Sonde Mars ExpressPréparation aux observation orbitale multi-angulaire en exploration planétaire
Photométrie Martienne
Les missions martiennes
Les sondes orbitales
La planète Mars a été observée depuis longtemps. Mais comme pour toutes les planètes du système solaire, ce sont les missions spatiales qui ont apporté la majorité des connaissances que l’on a de cet objet. Depuis le milieu des années 60, de nombreuses missions ont été envoyées vers Mars que ce soit des sondes en orbite ou des stations et des rovers au sol Un rapprochement entre la terre et Mars a lieu tous les 26 mois : période favorable à l’envoi de sondes d’exploration inhabitées. Celles-ci mettent alors environ 6 mois pour parvenir aux abords de la planète Mars. L’orbite de Mars étant excentrique, les distances d’opposition très favorables suivent un cycle principal d’environ 13 ans. La sonde Mars Express (MEx) a été lancée pendant la fenˆetre de 2003, particulièrement favorable. Les instruments qu’on retrouve à bord des sondes orbitales martiennes (cf. Tab. 1.2) comprennent des caméras, des spectromètres, des radars et des senseurs géophysiques. Aujourd’hui, les progrès dans la connaissance de Mars ont permis la mise au point et l’envoi d’instruments de plus en plus dédiés. à l’étude de l’atmosphère et de la surface (cartographie, composition minéralogique et élémentaire, propriétés thermiques,…). En cela nous avons dépassé le stade purement exploratoire et de reconnaissance.
Orbiteur et charge utile
L’énergie disponible est calculée pour la distance de Mars à la Terre. (NA-VIS) : Narrow angle visible camera, (WA-VIS) : Wide angle visible camera, IR : InfraRed Parmi les caméras embarquées on peut distinguer : les caméras à large champ et celles à haute résolution. Les 2 types sont complémentaires (ex : MOC WA et MOC NA, HRSC et SRC). La photométrie est favorisée par les caméras à champ large comme MOC-WA, HRSC et CTX parce que les images peuvent ˆetre répétées sur une mˆeme région. La figure Fig. 3.2 à la page 81 récapitule la résolution et la sensibilité des caméras. Une idée du champ visuel de chaque caméra est donnée par la couverture cartographique sur le tableau. 1.3. Les sondes martiennes partagent avec les sondes terrestres la recherche de très haute résolution avec aujourd’hui l’envoi sur place d’instruments très précis dans leurs pointages. Actuellement, les images les plus fines proviennent de la caméra martienne HiRISE (cf. Tab. 1.1). Si les premières caméras étaient analogiques, les caméras des orbiteurs actuels possèdent toutes des capteurs CCD (cf. page 82). Leur mode d’acquisition le plus fréquent étant le mode dit push-broom (cf. Fig. 1.1) o`u le détecteur composé d’une ligne de pixels est utilisé à la façon d’un scanner pour acquérir progressivement une image au cours du défilement orbital de la sonde. Fig. 1.1. Mode ”Push-Broom” Les avantages de ce mode sont nombreux : • Un capteur linéaire (comprenant une seule ligne de pixel) est suffisant pour acquérir une image, le capteur étant placé perpendiculairement à la trace au sol (sens de défilement) de la sonde. • Des images multiangulaires et multispectrales peuvent ˆetre acquises avec le mˆeme système optique, sur un mˆeme plan focal, sans réduire l’énergie reçue, gage d’un bon rapport signal sur bruit. • L’électronique est plus simple, le temps de lecture du détecteur beaucoup plus rapide… 57 L’inconvénient du mode push-broom est la non simultanéité des observations et les déformations géométriques dues aux mouvements du satellite, mais ces derniers sont habituellement très bien corrigés. Ainsi, pour l’imagerie, les caméras martiennes possèdent