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Migration du pétrole
L’accroissement de l’enfouissement compacte la roche mère qui, sous l’effet de la pression expulse ses fluides. Le pétrole formé dans la roche mère compacte, quasi imperméable et de porosité fine, est expulsé vers une roche de porosité supérieure (Sallé et Debyser, 1976), comme les grès ou les roches carbonatées. Cette roche est appelée roche réservoir ou roche-magasin.
L’estimation de la distance parcourue par le pétrole est difficile, elle est fonction de plusieurs facteurs : la nature du pétrole, les caractéristiques physiques et lithologiques du réservoir, l’histoire sédimentaire du bassin et les mouvements orogéniques (Sallé et Debyser, 1976). Elle peut être courte (de l’ordre du kilomètre) si les hydrocarbures rencontrent un obstacle et elle peut atteindre plusieurs centaines de kilomètres (Selley, 1998).
La direction de la migration du pétrole par rapport à la roche mère peut être verticale, latérale ou les deux à la fois (Hunt, 1996). La migration verticale peut dans des cas rares l’amener jusqu’à la surface, où il est exposé à l’évaporation et à la biodégradation.
Evolution des pétroles dans le système pétrolier
Le pétrole est thermodynamiquement métastable dans les conditions géologiques (Tissot et Welte, 1984). Sa composition dans les réservoirs varie dans le temps et en fonction de la température. Plusieurs facteurs influent sur ses constituants: le craquage thermique, la biodégradation, le lessivage à l’eau, l’adsorption, le désasphaltage et l’évaporation.
Craquage thermique des huiles
Le pétrole subit dans le réservoir une altération thermique appelée craquage secondaire. La température et le temps sont les facteurs principaux qui contrôlent ce processus et leurs effets sont compensatoires (Tissot et Welte, 1984). Avec l’augmentation de la profondeur et donc de la température le pétrole brut a tendance à devenir de plus en plus léger.
La compréhension, la simulation et la modélisation de ce processus sont les objectifs de nombreuses études dont ce travail fait partie (cf. §I.2).
Biodégradation et lessivage à l’eau des pétroles
Outre le craquage thermique, le pétrole peut subir dans le système pétrolier une biodégradation et/ou un lessivage à l’eau.
La biodégradation
Les roches sédimentaires et les eaux interstitielles contiennent une grande variété de microorganismes qui peuvent utiliser les hydrocarbures comme source d’énergie pour leur métabolisme. Les bactéries susceptibles d’attaquer les hydrocarbures, sont apportées par les eaux météoriques. Elles vivent dans les réservoirs peu profonds, à une température inférieure à 80°C et dans un milieu chargé en eau riche en oxygène (Palmer, 1993, Hunt 1996). Il existe une centaine d’espèces capables de dégrader un ou plusieurs types d’hydrocarbures. Certaines bactéries sont capables d’adapter leur processus métabolique en fonction des hydrocarbures disponibles (Hunt, 1996). Le mécanisme général de l’attaque bactérienne consiste en l’oxydation de l’hydrocarbure en alcool, cétone et acide (Hunt, 1996). La biodégradation produit des huiles riches en composés lourds et pauvres en hydrocarbures.
Le degré de biodégradation d’un pétrole est ainsi classé de faible à extrême en fonction de l’élimination des biomarqueurs, dont l’ordre d’élimination est le suivant: les n-alcanes, les iso-alcanes, les alkylcycloalcanes, les alkylbenzènes, les bicycloalcanes, les stéranes, les hopanes, les diastéranes, les terpanes tricycliques, les stéroïdes triaromatiques et finalement les porphyrines (Hunt, 1996).
Lessivage à l’eau
La solubilité dans l’eau croit des n-paraffines vers les aromatiques en passant par les iso-paraffines et les naphtènes. Ce phénomène de dissolution dans les eaux souterraines concerne surtout la fraction C15- . En général, la perte d’aromatiques légers est un indicateur que ce phénomène de lessivage a eu lieu et particulièrement la perte du benzène et du toluène. Les composés aromatiques soufrés sont encore plus solubles et donc plus lessivés (Palmer, 1993). Le lessivage peut arriver à des profondeurs faibles ou importantes, il augmente avec la température et diminue avec le degré de salinité de l’eau.
Ces deux phénomènes (biodégradation et lessivage) peuvent avoir lieu simultanément et il est parfois difficile de savoir lequel d’entre eux est responsable de l’altération.
