Rôle sur la relation médecin-patient d’une recherche internet en consultation

L’incertitude en médecine générale

Variabilité : Les médecins généralistes sont confrontés à un large éventail de patients et de situations cliniques au cours de leur pratique. Ils utiliseraient « deux millions d’informations pour gérer les problèmes quotidiens et passeraient un tiers de leur vie professionnelle à les recueillir et à les traiter ». Devant ce volume d’informations nécessaire, l’incertitude est fréquente en médecine générale. Celle-ci conduit à de nombreux questionnements variant de 0,10 à 1,85 questions par patient .
Evolution des connaissances : Les connaissances scientifiques évoluent rapidement. Selon l’article 32 du Code de déontologie médicale, pour « répondre à une demande, le médecin s’engage à assurer personnellement au patient des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science, en faisant appel, s’il y a lieu, à l’aide de tiers compétents ». Le principe de l’Evidence-Based Medicine (EBM) est décrit par Sackett « La médecine fondée sur les preuves consiste à utiliser de manière rigoureuse, explicite et judicieuse les preuves actuelles les plus pertinentes lors de la prise de décisions concernant les soins à prodiguer à chaque patient » .

L’évolution de la relation médecin-patient

Selon Gérard RAYMOND, président de France Assos Santé « la relation entre le patient et le soignant a longtemps été celle de l’ignorant face au sachant » . Cette relation paternaliste s’est estompée au fur et à mesure des générations au profit d’une relation délibérative issue de la loi du 4 mars 2002 .
L’approche centrée sur le patient implique la relation clinique-patient, le patient en tant que personne unique, l’information et l’autonomisation du patient . En 2018, 4% seulement des malades chroniques accédaient à l’éducation thérapeutique . Selon les recommandations du Conseil National de l’Ordre des Médecin (CNOM) dans son livre blanc de 2011, internet doit devenir un système d’information garantissant la qualité des soins en renforçant la qualité de la relation médecin patient. Internet étant devenu en moins de 20 ans, un média incontournable accessible à tous .

Internet et la relation médecin-patient

Recherche des patients : Internet est donc une nébuleuse infinie d’accessibilité universelle. Les patients s’en saisissent régulièrement. Plusieurs études ont examiné l’influence sur la relation médecins-patients des recherches des patients. Les raisons conduisant les patients à rechercher des informations sur leur santé comprennent un sentiment accru d’autonomisation, la perception d’un meilleur engagement avec leurs professionnels de la santé et le manque d’informations fournies par les professionnels de la santé . Le déploiement des TCI a ainsi favorisé la naissance du e-patient .
Ces derniers ayant un meilleur accès à l’information, ils sont en mesure de devenir plus acteurs de leur santé . On parle d’une démarche d’activation des patients . Ainsi, « le patient change, ses attentes changent et le médecin doit modifier sa pratique et particulièrement les modalités relationnelles de sa rencontre avec ce patient nouveau » .
Les obstacles aux recherches : Médecins et patients ont évolué dans le même temps face à ces nouvelles technologies. Des obstacles face à cette ressource ont été identifiés .
En 1999, une étude identifiait déjà des difficultés pour les médecins généralistes en lien avec la surcharge d’informations disponibles sur le web et le besoin d’informations spécifiques et simples. La revue systématique de 2020 confirme toujours ces données. La fiabilité des sources était aussi un frein à son utilisation. En 2013, au Canada, les 3 sources d’informations considérées comme les plus fiables étaient les manuels médicaux, les cours ou programmes de formations et les revues médicales. De plus, à l’heure actuelle, aucune certification valide n’existe. La loi du 13 août 2004 avait confié à la HAS la mission de certification des sites internet santé. C’était la fondation HON, qui depuis 2007, assurait cette mission. Mais, devant une absence d’efficacité de cette certification, la HAS a annoncé que ce partenariat ne serait pas reconduit, la certification HAS/HON ne peut plus être plus obtenue depuis le 7 juillet 2013 .