pour la plupart des capteurs linéaires et fonctionnent la plupart du temps en mode push-broom. C’est le cas de la caméra HRSC. Tab. 1.3. Historique de toutes les images acquises Fig. 1.2. Imagerie hyperspectrale : les images sont acquises simultanément pour plusieurs canaux spectraux Les moyens actuels permettent d’obtenir une image o`u à chaque pixel est associé un spectre (domaine UV-VIS-NIR-IR) grˆace à l’utilisation de filtres ou d’un dispositif dispersif de la lumière (cf. Fig. 1.2). Avec l’augmentation de la résolution spectrale et spatiale, ce type de données est très volumineux. HRSC est plutˆot un capteur multi spectral ou tout simplement couleur car il ne possède que 4 filtres couleur différents en regard de OMEGA et CRISM qui possèdent respectivement 352 et 560 canaux. Aujourd’hui, les ”images infrarouges proches” ont des résolutions comparables à celles du visible. Dans le cas des observations martiennes, elle sont issues des instruments THEMIS et maintenant CRISM. Ces instruments ont besoin d’ˆetre refroidis, mais cela suppose en plus d’une plus grande complexité technique, une faible durée d’activité de l’instrument parce que le liquide de refroidissement finit par s’évaporer. Le choix pour les sondes martiennes a été une perte de précision au prix d’une plus grande robustesse. Ainsi par exemple, THEMIS donne surtout une répartition relative de l’émission infrarouge alors que TES, très peu résolu, donne une mesure absolue. Les 2 instruments sont complémentaires. 58 Les données infrarouges donnent des informations sur les propriétés physiques de la surface. Les images infrarouges dévoilent des régions très différentes. Elles sont sensibles aux rayonnements émis (cf. page 25) et donc à des différences de température. Une image de jour montre la topographie et les unités qui ont absorbé le plus d’énergie, les versants orientés vers le Soleil étant plus chauffés que les autres. La nuit, le paysage infrarouge a une autre allure, nous sommes alors sensibles à l’inertie thermique, c’est-à-dire à une différence de vitesse de refroidissement. Il conserve plus de chaleur et la restitue plus lentement que ne le ferait une poudre de mˆeme composition. Cette inertie thermique est controlée par la taille des grains, la porosité et le degré d’induration. C’est un excellent révélateur d’affleurement rocheux immédiatement sous jacent et de la proportion de roche présente à la surface [Nowicki and Christensen, 2007]. Nous pouvons ainsi ˆetre plus sensibles à la présence de grosses particules qu’à des affleurements rocheux [Christensen, 1986], [Hynek and Singer, 2007]. Jusqu’à présent, en dépit des nombreuses observations réalisées en imagerie, aucun instrument orbital n’a véritablement été dédié à une étude photométrique de la surface martienne. HRSC représente une toute première possibilité, suivie de l’instrument CRISM. b. Les atterrisseurs Cinq atterrissages ont réussi sur Mars (cf. Tab. 1.4), tous à basse latitude, sauf Viking 2 à 48◦N, et tous en terrain plat pour diminuer les risques d’échec. La phase d’atterrissage a été menée grˆace à des rétrofusées ou des ballons. Certains de ces atterrisseurs étaient mobiles : rover Sojourner (Pathfinder), Spirit (MER-A), Opportunity (MER-B). Mission Long. Long. Lat. Quadrant Région Context Période (◦E) (◦W) (◦N) MOC-WA Mars2 48.8 313.2 -44.2 MC-27 Hellespontus Montes Terrain cratérisé 1971(échec) Mars3 202 158 -45 MC-24 Terra Sirenum Terrain cratérisé 1971(échec) Mars6 335 25 -24 MC-19 Margaritifer Terra Terrain cratérisé 1974(échec) Vl1 312 47.97 22.48 MC-10 Chryse Planitia plaine volcanique 1976-1980 Vl2 134.26 225.74 47.97 MC-7 Utopia Planitia éjecta 1976-1983 Pth 327 33 19 MC-11 Ares Vallis Vallée de débacle 1997 MPL <75 MC-1 Northern Plains Dépˆots stratifiés 1999(échec) MER-A 175.47 184.53 -14.57 MC-23 Gusev Crater Fond de cratère 2004-… MER-B 354.47 5.53 -1.95 MC-19 Meridiani Planum Sédimentaire 2004-… Phoenix ≈233 ≈127 ≈68 MC-1 Northern Plains permafrost 2008 Tab. 1.4. Lieu d’atterrissage : Long. (Longitude) Lat.