Dans le cadre de la collaboration Field Muséum / UCSB / DPAB Université d’Antananarivo, au cours des dix dernières années, des expéditions entreprises par Docteurs John Flynn et André Wyss consistaient à des fouilles paléontologiques dans la partie Sud du Bassin de Morondava. Ces prospections ont permis la découverte d’un groupe de Vertébrés terrestres estimés d’âge entre Trias Moyen et Trias Supérieur. Il s’agit d’ossements appartenant à des synapsides cynodontes, à des lépidosaures sphénacodontides, et à des archosauromorphes rhynchosaures. Parmi les cynodontes récupérés, deux nouveaux eucynodontes traversodontidés ont été décrits par Flynn et al. (1999, 2000). Il s’agit de Menadon besairiei, et de Dadadon isaloi. Ils ont été conservés dans la formation Isalo II (Besairie, 1936), équivalent de la formation de Makay de Razafimbelo (1987) correspondant au terme final du Karoo Malgache (Besairie, 1936). Les sites de gisement sont riverains de la rivière Malio, au Sud de Berenty, à l’Est et au Nord – Est de Sakaraha . Antérieurement, cette formation n’avait produit que seulement des bois silicifiés et des restes fragmentaires du rhynchosaure, Isalorhynchus genovefae (Buffetaut, 1983).
Menadon besairiei et Dadadon isaloï sont les tout premiers cynodontes jamais trouvés à Madagascar. Ils s’avèrent être des spécimens de cynodontes parmi les mieux conservés du Trias (Flynn et al. 1999, 2000). Une investigation très poussée est possible grâce à leur excellent état de conservation. En fait, ils représentent toute une mine d’information tant sur le crâne, sur la mandibule que sur la dentition. D’ailleurs, dans l’ensemble, les cynodontes sont mieux connus de par leur caractères crâniens, mandibulaires, et dentaires (Battail, 1991).
CARACTERISTIQUES DES TRAVERSODONTIDES
SYSTEMATIQUE PALEONTOLOGIQUE DES TRAVERSODONTIDES
Synapsida (Sensu Hopson, 1994)
Les synapsides groupent tous les mammifères et les fossiles de vetébrés amniotes appelés « reptiles-mammaliens ». Techniquement, les synapsides sont définis comme le clade qui rassemble tous les vertébrés amniotes (ayant entre autres une fosse temporale derrière l’orbite), y compris les mammifères, et qui excluent les « reptiles » modernes et les oiseaux (Hopson, 1987). Les synapsides sont connus depuis le Pensylvanien supérieur en Nova Scotia du Canada (il y a à peu près 310 MA). Ils sont les plus abondants dans le Permien inférieur spécialement en Amérique du Sud (jusqu’il y a à peu près 275 MA). Ceux du Permien supérieur et du Trias ont été trouvés principalement en Amérique du Sud, en Russie et dans les formations Karoo de l’Afrique du Sud. Cette répartition du groupe dans le temps et dans l’espace est traditionnellement utilisée comme le fondement d’une subdivision du groupe synapsides, en deux ordres (Carroll, 1988) :
Pelycosauria, un groupe paraphylétique, et Therapsida, un groupe monophylétique caractérisé par de nombreux caractères morphologiques dérivés (Hopson et Barghusen, 1986) .
L’articulation mandibulaire des premiers synapsides est constituée par l’articulaire et le carré. Cette articulation, postérieurement située par rapport au crâne (Kemp, 1982), est caractéristique des amniotes non–mammaliens.
Eucynodontia (Kemp, 1982, 1988)
Dans la dernière partie du Trias inférieur, un grand groupe de cynodontes à caractères plus mammaliens ont apparu, ce sont les Eucynodontia.
A la fin du Trias, ils ont atteint une grande répartition de par le monde. Ils sont caractérisés par :
– un grand dentaire qui atteint presque l’articulation mandibulaire. Cette augmentation de la taille parait être en relation avec l’accroissement d’abord en masse, puis en degré de différenciation des muscles adducteurs qui s’attachent au dentaire.
– des os postdentaires réduits à une mince baguette composée
– une lame réfléchie, petite apophyse en forme de faucille réduite. Elle a pour rôle d’élever la sensibilité de la vibration du son avec l’aide des autres os postdentaires (Allin & Hopson 1992) .
