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Le complexe ventrobasal (VB)
Le complexe Ventral Postérieur (VP), renommé Ventro-Basal (VB) par Rose et Mountcastle dans les années 1950, regroupe les noyaux de premier ordre pour le traitement de l’information somatosensorielle, celui d’ordre supérieur étant le noyau Postérieur médian (POm).
Sur des critères anatomiques et fonctionnels, le VB est divisé en deux noyaux, le noyau Ventral Postérieur Médial (VPM) et le noyau Ventral Postérieur Latéral (VPL).
Le premier reçoit ses afférences principalement du noyau trigéminal du tronc cérébral. Le faisceau d’axones qui innerve les neurones du VPM assure le relais des informations en provenance de la face (Veinante and Deschênes, 1999).
Les axones qui innervent le VPL cheminent le long de la colonne dorsale de la moelle épinière par les faisceaux cunéiformes et graciles et transmettent les informations du toucher en provenance du reste du corps (Jones, 2007).
L’ensemble de ces faisceaux forme le lemnisque médian et assure le transfert des informations somatosensorielles de la périphérie vers le thalamus. Il existe une voie extra-lemniscale qui passe par le faisceau spinothalamique et transmet les informations douloureuses au VPL.
Composition du complexe VB
Les cellules TC, qui composent le complexe VB, présentent chez les rongeurs une structure histologique homogène. Elles possèdent de nombreuses dendrites qui se divisent chacune en deux dendrites filles, l’ensemble de l’arborisation dendritique recouvre tout l’espace péri-somatique sur une distance d’environ 350 µm donnant un aspect buissonnant caractéristique (figure 3). Les neurones présentent un axone rostral qui passe par la capsule interne pour atteindre le cortex. Aucune collatérale n’a été trouvée entre les neurones TC (Jones, 2002; Yen et al., 1985).
Figure 3 : Morphologie d’un neurone TC
Reconstruction d’un neurone TC du noyau dLGN de rat marqué par une injection intrasomatique de péroxydase du raifort.
Organisation de la boucle thalamocorticale
Chez le rongeur, contrairement au Noyau Géniculé Latéral (dLGN) qui relaye les informations visuelles au cortex, le complexe VB ne comprend pas de neurones inhibiteurs locaux. Il n’est en somme composé que de neurones excitateurs glutamatergiques dont les propriétés synaptiques et organisationnelles sont détaillées dans la partie suivante.
Une organisation somatotopique du réseau
Chez les rongeurs, c’est principalement la somesthésie qui permet la perception de l’environnement extérieur, notamment grâce à un organe particulier, le système vibrissal. Le rat possède 35 vibrisses qui sont disposées en rangées (A, B, C, D et E) et en arcs (de 1 à 7) sur le tégument facial (figure 4). Depuis cette organisation périphérique, jusqu’à l’aire de projection corticale, l’ensemble du système conserve la somatotopie des informations somesthésiques. somatotopique du relais des informations sensorielles des vibrisses au cortex somatosensoriel La somatotopie des informations est conservée tout au long du cheminement des informations sensorielles : des vibrisses disposées en rangées (A, B, C, D et E) et en arcs (de 1 à 7) sur la face de l’animal, aux barrelletes des deux noyaux trigéminaux PrV et SpV, puis aux barillets (barreloïdes en anglais) thalamiques dans le VPm, jusqu’aux barils (barrels en anglais) corticaux dans la couche IV de l’aire S1.
Chaque baril cortical forme une colonne, allant de la couche I à la couche VI.
