Impact des maladies psychiatriques à l’adolescence et au début de l’âge adulte
Les troubles schizophréniques et les maladies psychiatriques en général restent encore actuellement des maladies mal comprises, tant d’un point du vue étiologiques que sur la question de leur prise en charge. Les problématiques psychiatriques à l’adolescence et au début de l’âge adulte sont diverses et, comme nous allons le voir, très fréquentes en population générale. Leurs répercussions peuvent être majeures sur bien des plans.
Aux concepts traditionnels d’« adolescence » et d’ « âge adulte », très dichotomique, s’oppose pour certains auteurs la notion de « jeunes personnes » (Young People). Cette classification comprend les personnes âgées de 12 à 24 ans. « Sur le plan développemental, ce sont des adultes en devenir, sexuellement matures, dans les dernières étapes de leur parcours scolaire et dans le tout début de leur carrière professionnelle. Ils accèdent à toute une panoplie d’activités socialement acceptées comme appartenant à l’âge adulte, tels : trouver et garder un travail, les relations amoureuses, l’usage d’alcool, de tabac… ».
Les progrès de l’imagerie médicale et de la neurophysiologie ont permis d’obtenir des données qui convergent vers une spécificité marquée de cette période. En effet, au cours de cette dernière, le cerveau se modifie fondamentalement d’un point de vue neurobiologique. Il s’agit d’une véritable transformation, qui conduit à des changements structurels et fonctionnels (processus de myélinisation, d’élagage synaptique et cascades hormonales). Le domaine émotionnel est tout particulièrement affecté par ces processus. On peut par exemple constater à cette période des comportements de prise de risque et de recherche de sensations.
La Schizophrénie
La schizophrénie est un trouble psychiatrique chronique et invalidant relativement fréquent en population générale. En effet sa prévalence est estimée à 0,7% dans le monde entier. Comme nous l’avons dit précédemment, cette maladie est une des dix premières causes d’invalidités dans le monde. Il s’agit d’un trouble très coûteux pour la société, puisqu’il représente 2% des coûts directs des dépenses de santé et les coûts indirects seraient évalués à plus d’une centaine de milliards de dollars par an. 80 à 90% des patients atteints de schizophrénie n’accèdent jamais au travail et 20% peuvent devenir sans-abris. Cette maladie se déclare principalement lors de la période critique que nous avons décrite précédemment (plus précisément entre 15 et 25 ans classiquement), ce qui accentue l’impact fonctionnel de cette maladie. Comme vu précédemment pour les maladies psychiatriques en général, l’espérance de vie des personnes atteintes de schizophrénie est réduite de 20 ans par rapport à la population générale et le risque de suicide est accrue de 5% sur la vie entière . De la description clinique de Kraepelin dans sa Troisième Leçon de l’Introduction à la Psychiatrie Clinique en 1907 au Manuel Diagnostique et Statistique des troubles mentaux DSM-5 paru en 2013, la clinique de la schizophrénie et des autres troubles délirants a été fortement remaniée. Il en va de même en ce qui concerne les hypothèses étiologiques et les traitements envisagés.
Prévention et Intervention Précoce
Devant l’impact majeur de la schizophrénie et des troubles comprenant de la psychose en général, plusieurs équipes ont tenté de développer des outils afin de pouvoir détecter précocement et prévenir ces psychoses. Ces démarches s’inscrivent dans le cadre de la prévention.
Selon la Haute Autorité de Santé : « La prévention consiste à éviter l’apparition, le développement ou l’aggravation de maladies ou d’incapacités. »
Sont classiquement distinguées : « la prévention primaire qui agit en amont de la maladie, la prévention secondaire qui agit à un stade précoce de son évolution et la prévention tertiaire qui agit sur les complications et les risques de récidive ».
La prévention ciblée en psychiatrie a pour objectif de détecter les individus à risque de développer des pathologies psychiatriques au moyen d’évaluations cliniques standardisées et de les prendre en charge au plus tôt afin d’éviter ou de différer une évolution vers une pathologie chronique invalidante. Celle-ci concerne à la fois la prévention primaire, secondaire et tertiaire.
Comportements de recherche d’aide ou recours aux soins (Help-Seeking)
L’un des freins majeurs semble inhérent au public ciblé, il s’agit de la notion de comportement de recherche d’aide ou de recours aux soins (Help-Seeking). En effet, comme nous l’avons vu précédemment, la DUP était en moyenne de 1 à 2 ans avant la première prise en charge. Cependant la majorité des personnes développant la maladie (85%) aurait présenté des comportements inquiétants pour eux ou pour leur entourage avant la survenue de la pathologie. Malgré cette inquiétude, seule la moitié de ces patients avait essayé de recourir aux soins avant le déclenchement des symptômes psychotiques.
Help-Seeking : Les comportements de recours aux soins sont définis comme le fait de rechercher activement de l’aide de la part d’une personne. Il s’agit de communiquer avec quelqu’un d’autre afin d’obtenir de l’empathie, un avis, de l’information, un traitement ou une aide générale en réponse à un problème. C’est une forme de coping reposant sur les autres. De nombreux facteurs viennent influencer la mise en place de ce type de comportement.
Facteurs influant sur le recours aux soins : Parmi les facteurs individuels venant influencer la recherche d’aide chez les adolescents, se trouvent le sexe et l’âge de l’adolescent (les filles demandant de l’aide plus facilement, à différents types d’interlocuteurs selon leur âge), ainsi que le type des troubles (les troubles externalisés, avec une symptomatologie bruyante telle que des troubles du comportement, ainsi que la perception de ces troubles semblent être associés à un plus grand recours aux soins).
L’influence des parents dans l’accès aux soins est également capitale, étant donnée la dépendance à l’autre qui perdure à l’adolescence. Dans une méta-analyse de 2015, 7 facteurs familiaux influencent significativement le recours aux soins : l’impact des troubles sur les parents, la perception du problème par les parents, la perception du besoin de soins, l’existence d’une psychopathologie chez les parents, une structure familiale monoparentale, les changements récents de structure familiale et l’ethnie.
Table des matières
I. Introduction
1. Contexte
A. Impact des maladies psychiatriques à l’adolescence et au début de l’âge adulte
B. La Schizophrénie
2. Prévention et Intervention Précoce
A. Intervention Précoce en psychose
i. Historique
ii. Etats Mentaux A Risque
iii. Pourquoi une intervention précoce pour la schizophrénie ?
a. Impacts de la DUP
b. Comorbidités
c. Coût/Efficacité
3. Comportements de recherche d’aide ou recours aux soins (Help-Seeking)
A. Help-Seeking
B. Facteurs influant sur le recours aux soins
4. Problématique et Objectifs de l’étude
II. Matériels et Méthodes
1. Critères d’éligibilité
2. Sources d’information et Stratégie de Recherche
3. Recueil des données
III. Résultats
1. Sélection
2. Caractéristiques générales des études (Annexe 1)
3. Stratégies d’implantation (Annexe 2)
A. Actions de déstigmatisation et promotion du Help-Seeking
B. Actions de création de réseau de partenariat
C. Créations d’équipes mobiles ou de liaison
4. Outils de détection (Annexe 3)
5. En zone rurale
IV. Discussion
1. Analyse de la démarche
2. Analyse des résultats
A. Caractéristiques générales des études
B. Stratégies d’implantation
i. Information en population générale
ii. Création de réseaux de partenariat
C. Outils de détection
D. Une prise en charge globale
E. Intervention précoce et ruralité
3. L’unité de Réhabilitation Psychosociale d’Evreux et l’Intervention Précoce
V. Conclusion
Bibliographie
Annexes