Rôle des facteurs psychologiques et du stress

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Epidémiologie

Prévalence

Dans le monde

Le SII constitue le trouble gastro-intestinal le plus fréquent dans le monde mais sa prévalence reste difficile à évaluer du fait de l’hétérogénéité des études et de la variabilité selon les régions, d’autant plus qu’il existe une marge d’erreurs significative dans la mise en pratique des critères diagnostique du SII qui ne cessent d’évoluer dans le temps. Il n’y a en effet pas de standardisation, ni du diagnostic, ni des traitements prescrits.
L’estimation globale de la prévalence moyenne oscille entre 10 et 15 % dans la population. [6]
La prévalence mondiale du SII a été abaissée de moitié soit de 5,7 % depuis l’utilisation de critères de diagnostiques plus précis : Rome IV en 2016 [7].
Figure 1: Prévalence du SII dans le monde [8]

En Asie et en Amérique

En Asie la prévalence du SII varie entre 7 à 9 % de la population générale.
En Amérique du nord la prévalence du SII varie entre 15 à 19 % de la population générale [9].

En Afrique

Très peu d’études concernant le SII ont été réalisées en Afrique.
Au Nigeria, une étude a trouvé une prévalence chez la population adulte de 33 %.
(Rome II) [11].
Au Kenya, une prévalence de 8 % a été retrouvée. (Rome II) [12].
Au Maroc une étude a retrouvé une prévalence chez la population adulte de 33,6 %
(Rome III) [10].

Selon l’âge

Le SII peut se voir à tout âge, incluant aussi bien les enfants que les personnes âgées, cependant 50 % de la population décrient avoir perçu les premiers symptômes avant l’âge de 35 ans et la prévalence est 25 % plus basse chez les plus de 50 ans. Le diagnostic est généralement établi entre 30 et 40 ans c’est donc une pathologie de l’adulte jeune dont la prévalence diminue avec l’âge [6]. I.1.5.Selon le genre
Dans la majorité des études épidémiologiques menées concernant le SII, une prédominance féminine a été constatée avec un sexe-ratio de 1,5 -2 en faveur des femmes [2].

Incidence

L’incidence est plus difficile à préciser que la prévalence car elle nécessite de faire la différence entre nouvelle maladie et poussée ainsi que d’avoir des critères de définition stable. Elle est estimée à 1,5 % basée sur une étude longitudinale d’une durée de 10 ans [14].

Physiopathologie

Des études de plus en plus nombreuses montrent que le SII est un cadre physiopathologique hétérogène avec des mécanismes différents sous-tendant une expression clinique commune. Le modèle physiopathologique actuel s’est considérablement complexifié s’organisant autour d’un dysfonctionnement de communications bilatérales entre deux grands axes périphérique et centrale
[15] reposant sur plusieurs hypothèses [16].

Troubles de la motricité intestinale

Le bol alimentaire qui arrive dans la lumière intestinale exerce une pression sur la muqueuse, ce qui entraîne la sécrétion d’un neuromédiateur, la sérotonine par les cellules entérochromaffines.
La sérotonine entre dans la lamina propria et se fixe sur les récepteurs 5TH4 des neurones primaires afférents entrainant la synthèse de l’acéthylcholine qui est à l’origine de l’initiation du réflexe péristaltique [17].
Les anomalies motrices ont été essentiellement décrites au niveau de l’intestin grêle et sont surtout présentes chez les patients atteints de SII à prédominance diarrhéique. Chez un individu sain, la motricité interdigestive est représentée par la succession cyclique de complexes moteurs migrants dont la partie la mieux identifiée est la phase III.
Chez les patients présentant des SII avec diarrhée, on observe une fréquence augmentée de CMM de phase III ainsi que des contractions iléales de grande amplitude [17].
Figure 3: Enregistrement moteur de l’iléon terminal (12-14) montrant des contractions iléales de grande amplitude associées à la survenue de crampes abdominales [17].
Figure 3: Concordance entre douleur abdominale et troubles moteurs [17].