À chacune des vibrisses, correspondent des barrelettes trigéminales au niveau des noyaux spinal (SpV) et principal (PrV) du complexe trigéminal du tronc cérébral (Belford and Killackey, 1979). Les noyaux trigéminaux, projettent ensuite au niveau thalamique sur le VPM pour faire synapse avec les neurones TC organisés en barillets thalamiques (Land et al., 1995; Van Der Loos, 1976). Enfin, au niveau cortical, la projection somatotopique des neurones TC au niveau de la couche IV du cortex somatosensoriel primaire (S1) est organisée en barils corticaux (Simons and Woolsey, 1979; Woolsey and Van der Loos, 1970), pour revue (Bosman et al., 2011; Kleinfeld and Deschênes, 2011) (figure 4). La coloration à la cytochrome oxydase permet d’observer que l’agencement des barillets thalamiques réplique l’organisation topographique des vibrisses sur la face de l’animal (Land et al., 1995; Timofeeva et al., 2003).
Tout comme les neurones du noyau trigéminal PrV, les neurones TC du VPM possèdent un champ récepteur et répondent à une vibrisse principale, mais également aux vibrisses adjacentes avec une structure temporelle de réponse plus dispersée et une amplitude plus faible (Minnery et al., 2003). Cependant, ils répondent aussi lors du toucher des poils et de la peau de la face (Chiaia et al., 1991). Chaque barillet thalamique est composé d’environ 200 cellules, partant dorsalement à la limite du PO (posterior group nucleus), les barillets s’incurvent ventralement et caudalement, adoptant la forme d’une banane (figure 5).
Figure 5 : Marquage du barillet thalamique C2
Le marquage rétrograde au Fluoro-Gold du barillet thalamique C2 par injection dans le baril cortical correspondant, permet une bonne observation de la forme du barillet.
D’après (Pierret et al., 2000)
Projections des neurones relais TC vers le cortex et vers le NRT
Projections TC CT : Les neurones TC du VB projettent vers le cortex correspondant à l’aire sensorielle associée à la modalité des informations reçues de la périphérie. Ils projettent principalement sur les dendrites des cellules étoilées et pyramidales, ainsi que sur les interneurones de la couche IV (Castro-Alamancos, 2004; Sherman and Guillery, 1996). La projection des neurones du VB sur les neurones du cortex somatosensoriel primaire conserve l’organisation topographique de l’information ; se dessine ainsi des barils corticaux correspondants somatotopiquement aux barillets thalamiques. Ces barils définissent les colonnes corticales qui sont les modules fondamentaux du traitement de l’information sensorielle. Cette information se propage au sein de la colonne corticale permettant son intégration, suivant l’enchaînement L4 L2/3 L5/6 (L pour Layer, signifiant couche en anglais) (Douglas and Martin, 2004). Cependant, les neurones TC envoient également des collatérales sur les neurones pyramidaux de la couche VI (Castro-Alamancos and Connors, 1997; Sherman and Guillery, 1996), permettant au thalamus d’activer séparément deux strates différentes d’une même colonne dans le même laps de temps (Constantinople and Bruno, 2013). L’arborisation axonale des neurones TC leur permet aussi de connecter d’autres colonnes corticales de barils adjacents, comme le montrent certaines études anatomiques (Arnold et al., 2001) ou électrophysiologiques (Roy et al., 2011). Ainsi, chaque baril peut intégrer l’information de plusieurs vibrisses via un processus sous-cortical indépendant de l’activité des barils corticaux.
Les données in vitro divergent quant à l’efficacité de la projection des neurones TC sur les neurones corticaux de la couche IV. Certaines suggèrent la nécessité d’une forte convergence synaptique pour que le transfert de l’information soit efficace (Kyriazi and Simons, 1993), alors que d’autres concluent à une grande efficacité des connexions TC couche IV (Gil et al., 1999). Les données obtenues in vivo confirment cependant la première de ces hypothèses (Bruno and Sakmann, 2006).
