Spécificités d’un environnement

Spécificités d’un environnement .

Lors de l’élaboration d’un environnement d’apprentissage multimédia interactif, l’enseignant peut se contenter d’apporter sa contribution, au macro-niveau des objectifs et au méso-niveau didactico-pédagogique, et passer ensuite la main à un spécialiste de la programmation. Un tel choix ne permet cependant pas à l’enseignant de s’investir dans le micro-niveau de l’interfaçage des situations d’apprentissage. Or, c’est précisément à ce dernier niveau qu’a lieu la mise en place de tout un ensemble d’opérations liées à ces caractéristiques essentielles du média informatique que sont l’interactivité, le feedback, la gestion et le suivi du parcours de l’apprenant. Puisque, nous l’avons vu dans le point précédent, des langages auteur existent qui permettent à l’enseignant d’assurer lui-même la mise en machine, nous pensons que celui-ci a tout intérêt à aller jusqu’au bout de sa démarche de médiatisation afin d’être au plus près de l’apprenant qu’il veut guider. Certes, la conception des interfaces d’apprentissage n’est pas sans poser de multiples problèmes, en raison même de leur hétérogénéité et de leur complexité. D’après Linard, [l’écran] condense au moins trois domaines fonctionnels différents : celui des contenus et de la tâche proprement dite ; celui de la navigation de l’utilisateur dans le micromonde artificiel proposé par le système ; celui du pilotage par l’apprenant de son propre apprentissage par rapport aux deux autres domaines (2001 : 213). Dans cette perspective, poursuit-elle, le concepteur des interfaces d’apprentissage doit se demander « comment assister au mieux pour l’apprenant l’interaction entre les trois domaines imbriqués de la tâche, de la navigation et de la conduite de son propre apprentissage ». Les rapports entre l’activité de l’apprenant et la réaction de l’interface feront l’objet de notre premier point. L’aide fournie par l’interface à l’autopilotage de l’apprentissage sous forme de feedback est directement liée à l’analyse de l’activité de l’apprenant : ce sera notre deuxième point. Quant au concept de navigation il renvoie à celui d’hypertexte, caractéristique quasi emblématique des NTIC. Enfin, dans la perspective d’un développement itératif des interfaces d’apprentissage, nous montrerons l’utilité de conserver la trace du parcours de l’apprenant. 4. 2. 1. Interactivité et interaction Les auteurs du domaine soulignent tous l’omniprésence du terme interactivité associé aux nouvelles technologies. D’autres termes s’y rajoutent, en premier lieu celui d’interaction, mais aussi échange et dialogue, concepts qui appartiennent tous trois également au domaine de la DLE. Peut-on alors considérer les concepts d’interaction et d’interactivité comme « un pont entre la didactique des langues et le développement d’environnements multimédia »517 ? Nous allons explorer brièvement quelques définitions de ces deux concepts, puis étudier la notion de degrés d’interactivité, et enfin en tirer des conséquences sur le développement des didacticiels. — Interactivité et interaction : quelques définitions Considérons tout d’abord la définition d’interactivité donnée par l’EU : 1. caractère d’un média qui favorise l’échange avec le public ; 2. activité de dialogue entre une personne et une information donnée par une machine. La première entrée renvoie aux multiples usages contemporains du couple interactif/interactivité, en lien ou non avec l’informatique. C’est le mot magique des années 1990, dont l’usage confère aux noms des entreprises nouvelles ou qui créent une nouvelle filiale le sceau de l’indispensable modernité518. On parle beaucoup au milieu des années 1990 de télévision ou de radio « interactive » : il peut s’agir – à un premier niveau d’interactivité – de donner la parole aux auditeurs ou téléspectateurs pour intervenir en direct dans les émissions (par téléphone). Mais un deuxième niveau d’interactivité permet à l’utilisateur d’intervenir directement dans le déroulement de l’émission (qui peut être une fiction)519. La deuxième entrée, quasiment identique à la définition donnée par le GRE, correspond davantage à la notion d’interactivité telle qu’on la conçoit dans le domaine des environnements d’apprentissage multimédias. Elle rejoint les définitions citées ci-après : L’interactivité est la qualité d’un objet de réagir aux sollicitations qu’on lui fait et de fonctionner à l’aide d’un échange. Le micro-ordinateur, dans l’usage courant, ne marche pas tout seul. […] Cet échange se rapproche de la forme d’un dialogue (Mucchielli, 1987 : 13). [L’interactivité technologique implique] la notion d’un dispositif capable de réponses différenciées, en réaction à une intervention humaine (Bélisle, 1998)520. On parlera d’interactivité chaque fois que l’utilisation d’un programme informatique fera appel à l’intervention constante d’un utilisateur humain. En ce sens interactif s’oppose à automatique (Balpe, 1990)521. Quel est l’élément nouveau, facultatif dans les situations qualifiées d’interactives au sens de la première entrée mentionnée ci-dessus, mais indispensable dans ce deuxième sens ? Cet objet susceptible de réagir aux sollicitations de l’utilisateur, ce dispositif, c’est le programme informatique (parfois désigné par son support matériel, l’ordinateur). Le cas du vidéodisque évoqué par Demaizière et Dubuisson illustre bien le fait que – dans les nouvelles technologies audiovisuelles – « le niveau supérieur d’interactivité est lié à l’ordinateur et non au vidéodisque » (op. cit. : 32-33). Notons d’ailleurs que c’est précisément la conjonction de la qualité intrinsèque d’interactivité de l’ordinateur et des progrès que celui-ci a faits dans la gestion des images et des sons qui a sonné le glas du vidéodisque et du « disque compact interactif » dans les années 1990. Le concept d’interaction est attesté depuis plus longtemps que celui d’interactivité, et il s’applique à un nombre plus important de domaines. Le Grand Larousse en 5 volumes (1987) distingue deux acceptions principales (outre le domaine de la physique) : 1. réaction réciproque de deux phénomènes l’un sur l’autre ; 2. Interaction sociale : relation interpersonnelle entre deux individus au moins, par laquelle les comportements de ces individus s’influencent mutuellement et se modifient chacun en conséquence. Dans le domaine de l’apprentissage en général et dans celui des langues en particulier, il convient de rajouter un troisième sens au terme interaction. Lorsque Ellis (1994) considère le rôle de l’input dans l’acquisition de la langue, il distingue trois conceptions : behavioriste, mentaliste et interactionniste. Les théories du premier type accordent une grande importance à l’input, facteur externe d’apprentissage. Pour les théories du deuxième type, au contraire, l’input sert uniquement de déclencheur du module interne d’apprentissage dont chaque individu est muni : c’est le modèle nativiste de Chomsky. Quant à l’étiquette interactionniste, nous dit Ellis, elle s’applique à deux principaux types de théories qui souhaitent conjuguer facteurs externes et facteurs internes : • According to cognitive interactionist theories, acquisition is seen as a product of the complex interaction of the linguistic environment and the learner’s internal mechanisms, with neither viewed as primary. […] • The second type […] is more social in orientation. The principle that informs these theories is that verbal interaction is of crucial importance for language learning as it helps to make the ‘facts’ of the L2 salient to the learner (op. cit.: 243-244). La distinction introduite ici par Ellis n’est pas toujours pertinente ou perceptible, comme on peut le voir si l’on se reporte, par exemple, au modèle présenté par Chapelle522. En effet, ce modèle interactionniste conjugue d’une part l’interaction des facteurs externes (apport langagier) et des facteurs internes (intégration de la saisie langagière) et de l’autre l’interaction sociale lorsque « la production langagière des étudiants sollicite un apport langagier de la part d’interlocuteurs [processus de négociation de sens] » (Chapelle, 2001 : 28). Il est également possible d’établir un pont entre l’interactionnisme et la cognition située, comme le fait Weil-Barais : [pour le courant interactionniste] c’est dans les interactions que les compétences individuelles se construisent et prennent sens. […] Une des particularités de cette approche c’est que le contexte n’est pas conçu comme une ‘réalité’ extérieure au sujet mais qu’il est constitutif de son activité psychologique (1993 : 54-55).

Deux types d’interactivité.

