SELECTION ET IDENTIFICATION DE MICROORGANISMES ELECTRO-ACTIFS
Les microorganismes électroactifs impliqués dans les systèmes bio électrochimiques (BES) tels que les piles à combustibles microbiennes (MFC – « Microbial Fuel Cells ») ou les cellules d’électrolyse microbiennes (MEC – « Microbial Electrolysis Cells ») sont actuellement très étudiés et l’optimisation des procédés comme la recherche de consortia électroactif plus performant est d’un intérêt majeur pour les futures applications industrielles (Logan, 2009; Lovley, 2012). Dans le cadre de cette thèse, un consortia type a été recherché pour assurer le couplage de la fermentation et de l’électrolyse microbienne. Dans les systèmes bio électrochimiques, le transfert de charges joue un rôle très important et l’influence de la salinité dans le compartiment anodique fait l’objet de récentes études (Liu, Cheng, et al., 2005b; Lefebvre et al., 2012; Rousseau et al., 2013). Liu et al., (2005a) ont observé qu’une augmentation de 1,7 à 6,8 g NaCl/L induisait une augmentation de 85% de la densité de puissance en utilisant des eaux usées domestiques comme inoculum. Plus récemment, Lefebvre et al. (2012) ont signalé une augmentation des densités de puissance en pile à combustibles microbienne en utilisant des concentrations plus élevées en NaCl de 0,0 à 20,0 g NaCl/L. Dans ce cas, une salinité plus importante s’avérait être préjudiciable pour la performance globale des BES, signifiant que l’activité electroactive des biofilms obtenus à partir d’eaux usées domestiques pouvait être fortement diminuée pour des salinités relativement faibles (de l’ordre de 20-30 g NaCl/L). L’amélioration des performances a été donc très limitée en termes de gamme de salinité au cours de ces études, pour lesquelles les inocula utilisés pour la sélection d’espèces électroactives sur anode étaient essentiellement d’origine non salée. Récemment, Rousseau et al. (2013) ont montré une influence positive de la salinité sur les performances électroactives du biofilm pour des salinités de l’ordre de 20 g NaCl/L avec des biofilms formés à partir de sédiments issus d’un environnement salin. De plus, la culture en milieu salin de biofilms électroactifs permettrait le traitement d’effluents salins encore peu traités tels que les effluents d’industries de la pêche, du pétrole et du cuir ou certaines eaux usées rejetées par les usines de traitement d’eau potable. Ces effluents difficiles à traiter par les procédés biologiques conventionnels présentent un risque important de salinisation des sols et des eaux de surface et souterraines (Lefebvre et al., 2010, 2012; Pierra et al., 2013). Dans un premier temps, l’objectif de ce travail a été d’identifier de nouvelles sources de consortia bactériens électroactifs. Pour cela, la sélection de biofilms électroactifs a été réalisée dans des conditions salines. Ainsi, cette étape a été testée en milieu salin (30 g NaCl/L) avec une salinité proche de celle constatée dans la majeure partie des mers et océans, qui devraient ainsi représenter une salinité optimale pour la croissance d’une plus grande variété d’organismes. De plus, la sélection de bactéries électroactives à partir de ces sédiments salins produirait un consortium efficace pour travailler dans des BES à des salinités plus élevées que celles habituellement appliquées. Ainsi des inocula anaérobies en incluant des sédiments issus de milieux salins. Les biofilms ont été formés en utilisant un système a 3 électrodes avec une électrode de travail en graphite polarisée à +0.2V/Ag/AgCl. Différentes sources d’inocula issus de milieux anaérobies ont été utilisées à différents pH afin de sélectionner des populations électroactives comme décrit dans le Tableau IV-1 ci-dessous (sédiments d’égout de salins de Gruissan mais aussi vinasses, compost, sol). Les pH choisis ici se rapprochaient des pH des milieux de prélèvement des inocula. L’électrolyte utilisé (milieu réactionnel) était composé d’oligo-éléments, d’eau de mer ou d’une solution de NaCl à 30 g NaCl/L. Les plus performants, en termes de production de courant, sont les sédiments de l’étang de Gruissan (4.2 A/m², dans l’eau de mer à pH 7) et un échantillon de sol (2.0 A/m² dans l’eau de mer à pH 6). Tableau IV-1 : Recherche d’inocula pour la formation d’un biofilm électroactif dans un système a 3 électrodes avec une électrode de travail en graphite polarisée à +0.2V/AgAgCl.Ces premières expériences ont permis d’obtenir de bonnes densités de courants notamment avec l’inoculum de sol (2 A/m²) et celui des sédiments de l’étang de Gruissan (4.2 A/m²) à des pH respectifs de 6 et 7. Les faibles pH semblent empêcher la formation d’un biofilm électroactif. Ces résultats sont cohérents avec la littérature dans laquelle la majorité biofilms électroactifs sont formés à partir de sols et de sédiments d’eaux douces ou salines (Lovley, 2006b). Dans une étude précédente effectuée dans des conditions salines (20 gNaCl/L) , Erable