Composition du pétrole brut
Le pétrole brut est un mélange très complexe de composés organiques. Les principales familles de composés sont les hydrocarbures saturés, les aromatiques, les résines et les asphaltènes. Les H.C. saturés forment le groupe majoritaire sauf dans les pétroles lourds dégradés. Cette famille comporte des n-alcanes, mais aussi des iso-alcanes et des cyclo-alcanes. La famille des hydrocarbures aromatiques contient des composés de 1 à 5 noyaux aromatiques, substitués par des groupements méthyles ou alkyles. Les composés soufrés des pétroles comportent des thiols, des sulfures, des thiophènes, des benzothiophènes, des dibenzothiophènes, des naphtothiophènes, et des bithiophènes. Les résines et les asphaltènes sont des molécules de haute masse moléculaire contenant des hétéroatomes : N, S et O, d’où l’appellation NSO. Le pétrole brut peut contenir des traces de métaux. Le Vanadium peut représenter jusqu’à 75% de la teneur en métaux suivi du Nickel.
Classification des huiles brutes
Les huiles brutes peuvent être caractérisées par leurs propriétés globales ou par les classes moléculaires qui les composent (Tissot et Welte, 1984).Les diverses méthodes de classification des pétroles bruts peuvent être groupées en deux catégories: classifications des géochimistes et classification des raffineurs (Selley, 1998).
Classification des huiles du point de vue géochimiste
Les géochimistes classent les pétroles par des méthodes qui rendent compte de leur origine, de leur histoire géologique, de leur maturité ou d’autres paramètres géochimiques. Cette classification suit celle des kérogènes. On distingue ainsi les huiles de type I, II et III.
Tissot et Welte (1984) donnent une classification en fonction de la composition majoritaire de l’huile. L’avantage de cette classification est sa possible utilisation pour l’étude de la maturité et de la dégradation des huiles (Selley, 1998).
Classification des huiles du point de vue des raffineurs
Les raffineurs classent les huiles brutes en fonction des hydrocarbures contenus ou de leurs propriétés physiques.
Classification selon la densité
La densité est un critère important de qualité des pétroles bruts car elle constitue une indication sur les rendements des coupes pétrolières en raffinerie. Nous pouvons ainsi classer les bruts en trois types.
La gravité API peut remplacer la densité dans cette classification. Les deux paramètres sont inversement proportionnels; La gravité API est mesurée par un hydromètre avec une échelle développée à l’Institut Américain du Pétrole.
Classification selon la teneur en soufre
La teneur en soufre est un autre critère qui intéresse beaucoup les raffineurs car elle conditionne les traitements de désulfuration qu’ils devront effectuer pour atteindre les spécifications des différents produits pétroliers.
Modélisation du craquage thermique des huiles
principe
Il est admis (Tissot et Welte, 1984) que l’évolution thermique des huiles est contrôlée par la cinétique de craquage. Les processus naturels ont lieu à basse température (50-220°C) et pendant des longs temps (10-350 MA). Pour étudier ces réactions en laboratoire, les géochimistes simulent le craquage par des expériences de maturation artificielle à des températures plus élevées (250-550 °C).
Rappels cinétiques
Vitesse d’une réaction
La vitesse d’une réaction traduit la variation des concentrations des réactifs ou des produits avec le temps.
Pour une réaction de type ( C → Produits ) la vitesse de disparition du réactif est exprimée par: v = – d[C]/dt = k [C] n avec k: constante de vitesse. Elle ne dépend que de la température. n: ordre courant de la réaction.
Loi d’Arrhénius
La constante de vitesse k obéit en général à la loi empirique d’Arrhénius (1889) : k = A. exp(-E/R.T) ou ln k= -E/RT + ln A
Avec A: facteur de fréquence ou facteur préexponentiel (en s-1 pour une réaction d’ordre 1)
E: Energie d’activation (en kcal.mol-1)
R: Constante de gaz parfait (0.001987 kcal.mol-1.K-1)
T: Température absolue (Kelvin)
Dans cette loi, le facteur de fréquence et l’énergie d’activation sont considérés indépendants de la température ce qui n’est pas vrai dans l’absolu. La comparaison avec la théorie de l’état de transition montre que ces paramètres cinétiques dépendent de la température, mais l’approximation reste acceptable dans les applications pratiques (Burnham et Braun,1999).
Conversion
La conversion d’une réaction est le pourcentage du réactif ayant réagi par rapport à sa quantité
initiale. Elle est donnée par la formule:
Conversion = 100 [1-Cr/C0]
Avec Cr : Concentration résiduelle
C0 : Concentration initiale.
Détermination des paramètres cinétiques
Pour une réaction d’ordre 1 on peut écrire:
ln (1-Conversion) = – k.t
Si on trace la courbe de ln (1-Conversion) en fonction du temps, on doit obtenir une droite dont la pente est (-k).