Ainsi que le rapportent Demaizière et Dubuisson (1992 : 30 et s.), de nombreux auteurs ont cherché à établir une typologie de l’interactivité, qui prend souvent la forme d’une échelle de degrés situés le long d’un continuum. Certains auteurs établissent jusqu’à cinq523 ou six524 degrés, tandis que d’autres se contentent d’opposer une interactivité machinique à une interactivité mentale ou humaine, proche de l’interaction. Bien que les échelles comportant plus de trois degrés permettent de mettre en évidence de manière assez fine les caractéristiques de différents dispositifs plus ou moins interactifs, nous pensons qu’il est suffisant pour notre propos de considérer deux ou trois degrés d’interactivité. Les auteurs qui considèrent deux types d’interactivité ne raisonnent pas en termes de degrés mais de dichotomie. Barchechath et Pouts-Lajus, cités par Demaizière et Dubuisson, distinguent ainsi : • l’interactivité fonctionnelle [qui est] liée à l’ergonomie des échanges d’information avec la machine […], à la convivialité ; • [et] l’interactivité intentionnelle [qui] concerne l’engagement de l’auteur du logiciel face à l’utilisateur525. Dans leur commentaire, Demaizière et Dubuisson estiment que c’est principalement dans le domaine de l’interactivité fonctionnelle, de l’ergonomie des interfaces que des progrès importants ont eu lieu ces dernières années. Ces auteures pensent en revanche que beaucoup de progrès restent à faire dans le deuxième domaine, celui du dialogue entre le concepteur et l’utilisateur. En EAO, par exemple, « on aimerait sentir dans le didacticiel l’intention du concepteur de donner sa place à l’apprenant, de le laisser exprimer ses questions et commentaires » (idem). Un point de vue très semblable est exprimé par Jacquinot, qui oppose : • d’un côté l’interactivité machinique, fonctionnelle, transitive, celle qui permet à l’utilisateur de rétroagir sur le programme […] gérant la communication entre l’utilisateur et la machine ; • et, de l’autre, l’interactivité mentale, intentionnelle, intransitive […] qui gère la communication entre l’utilisateur et l’auteur du logiciel, présent à travers ses choix de contenu […] de structure […] de navigation, de rhétorique, de contrat énonciatif (1997 : 160). On notera que cette auteure accorde une fonction de gestion de communication à l’échange avec la machine, alors que le modèle des auteurs précédents ne parlait que d’information. En outre, Jacquinot affirme que la conception de l’interaction intentionnelle doit précéder celle de l’interaction fonctionnelle, ce qui entraîne comme conséquence pratique la nécessité de ne « faire intervenir les informaticiens qu’au dernier moment » (op. cit. : 161). Enfin, pour cette auteure, « l’interactivité en soi n’est pas un gage d’efficacité de l’apprentissage ». La notion d’interactivité est essentielle dans la conception du design des environnements d’apprentissage multimédia exposée par Depover et al. (1998). Ces auteurs consacrent deux chapitres à ce sujet, dont l’un est intitulé « Formes et modalités d’une interactivité significative ». Malheureusement la rédaction de ces deux chapitres est peu rigoureuse, floue et souvent répétitive, ce dernier défaut étant probablement dû au fait qu’il s’agit d’une rédaction à trois auteurs. Nous retiendrons malgré tout que le point de vue de ces auteurs oppose, comme chez les deux auteurs précédents, une interactivité mécanique à une interactivité significative. La première est statique, elle représente un objet passif contenant seulement des informations, elle utilise les caractéristiques techniques du dispositif. La seconde est dynamique, bidirectionnelle, elle simule un dialogue interpersonnel ; elle est « le moyen de communication des intentions pédagogiques du professeur-concepteur et […] le lieu […] de réflexion de l’apprenant qui […] construit de nouvelles connaissances » (op. cit. : chapitre 4, passim). Pour citer un quatrième exemple, Bélisle et Linard (1996) franchissent un pas supplémentaire par rapport aux points de vue cités ci-dessus, en opposant non pas deux types d’interactivité mais interactivité et interaction. Ces auteures mettent en garde contre un optimisme technologique qui : se fonde sur une confusion systématique entre interactivité technique (réponse de la machine à une commande de l’usager) et interaction humaine (interrelation significative entre deux personnes ‘à propos’ et ‘en vue de’ quelque chose d’intéressant qui les concerne (op. cit. : 25)526. On peut mettre cette opposition interactivité technique / interaction humaine en parallèle avec le couple médiatisation technique / médiation humaine de Linard (1996 : 250 et s.). Il semblerait que cette auteure, en réaction contre une vision anthropomorphique des dispositifs d’apprentissage interactifs, ait tendance à occulter leur composante humaine. Sa définition de l’interaction527 renvoie nécessairement à une interrelation entre des personnes, ce qui exclut la possibilité d’une interaction humain–machine. Corrélativement, et quel que soit le degré d’implication de l’humain dans la machine, l’interactivité reste toujours d’ordre technique. Ce point de vue rejoint celui exprimé en termes moins catégoriques par Demaizière et Dubuisson : La véritable interactivité […] tend vers un véritable échange bidirectionnel entre l’humain et la machine. […] Certains diraient qu’au niveau maximum, l’interactivité ne se distingue plus de l’interaction même si elle est médiatisée. Nous resterions plus prudentes (de par notre formation de linguistes nous ne distribuons pas la capacité de langage aux machines aussi aisément que d’autres) (op. cit. : 37).