et al. (2009) ont montré une production efficace de courant (2,5 A/m²) en utilisant un biofilm naturel marin fixé sur une électrode en graphite polarisée à -0,1 V/ESC et alimenté avec de l’acétate à 10 mM. L’intérêt d’utiliser des sédiments salins comme source de micro-organismes électroactifs est ici vérifié avec l’obtention d’une densité de courant de 4.2 A/m² pour le biofilm obtenu à partir des sédiments de l’étang de Gruissan. Plus récemment, Rousseau et al. (2013) ont observé, en utilisant un inoculum issu d’un milieu salin, une augmentation de la production de densité de courant dans des conditions salines dans un système à potentiel contrôlé alimenté avec 40 mM d’acétate. Une densité de courant de 85 A/m² a même été obtenue à 45 gNaCl/L sur un feutre de graphite. Une diminution de la production de densité de courant a ensuite été observée à 60 gNaCl/L mais elle restait encore élevée (30 A/m²). Une caractérisation des communautés microbiennes de ce type de biofilms développés en conditions salines apporterait un éclairage nouveau et sans doute nécessaire à la compréhension des résultats observés en termes de densités de courant. Dans un deuxième temps, un inoculum type à utiliser dans le cadre du couplage de la fermentation et de l’électrolyse microbienne a été défini et la capacité d’adaptation des consortia aux conditions de fonctionnement en MEC a été évaluée sur les biofilms ainsi obtenus. Suite aux tests préliminaires, il a donc ensuite été décidé de sélectionner des bactéries électroactives à partir de 2 types d’inoculum : les sédiments de l’étang de Gruissan et les sédiments des salins de Gruissan (qui ont été testés à pH 7). L’originalité de cette étude a été d’utiliser des sédiments salins, déjà adaptés à une concentration en sel importante, dans un milieu de culture salin. Les biofilms ont été étudiés en termes de performances électroactives (densité de courant, rendement faradique, temps de latence), mais aussi en termes de composition des communautés microbiennes.
Origin of the Inoculum
As briefly explained above, the inocula used here were sampled from two different locations: Inoculum 1, sediments collected at a salt lake beach and Inoculum 2, seed sediments from a lagoon collecting wastewaters from a salt factory (Salins de Saint Martin, Gruissan, France). Both inocula presented similar physicochemical properties, i.e., pH of 7.8±0.2; 36.1±3.5 gVS gsediments -1 and a value of conductivity of 93.6±12.1 mS cm-1 .
Experimental set-up
potentiostically controlled electrochemical reactors Experiments were carried out using electrochemical reactors under potentiostatic control (VSP Bio-Logic SA) monitored with a computer (EC Laboratory v.10.1 software, Bio Logic SA). The set-up, based on a previously described arrangement (Ketep et al., 2013), consisted of a working electrode (graphite), a reference electrode (Ag/AgCl) and a counter electrode (platinum grid). The anodes were geometrically well defined graphite planar working electrodes with the following dimensions: 2.5×2.5×0.2 cm (Goodfellow). To ensure the electrical connection, 2 mm diameter and 12 cm long titanium rod (Goodfellow) were used. The working electrodes were cleaned before use using a P800 sandpaper and rinsed with 99% purity ethanol. Cathode or counter electrodes were Platinium Iridium grid (90%/10%) (Heraeus) cleaned by heating in a blue flame. The potentials of working electrodes were controlled using an Ag/AgCl electrode (potential +0.197 vs. SHE). Inocula were added into the culture media (10% v/v for a final working volume of 400mL) containing 50mM of MES buffer and mineral solution (Rafrafi et al. 2013) (0.5 g l -1 K2HPO4, 2 g l -1 NH4Cl, 0.2 g l -1 Yeast Extract, 55 mg l -1 MgCl2, 6H2O, 7 g l -1 FeSO4(NH4)2SO46H2O, 1mg l -1 ZnCl2, 2H2O, 1.2 mg l -1 MnCl2, 4H2O, 0.4 mg l -1 CuSO4, 5H2O, 1.3 mg l -1 CoSO4, 7H2O, 0.1 mg l -1 BO3H3, 1 mg l -1 Mo7O24(NH4)6, 4H2O, 0.05 mg l -1 NiCl2, 6 H2O, 0.01 mg l -1 Na2SeO3, 5 H2O, 60 mg l -1 CaCl2, 2 H2O). Reactors were fed with acetate (10 mmol l-1 ) or a mixture of acetate (5 mmol l-1 ) and butyrate (5mM) as described in Tableau IV-2. Deionized water (reactors B7, B8, B9) or sea water (reactors B1, B2, B3, B4, B5, B6) were used in order to get a final salinity equivalent to 30 gNaCl L -1 . The initial pH was adjusted to 5.5 or 7.0 using NaOH (1 mol l-1 ). To ensure anaerobic conditions, all reactors were flushed with nitrogen gas for 30 minutes after inoculation. Reactors were incubated at 37°C. The anode potential was fixed at +0.2V vs Ag/AgCl during chronoamperometry (CA). CA maximum current densities jmax (A m- ²) of mature microbial biofilms were calculated considering the total immersed electrode surface area since electroactive biofilms covered both sides of the electrode with the same microbial community profile (CE-SSCP patterns). Coulombic efficiencies (CE) were calculated for each experiment according to (Call et al. 2009).