Projections TC NRT : En plus des projections corticales, les neurones TC envoient des collatérales vers le NRT. La partie somatosensorielle du NRT est divisée en trois parties en fonction des afférences reçues par les neurones et également de leurs projections. Ces trois parties se découpent dans la longueur du noyau en suivant l’axe de séparation du NRT et des noyaux thalamiques. Ainsi, la partie la plus proche du thalamus reçoit les afférences du Pom, la partie médiane est innervée par le VPM et la partie externe, la plus proche de la capsule interne et du cortex, reçoit quant à elle les projections des neurones du VPL (Pinault and Deschênes, 1998a; Pinault et al., 1995). Les courants post-synaptiques excitateurs (CPSE) provenant des neurones TC présentent une faible latence et une forte amplitude (Gentet and Ulrich, 2003), résultant de la taille importante des terminaisons qui contactent la base de l’arborisation dendritique des neurones du NRT (Liu and Lachamp, 2006; Liu and Jones, 1999). Cette proximité au soma et le nombre important de sites de libération permettent une transmission sans échec de potentiels post-synaptiques excitateurs (PPSE) capables de déclencher des PA au niveau des neurones GABAergiques. Des études pharmacologiques ont mis en évidence que ces PPSE glutamatergiques présentent deux composantes, AMPA (non NMDA) et NMDA (Gentet and Ulrich, 2003). La majorité de l’influx excitateur étant conduit par les récepteurs AMPA et particulièrement par la sous-unité GluR3 (Paz et al., 2011). La composante NMDA est faiblement sensible au bloc par le magnésium (Mg2+), dépendant du potentiel de membrane, ce qui est caractéristique de l’implication des sous-unités NR2C et NR2D (Monyer et al., 1994; Paoletti et al., 2013). De plus, une étude récente sur la plasticité synaptique de cette synapse TC NRT, menée par l’équipe du Dr. Anita LÜTHI, a montré la présence à cette synapse de la sous-unité GluN2B (Astori and Lüthi, 2013).
Les projections des neurones TC directement vers leurs aires corticales associées, font du thalamus la porte d’entrée des informations sensorielles vers le cortex. Néanmoins, la boucle intrathalamique entre neurones TC et neurones du NRT et le retour corticothalamique, confère au thalamus un rôle dans la modulation de ces informations. Après avoir décrit les aires de projections des neurones TC, je présenterai donc les afférences reçues par ces neurones, qui contribuent au trairement des informations sensorielles par le thalamus.
Les afférences glutamatergiques des neurones TC
Les neurones TC présentent deux types d’afférences glutamtergiques, l’une provenant de la périphérie, ce sont les afférences lemniscales, l’autre de l’aire corticale préalablement contactée par les neurones TC au cours du cheminement de l’information sensorielle vers le cortex.
Dans un premier temps, je décrirai les afférences en provenance de la périphérie, pour dans un second temps, m’attacher à détailler celles provenant du cortex.
Les afférences excitatrices lemniscales
Description anatomique : Les synapses sont réalisées principalement sur la partie proximale de l’arbre dendritique des cellules TC et occasionnellement directement sur le corps cellulaire (Williams et al., 1994). La vibrisse contralatérale principale est à l’origine de 75% de ces synapses (Minnery et al., 2003). Les synapses lemniscales forment des connexions complexes avec les neurones TC appelées glomérules synaptiques au sein desquels les composants axonaux et dendritiques sont enveloppés dans une coque gliale (figure 6).
L’axone de l’afférence lemniscale (A) représenté en blanc avec ses petites vésicules rondes, fait synapse avec les épines (E) dendritiques (D), du neurone TC (en gris). Les nombreux sites de libérations entre l’axone lemniscal et le neurone TC (R) montrent une accumulation de vésicules pré -synaptiques et une densité post- synaptique (en noir). Les synapses provenant du NRT (F), présentent des vésicules aplaties. La glie englobe ce complexe (G). L’espace intracellulaire est comblé par endroits de mitochondries (M).