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Pour résumer, nous proposons de ranger les points de vue sur l’interactivité cités ci-dessus en deux catégories. Certains auteurs distinguent deux types d’interactivité : une interactivité machinique, lieu de la gestion des rapports utilisateur–machine ; une interactivité intentionnelle, ou significative, qui gère les rapports utilisateur–concepteur (du logiciel) via la machine. Ils parlent, pour le premier type, d’intervention, de commande et de réponse, d’échange d’information ; pour le deuxième de dialogue et de communication. D’autres auteurs hésitent ou répugnent à parler de dialogue homme–machine. Même si un concepteur humain est bien « virtuellement » présent dans la machine, cette virtualité, qui résulte de l’opération de médiatisation, entraîne au mieux une « simulation de dialogue » et non un dialogue véritable528. En conséquence, ces auteurs préfèrent associer interactivité et technique d’une part et réserver le terme d’interaction au vrai dialogue humain–humain de l’autre529. Une analyse de l’interactivité en termes de degrés permettrait-elle, en situant la position relative des concepts d’échange, de dialogue et de conversation le long d’un continuum, de réconcilier ces deux points de vue ? — Degrés d’interactivité et degrés d’interaction Parmi les auteurs qui établissent une échelle des degrés d’interactivité, Chanier cherche à rapprocher – autour de la notion d’interactivité telle qu’elle peut se réaliser en ALAO – les points de vue de deux domaines a priori fort éloignés qui sont l’informatique d’une part et les sciences du langage de l’autre. Nous résumons ci-après son propos530. • Le premier degré d’interactivité est celui où l’utilisateur communique quelque chose au système, qui se contente de l’exécuter. • Au degré deux de l’interactivité, le système offre une rétroaction ; il informe sur l’opération en cours ; on a un début de relation bidirectionnelle. À ce niveau, la qualité de l’interactivité dépend de la qualité de la représentation des connaissances décrites par les concepteurs du système et de la faculté du système à adapter ses réactions à celles de l’apprenant. • Un troisième degré est atteint lorsque l’apprenant peut agir sur les informations ou les représentations mises à sa disposition par le système. Le concepteur cherche à créer les conditions d’un dialogue système–apprenant. La connotation d’immédiateté (court délai entre action de l’utilisateur et rétroaction du système531) cède la place à une interaction définie comme constitution d’un mode conversationnel. Dans ce sens, l’interaction (verbale et non verbale) entre individus est considérée comme un lieu où se manifestent des formes sociales, cognitives, linguistiques d’organisation humaine. C’est à ce troisième niveau d’interactivité que se rejoignent les conceptions des chercheurs en EIAH532 et en ALS. Nous avons déjà évoqué le modèle socio-affectif de l’interaction selon van Lier (1996), et plus particulièrement la distinction que cet auteur fait entre monologue, dialogue et conversation. Cette distinction s’inscrit dans le cadre d’un modèle où l’auteur classe les différents types d’interaction sociale en fonction de leur aptitude à favoriser l’apprentissage. Il nous a donc paru que ce modèle pourrait fournir un cadre susceptible d’accueillir l’échelle des degrés d’interactivité telle qu’elle est définie ci-dessus par Chanier et plus haut par d’autres. Nous retiendrons du modèle de van Lier les éléments permettant d’éclairer les rapports entre interactivité et interaction. Ce modèle comprend quatre niveaux : Transmission, IRF Questioning533, Transaction et Transformation (cf. Figure 4.4 ci-dessous). 1. Transmission : flux d’information ou d’instructions d’une personne à une autre, selon un mode monologique ; 2. IRF Questioning : la planification et l’orientation du discours sont entièrement déterminées par celui qui pose les questions ; le « dialogue Socratique » appartient à cette catégorie ; les rôles du questionneur et du répondant sont nettement séparés. 