Si les constantes de vitesse suivent une loi d’Arrhénius, la courbe (ln k) en fonction de (1/RT) est une droite dont la pente est (-E) et l’ordonnée à l’origine est (lnA).
La figure I.3. montre la détermination des grandeurs cinétiques du craquage du dodécylbenzène (DDB) à partir de mesures expérimentales de conversion (Behar et al., 2002).
Schémas cinétiques
Deux approches sont possibles pour étudier la stabilité thermique des hydrocarbures, l’une est théorique et l’autre empirique.
Approche théorique
Dans un schéma théorique, il faut décrire précisément les mécanismes des réactions élémentaires. Les paramètres du modèle sont les constantes de vitesse des étapes élémentaires et les données thermochimiques correspondantes. Dans la logique d’un tel modèle la source des valeurs de ces paramètres est indépendante des expériences que le système cherche à modéliser (Savage, 2000). Ces valeurs peuvent être tirées de la littérature, calculées ou estimées. Le rôle des valeurs expérimentales n’intervient pas lors de la construction du modèle mais lors de sa validation.
Approche empirique
Un schéma cinétique empirique est construit par un nombre limité de réactions dont les paramètres cinétiques globaux sont directement calculés par la corrélation des résultats expérimentaux obtenus par une série d’expériences. Les réactions sont qualifiées de stœchiométriques lorsqu’elles rendent compte des bilans massiques et atomiques obtenus expérimentalement.
Dans un tel schéma, les composés ayant une structure similaire et donc une stabilité thermique similaire sont rassemblés dans une classe chimique. L’évolution de chaque classe est représentée dans le schéma cinétique par une seule réaction. L’optimisation de ce schéma permet d’aboutir à un modèle cinétique empirique.
Discussion
Le choix entre les deux approches est un sujet de controverse car chacune des deux approches a ses avantages et ses inconvénients. Le schéma théorique est plus proche de la réalité et comporte toutes les étapes élémentaires, néanmoins il faut d’abord pouvoir écrire le mécanisme radicalaire et connaître les propriétés cinétiques et thermochimiques de chaque étape élémentaire (Savage, 2000). Plusieurs auteurs ont établi un schéma cinétique radicalaire pour des cas simples de composés modèles (Freund et Olmstead, 1988; Dominé, 1989; Dominé et al., 1990,1992,1998; Kressmann, 1991), cependant le recours à cette approche n’est pas possible à l’heure actuelle pour les huiles réelles à cause de leur diversité et de leur complexité ce qui donne un nombre très élevé de réactions (plusieurs millions) et rend le schéma réel très complexe. Une simplification apparaît ainsi indispensable pour réduire la taille du système comme le « lumping » d’espèces que Bounaceur (2001) a utilisé dans son modèle (cf. § I.2.4.2).
L’approche empirique n’a aucun fondement théorique mais permet d’obtenir des paramètres cinétiques globaux. Cette approche a l’avantage de répondre rapidement à la demande de l’industrie qui s’intéresse à l’aspect appliqué et prédictif des modèles cinétiques sans les détails de mécanismes radicalaires compliqués.
Les partisans du modèle réel reprochent au modèle empirique l’approximation sur l’ordre des réactions supposé 1 et le fait de prendre la même énergie d’activation dans les conditions de laboratoire et dans les conditions géologiques (Dominé, 1998). Malgré ces critiques, les modèles empiriques ont pu être extrapolés aux conditions géologiques et leur développement continue pour les rendre plus prédictifs. Il s’avère cependant raisonnable de faire un compromis entre les deux approches, les modèles réels servent à contraindre les modèles empiriques. En retour les modèles empiriques servent à valider les schémas réels.
Travaux antérieurs
Nous allons voir dans ce paragraphe les études expérimentales qui ont abordé la cinétique du craquage thermique de composés pétroliers et les modèles cinétiques publiés dans la littérature. Nous mettrons l’accent surtout sur les études effectuées dans les mêmes conditions expérimentales que celles choisies pour cette étude.
Craquage thermique de composés modèles
L’étude de la réactivité thermique de composés modèles, seuls ou en mélange, apporte une contribution considérable à la compréhension du craquage thermique secondaire du pétrole.
Craquage thermique de composés saturés
Le craquage des hydrocarbures saturés a été étudié par plusieurs équipes et depuis longtemps. Sans donner une liste exhaustive des études dont la littérature est très riche, surtout en ce qui concerne les hydrocarbures saturés légers, nous citerons ici quelques exemples. Nous donnerons ensuite les corrélations de dépendance des constantes de vitesse avec le nombre de carbone, et finirons par le cas d’une paraffine lourde étudiée récemment à l’IFP dans le cadre des modèles géochimiques empiriques.
