en une forme 1 α moins ordonnée, constituée d’hélices isoclines et anticlines distribuées aléatoirement, et une forme 2 α plus ordonnée où les hélices isoclines et anticlines sont disposées de façon régulière. La différence d’énergie de cohésion du cristal entre ces deux formes 1 α et 2 α est de quelques dixièmes de kJoules/mole. Dans les conditions standard de cristallisation, la phase β est moins stable que la phase α . Des auteurs [6] rapportent la préparation de polypropylène isotactique très riche en phase β par des techniques de trempe, solidification par zonage, cristallisation dans un gradient de température ou par l’utilisation d’agents de germination spécifiques. Dans les pièces injectées, la phase β peut apparaître dans les zones de cisaillement. Sa structure est un sujet de controverse. Les premiers travaux étaient basés sur des analyses par diffraction des rayons X aux grands angles. Deux pics de diffraction principaux apparaissent alors, correspondant à des familles de plans réticulaires de distance égale à o 5,53 A et o 4,17 A (Fig. I-2). Keith et al. [7] ont attribué ces deux réflexions aux plans {2 0 0} et {2 0 1} d’une maille hexagonale dont les paramètres sont : 33 a =12,74 A c ; = 6,35 A ; γ =120 ° et α = β = 90 ° o o . D’autres travaux [3] attribuent ces pics à des familles de plans correspondant à des paramètres de maille légèrement différents. L’agencement des chaînes dans la phase β se ferait par groupe de chaînes parallèles et isomorphes. Ceci a été confirmé par Gomez et al. [8] par des mesures de RMN du C 13 . Depuis quelques années, un jeu de paramètres de la maille de la phase β semble être admis ( a =11 A c ; = 5 ,6 A ; γ =120 ° et α = β = 90 ° o o ). La maille aurait également des plans de symétrie formés par des hélices isochirales. La divergence d’opinions qui subsiste concerne les modèles de désordre liés à la rotation des chaînes et aux jonctions [9,10,11]. Ces approches, en admettant un grand degré de désordre dans la phase cristalline, justifient certains faits expérimentaux : La vitesse de croissance élevée incompatible avec l’existence de cristaux contenant uniquement des hélices isomorphes ; La possibilité de transformer la phase β en phase α par un processus de fusion – recristallisation [6] implique que la structure des deux phases soit très différente ; La différence de température de fusion entre les deux polymorphes (Tf ∈[170-200°C] pour la phase β contre [185-208°C] ∗ pour la phase α ) malgré des densités du cristal proches. Labour et al. [12] ont montré que la mobilité moléculaire est plus importante dans les cristaux de la phase β par rapport à la phase α . Cette mobilité accrue est susceptible d’être la conséquence d’une densité du cristal plus petite et d’interactions limitées des chaînes. Trodjeman et al. [13] montrent que le travail essentiel à la rupture et l’allongement à rupture augmentent avec le pourcentage de phase β dans un polypropylène alors que le module d’Young et la contrainte au seuil de plasticité diminuent. Les observations précédentes sont quelquefois mises en avant pour expliquer la plus grande ductilité du polypropylène en présence de phase β . Cette ductilité serait également favorisée par la maille cristalline hexagonale qui offre trois plans de symétrie équivalents. Ainsi, si l’on admet que la plasticité des polymères semi cristallins est liée aux dislocations et glissements au sein du cristal [14,15], la probabilité que la maille de la phase β soit bien orientée pour le glissement est plus importante. En outre, un plus grand degré de désordre dans la phase β induirait une distribution de la contrainte plus uniforme. Nous ne parlerons pas ici des phases tricliniques et smectique plus rarement observées bien qu’elles soient largement décrites dans la littérature [3,5,8,16,17]. Retenons ici qu’un polypropylène peut voir sa phase cristalline exister sous plusieurs formes en fonction des conditions de transformation et que ces phases ne sont pas équivalentes d’un point de vue mécanique.