3. Transaction : échange bidirectionnel d’information dans lequel l’orientation du discours, la pertinence des propos et la planification des événements sont décidées en commun par les participants. 4. Transformation : conversation gérée en commun pour une co-construction du sens et des événements. Figure 4.4 – From transmission to transformation (Van Lier, 1996: 179, Figure 20) L’auteur précise que la plupart des activités pédagogiques seront hybrides, faisant appel à plusieurs types de modalités. Comme on le voit sur la Figure 4.4, les paramètres de la situation d’interaction pédagogique sont disposés selon un continuum centrifuge qui va du non contingent au totalement contingent. Rappelons que, pour van Lier, le concept bifacial de contingence renvoie à la fois au connu et à l’inconnu, au prévisible et à l’imprévisible. C’est au niveau 4 des interactions, celui de la transformation, où la contingence est maximale, que se trouvent les conditions les plus favorables à l’apprentissage. Parmi les caractéristiques de l’interaction pédagogique ainsi situées sur un continuum, le triplet monologue–dialogue–conversation nous intéresse particulièrement ici. En reprenant la typologie de Chanier, nous proposerons donc de faire correspondre le degré 1 d’interactivité de cet auteur au niveau Transmission du modèle de van Lier ; le degré 2 au niveau 2 du « dialogue pédagogique » et le degré 3 au niveau 3 de la Transaction. Peut-on aller jusqu’à faire correspondre le degré 3 d’interactivité au niveau 4 de la Transformation et du « mode conversationnel » ? C’est là une question cruciale. Comme nous l’avons déjà dit, le modèle conversationnel a les faveurs des néo-cognitivistes534. Van Lier expose lui aussi en quoi la conversation procure un cadre idéal d’apprentissage : Conversation, or any language use which plays with contingencies (storytelling, for example), can […] be expected to be the most stimulating environment for learning. Conversational interaction naturally links the known to the new. It creates its own expectancies and its own context, and offers choices to the participants (op. cit.: 171). Transposé dans le domaine des NTIC, l’équivalent de l’interaction conversationnelle entre le professeur et l’élève serait le tutoriel intelligent (c’est-à-dire doté d’une activité de degré 3 selon Chanier, et fonctionnant donc sur un mode conversationnel). Mais, comme nous l’avons dit n’existe pas, Laurillard affirme que le tutoriel intelligent n’existe pas. En conclusion, nous avons montré la possibilité de faire correspondre – jusqu’à un certain point – une vision de l’interactivité comme un continuum de degrés avec un modèle de l’interaction pédagogique organisant également des modalités d’interaction sociale le long d’un continuum régi par l’opposition non contingent/contingent. L’interactivité d’un système informatique d’apprentissage humain peut-elle atteindre les qualités optimales de l’interaction pédagogique, celles qui sont situées sur le cercle extérieur du modèle présenté par van Lier ? Les chercheurs en EIAH en semblent convaincus, comme Chanier qui n’hésite pas à parler de « constitution d’un mode conversationnel impliquant un dialogue apprenant–système » (op. cit. : 59). La communauté des psychologues de l’apprentissage et des didacticiens est plus réservée : on évoque la « simulation de dialogue » (Demaizière, 1983), on insiste sur l’indispensable « présence du formateur et des pairs, comme représentants de l’ordre du social dans le cognitif » (Bélisle et Linard, 1996), on rappelle que le seul vrai dialogue possible ne peut avoir lieu qu’entre professeur et élève535. Qu’ils considèrent l’interactivité de type conversationnel comme un idéal vers lequel il faut tendre ou une caractéristique déjà présente dans des EIAH évolués, tous les acteurs des domaines concernés partageraient sans doute le point de vue exprimé par Depover et al. : La recherche de l’interactivité optimale comme concept intégrateur devient […] l’élément autour duquel il s’agit d’axer toutes les activités de formation et d’apprentissage (1998 : 137).

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