D’après (Castro-Alamancos, 2004), adapté de (Spacek and Lieberman, 1974)
On y retrouve les épines dendritiques du neurone TC, englobées par la grande terminaison axonale de l’afférence lemniscale. Cette organisation permet la libération de nombreuses vésicules de neurotransmetteurs en de multiples sites. Au sein de ce glomérule, les afférences GABAergiques en provenance du NRT font également synapse au niveau dendritique, en périphérie du glomérule. La réunion de ces différents éléments pourrait servir à limiter la diffusion du glutamate et à prévenir l’action des neuromodulateurs ambiants.
Description électrophysiologique : la libération de glutamate aux synapses sensorielles lemniscales génère des potentiels post-synaptiques excitateurs (PPSE) dans les neurones TC en activant principalement les récepteurs AMPA, mais aussi les récepteurs NMDA en cas de stimulations à haute fréquence des afférences (Turner et al., 1994). En revanche, les récepteurs métabotropiques du glutamate (mGluR) ne semblent pas être présents à cette synapse, ou tout du moins ne pas s’activer (Castro-Alamancos, 2002a), tout comme les récepteurs kaïnates (Miyata and Imoto, 2006). Les caractéristiques de ces PPSE sont leur faible latence, avec un front de montée rapide, et leur grande amplitude (Castro-Alamancos, 2002a; Turner and Salt, 1998). La réponse à la stimulation de ces afférences répond à la règle du « tout ou rien » et on observe également une dépression à court terme en cas de stimulations répétées à une fréquence supérieure à 2 Hz (figure 7). Cette caractéristique indique que le glutamate est libéré avec une forte probabilité aux nombreux sites présents au sein des glomérules (Castro-Alamancos, 2002a).
PPSE enregistrés dans un neurone du VPM suite à une stimulation de fibres lemniscales dans des tranches de souris adultes.
A : Superposition d’évènements enregistrés en réponse à des stimulations d’intensités croissantes. Ces réponses suivent la loi du tout-ou-rien « all-or-none-events », selon l’intensité de stimulation.
B : Dépression à court terme des PPSE évoqués à une fréquence de 20 Hz. Cette dépression apparait de manière significative pour des fréquences de stimulation supérieures à 2 Hz comme le montre le diagramme.
D’après (Castro-Alamancos, 2004)
Cette dépression des synapses lemniscales joue le rôle de filtre passe-bas, dans le sens où elle permet avec une grande efficacité le passage des informations à basse fréquence et, inversement, augmente le nombre d’échecs lors d’activités à haute fréquence. Dans ce dernier cas, le relai des informations au cortex est alors fortement dépendant du potentiel de membrane du neurone TC, et le taux d’échecs sera d’autant plus important que celui-ci est hyperpolarisé et donc éloigné du seuil de déclenchement des PA (Castro-Alamancos, 2002b). Ainsi, chez les rats anesthésiés à l’uréthane, dont le potentiel de membrane des neurones TC est hyperpolarisé, les stimulations sensorielles ne peuvent être relayées à des fréquences supérieures à 2 Hz. La reproduction de l’état d’éveil chez les animaux anesthésiés, par l’application de neuromodulateurs (acétylcholine ou norépinephrine) ou par la stimulation du tronc cérébral, dépolarise les neurones TC et augmente la probabilité de déclenchement de PA suite à la genèse d’un PPSE ; dans ces conditions les informations à haute fréquence sont alors plus efficacement relayées au cortex (Castro-Alamancos, 2004).
La transmission des informations sensorielles dépend également de récepteurs métabotropiques au GABA présents au niveau pré-synaptique sur les terminaisons des fibres lemniscales. En effet, une forte concentration de GABA ambiant est susceptible d’activer ces récepteurs GABAB et ainsi diminuer de manière tonique la transmission excitatrice au niveau de ces synapses sensorielles (Emri et al., 1996a; Emri et al., 1996b).