Troubles de la sensibilité

Le trouble de la sensibilité concerne spécifiquement la sensibilité viscérale. L’hypersensibilité s’observe aussi bien dans le SII à forme diarrhéique (SII-D) que dans le SII a prédominance constipation (SII-C), cette hypersensibilité viscérale s’étend parfois au tube digestif haut, ce qui explique l’association possible d’une dyspepsie ou d’un pyrosis fonctionnel et peut même concerner les organes extradigestifs comme la vessie, les muscles et articulations [18].
Le système nerveux entérique, localisé dans la sous-muqueuse et la musculeuse, régule la fonction sensitivomotrice de l’intestin et est également contrôlé par le système nerveux sympathique et parasympathique.
Dans le SII, on observe une dysrégulation sensitivomotrice responsable de troubles sensitifs et moteurs avec :
-Une hyperactivité du SNA sympathique (nerfs splanchniques) à l’origine de la douleur -Une hypoactivité du SNA parasympathique (nerf vague) qui est à l’origine des troubles moteurs [19]
Cette hypersensibilité viscérale est également d’origine centrale résultant :
-d’une hyperexcitabilité neuronale dans la corne postérieure de la moelle amplifiant les messages sensitifs d’origine digestive.
-et/ou d’une perturbation de l’intégration de ces messages sensitifs dans le cerveau entrainant une inhibition des voies descendantes inhibitrices de la douleur au niveau spinal [19].
Etoiles : patients SII
Ronds : témoins
Figure 4:Perception de la douleur viscérale mesurée par la méthode du barostat.
Seuil de perception douloureuse démarre à des pressions plus basse chez les patients atteints du SII (moyenne ± SEM). * : p < 0,05

Micro-inflammation de la muqueuse intestinale

Une notion d’un état inflammatoire à minima a été mise en évidence chez les patients ayant un SII post-infectieux ou non. Les différents types cellulaires potentiellement impliqués dans les symptômes sont les lymphocytes T, les mastocytes, les cellules entérochromaffines et les cytokines [20], et l’ensemble de ces réactions cellulaires est
à l’origine de la sensibilisation des terminaisons sensitives par l’intermédiaire des récepteurs 5HT3 à l’origine de la douleur [23].

Anomalies de l’immunité muqueuse

Modifications des systèmes immunitaires innés et acquis identifiées chez les patients SII à la fois dans la muqueuse intestinale et dans la circulation systémique avec: -Augmentation des mastocytes, des taux sériques de cytokines pro-inflammatoires. -Activation de cellules B sériques et des cellules T isolées à partir de sang et de biopsies coliques.
-Altérations de production de peptides anti-microbiens, anomalies des Toll-Like Receptor TLR : qui ont un rôle central dans la réponse immunitaire innée [2].

