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Contexte laboratoire
Ces travaux s’intègrent dans la thématique de recherche de l’axe Ingénierie des Systèmes et Microsystèmes (ISM) du groupe Modélisation des Systèmes et Microsystèmes Mécaniques de l’Institut Clément Ader (Toulouse). Cet axe s’intéresse en effet à la conception en phase préliminaire de systèmes mécaniques, en particulier dans le domaine aéronautique (Fraj 2014; Liscouët-Hanke 2008; Liscouët 2010). Les travaux de notre thèse sont également le fruit d’une collaboration étroite et durable entre Safran Helicopter Engines et l’Institut Clément Ader depui
Spécificités du cas d’étude
Le but de nos travaux a été de proposer une méthodologie d’étude de concepts d’architectures fortement innovants afin de sélectionner les concepts les plus prometteurs, pour un cahier des charges donné. Cette méthode a été pensée et appliquée dans le cadre de l’architecture d’un circuit carburant de moteur d’hélicoptère, dans l’entreprise Safran Helicopter Engines. Ceci étant dit, un certain nombre de spécificités se dégagent de nos travaux. Dans un souci de réutilisation de nos travaux dans des applications similaires, nous exposons dans ce paragraphe les spécificités de notre cas d’étude :
Une approche d’innovation de rupture : notre méthodologie a été pensée dans le but de proposer des solutions fortement innovantes. Ceci nous a poussé à débuter nos travaux de recherche dès l’expression des besoins, pour ensuite proposer et sélectionner les solutions fortement innovantes.
Une approche conceptuelle : nos travaux se placent en phase préliminaire de la conception du système. Nous traiterons de la conception d’architectures, en tant qu’assemblage de sous-systèmes en interaction les uns avec les autres, et avec leur environnement. Nos travaux ne traitent pas de dimensionnement de ces sous-systèmes ni de leur conception, mais se focalisent sur leur sélection et leur organisation.
Une approche systémique : Nos travaux sont basés sur une approche d’ingénierie système. Ainsi, les différentes parties prenantes sont représentées dans les critères d’évaluation des concepts. Ceci implique un nombre de critères relativement grand, ainsi que la présence de critères non-quantifiables.
Une mise en œuvre sur un système multiphysique de transformation de puissance : le système carburant d’un moteur d’hélicoptère est un système mélangeant les domaines de l’hydraulique, la mécanique, l’électrique et la thermique. Il s’agit également d’un système de transformation de puissance, permettant de déplacer et pressuriser du carburant.
Une mise en œuvre industrielle : Notre approche doit pouvoir être implémentée dans un contexte industriel où l’efficacité est maître-mot. Ainsi, la méthodologie proposée doit répondre à un certain nombre de contraintes :
Maitrise du temps de mise en œuvre. Ce point est primordial dans une approche industrielle d’un point de vue coût et délais. La méthodologie proposée étant hautement collaborative, il est souvent nécessaire de réunir des experts de plusieurs domaines. Ceci, en plus de générer du délai du fait de la relative difficulté à trouver un créneau commun, est source de coût en termes d’utilisation d’heures de travail de personnels.
Facilité d’appropriation par des participants non-experts des méthodologies de spécification, génération et sélection de concepts. Cet aspect est important car les ingénieurs ne pourront avoir confiance en une méthode dont ils ne peuvent pas comprendre les rouages. On pensera par exemple aux méthodes d’aide à la décision multicritère, qui seront abordées au Chapitre 3 et qui peuvent être particulièrement complexes à appréhender.
Par voie de conséquence, nos travaux ont été basés sur l’évaluation qualitative de concepts. En effet les aspects d’innovation de rupture et d’approche préliminaire impliquent d’avoir à traiter un grand nombre de concepts fondamentalement différents de ceux classiquement utilisés au sein de l’entreprise. La quantification des performances de ces nouveaux concepts vis-à-vis des critères d’évaluation nécessiterait une modélisation ou des essais spécifiques. Ces moyens spécifiques ne peuvent être mis en œuvre dans nos travaux d’étude conceptuelle du fait du nombre important de nouveaux concepts à évaluer.