Les afférences excitatrices corticothalamiques
Il existe quatre types de projections corticothalamiques (CT) selon (Bourassa and Descheˆnes, 1995), mais seulement deux concernent les projections vers le VB :
i) La plus commune provient des neurones localisés dans la partie supérieure de la couche VI du cortex. Cette projection d’un baril cortical au barillet thalamique associé forme une boucle fermée dans la voie de passage des informations entre cortex et thalamus et participe au traitement de l’information sensorielle (figure 8).
ii) Le second type de projection provient des neurones de la partie inférieure de la couche VI du cortex. La majeure partie de ces neurones projette au niveau du noyau d’ordre supérieur du thalamus, le Pom, mais ceux-ci envoient également des collatérales qui établissent des synapses au niveau des barillets thalamiques du VB.
Les deux autres projections corticothalamiques contactent le Pom ; celles-ci permettent de transférer les informations sensorielles vers d’autres aires corticales, associatives et motrices. Ce retour cortical est à l’origine d’une boucle ouverte et permet une communication entre les aires corticales primaires et secondaires via le thalamus.
Les synapses glutamatergiques des neurones CT de la couche VI, représentent 30 à 40% des afférences reçues par les neurones TC (Montero, 1991). Cela permet au néocortex de contrôler de manière continue la transmission de l’information sensorielle au sein du réseau thalamocortical. Ce contrôle s’exerce de manière directe, mais également de manière indirecte en passant par le NRT (figure 8).
Reconstructions chez le rat des projections CT depuis le haut de la couche VI d’un baril du cortex somatosensoriel sur les neurones TC du VPM. Ces projections innervent par collatérales les neurones du NRT (noté TR sur la figure)
A : Neurone CT marqué à la biocytine : le corps cellulaire est localisé dans la couche VI, l’arborisation dendritique remonte vers les couches corticales supérieures (4 et 5) et l’axone projette vers le noyau thalamique VPM en émettant une collatérale dans le NRT
B : Terminaisons des fibres CT marquées par un traceur rétrograde, le BDA (Amine Dextran Biotinylé) injecté depuis la partie supérieure de la couche VI du baril cortical B3
D’après (Deschênes et al., 1998)
Cette connexion inhibitrice « feed-forward » (en avant), participe non seulement à l’intégration des informations sensorielles, mais joue également un rôle primordial au cours des oscillations associées au sommeil à ondes lentes (voir chapitre III) et dans le cas de certaines activités oscillatoires paroxystiques comme celles présentes dans des formes d’épilepsies (Paz et al., 2011).
Concernant les connexions directes CT TC
Description anatomique : les terminaisons synaptiques au niveau du noyau VB se localisent sur la partie distale de l’arbre dendritique et sont généralement de petite taille (Hoogland et al., 1991) alors que les afférences en provenance de la couche V qui connectent les neurones du Pom, établissent des synapses plus larges (Liao et al., 2010). Ainsi, les terminaisons synaptiques de petite taille joueraient le rôle de « modulateur », alors que les larges boutons synaptiques joueraient plutôt le rôle de « moteur » (= « driver » ang.) (Landisman and Connors, 2007). Cependant, une étude utilisant des traceurs antérogrades injectés au niveau des cortex S1 et S2 montre qu’il existe également des synapses de taille importante au niveau du noyau de premier ordre qu’est le VB. Ces synapses sont localisées à la frontière entre le VB et le Pom, et au sein du VB, entre les deux noyaux VPM et VPL (Liao et al., 2010). Les auteurs proposent donc une nouvelle classification pour ces différentes zones, à coté des noyaux de premier et second ordre. Description électrophysiologique : l’activation des fibres corticothalamiques induit un PPSE, résultant de l’activation de plusieurs types de récepteurs au glutamate, les récepteurs ionotropiques NMDA et AMPA et les récepteurs métabotropique, mGlu-R principalement du groupe I (Salt and Eaton, 1996; Salt, 2002; Turner and Salt, 2000). Contrairement au PPSE induit par les afférences lemniscales, les réponses à une stimulation à haute fréquence des afférences CT présentent une potentialisation à court terme appelé facilitation (Castro-Alamancos, 2004; Turner and Salt, 1998) (figure 9).