Augmentation de la perméabilité intestinale

L’épithélium intestinal a une fonction importante dans la perméabilité muqueuse; c’est une barrière épithéliale en contact permanent avec des milliards de bactéries et qui assure la défense de l’hôte contre les antigènes intra-luminaux grâce à un système de filtrage que constituent les jonctions serrées [22].
En cas de SII, il existe une perméabilité accrue de la muqueuse du colon et du grêle décrite initialement dans les SII post-infectieux et SII- D due à une altération des jonctions serrées entraînant ainsi un passage excessif de macromolécules à travers la membrane épithéliale.
De nombreuses substances sont susceptibles d’induire l’ouverture des jonctions serrées : les acides biliaires, des composants de certaines bactériens (LPS), le stress, les antibiotiques, les anti-inflammatoires non stéroïdiens, ou encore une altération de la flore commensale, les sérines ou cystéines -protéases telles que la trypsine ou la tryptase qui sont des enzymes protéolytiques [22] (SII-D : élévation de la sérine protéase, SII-C : élévation de la cystéine protéase [25]). II.6.Rôle du microbiote intestinal
Le microbiote intestinal est l’ensemble des micro-organismes (bactéries, champignons, virus) qui colonisent l’intestin, et principalement le côlon. On estime que le microbiote intestinal est composé de 1014 micro-organismes représentant plus de 1000 espèces bactériennes, avec une biomasse estimée à 1-2 kg [26]. Il remplit de nombreuses fonctions, jouant notamment un rôle dans le métabolisme nutritionnel de l’hôte, le maintien de l’intégrité de la muqueuse intestinale, la modulation du système immunitaire ou encore la protection contre les pathogènes. Dans le SII, de nombreuses anomalies qualitatives (dysbiose) et quantitatives (colonisation bactérienne) de la flore fécale ont été mises en évidence [27].
Colonisation bactérienne chronique du grêle
L’hypothèse avancée, sur la base de culture directe de liquide d’aspiration jéjunale et des résultats anormaux de tests respiratoires au glucose ou au D-xylose démontrent une production importante et précoce de gaz hydrogène et méthane après charge en lactulose ou en glucose.
Le gaz majoritairement produit influencerait le profil symptomatique des malades avec une production accrue de méthane chez les patients décrivant un SII avec constipation et une production accrue d’hydrogène chez les patients décrivant un SII avec diarrhée [28].
Dysbiose
La dysbiose se caractérise par une baisse de la diversité des populations microbiennes intestinales. Un changement brutal d’environnement et/ou d’alimentation, un déficit immunitaire, une infection virale, bactérienne ou parasitaire, une prise d’antibiotiques peut rompre l’équilibre du microbiote intestinal.
Une différence sur les profils des microbiotes a été constatée dans les différentes études avec une hétérogénéité des patients : SII-D, SII-C, SII-M augmentation de certains germes, diminution d’autres. Un excès de firmicutes (Faecalibacterium, Acetititomaculm…) est l’anomalie la plus constamment rapportée, soit comme unique différence, soit en association avec une réduction des bactéroidetes (Bacteroides, Alistipes) [29].
Tableau II: Résultats de l’analyse du microbiote fécal chez les malades souffrants du SII [30].
• Dysbiose et acides biliaires : Les AB sont des laxatifs endogènes qui augmentent la motricité colique, la perméabilité muqueuse et la sécrétion colique et jouent un rôle dans la sensibilité viscérale. La flore intestinale a pour fonction de transformer les AB primaires en AB secondaires et toutes anomalie du microbiote perturberaient cette transformation.
Une malabsorption des acides biliaires expliquerait l’accélération du transit chez au moins 30 % des patients souffrant d’un SII diarrhéique d’où l’efficacité des chélateurs des acides biliaires [31].
Microbiote et Fodmaps [32]
Les hydrates de carbones à chaines courtes sont regroupées sous le terme de FODMAPs qui est l’acronyme de «Fermentable, Oligosaccharides, Disaccharides, Monosaccharides And Polyols ».Ils regroupent le fructose, le lactose, les fructo-oligosaccharides, les fructanes et le sorbitol. Ces courtes chaînes de carbone ont pour caractéristiques d’être peu absorbées dans l’intestin grêle, d’avoir un effet osmotique et d’être rapidement fermentées par la flore ce qui entraîne la production d’acides gras à chaînes courtes et de gaz causant de nombreux symptômes comme les ballonnements, la douleur et les troubles du transit de façon plus marquée chez les patients souffrants de SII.

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Rôle des facteurs psychologiques et du stress

Ils constituent des acteurs prépondérants de cette maladie, dans sa cause, ses conséquences tout comme le SII semble être une cause de majoration des syndromes anxiodepressifs ; ces deux troubles forment une boucle s’auto-entraînant. Ils Interfèrent avec la perception et l’intégration des informations sensitives d’origine digestive entraînant un état d’hypervigilance aux stimulis à l’origine d’une sensation douloureuse pour des stimulis de moindre intensité [29]. II.8.Données génétiques Des polymorphismes ou des variantes de plusieurs gènes ont été associés au SII et plusieurs altérations ont été mises en évidence selon les sous-groupes spécifiques de patients atteints du SII: barrière épithéliale, atteinte immunitaire, altération du métabolisme et de la fonction des acides biliaires, diaphonie bidirectionnelle : Brain-Gut axis [29].
Figure 5:Découvertes génétiques associées à la physiopathologie du SII [29]
voies en rouge :basées sur des découvertes génétiques
voies en bleu :basées sur des découvertes épigénétiques
voies en noir : actuellement non considérée comme une cible pharmacogénétique potentielle

Axe cerveau-intestin ou Brain-Gut Axis : BGA

Le fonctionnement de l’axe cerveau-intestin qui est un système bidirectionnel d’interactions et d’interférences entre l’intestin et le cerveau a un rôle important dans le SII. Les mécanismes mis en place sont complexes et utilisent les voies neuronales, endocrines, immunitaires et métaboliques [15].
Figure 6: Modèle d’influence du microbiote intestinal sur le brain-gut axis [15].

