Simuler la baisse de fécondité indienne
La transition démographique
Désignée comme « la révolution démographique » par Adolphe Landry en 19341 , la transition démographique est une théorie admise par tous les démographes et géographes, même si certains aspects restent soumis à des points de vue différents. Dans un premier temps, nous exposerons la théorie de la transition démographique, pour ensuite analyser la progression de ce phénomène dans le monde, ainsi que ses conséquences. Pour terminer, nous analyserons la situation démographique indienne afin d’observer l’évolution et les conséquences du phénomène démographique à l’échelle de ce pays. A) La transition démographique, une théorie admise La transition démographique est définie par M.L. Lévy comme « le passage (…) d’un régime traditionnel d’équilibre démographique à mortalité et fécondité fortes, à un régime moderne d’équilibre, à mortalité et fécondité basses » [Lévy M.L., 1986]. Ce changement s’opère de manière spécifique (voir figure 1). Premièrement, la mortalité baisse alors que la fécondité reste haute. De façon décalée, la fécondité diminue à son tour pour atteindre finalement le taux de mortalité. Lors de la première étape, l’accroissement naturel augmente fortement, pour atteindre son maximum lorsque la fécondité commence à s’incliner. Evidemment, celui-ci diminue au fur et à mesure que le taux de fécondité baisse. Un accroissement naturel fort engendre un puissant accroissement de population. Cette augmentation dépend de la coordination des baisses de la mortalité et de la fécondité. La transition démographique demeure un processus universel [Lévy M.L., 1986] car la théorie s’applique aux pays où la transition est déjà terminée, mais également aux pays avec une transition en cours et pas terminée. Le point commun à tous les types de transition reste « l’antériorité nécessaire de la baisse de la mortalité »2 . L’augmentation de la population peut modifier de manière radicale la structure d’un pays. Tout dépend de la durée de la transition : plus elle est longue, plus la population a tendance à augmenter. Michel-Louis Lévy détermine « le multiplicateur de transition » [Lévy M.L., 1986]. Il s’agit du nombre par lequel la population est multipliée entre le début et la fin du phénomène. Ce multiplicateur est très variable selon le pays considéré : il est inférieur à deux pour l’Irlande, de quatre à cinq pour l’Inde et de quinze ou plus pour le Kenya. De manière générale, plus la transition est récente, plus elle est courte et haute
La baisse de fécondité à l’échelle mondiale
Le point de vue sociologique de la théorie
« On admet en général que tout groupe humain, suffisamment nombreux pour que le calcul de moyennes ait un sens, est biologiquement capable d’une fécondité de 15 enfants par femme » . Malgré ce constat, il reste rare de trouver un groupe social avec une fécondité supérieure à sept enfants par femme. Par conséquent, la natalité a quasiment toujours été limitée notamment par le mariage ou par l’allaitement au sein, allongeant le temps entre deux enfants. Par analogie,, la vie humaine possède un âge limite de 120 ans, mais en moyenne, l’homme dans le monde vit jusqu’à 65 ans. Encore faut-il préciser que cette moyenne est obtenue grâce aux progrès socioéconomiques d’une part, et de la médecine d’autre part. Dans un régime démographique ancien, la durée de vie moyenne se situait entre 20 et 25 ans, notamment à cause d’une très forte mortalité infantile. Yoann Doignon, 2010 16 Ce type de régime démographique se caractérise par des crises de mortalité ayant par exemple pour cause les épidémies et les maladies infectieuses. Afin d’équilibrer cette mortalité, une fécondité de six enfants par femme était nécessaire. Mais à partir du XVIIIe siècle, les progrès de la médecine et de l’hygiène engendrèrent une diminution de la mortalité, principalement de la mortalité infantile. Il s’agit de la première étape de ladite transition démographique : la natalité devient donc excédentaire par rapport à la mortalité, provoquant une forte augmentation de l’accroissement naturel. Avec un certain temps de retard, les hommes comprennent que les enfants survivent de mieux en mieux dans leurs premières années de vie. De ce fait, l’idée se répand qu’il n’est plus nécessaire de concevoir beaucoup d’enfants pour assurer la survie de l’espèce. Les hommes adoptent alors un nouveau comportement démographique, ce que nous observâmes tout d’abord en Europe et en Amérique du Nord : la limitation volontaire des naissances. Par ce procédé, la natalité diminue à son tour sous l’effet des progrès de l’éducation et des programmes de planification familiale.
L’évolution de la baisse de fécondité dans le monde
Si la baisse de la mortalité intervient en Europe dès le XVIIIe siècle, la fécondité, quant à elle, s’atténue sensiblement à l’échelle mondiale dans la deuxième moitié du XXe siècle [A. Grinblat, 2008]. Effectivement, en 1950, la transition démographique n’a quasiment pas commencé dans les pays en développement, alors qu’aujourd’hui elle est terminée pour la plus grande partie du monde. Avant 1950, le monde est divisé en deux zones : celle où la fécondité est inférieure à 3,5 enfants par femme (pays développés), et celle ayant une fécondité supérieure à 6 enfants par femme (pays en voie de développement). A la fin des années 1950, une véritable prise de conscience émerge dans le monde académique et politique concernant le fardeau que représente une fécondité élevée pour le développement économique des pays pauvres. En 1974, à la conférence mondiale de Bucarest, la causalité est inversée : le manque de développement provoque une haute fécondité. Ainsi, s’accroît l’aide au développement dans le but de réduire la fécondité. Entre 1970 et 1990, la fécondité diminue de manière conséquente, soit, à titre d’exemple, de 36 % en moyenne dans les pays en voie de développement. La conférence du Caire de 1994 établit un lien entre la fécondité et les conditions de la femme. De la sorte, les programmes internationaux se concentrent alors essentiellement sur cet axe, tout en réduisant les interventions directes sur la contraception. En moyenne, de 1965 à 2000, les pays en voie de développement ont vu leur fécondité diminuer de 52%. Mais certains pays accusent une baisse de fécondité exceptionnelle, à l’instar de l’Iran, encaissant une baisse de 62 % en 15 ans. Aujourd’hui, seules les régions d’Afrique Centrale, de l’Ouest et de l’Est ont une fécondité supérieure à 5 enfants par femme. Dans le monde, 81 % de la population vit dans un pays dont la fécondité est inférieure à 3 enfants par femme.
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