Selon Hopson & Barghusen (1986) ; Hopson (1990, 1991b), les Eucynodontia sont subdivisés en Cynognathia et Probainognathia. Parmi les Cynognathia, les gomphodontes rassemblent les formes herbivores et seraient à l’origine des trytilodontidés du Jurassique. Par contre, Probainognathia (Hopson, 1990), groupe à la fois les insectivores et les carnivores, y compris le genre Probainognathus du Trias moyen, puis les trithelodontidés, ictidosaurs du Trias supérieur et du Jurassique inférieur, en plus de certains mammifères. Les tritylodontidés et les trithelodontidés se distinguent surtout des autres Eucynodontes par leur organisation plus mammalienne (Kemp, 1982).
ANALYSE FONCTIONNELLE
Analyse fonctionnelle des caractéristiques anatomiques du crâne et de la mandibule
Chez Menadon
– Crâne haut et étroit corrélativement à un museau allongé et plus ou moins pointu: il s’agit de la conséquence du développement vertical du maxillaire. Par la suite, ce maxillaire est disposé presque entièrement en avant de l’orbite. Cet arrangement rend possible l’enchâssement des racines des robustes dents postcanines. Autrement dit, c’est une forme d’adaptation à un mode de vie bien déterminé.
– L’absence de la barre internasale se traduit par l’unique fosse nasale, une des caractéristiques des mammifères.
– La position plus ou moins frontale de l’orbite de la même condition que les cynodontes, céde plus d’espace à l’unique fenêtre temporale.
– La présence du petit éperon d’os, vestige inférieur de la barre internasale lui fait ressembler aux cynodontes tardifs, Exaeretodon, et Scalenodontoïdes macrodontes (Bonaparte, 1962 ; Hopson 1984, 1985).
– Le maxillaire est latéralement étroit. Il prolonge dans l’espace la rangée dentaire en s’étalant vers le haut de façon presque parallèle à l’axe du crâne.Il est très développé par rapport au lacrymal. C’est un caractère qui rapproche Menadon des mammifères.
– Un autre caractère mammalien est le contact entre le lacrymal et le nasal, éliminant celui entre le préfrontal et le lacrymal observé chez les tout premières formes (Battail, 1991).
– Le jugal se présente sous une large structure, forme évoluée. Il forme l’arcade zygomatique avec le squamosal. Hautement située, l’arcade zygomatique est à l’origine de la position dorsale de l’orbite. Puis, cette arcade est convexe latéralement.
Chez Dadadon
– Crâne bas, aplati, relativement court, corrélativement à un museau élargi , suite à l’étalement latéral du maxillaire qui vient surplomber la région dentaire. Ceci pourrait être une opportunité d’augmenter le volume de la cavité nasale, dans le but d’aiguiser le sens olfactif de l’animal comme l’ont avancé Romer (1967) et Kemp (1980). En plus, ceci pourrait être une manière de bien irriguer cette zone.
– Présence de septomaxillaire corrélativement avec la barre internasale complète : témoignant que l’animal possède deux narines au lieu d’une comme chez les mammifères.
– Orbite très antérieurement située, surplombant les deux tiers postérieurs de la rangée dentaire, corrélativement à des dents jugales réduites en taille.
– Maxillaire très développé par rapport au lacrymal de nature mammalienne pourvu latéralement de 4 ou 5 orifices bien distinctes : ceci confirme la précédente hypothèse mentionnant que l’animal a élargi son museau pour aiguiser son sens olfactif
– Contact entre lacrymal et nasal et non entre préfrontal et le lacrymal équivalent d’un caractère évolué chez les cynodontes.
– Plateforme dorsal composé essentiellement par le frontal pourvu de crêtes et de dépressions caractéristiques d’insertions musculaires.
– Présence du trou pariétal, caractère « reptilien »
– Perte du contact postorbitaire – squamosal vers l’arrière, appartenance au groupe des gomphodontes.
– Absence du postfrontal, caractéristique des cynodontes.
– Région pariètale restreinte en crête pariétale dont les parois latérales sont verticalement édifiées. Il s’ensuit que les surfaces latérales de la boite crânienne sont étroitement construites. Ces crêtes vont servir de site d’origine de la musculature temporale à la manière mammalienne.
INTRODUCTION |