Rice et al. ont étudié les réactions de décomposition thermique des composés saturés et mis en évidence le mécanisme radicalaire en chaîne (Rice,1931, 1933; Rice et Herzfeld, 1934; Kossiakoff et Rice, 1943).
Fabuss et al (1964) ont étudié le craquage des paraffines (n-C4 au n-C16), des iso-paraffines (C4 au C16), et des naphtènes (C6 au C12).
Dominé (1987,1989, 1990) a étudié le craquage du n-hexane supercritique en milieu confiné et il a établi un modèle radicalaire de craquage comprenant 156 réactions. Un schéma simplifié du craquage du n-hexane a été publié par Dominé et Enguelard (1992), il comporte 31 réactions.
Le n-hexadécane (n-C16) est probablement l’hydrocarbure le plus étudié dans la littérature; il a fait l’objet de différentes études dans des conditions variées de pyrolyse (par ex.: Voge et Good, 1949; Fabuss et al.; 1964; Groenendyk et al., 1970; Rebick, 1981; Blouri et al., 1985; Ford, 1986; Khorasheh and Gray, 1993; Song et al., 1994; Jackson et al., 1995; Wu et al., 1996; Watanabe et al., 2000; Burklé, 2001).
Yu et Eser (1997-a, 1997-b) ont étudié le craquage du n-C10, n-C12 et n-C14 dans des conditions supercritiques et subcritiques.
Watanabe et al. (2001) ont proposé un modèle d’estimation de la constante globale de vitesse basé sur la théorie de Kossiakoff et Rice (1943), et ce pour les n-alcanes de n-C3 à n-C32 pour une gamme de température de 300-700°C.
Corrélations entre la constante de vitesse et le nombre de carbone
Plusieurs chercheurs ont essayé d’établir une corrélation entre la constante de vitesse du craquage des n-alcanes d’une part et le nombre de carbones d’autre part. Tilicheev (1939), Voge et Good (1949) et Yu et Eser (1997-b) ont donné des corrélations empiriques établies à partir des données expérimentales, tandis que Watanabe et al. (2001) ont établi leur corrélation à partir de calculs théoriques. Le tableau I.6 donne ces corrélations et leurs domaines d’application et la figure I.4 présente une comparaison entre elles.
Craquage du n-C25 (Behar et Vandenbrouk 1996)
Le pentacosane (n-C25) a été pyrolysé en milieu confiné à 120 bars pour des températures et des temps différents afin de déterminer la réaction globale et les paramètres cinétiques globaux.
– Températures 325 °C, 375 °C, 400 °C et 425 °C
– Durées: 1 à 360 h
Les auteurs ont vérifié expérimentalement que la réaction de disparition du n-C25 est d’ordre 1 et ont déterminé les paramètres cinétiques de la loi d’Arrhénius:
– Energie d’activation: E = 68,2 (kcal/mol)
– Facteur pré-exponentiel: A = 6,1 × 1017 (s-1) La réaction globale de craquage est: n-C25 → 2% C1-C4 + 31% C7-C14 + 65% C14+(sat) + 2% C14+(aro)
Le résidu insoluble apparaît à un taux de conversion > 90% et cela veut dire qu’il est produit par des réactions de craquage secondaire. Les précurseurs de formation du coke sont les composés polyaromatiques.
Les auteurs ont montré que l’extrapolation des paramètres cinétiques aux conditions géologiques indique que le n-C25 se dégrade à une température supérieure à 180°C pour un temps de séjour supérieur à 10 millions d’années. Cela signifie que dans les réservoirs, les huiles riches en n-alcanes sont stables à haute température et, quand elles commencent à se dégrader, elles donnent des condensats stables au-dessus de 200°C pendant des temps de séjour similaires.
Craquage thermique des composés aromatiques
Les premiers travaux sur la pyrolyse des composés aromatiques n’avaient pas pour but la simulation du craquage secondaire naturel des huiles, mais plutôt des applications industrielles. Les études sur les composés aromatiques dans les huiles sont beaucoup moins abondantes que celles sur les composés saturés.
Craquage du benzène et de ses dérivés
Craquage du Benzène (Louw et Lucas, 1973) et (Brooks et al., 1979)
Louw et Lucas (1973) ont étudié la pyrolyse du benzène en phase gazeuse à 540 °C et à pression atmosphérique, dans un réacteur ouvert sous un flux d’azote. Ils ont trouvé que le benzène donne du biphényle via un mécanisme radicalaire dans lequel interviennent les radicaux H et phényle. Brooks et al (1979) ont étudié la pyrolyse du benzène dans un réacteur statique entre 600°C et 763 °C et ils ont remarqué que la réaction ne peut être mesurée à T < 600 °C. Le benzène sera désormais considéré comme un composé stable dans l’ensemble des schémas cinétiques élaborés par les différents auteurs.