(Latitude) Quadrant (cf. page 173) Les observations au sol, notamment lors des parcours des rovers, donnent une meilleure compréhension des propriétés (nature, physique) de la surface et de l’environnement martien. Ces données sont capitales pour documenter à différentes échelles spatiales l’aspect de surface et ˆetre confrontées aux données orbitales de HRSC. A l’heure actuelle, deux rovers de la mission réalisent des observations de la surface martienne. Chacun dispose de 7 caméras CCD [Crisp et al., 2003], chacune d’elles comprenant des capteurs CCD (1024 ∗ 1024). Celles qui nous intéressent particulièrement sont : • Les 2 caméras panoramiques (PanCam) (cf. Fig. 1.3), caméras les plus perfectionnées de longue focale, équipées de 13 filtres (domaine allant de 400 à 1000 nm). Outre les images de la surface, elles acquièrent quotidiennement une image du Soleil pour mesurer l’opacité et aussi la cible étalon de couleur et de contraste installée sur le dos du rover (cf. Fig. 1.4, Fig. 1.3). 59 • Les 2 caméras de navigation (NavCam), sans filtre, sont utilisées pour le repérage et la sélection des cibles étudiées ensuite par les PanCam. Les NavCam acquièrent aussi à chaque déplacement du rover un panorama sur 360◦. • L’imageur microscopique (MI) placé au bout du bras et muni d’un protège poussière servant parfois de filtre, permet d’acquérir les images de résolution millimétrique. Un pixel couvre 50μm, mais résoudre une poudre demande plusieurs pixels, qui amène la limite inférieure de taille aux alentours de 200μm. Fig. 1.3. Charge utile des rovers MER (PanCam FOV 16◦X16◦, NacCam FOV 45◦X45◦) Cette panoplie d’instruments permet de véritablement documenter les propriétés liées à l’état de la surface martienne, en couvrant les échelles allant des grains, aux sols, aux roches, aux affleurements et aux paysages. Fig. 1.4. Cible de référence Chaque rover est équipé d’une cible de référence dans le champ de vue de PanCam. Cette dernière est constituée de 4 étalons de couleurs, de 3 cercles d’intensités différente, et d’une barre verticale. Cette cible a été calibrée au sein de notre laboratoire UMR 5562 DTP ’Dynamique terrestre et planétaire’. La cible est régulièrement imagée pour corriger radiométriquement les images PanCam et construire les images couleur [Kinch et al., 2007]. Elle procure, couplée avec des observations du Soleil, une mesure de l’opacité atmosphérique et, couplée avec une mesure de l’énergie disponible, elle met en évidence des redistributions de poussière sur le rover. Elle permet aussi une mesure de la proportion d’énergie lumineuse diffuse (cf. page 14) en mesurant l’intensité des zones à l’ombre comparée à la zone éclairée. Ce rapport moyenné pour les trois cercles de brillance différente et pour tous les filtres permet un affinage des modèles futurs. Bien que mobiles, les 2 rovers ont réalisé à plusieurs reprises des observations photométriques (multiangulaires) d’une mˆeme scène au gré des arrˆets comme lors du blocage d’Opportunity dans les dunes ’Purgatory’ ou du stationnement de Spirit durant la saison froide. En tout, 16 ensembles de données ont été obtenus pour Opportunity, 8 pour Spirit au cours de leurs 400 premiers sols de mission ([Johnson et al., 2006a,b]).