Les différentes caractéristiques de notre cas d’étude, présentés dans ce paragraphe, ont guidé nos travaux de recherche et les choix méthodologiques qui y ont été faits.
Adrien MONSIMER, Méthodologie pour l’étude conceptuelle d’un système fortement innovant,
Positionnement vis-à-vis des travaux existants
Nos travaux de thèse se trouvent à la frontière de deux domaines de la littérature scientifique : la conception préliminaire d’une part, et l’innovation de rupture d’autre part. Lors de notre recherche bibliographique, nous n’avons collecté que très peu de contributions combinant simultanément ces deux aspects. On peut néanmoins s’en approcher en passant par l’un ou l’autre des thèmes.
« Innovation de rupture » dans les travaux de « Conception préliminaire »
Dans les travaux traitant de conception préliminaire, l’accent est rarement mis sur l’innovation. On trouve les travaux de (Moullec 2014) où l’aspect innovant des concepts proposés est principalement représenté par un nombre important d’architectures à sélectionner. Ainsi, les travaux de conception préliminaire sont souvent focalisés sur les étapes de génération et évaluation des concepts, sans prendre en compte l’étape d’analyse du besoin. La génération des architectures y est alors traitée de manière systématique, sans considérer d’apport de créativité. C’est notamment le cas des travaux de (Fraj 2014; Liscouët 2010; Moullec 2014; Biltgen & Mavris 2007a; Engler et al. 2007; Craisse et al. 2016). Les aspects d’analyse du besoin sont traités avec la démarche de conception dans des ouvrages de référence tels que (Pahl et al. 2007; Ulrich & Eppinger 2012). Ils apportent un cadre structurant ainsi une approche intégrée d’analyse des besoins, génération et sélection de solutions. Cependant, les aspects d’innovation sont abordés mais sans proposer une méthodologie spécifique.
Dans cette catégorie de la littérature dédiée à la conception préliminaire, les travaux de recherche sont très majoritairement tournés vers une évaluation quantitative des performances, basée sur les modèles (Fraj 2014; Moullec 2014; Kirby 2001; Liscouët 2010). Les approches basées sur une évaluation qualitative des performances sont en revanche marginales, et concernent généralement des systèmes où l’appréciation subjective du client a une part importante. C’est le cas notamment des travaux de (Mammeri 2013) qui traitent de l’évaluation du confort dans les trains.
« Conception préliminaire » dans les travaux d’« Innovation de rupture »
La plupart des travaux traitant d’innovation de rupture, ont une approche par l’organisation de l’entreprise (Felk 2011; Arnoux 2013) ou bien une approche orientée vers les besoins et le marché (Yannou et al. 2018; Buisine et al. 2017). Dans ce dernier cas, l’approche s’intègre dans une optique de conception préliminaire par le biais de l’analyse des besoins. Ces travaux ne proposent cependant pas de méthodologie pour la sélection des concepts les plus pertinents pour une situation donnée.
De ce fait, les travaux de thèse présentés dans ce manuscrit proposent une approche originale de l’étude conceptuelle d’architecture de systèmes de transformation de puissance dans le sens où ils visent à combiner judicieusement deux domaines jusqu’alors disjoints : la conception préliminaire et l’innovation de rupture.
L’ingénierie des besoins et des exigences constitue la première étape du processus d’ingénierie d’un système. Lorsque le système à faire est fortement innovant, il s’agit d’une étape cruciale pour permettre la créativité en phase de conception. L’objectif est, en effet, de donner une description précise et complète du système à faire tel qu’il devra se comporter du point de vue de ses parties prenantes, sans présupposer de la solution. Ainsi, il est question dans ce chapitre de poser, de manière complète et non ambigüe, le problème d’ingénierie à résoudre.
Remarque préliminaire
Il est d’usage en ingénierie des besoins ((Fiorèse & Meinadier 2012; ISO/IEC/IEEE 2015; Liu 2016;
Walden et al. 2015)) de distinguer :
Les attentes ou besoins fonctionnels : qui déterminent ce que le système doit faire
Les contraintes : qui engendrent une limitation contraignant la conception du système.