Craquage de l’Ethylbenzène (Brooks et al., 1982) et (Domke et al., 2001) Brooks et al. (1982) ont étudié la pyrolyse de l’éthylbenzène dans un réacteur statique à 510 °C. A faible conversion les deux principaux produits de pyrolyse sont l’hydrogène et le styrène, avec le méthane, le toluène, l’éthane, le benzène et des traces de composés lourds. Le mécanisme proposé est un mécanisme radicalaire complexe.
Domke et al. (2001) ont étudié la pyrolyse du l’éthylbenzène dans un réacteur TSR (Temperature Scanning Reactor) entre 540°C et 700°C. Ils ont trouvé que la réaction de disparition de l’éthylbenzène est d’ordre 1 avec les paramètres cinétiques suivants:
– Energie d’activation: E = 62,3 kcal/mol
– Facteur de fréquence : A = 4,74 × 1013 (s-1)
Craquage du butylbenzène (Freund et Olmstead, 1988)
Les auteurs ont élaboré un modèle du craquage du butylbenzène à partir de données tirées de la littérature ou estimées. Le mécanisme comporte 60 réactions radicalaires et 29 espèces chimiques. Les produits majeurs de la réaction sont le styrène, l’éthane, le toluène, le propylène et l’éthylène. Les paramètres cinétiques globaux de la réaction de disparition du butylbenzène sont:
– Energie d’activation : E = 52,9 kcal/mol
– Facteur de fréquence : A = 1,1 × 1012 (s-1)
Craquage du Dodecylbenzène (Behar et al. 2002)
Le Dodecylbenzène est pyrolysé en milieu fermé à 140 bars à 325 °C, 350 °C, 375 °C, 400°C et 425°C pour des durées de 1 à 72 h.
Pour l’ensemble des températures de travail la réaction globale obéit à une loi de vitesse de premier ordre. Les paramètres cinétiques trouvés sont:
– Energie d’activation: E = 53,3 kcal/mol
– Facteur de fréquence: A = 1,3 × 1013 (s-1)
Les produits majeurs du craquage (à une conversion > 30%) sont le toluène, l’éthylbenzène, le n-C10 et le n-C11. D’autres molécules en proportions plus faibles, ont été trouvées: le styrène, le α-decène, le α-undecène, et des alkylbenzènes.
Jusqu’à un taux de conversion de 88% les produits liquides constituent 98% de la charge. Les effluents gazeux sont très faibles et aucun résidu solide n’a été observé.
La réaction stœchiométrique de craquage (à 61,6%) est:
DDB → 14% C7-C14 n-alcanes + 31% C7-C14 aro + 55% C14 +
Les auteurs ont extrapolé ces paramètres cinétiques aux conditions géologiques ce qui a permis de prédire la décomposition des n-alkylaromatiques à une température inférieure à 160°C (avec un gradient de 1,25°C/MA). Ces paramètres indiquent que même dans la roche mère les n-alkylaromatiques se décomposent pendant la dernière étape du craquage du kérogène.
Les auteurs ont comparé les diagrammes d’Arrhénius des trois composés: n-C25, 9-MPh et DDB et ils ont conclu que dans les conditions géologiques les paraffines lourdes sont les plus stables suivies des méthylaromatiques et ensuite des n-alkylaromatiques.
Craquage des composés polyaromatiques
Craquage des methylaromatiques et des alkylaromatiques (Smith et Savage, 1991,1992, 1993, 1994; Savage, 1995; Savage et Baxter, 1996)
Les auteurs ont étudié les mécanismes radicalaires de craquage des methylaromatiques et des alkylaromatiques. Smith et Savage (1992) ont étudié le craquage du 1-méthylpyrène et du 1-éthylpyrène à 400, 425 et 450 °C. Ils ont constaté que le premier donne essentiellement du pyrène et du diméthypyrène; et le deuxième du pyrène et du méthylpyrène. Ils ont, d’autre part proposé des mécanismes radicalaires pour les deux composés. Smith et Savage (1994) et Savage (1995) ont développé un modèle cinétique du craquage d’alkylaromatiques de longue chaîne, qu’ils ont validé par la pyrolyse du dodécylpyrène. Le transfert de l’hydrogène radicalaire est le processus dominant pendant toute la réaction et essentiellement pendant l’étape initiale. La réaction est autocatalysée par la dissociation de la liaison aryl-alkyl.