L’attente d’un nouveau rôle

Les études évoquant les recherches des patients montraient leur souhait d’être mieux informés, en communiquant avec leur médecin sur leur propre recherche ou en attendant d’eux une aide à l’accès aux informations sur leur santé. Ces attentes étaient présentes de manière internationale. Concernant ce nouveau rôle, le CNOM s’était déjà positionné en faveur en 2011. Selon le Dr Dupagne, « l’avenir est là, dans la mise en forme de l’intelligence collective des soignants, des patients et des scientifiques et dans l’invention de nouveaux outils pour y accéder». Dans une revue de littérature de la HAS en 2007, 65% des patients visitaient le site recommandé dans la semaine qui suivait la consultation. Dans notre étude, certains médecins répondaient à cette demande d’information voire de formation. Ils avaient régulièrement recours à internet comme une aide à la compréhension, un outil de communication. Selon une enquête de l’Inserm, «44% des internautes affirmaient ne jamais avoir consulté Internet en remplacement d’une consultation médicale, tandis que plus de 16% d’entre eux affirmaient le faire assez souvent ou très souvent». On peut donc penser que les informations sur internet n’empêchaient pas la plupart des consultations, mais qu’elles pouvaient parfois être utilisées en premier recours comme le préconisaient certains de nos jeunes participants. Dans une étude de 2015, seul 32% des médecins recommandaient des sites à leur patient . Dans notre étude, les plus jeunes participants étaient les plus enclins à cette pratique de prescription de site, ceci devrait donc tendre à augmenter.
Ainsi, avec internet, «la relation médecin-malade accède à un niveau supérieur : les patients utilisent mieux les ressources de santé ce qui améliore la communication». Cette redéfinition du rôle du médecin n’est pas toujours aisée mais les participants de notre étude recouraient régulièrement à ce nouvel outil de communication, évoquant son intérêt en éducation thérapeutique.

Table des matières

1. Introduction 
1.1. Contexte actuel 
1.1.1. L’incertitude en médecine générale
Schéma 1 : Evolution du modèle de la décision EBM (6)
1.1.2. Les sources d’informations
1.1.3. L’évolution de la relation médecin-patient
1.2. Internet et la relation médecin-patient 
1.2.1. Recherche des patients
1.2.2. Les obstacles aux recherches
1.3. Objectif de l’étude 
2. Méthodologie
2.1. Type d’étude
2.2. Population 
2.3. Recueil des données
2.4. Analyse des données
3. Résultats
3.1. Caractéristiques de l’étude 
3.1.1. Des entretiens
Schéma 2 : Caractéristiques des différents entretiens
3.1.2. Des participants
Tableau 1 : Recueil des caractéristiques des participants
3.2. Résultats de l’analyse
3.2.1. DES UTILISATIONS DIVERSES
Tableau 2 : Les utilisations exclusives aux médecins
Tableau 3 : Les utilisations partagées avec le patient
3.2.2. GÉRER LA RECHERCHE EN PRATIQUE
Tableau 4 : Le temps de recherche
Tableau 5 : Les astuces compensatrices
Tableau 6 : Les utilisations de l’écran
3.2.3. MODERNISER LA MÉDECINE
Tableau 7 : Le nouveau rôle du médecin
Tableau 8 : L’acquisition de nouvelles compétences
3.2.4. PLACE AMBIVALENTE
Tableau 9 : L’allié internet
Tableau 10 : L’effet néfaste d’internet
4. Discussion
4.1. Résultat principal 
Schéma 3 : Modèle explicatif du rôle sur la relation médecin-patient d’une recherche internet
en consultation
4.2. Comparaison avec la littérature 
4.2.1 Des consultations partagées
4.2.2. L’attente d’un nouveau rôle
4.2.3 Un bénéfice ambivalent
4.2.4. L’effet des générations
4.3. Forces et limites
4.3.1. Les limites de l’étude
4.3.2. Les forces de l’étude
4.4. Perspectives 
Conclusion
Bibliographie 
Annexes
Annexe 1 : Document de recrutement
Annexe 2 : Formulaire de consentement
Annexe 3 : Evolution du guide d’entretien
Annexe 4 : Retranscriptions

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