Photométrie martienne : études antérieures
Observations et résultats depuis la Terre La photométrie martienne a débuté par des observations depuis la Terre avec comme premiers ”detecteurs” des plaques photographiques. Outre les problèmes liés à l’atmosphère terrestre réduisant la résolution spatiale d’une centaine à quelques centaines de kilomètres à la surface de Mars, ces observations sont limitées par le fait que : • Elles ne sont possibles qu’en périodes de rapprochement planétaire tous les 26 mois. • Elles sont limitées aux faibles phases (< 45◦). Mˆeme observée depuis l’espace par le télescope spatial Hubble grˆace à sa caméra WFPC2 la résolution atteinte à la surface de Mars est de la dizaine de kilomètres [Bell et al., 1999] lors des oppositions (cf. page 73). Fig. 1.5. Contribution spectrale surface / atmosphère : exemple pour l’instrument TES Mars est une planète photométriquement variée. La réflectance augmente avec la longueur d’onde donnant sa couleur rouge caractéristique. L’albédo dans le visible en bande large s’étend entre 0.08 pour les régions les plus sombres (Syrtis Major) jusqu’à 0.30 pour Terra Arabia [De Vaucouleurs, 1967]. Les calottes polaires ont un albédo proche de 1. A 673nm, l’albédo de diffusion simple varie de 0.55 pour Syrtis major à 0.84 pour Amazonis Planitia [Soderblom et al., 2006a]. Généralement, à fort albédo la surface se comporte de façon plus diffuse. Dans tout le visible, les terrains sombres restent plus sombres que les autres régions à l’exception du bleu o`u la différence d’intensité s’estompe vers le limbe [Erard, 2001]. Aux fortes émergences, les rayons lumineux traversent l’atmosphère sur un trajet plus long, augmentant ainsi la part de l’atmosphère dans le signal reçu. L’atmosphère martienne est une gˆene aux courtes longueur d’onde o`u justement, la surface réfléchit moins d’énergie (cf. Fig. 1.5). Par ailleurs, la fonction photométrique apparait plus diverse à mesure que la longueur d’onde augmente ce qui suggère une moins grande contribution de la diffusion multiple causée par l’atmosphère [Combes et al., 1991, Drossart et al., 1991, Clancy et al., 2003]. L’indice de Minnaert (k), appelé aussi ’limb darkening’ (cf. page 43) a été estimé dans le visibleproche IR dès les années 90 à l’observatoire du Pic du Midi [de Grenier and Pinet, 1995]. Il s’étend de 0.35 à 1, la moyenne étant de 0.75, la dispersion étant plus grande pour les terrains brillants [Pinet and Rosemberg, 2001]. Récemment à une longueur d’onde plus grande de 1200 nm (instrument PFS de Mars-Express) Esposito et al. [2007] ont retrouvé ces tendances et montré aussi que l’albedo normal est plus faible que l’albédo de Lambert. En effet un indice de Minnaert k < 1 (cf. page 43) traduit que le facteur de réflectance augmente avec les angles d’incidence et d’émergence. Tout albédo mesuré sur des terrains avec des angles non nuls, et qui modélise la surface comme lambertienne est donc surestimé. C’est un corrolaire du résultat précédent (k < 1) et qui traduit que l’albédo de Lambert surestime la réflectance s’il est calculé pour des angles d’incidence et d’emergence non nuls. Le paramètre k augmente aussi généralement avec l’albédo et la longueur d’onde (cf. page 44). L’interprétation de ce paramètre reste difficile et ambig¨ue mais les hautes valeurs de k dans la littérature sont généralement associées aux terrains à grains fins, et l’inverse pour les plus faibles valeurs [Esposito et al., 2007]. Pour le paramètre d’asymétrie (cf. page 19), Soderblom et al. [2006a] ont présenté récemment des valeurs entre 0.25 et 0.58, mais la faible couverture en phase (<40◦) rend ce paramètre peu contraint
I Physique du rayonnement |