Craquage du 9-méthylphénanthrène (Behar et al. 1999)
Le 9-méthylphénénthrène (9-MPh) est pyrolysé en milieu fermé confiné à 120 bars pour des températures variables dans l’objectif de déterminer la réaction globale et les paramètres cinétiques globaux.
– Températures: 400°C, 425°C et 452°C
– Temps: 1 à 216 h
La réaction de disparition du 9-MPh obéit à une loi d’ordre 1, avec les paramètres cinétiques suivants:
– Energie d’activation: E = 49.0 kcal/mol
– Facteur de fréquence: A = 4,5 × 1010 (s-1)
Les seuls produits du craquage plus légers que le 9-MPh sont le méthane et le phénanthrène, tous les autres produits sont plus lourds comme le diméthylphénanthrène .
Le facteur de fréquence obtenu est très faible par rapport à celui obtenu pour le craquage du n-C25 (6,1 × 1017). Ceci montre que dans les modèles empiriques, nous ne pouvons pas continuer à prendre un facteur de fréquence unique comme dans le premier modèle de Behar et al. (1991) (cf. § I.2.4.2.2).
Les auteurs ont comparé les diagrammes d’Arrhénius du n-C25 et du 9-MPh, les courbes se croisent à 315°C ce qui signifie une inversion de stabilité relative entre conditions de laboratoire et conditions naturelles. Le 9-MPh, plus stable que le n-C25 en laboratoire devient moins stable en bassin sédimentaire. Cela explique la composition des huiles trouvées dans des réservoirs profonds : elles sont appauvries en composés aromatiques et enrichies en n-alcanes.
Craquage du 1-méthylnaphtalène (Leininger, 2002)
Le 1-méthylnaphtalène est pyrolysé en milieu fermé dans les conditions suivantes:
– Pression: 140 bar
– Températures: 380, 443, 400 et 423°C
– Temps: 1 à 72 h
Pour l’ensemble des conditions de travail, la réaction globale obéit à une loi de vitesse de premier ordre. Les paramètres cinétiques globaux trouvés sont:
– Energie d’activation: E = 47,5 kcal/mol
– Facteur de fréquence: A = 7.6 × 109 (s-1)
Les principaux produits de craquage sont les produits lourds C20+aro (ca. 59 %), le naphtalène (ca. 32 %). Une faible proportion de produits légers (C6-C14) est également formée (ca. 6 %). Le méthane n’a pas été quantifié mais sa teneur estimée est faible. Les paramètres cinétiques trouvés sont très proches de ceux trouvés pour le 9-MPh, ce qui illustre la faible influence de l’effet de cycle sur le craquage. Ce résultat est très important car il justifie la considération des méthylaromatiques comme une famille ayant une stabilité thermique identique.
Craquage des naphténoaromatiques
Craquage du 2-Dodécyl-9,10-dihydrophénanthrène
Savage et Baxter (1996) ont étudié le craquage du 2-Dodécyl-9,10-dihydrophénanthrène. Ils ont trouvé que la réaction globale de disparition du réactif est d’ordre 1 avec les paramètres cinétiques suivants:
– Energie d’activation : E = 54.5 kcal/mol
– Facteur de fréquence : A = 4 × 1013 (s-1)
Les auteurs ont distingué quatre voies de décomposition primaire du 2-Dodécyl-9,10-dihydrophénanthrène dont la plus importante est la déshydrogénation qui mène à la formation de 2-Dodécylphénanthrène, les trois autres voies passent par la coupure d’une liaison C-C. Des réactions secondaires et tertiaires se succèdent et les principaux produits à haute conversion sont le 2-méthylphénanthrène et le 2-éthylphénanthrène.
Craquage thermique de la tétraline
Le craquage de la tétraline a été étudié par plusieurs auteurs dans des conditions différentes (Yen et al., 1976; Frantz, 1984; Hooper et al., 1978; Grigor’eva et al., 1991; Khorasheh et Gray, 1993). Yu et Eser (1998) ont calculé les paramètres cinétique apparents du craquage (E = 58 kcal/mol et A = 3,5 × 1012 s-1). A partir des résultats disponibles dans la littérature, Bounaceur et al. (2000) ont proposé un schéma cinétique radicalaire de 132 réactions pour rendre compte des mécanismes de formation des principaux produits formés: le 1-méthylindane, le naphtalène et le n-butylbenzène. Poutsma (2002) a construit un autre schéma radicalaire. De ces deux schémas on peut déduire que lors du craquage de la tétraline il y a compétition entre plusieurs voies réactionnelles. La déshydrogénation du cycle saturé donne le dialine. L’isomérisation par contraction du cycle donne le méthylindane qui mène par déshydrogénation aux indènes. L’ouverture du cycle et le craquage de la chaîne latérale donnent des alkylbenzènes et des gaz (CH4, C2H6, C2H4). La rétrocyclisation donne l’éthylène et du benzocyclobutène.