Classification

La dernière classification de Rome IV [1] a revu les critères diagnostiques des TFI et définit cinq catégories de patients (tableau III) et plusieurs sous-groupes (tableau IV) sont définis par la consistance des selles selon l’échelle de Bristol (figure 10).
Dans les critères Rome I à III, les définitions pour les maladies fonctionnelles se sont appuyées sur l’opinion d’experts. Pour l’établissement des critères Rome IV, le comité de Rome a initié une grande étude épidémiologique avec plus de 1600 individus américains. Ces informations ont alors été utilisées pour déterminer le seuil de la fréquence des symptômes, se référant au 90e percentile de la prévalence dans la population générale ce qui a permis de baser les critères de Rome IV sur des données épidémiologiques solides [38].

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
I. Epidémiologie
I.1. Prévalence
I.1.1. Dans le monde
I.1.2. En Asie et en Amérique
I.1.3. En Afrique
I.1.4. Selon l’âge
I.1.5. Selon le genre
I.2. Incidence
II. Physiopathologie
II.1.Troubles de la motricité intestinale
II.2.Troubles de la sensibilité
II.3. Micro-inflammation de la muqueuse intestinale
II.4. Anomalies de l’immunité muqueuse
II.5. Augmentation de la perméabilité intestinale
II.6. Rôle du microbiote intestinal
II.7. Rôle des facteurs psychologiques et du stress
II.8. Données génétiques
II.9. Axe cerveau-intestin ou Brain-Gut Axis : BGA
III. Classification
IV. Diagnostic
IV.1. Diagnostic positif
IV.1.1. Circonstances de découverte
IV.1.2. Interrogatoire
IV.1.3. Examen physique
IV.1.4. Examens paracliniques
IV.2. Diagnostic différentiel
IV.2.1. Maladie coeliaque
IV.2.2.Intolérance au lactose
IV.2.3.Parasitoses digestives
IV.2.4.Tuberculose intestinale
IV.2.5. MICI
IV.2.6. Colites microscopiques
IV.2.7. Dysthyroïdies
V. Evolution /Retentissement
V.1. Evolution
V.2. Retentissement
V.2.1. Qualité de vie
V.2.2. Poids économique
V.2.2.1. Coûts directs
V.2.2.2. Indirects
VI. Traitement
VI.1But
VI.2.Moyens
VI.2.1. Traitements médicamenteux symptomatiques
VI.2.2.Traitements médicamenteux à action centrale
VI.2.3.Traitements médicamenteux agissants sur le microbiote
VI.2.4.Thérapies non médicamenteuses et thérapies alternatives
VI.2.4.1.Mesures hygiéno-diététiques
VI.2.4.2.Thérapies alternatives
VI.2.5.Perspectives thérapeutiques
VI.3.Indications
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
I- Patients et méthode
1. Type et durée d’étude
2. Cadre d’étude
3. Population d’étude
4. Critères d’inclusion
5. Critères de non inclusion
6. Paramètres des données
7. Exploitation des données
II. RÉSULTATS
II.1. Données sociodémographiques
II.1.1. Prévalence
II.1.2. Genre
II.1.3. Age
II.1.4. Le niveau d’instruction
II.1.5. Le coût global des soins par patient
II.1.6. Le taux d’absentéisme
II.2. Données cliniques
II.2.1. Interrogatoire
II.2.1.1. Antécédents et terrain
II.2.1.2. Ancienneté des symptômes
II.2.1.3. Fréquence des symptômes
II.2.1.4. Sévérité des symptômes
II.2.1.5. Signes fonctionnels
II.2.2. Signes physiques
II.3.Corrélations entre les dimensions du score SF-36 et les caractéristiques de la population étudiée.
II.3.1. En étude univariée
II.3.2 En étude multivariée
III.Discussion
III.1 Données Socio-démographiques
III.2 Données cliniques
III.3 Dimensions du score SF-36 et les caractéristiques de la population étudiée
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
RÉFÉRENCES
ANNEXES

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