Chemical analyses
Volatile Fatty Acids (VFA) consumption (i.e. acetic (C2) and butyric (C4) acids) was determined with a gas chromatograph (GC-3900 Varian) equipped with a flame ionization detector. Sample analysis was performed using an auto sampler. A syringe automatically takes 0.5µl of the mix and places it in the injector, heated at 250°C. The column used is an ELITE FFAP, 15000×0.53 mm (Perkin Elmer). The temperature is maintained at 120°C. The carrier gas is nitrogen (N2) and the flame ionization detector gas is hydrogen (H2).
DNA extraction, PCR amplification and CE-SSCP fingerprinting
All DNA from biofilms obtained was extracted and the microbial community on biofilms and inoculum 2 was characterized using capillary electrophoresis single-strand conformation polymorphism (CE-SSCP) and sequenced using pyrosequencing. Molecular analyses of bacterial communities were performed on each electroactive biofilm. Genomic DNA was extracted and purified using a previously described protocol (Godon et al. 1997). Total extracted DNA was purified using a QiAmp DNA microkit (Qiagen, Hilden, Germany). Extracts’ amount and purity of DNA were confirmed by spectrophotometry (Infinite NanoQuant M200, Tecan, Austria). Then, the 16S rRNA genes were amplified using universal primers for bacteria, named W49 (5’-ACGGTCCAGACTCCTACGGG-3’ Escherichia coli position 330) and 5’-fluorescein phosphoramidite labeled W104 (5’-6FAM-TTACCGCGGCTGCTGGCAC3’ Escherichia coli position 533), according to Wéry (2008). Each PCR mixture (50µL) contained 5µL of 10x Pfu Turbo DNA buffer, 200 nMf of dNTP, 500 nMf of each primer, 2.5 U µl -1 of Pfu Turbo DNA polymerase (Stratagene) and 10 ng of genomic DNA. Reactions were performed in a Mastercycler thermal cycler (Eppendorf). The 16S rRNA genes were amplified as follows: initial denaturing step at 94°C for 2 min, followed by 25 cycles performed at 94°C for 30 s, 61°C for 30 s and 72°C for 30 s, with a final elongation at 72°C for 10 min. Reactions were stopped by cooling the mixture to 4°C. A capillary electrophoresis single-strand conformation polymorphism (CE-SSCP) method was used for PCR products fingerprinting. CE-SSCP is a method that separates DNA fragments with the same size but having different secondary conformation rearrangement according to their base compositions (Wéry et al. 2008). To perform CE-SSCP fingerprinting, one microliter of the appropriate dilution of PCR products was mixed with 18.925 µL of formamide and 0.075 µL of internal standard GeneScan ROX (Applied Biosystems). Samples were heat-denatured at 95°C for 5 min and re-cooled directly in ice for 5 min. CE-SSCP electrophoresis was performed in an ABI Prism 3130 genetic analyzer (Applied Biosystems) in 50 cm capillary tubes filled with 10% glycerol, conformation analysis polymer and corresponding buffer (Applied Biosystems). Samples were eluted at 12kV and 32°C for 30 min, as described elsewhere (Wéry et al. 2008). On DNA samples selected from CE-SSCP profiles, pyrosequencing was performed using a 454 protocol for bacterial identification (Research and Testing Laboratory (Lubbock, USA)). Sequences of most abundant bacteria found in each biofilm were deposited in the NCBI genbank database under the following accession numbers for the main abundant bacteria selected in anodic biofilms (listed as “sequence number” for “biofilm designation”): KF573509 for B1; KF573510 for B2; KF573511 for B3; KF573512 and KF573513 for B4; KF573514 for B5; KF573515 for B6; KF573516 for B7; KF573517 and KF573518 for B8 and KF573519 for B9. CE-SSCP profiles were aligned with an internal standard, ROX, to consider the intersample electrophoretic variability. The CE-SSCP profiles were normalized using the StatFingerprints library (Michelland et al. 2009) in R software version 2.9.2 (R. Develpment Core Team, 2010), with a standard procedure described elsewhere. (Fromin et al. 2007). Simpson diversity index (Simpson, 1949) was evaluated to estimate the complexity of the community by assessing the number of species (number of peaks) as well as the relative abundance (area under each peak) (Quéméneur et al. 2011).