Craquage thermique de la 2-éthyltétraline
Le craquage de la 2-éthyltétraline a été étudié par Savage et Klein (1988) qui ont calculé l’énergie apparente d’activation E = 53,5 kcal/mol et le facteur de fréquence A = 5,0 × 1012 s-1. Les produits majeurs formés sont le naphtalène, la tétraline, le dialine, le 2-éthylnaphtalène et le 2-éthyldialin avec d’autres produits générés en faibles quantités (toluène, méthylindane et alkylbenzènes).
Craquage thermique de mélanges
Etude de Kressmann (1991)
L’auteur a étudié le craquage thermique de deux mélanges: n-hexane + benzène et n-hexane + 2,4-diméthylpentane à haute pression, pour des températures constantes, variant de 310°C à 400°C et dans une gamme de conversion de 0 à 20 %. Des paramètres cinétiques globaux ont été calculés pour la réaction globale de disparition de la somme des réactifs.
• La pyrolyse du mélange (n-hexane + benzène) donne des composés saturés: n-alcanes et iso-alcanes, des alcènes (faible rendement) et des aromatiques (biphényle). La vitesse de pyrolyse de ce mélange est supérieure à celle du n-hexane, ceci est dû au rôle du benzène dans le transfert d’hydrogène. L’auteur a élaboré un modèle mécanistique pour ce mélange comprenant 396 réactions et 134 espèces.
• La pyrolyse du mélange (n-hexane + 2,4-diméthylpentane) donne à faible conversion les produits suivants: n-alcanes, iso-alcanes et naphtènes. A fort taux de conversion il y a formation de naphténo-aromatiques, de di-aromatiques substitués et des polyaromatiques. L’application d’une loi cinétique d’ordre 1 à la somme des réactifs a donné une énergie apparente d’activation E = 54,1 kcal/mol et le facteur de fréquence A = 2,8 × 1012 s-1.
Kressmann a étudié la pyrolyse des deux mélanges à des pressions différentes, l’effet de la pression est discuté au paragraphe (I.2.6).
Craquage thermique des mélanges Hexadécane /Décylbenzène/Tétraline (Burklé, 2001; Bounaceur, 2002) Burklé (2001) a réalisé des pyrolyses en milieu confiné, à 300°C et sous une pression de 700 bars, de mélanges binaires et ternaires de n-C16, DB et tétraline. Les résultats ont été traités du point de vue de l’effet du DB ou/et de la tétraline sur la pyrolyse du n-C16. Les deux composés ont eu un effet inhibiteur sur la pyrolyse du n-C16. Cet effet est dû à la formation des radicaux stabilisés par résonance, ce qui introduit des réactions de terminaison. C’est la tétraline qui a le pouvoir inhibiteur le plus important, un pouvoir d’autant plus fort que la température est basse.
Bounaceur (2002) a établi un schéma cinétique radicalaire semi-détaillé de 225 réactions pour décrire la pyrolyse du mélange n-C16 /tétraline. Il a par ailleurs comparé l’effet inhibiteur de la tétraline à celui du toluène considéré comme un pur inhibiteur.
