Stabilité de Systèmes Dynamiques Chaotiques et
Variétés Singulières
Etude numérique des systèmes dynamiques
Les différents aspects d’une étude numérique sont ici rappelés dans le but de préciser les méthodes utilisées, leurs avantages et leurs limites. L’étude des systèmes dynamiques non-intégrables ainsi que le tracé des variétés lentes qui peuvent leur être associés a été considérablement facilitée par l’utilisation de logiciels comme : Mathematicar, MATLABr ou MAPLEr qui emploient différents schémas d’intégration numérique comme : Adams-Bashforth-Moulton, Euler, BDF (implicit Backward Differentiation Formulas) ou Runge-Kutta selon le système dynamique considéré. Ces logiciels, qui possèdent chacun leur propre fonctionnalité dans les choix du schéma et du pas d’intégration numérique et, surtout dans celui de la spécification des erreurs systématiques (erreur maximale admissible, relative ou absolue), produisent en général le même résultat. On peut cependant en distinguer deux catégories : les logiciels de calcul numérique comme MATLABr et les logiciels de calcul formel et symbolique comme Mathematicar ou MAPLEr. Dans ce mémoire, ces trois logiciels ont été utilisés en parallèle de manière comparative et complémentaire. De plus, l’adjonction et la conception de programmes compatibles avec chacun d’eux et disponibles à l’adresse suivante : http ://ginoux.univ-tln.fr ont permis de constituer un outil efficace d’investigation des systèmes dynamiques non-linéaires et chaotiques. Ces programmes permettent par exemple, de calculer la dimension fractale de l’attracteur, de tracer le diagramme de bifurcation, l’application de Poincaré et la variété lente. En ce qui concerne cette dernière, la méthode de l’approximation du système linéaire tangent, développée par Rossetto et al. [1998], fournissait l’équation de la variété lente à partir des valeurs propres de la matrice jacobienne fonctionnelle du système linéaire tangent. Son tracé nécessitait, d’une part, que l’on utilise un logiciel de calcul formel et, d’autre part, que les valeurs propres soient réelles sur le domaine considéré. Cette difficulté, qui a motivé une partie de la recherche consacrée à cette étude, a été levée grâce à la formalisation de cette méthode et à l’élaboration d’un algorithme mathématique rendant cette équation indépendante des valeurs propres de la matrice jacobienne fonctionnelle du système linéaire tangent. Ces résultats, présentés au chapitre 8, permettent d’obtenir plus directement et plus précisément le tracé de la variété lente de (SDAL-R) ou de (SDACCL-R) avec n’importe quel type de logiciel. C’est cette nécessité de rendre l’équation de la variété lente indépendante des valeurs propres de la matrice jacobienne fonctionnelle du système linéaire tangent qui a conduit à l’élaboration de la nouvelle méthode de détermination proposée dans ce mémoire
Exemples et applications
La nouvelle approche proposée s’applique en automatique (stabilité), éléctronique (oscillateurs), physique (laser, météorologie), chimie (cinétique chimique), biologie (dynamique des populations), neurophysiologie (influx nerveux). Les modèles de Van der Pol, de Chua et de Lorenz seront utilisés respectivement à titre d’exemples pour illustrer cette nouvelle méthode de détermination de l’équation de la variété lente de (SDAL-R) et de (SDACCL-R) qui sera ensuite appliquée à des modèles de type prédateur-proie empruntés à la “ dynamique ” des populations. Le terme “ dynamique ” est envisagé dans ce contexte sous une acception différente de celle qui est utilisée en Physique. En effet, si la “ dynamique ” est l’étude d’un corps en mouvement sous l’effet des forces qui lui sont appliquées, l’analyse de l’évolution d’une population consiste à suivre ses variations d’abondance dans le temps sans pouvoir les expliquer par des forces3 . Ce qui revient essentiellement à modéliser cette “ dynamique ”, de sorte qu’elle soit en mesure de justifier les variations passées, et surtout de prévoir les futures. La modélisation mathématique en “ dynamique ” des populations a débuté à la fin du XVIIIe siècle avec les travaux de Thomas R. Malthus [1798] qui introduisit le paradigme de la croissance exponentielle. Ce modèle qui conduisait à une croissance illimitée, donc irréaliste, des populations, fut ensuite modifié