Ces propriétés de facilitation et le grand nombre de synapses CT compensent le faible poids de l’événement synaptique unitaire. Lors d’activités à haute fréquence, la mise en jeu de ces synapses CT permettraient de dépolariser les neurones TC (Turner and Salt, 1998). Comme nous le verrons dans le chapitre II.3.2, le contrôle du potentiel de membrane a un impact important sur le mode de décharge de ces neurones. Par ailleurs, une étude couplant enregistrements in vitro et dynamic-clamp dans les neurones TC du corps genouillé latéral a montré que le bruit synaptique excitateur généré par les entrées corticothalamiques participe au contrôle de la transmission thalamocorticale. Grâce à ce bruit, les neurones TC sont en mesure de répondre à des entrées sensorielles sur une large gamme d’amplitude (Wolfart et al., 2005) (figure 10).
a : Enregistrements intracellulaires des réponses d’un neurone TC in vitro à des stimulations excitatrices d’amplitudes variées .en condition statique (à gauche) et en présence de bruit synaptique. Les courants synaptiques excitateurs et le bruit excitateur (ge) et inhibiteur (gi) sont injectés dans le neurone TC par la technique de dynamic clamp. On observe qu’en condition statique seuls les courants synaptiques de grande amplitude déclenchent un PA. Lorsque du bruit synaptique est ajouté, noter la diparition des PA en réponse à des stimulations de grande amplitude (entourées en bleu), alors que des événements sous-liminaires deviennent supra-liminaires (entourées en rouge).
b : Courbe de gain représentant la probabilité de déclenchement d’un PA en fonction de l’amplitude de stimulation dans des conditions statique (noir), de faible (gris clair : weak noise) et de fort bruit synaptique (gris foncé : strong noise). Le bruit synaptique linéarise la fonction de transfert, il augmente la probabilité de décharge des neurones TC pour de faibles stimulations et la diminue pour des stimulations plus fortes.
Le retour corticothalamique a pour rôle également d’affecter les propriétés spatiales et temporelles des champs récepteurs des neurones thalamiques, ce qui a été montré notamment au niveau du système visuel (Murphy et al., 1999). Au niveau du système somatosensoriel, l’augmentation de l’activité CT dans une colonne corticale augmente la réponse des neurones TC du barillet thalamique correspondant et diminue la réponse dans les barillets adjacents. Ce feedback CT permet donc une optimisation de la discrimination spatiale entre les vibrisses adjacentes (Temereanca and Simons, 2004).
Concernant les connexions CT NRT
Description anatomique : les neurones inhibiteurs du NRT reçoivent des afférences glutamatergiques en provenance des neurones TC du complexe VB (détaillées plus tard), mais également du cortex, via des collatérales des afférences CT issues des neurones de la couche VI. Les synapses entre les neurones CT et les neurones du NRT sont de petite taille, elles contiennent peu de sites de libération, mais sont présentes en grande quantité essentiellement sur les parties distales de l’arborisation dendritique (Liu and Jones, 1999).
Description électrophysiologique : les afférences glutamatergiques en provenance du cortex et du thalamus représentent les afférences principales des neurones du NRT. Concernant celles en provenance de la couche VI du cortex S1, elles entraînent des PPSE avec un faible taux d’échec, comme le montre l’enregistrement de paires de neurones connectés (Gentet and Ulrich, 2004). Les PPSE évoqués ont une amplitude relativement faible (2,4 mV en moyenne) et une cinétique de décroissance rapide (11 ms), résultant du faible poids de la composante NMDA dans les PPSE d’origine corticale. Le PPSE est essentiellement dû à l’activation des récepteurs AMPA, en particulier de la sous-unité Glur4 (Golshani et al., 2001; Paz et al., 2011).