Dans la suite du document, nous ne ferons pas de distinction entre attentes et contraintes. Nous avons choisi de regrouper les attentes et contraintes sous l’appellation « besoins ». En effet, les contraintes et attentes doivent être indifféremment satisfaites par le système à faire. Ainsi, pourquoi passer du temps et de l’énergie à déterminer si tel ou tel service relève de l’attente ou du besoin ? En effet, étant donné qu’il est parfois difficile de faire la distinction entre attente et contrainte, le débat peut être long. Considérons par exemple le cas d’un moteur automobile. Un besoin de type « Etre capable de détecter une fuite d’huile », relève-t-il de l’attente ou de la contrainte ? Certains diront qu’il s’agit d’une contrainte car la détection des fuites n’est pas une attente opérationnelle de l’utilisateur du moteur. D’autres diront que dans le contexte actuel d’évolution des services rendus à l’utilisateur, la détection de fuite en tant que dysfonctionnement fait partie des attentes que l’utilisateur a à l’égard du moteur. Et pourtant, qu’il s’agisse d’une attente ou d’une contrainte, l’exigence « Etre capable de détecter une fuite d’huile » devra être satisfaite.
Ainsi, pour éviter de longs débats sans grande valeur ajoutée pour la suite de la démarche d’IS, nous utiliserons donc le terme « besoin » qui réfèrera aussi bien à des attentes qu’à des contraintes.
Table des matières
Définitions
Acronymes
Introduction Générale
CHAPITRE 0 – Présentation des travaux de thèse
I. Contexte des travaux
I.A. Contexte industriel
I.B. Contexte laboratoire
II. Particularité des travaux de thèse
II.A. Spécificités du cas d’étude
II.B. Positionnement vis-à-vis des travaux existants
CHAPITRE 1 – Ingénierie des Besoins et des Exigences
Introduction
I. Présentation de l’ingénierie des besoins et des exigences
I.A. Enjeux de l’ingénierie des besoins et des exigences
I.B. Etat de l’art en ingénierie des besoins et des exigences
I.C. Méthodologie proposée dans le cadre de la thèse
II. Analyse du retour d’expérience Safran Helicopter Engines
II.A. Elicitation du besoin
II.B. Analyse du besoin des parties prenantes
Conclusion
CHAPITRE 2 – Génération d’architectures système carburant en rupture
Introduction
I. Etat de l’art des démarches de génération d’architectures
II. Présentation des étapes de la démarche retenue
II.A. Abstraire
II.B. Décomposer
II.C. Rechercher.
II.D. Combiner
III. Proposition d’une méthode pour les travaux de thèse
III.A. Sélection méthode Abstraire
III.B. Sélection méthode Décomposer
III.C. Sélection méthode Rechercher
III.D. Sélection méthode Combiner
IV. Mise en oeuvre de la méthode proposée chez Safran Helicopter Engines
IV.A. Abstraire et Décomposer
IV.B. Rechercher des solutions innovantes
IV.C. Combiner les concepts de solution
Conclusion
CHAPITRE 3 – Sélection des concepts d’architectures système carburant en rupture
Introduction
I. Définition du problème
II. Etat de l’art
II.A. Processus de prise de décision sur les architectures système
II.B. Travaux similaires et vue d’ensemble de la littérature
II.C. Méthodes d’évaluation des architectures
III. Méthodologie proposée
III.A. Processus
III.B. Les critères d’évaluation
III.C. Evaluation préliminaire
III.D. Analyse des alternatives
III.E. Prise de décision
IV. Mise en oeuvre chez Safran Helicopter Engines
IV.A. Les critères d’évaluation
IV.B. Evaluation préliminaire
IV.C. Evaluation des alternatives
IV.D. Prise de décision sur les architectures
V. Poursuite des travaux de conception
V.A. Architecture du système EPD
V.B. Modélisation du système EPD
V.C. Résultats
Conclusion
Conclusion Générale
Références
Annexe