par Pierre-François Verhulst [1838] qui proposa de lui ajouter un terme de limitation. Le résultat, connu sous le nom de loi logistique, a été appliqué avec succès par Verhulst à la détermination de la population limite de la France et de la Belgique. De plus, son accord parfait avec les statistiques de Raymond Pearl et Lowell J. Reed [1920] sur la croissance de la population des Etats-Unis a également été constaté. Néanmoins, de multiples causes pouvant être à l’origine de profonds changements dans l’évolution, la principale difficulté de la modélisation en “ dynamique ” des populations est de parvenir à transcrire en termes mathématiques les facteurs responsables de ces variations d’abondance. Ces facteurs, appelés réponses fonctionnelles, peuvent, dans un premier temps, être envisagés en termes de croissance (natalité) et de décroissance (mortalité). Cependant, dès lors que l’on ne se limite plus à l’étude d’une population “ idéale ”, i.e., vivant seule dans un milieu invariable avec lequel elle n’interagit pas, mais que l’on s’intéresse à la co-existence de plusieurs populations en interactions mutuelles ou avec le milieu extérieur, d’autres réponses fonctionnelles interviennent. C’est au début du XXe siècle, plus précisément en 1926, avec les travaux de Vito Volterra [1926v] que ces modèles prirent un immense essor. Un de ses nombreux ouvrages intitulé : “ Leçons sur la Théorie Mathématique de la Lutte pour la Vie ” [1931v] est la pierre fondatrice de la modélisation en dynamique des populations et en donne les 3D’après Frontier [2001] la terminologie exacte devrait être “ cinétique ” des populations. 18 premiers développements. C’est la raison pour laquelle une note bibliographique lui est consacrée à la fin de ce mémoire. Ainsi, considérant une population au sein de laquelle co-existent plusieurs espèces, Volterra élabore puis étudie les différentes formes d’interactions entre ces espèces. Le cas où elles “ se disputent la même nourriture ” est connu sous le nom de modèle de type compétition. Celui où l’une des espèces “ dévore les autres ” est connu sous le nom de modèle de type prédateur-proie. Le cas d’une entraide mutuelle entre espèces baptisé Allee effect a également été envisagé, Allee [1931a]. Le modèle est alors de type coopération. Tout au long du XXe siècle ces formes d’interactions, et surtout les réponses fonctionnelles qui leur correspondent, ont fait l’objet de nombreuses recherches visant à transcrire de manière mathématique le plus fidèlement possible le comportement observé. Plus particulièrement, la prédation a fait l’objet de toutes les attentions. La réponse fonctionnelle proposée par Volterra basée sur la méthode des rencontres et sur l’hypothèse des équivalents, a été modifiée successivement par G.F. Gause [1935], V.S. Ivlev [1955i], C.S. Holling ([1959a], [1959b]), . . . dans le but de rendre compte à la manière de la loi logistique, d’un niveau de saturation dans la prédation, i.e., d’une certaine satiété du prédateur vis à vis de sa proie. La croissance et la mortalité naturelles ont également été modifiées dans le même but en fonction des applications. L’étude d’un modèle de type prédateur-proie à trois espèces “ dont la première se nourrit de la seconde, et celle-ci de la troisième ”, qui avait été envisagée par Volterra [1931v], a conduit à l’élaboration des modèles de Rosenzweig-MacArthur [1963] et Hastings-Powell [1991] dont les solutions chaotiques prennent la forme d’attracteurs étranges. Ces modèles, qui sont des (SDAL-R) ou des (SDACCL-R), ont fait l’objet d’une analyse détaillée exposée dans ce mémoire. Ils ont permis d’aboutir à la conception d’un nouveau modèle de type prédateur-proie à trois espèces : le modèle Volterra-Gause (Ginoux et al. [2005]) dont l’étude a mis en évidence plusieurs bifurcations de Hopf [1942] et une cascade de doublement de période conduisant à un attracteur chaotique ayant la forme d’un escargot. L’élaboration de ce modèle, qui est également un (SDALR), constituait l’un des objectifs de cette étude. Il sera tout d’abord présenté dans ce mémoire, puis utilisé afin de mettre en application la nouvelle méthode de détermination de l’équation de la variété lente, et permettra ensuite d’illustrer le concept de déploiement
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