Contrairement aux CPSE en provenance des neurones TC (vu dans le chapitre I.1.3.), ceux d’origine corticale présentent une longue latence et une faible amplitude qui résultent de la petite taille des terminaisons. Des récepteurs mGlu sont également présents à cette synapse avec des localisations pré et post-synaptiques. L’activation tonique des récepteurs métabotropique au glutamate de type 2 (mGlu2Rs) situés pré-synaptiquement provoque une réduction de la libération de glutamate. L’application d’un antagoniste (le LY341495) augmente la fréquence des CPSE miniatures de l’ordre de 53% (Crabtree et al., 2013). Des récepteurs mGlu de type I sont observés à la synapse du côté post-synaptique et des récepteurs de type II en péri synaptique, mais leurs rôles fonctionnels ne sont pour l’heure pas encore connus. Cependant, l’application d’agonistes spécifiques des sous-familles de mGluR a montré que l’activation du groupe I induit une dépolarisation des neurones du NRT, tandis que l’activation de ceux du groupe II induit une hyperpolarisation (Cox and Sherman, 1999).
L’afférence corticothalamique sur les neurones du NRT joue potentiellement un rôle majeur dans les activités du réseau en permettant une forte inhibition des neurones TC sous contrôle cortical. En effet, bien que les afférences corticothalamiques contactent directement les neurones TC, l’effet majeur des stimulations des couches profondes du cortex ne résulte pas en une excitaion de ces neurones mais en une inhibition résulant du recrutement massif des neurones du NRT (Zhang and Jones, 2004). Par ailleurs pendant le sommeil, l’activation des afférences cortico-NRT permettrait la synchronisation, et le déclenchement de certaines activités oscillantes thalamiques du sommeil profond (Destexhe et al., 1998a; Fuentealba and Steriade, 2005).
Table des matières
Introduction
I. Organisation de la boucle thalamocorticale
I.1. Le complexe ventrobasal (VB)
I.1.1. Composition du complexe VB
I.1.2. Une organisation somatotopique du réseau
I.1.3. Projections des neurones relais TC vers le cortex et vers le NRT
I.2. Les afférences glutamatergiques des neurones TC
I.2.1. Les afférences excitatrices lemniscales
I.2.2. Les afférences excitatrices corticothalamiques
I.2.3. Les afférences neuromodulatrices
I.3. Les afférences GABAergiques
I.3.1. Organisation du NRT
I.3.2. Connexions NRT TC
I.3.3. Interconnections NRT NRT
II. Rôle du canal calcique de type T dans l’excitabilité thalamique
II.1. Description du canal calcique de type T
II.1.1. Histoire du courant T thalamique
II.1.2. Composition du canal T
II.1.3. Expression du canal T dans le thalamus
II.2. Propriétés des courants T
II.2.1. Propriétés biophysiques
II.2.2. Fonction du courant T et genèse des PCBS
II.3. Le thalamus, le canal T et le sommeil
II.3.1. Le thalamus, un acteur des rythmes du sommeil
II.3.2. Excitabilité des neurones TC penadant le sommeil
II.3.2. Mise en jeu des canaux T et des interactions thalamocorticales dans la genèse et le maintien des rythmes du sommeil
III. Les plasticités GABAergiques et thalamiques
III.1. Les formes de plasticités inhibitrices
III.1.1. Origine pré-synaptique
III.1.2. Origine post-synaptique
III.2. Le calcium et la plasticité GABAergique
III.2.1. Sources de calcium
III.2.2. Les voies intracellulaires activées par le calcium
III.3. Plasticités intrathalamiques
III.3.1. Plasticités des synapses glutamatergiques
III.3.2. Plasticités des synapses GABAergiques
III.4. Sommeil et plasticité
Résultats
IV. LTD des synapses GABAergiques intrathalamiques NRT → TC lors des oscillations delta du sommeil
IV.1. Introduction préliminaire
IV.2. Article
Discussion
Bibliographie
Table des illustrations