Table des matières
Introduction générale
Chapitre I Cadre de l’étude
I.1. Formation du pétrole dans les bassins sédimentaires
I.1.1. Formation du kérogène
– Origine de la matière organique sédimentaire
– Enfouissement de la matière organique
– Matration de la matière organique, la diagenèse
– Préservation sélective
– Sulfuration naturelle
– L’encapsulation des protéines
– La réticulation oxidative
– Protection par des minerais argileux
I.1.2. Caractérisation et classification des kérogènes
I.1.3. Genèse du pétrole
– La catagenèse
– La métagenèse
I.1.4. Migration du pétrole
I.1.5. Evolution du pétrole dans le système pétrolier
I.1.5.1. Craquage thermique secondaire
I.1.5.2. Biodégradation et lessivage à l’eau
I.1.6. Composition du pétrole
I.1.7. Classification des huiles brutes
I.1.7.1. Classification des huiles du point de vue géochimiste
I.1.7.2. Classification des huiles du point des raffineurs
I.2. Modélisation du craquage thermique
I.2.1. principe
I.2.3. Rappels cinétiques
I.2.3. Schémas cinétiques
– Approche théorique
– Approche empirique
– Discussion
I.2.4. Travaux antérieurs
I.2.4.1. Craquage thermique de composés modèles
I.2.4.1.1. Craquage thermique de composés saturés
I.2.4.1.2. Craquage thermique de composés aromatiques
I.2.4.1.3. Craquage thermique de mélanges
I.2.4.2 Modèles cinétiques
I.2.4.2.1. Modèles théoriques
I.2.4.2.2 Modèles empiriques compositionnels
– Modèles de l’IFP (1988, 1991, 1992, 1999)
– Modèles de Braun et Burnham (1990, 1992)
– Modèle de Kuo et Michael (1994)
I.2.5. Rôle de la pression dans les réactions de craquage
I.2.5.1. Etude théorique
I.2.5.2. Travaux antérieurs
I.2.5.2.1. Effet de la pression sur le craquage du kérogène
I.2.5.2.2. Effet de la pression sur le craquage des hydrocarbures saturés
I.2.5.2.3. Effet de la pression sur le craquage des hydrocarbures Aromatiques
I.2.5.2.4. Effet de la pression sur le craquage des mélanges
I.2.5.2.5. Effet de la pression sur le craquage des huiles
I.2.5.2.5. Discussion
I.3. Objectifs de la thèse
I.4. Stratégie générale
– Choix de l’échantillon
– Isolement et caractérisation de la fraction aromatique
– Pyrolyse de la fraction aromatique
– Elaboration du schéma cinétique compositionnel
– Etude sur l’effet de la pression sur la stabilité thermique de la fraction aromatique
Références bibliographiques du chapitre I
Chapitre II Séparation et Caractérisation de la Fraction Aromatique C15- de l’Huile Brute Safaniya
Résumé
II.1. Introduction
II.2. Echantillon
II.3. Isolement de la fraction aromatique par chromatographie en phase liquide
II.3.1. Séparation des fractions saturée et aromatique sur mini-colonne
II.3.2. Isolement préparatif de la fraction aromatique
II.4. Caractérisation de la fraction aromatique
II.4.1. Fractionnement par PHPLC
II.4.2. Identification moléculaire par GC/MS
II.4.3. Analyse quantitative par GC-FID
II.5. Conclusions
Annexe : tableau des composées monoaromatiques et diaromatiques et de leurs pourcentage dans la fraction 250- °C
Références bibliographiques du chapitre II
Chapitre III Craquage Thermique de la Fraction Aromatique Légère de l’Huile Brute Safaniya – Etude Expérimental et Modélisation Compositionnelle par Classes Moléculaire
Résumé
III.1. Introduction
III.2. Matériels et méthodes
III.2.1. Echantillon
III.2.2. Préparation des tubes en or
III.2.3. Pyrolyses
III.2.4. Analyse des gaz
III.2.5. Analyse de l’extrait
III.2.6. Analyses par GC/MS
III.2.7. Analyse par GC-FID
III.2.8 Fractionnement par HPLC
III.2.9. Conditions de pyrolyse et définition de la conversion globale
III.3. Résultats et discussion
III.3.1. Balayage en température
III.3.2. Etude pyrolytique
III.3.2.1. Résultats quantitatifs
III.3.2.2. Evolution des différentes classes moléculaires de la charge en fonction de la conversion
III.3.2.3. Evolution des nouveaux types de composés produits lors des pyrolyses en fonction de la conversion
III.3.3. Cinétique
III.3.3.1. Craquage des classes moléculaires de réactifs instables
III.3.3.2. Craquage secondaire des classes de produits instables
III.3.3.3. Modélisation compositionnelle
III.3.3.4. Comparaison entre les valeurs expérimentales et les valeurs calculées à partir du modèle optimisé
III.3.3.5. Extrapolation aux conditions géologiques
III.4. Conclusions
Références bibliographiques du chapitre III
Chapitre IV Effet de la Pression sur le Craquage Thermique de la Fraction Aromatique Légère de l’Huile Brute Safaniya – Implications en prospects profonds
Résumé
IV.1. Introduction
IV.2. Matériels et méthodes
IV.3. Résultats et discussion
IV.3.1. Etude pyrolytique
IV.3.2.1. Résultas quantitatifs
IV.3.2.2. Effet de la pression sur les différentes classes moléculaires de la charge
IV.3.2.3. Effet de la pression sur les nouveaux types de composés produitslors des pyrolyses
IV.3.2. Intégration de l’effet de la pression dans le modèle cinétique
IV.3.3. Implications en prospects profonds
IV.4. Conclusions
Références bibliographiques du chapitre IV
Conclusions Générales
Références bibliographiques
Annexes
Annexe 1: Mise au point du fractionnement Sat-Aro par chromatographie sur colonne préparative
Annexe 2: Photographies et schémas des dispositifs expérimentaux