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Température de Kauzmann
A basse température, la diffusion des particules s’op`ere de plusieurs fa¸cons. Celles-ci peuvent diffuser `a l’intérieur de petites régions (des “cages”) dans les-quelles elles sont confinées par les interactions avec les particules les plus proches ; elles peuvent aussi diffuser en quittant leurs cages, ce qui implique le franchissement de barri`eres d’énergie et donc des échelles de temps plus grandes. Le fait que les particules puissent quitter leur cages permet au syst`eme de s’écouler. Cette remarque permet de séparer la chaleur spécifique en deux contributions : les vibrations dans les cages, et les mouvements structuraux (ou “configurationnels”). Par intégration ther-modynamique, la mˆeme séparation peut ˆetre faite pour l’entropie, qui est la somme de l’entropie due aux vibrations des particules dans leurs cages, ou autour de leurs positions d’équilibre dans le cristal, et de l’entropie configurationnelle, associée aux mouvements structuraux. Kauzmann a calculé l’entropie du liquide et celle du cristal a` basse température, la différence entre les deux étant l’entropie configurationnelle du liquide (l’entropie configurationnelle du cristal étant nulle). L’extrapolation des données obtenues par Kauzmann a` tr`es basse température sugg`ere que pour un verre fragile, l’entropie configurationnelle devient négative a` une certaine température TK , la température de Kauzmann [6]. L’entropie configurationnelle étant une grandeur positive, cela signifie qu’elle est nulle en dessous de TK , et donc que le syst`eme n’a plus qu’un seul état accessible et ne peut plus s’écouler. L’état obtenu est appelé “état vitreux idéal”. Cependant, Stillinger a argumenté que si cet état vitreux existe, alors du fait de la dimensionnalité finie de l’espace, il en existe un nombre exponen-tiel d’autres, et l’entropie configurationnelle ne peut ˆetre nulle [7]. Ajoutons que la valeur supposée de TK est tr`es proche de celle de T0. Ceci est décrit par la théorie phénoménologique d’Adam, Gibbs et Di Marzio selon laquelle la taille typique des barri`eres a` franchir est inversement proportionnelle a` l’entropie configurationnelle [8, 9].
Importance du taux de refroidissement
La transition vitreuse correspond a` la perte de l’équilibre lorsque la température approche de Tg . Cependant, la phase vitreuse ne semble présente que parce que le temps suffisant pour équilibrer n’a pas été laissé au syst`eme. Ainsi, si l’on refroi-dit un syst`eme jusque dans la phase vitreuse, on lui laisse d’autant plus de temps pour équilibrer qu’on le refroidit lentement. Si l’on trace la variation du volume en fonction de la température en fonction de la vitesse de refroidissement, on ob-serve effectivement une diminution de la température a` laquelle l’équilibre est quitté lorsque cette vitesse diminue.
Quelques propriétés génériques de matériaux vi-treux
Nous allons décrire ici certaines propriétés qui ont été mises en évidence durant ces derni`eres années dans de nombreuses expériences et mod`eles théoriques. Ces propriétés sont génériques dans le sens qu’elles ont été observées dans la majorité des syst`emes qu’on serait tenté de qualifier de “vitreux”.
Vieillissement, brisure d’ergodicité
Vieillissement
Le vieillissement est une propriété essentielle des syst`emes vitreux. En effet, l’étude d’un syst`eme a` l’équilibre thermique ne permet pas de de connaˆıtre l’ori-gine du temps, c’est-a`-dire l’ˆage du syst`eme. Ainsi, les mˆemes propriétés physiques macroscopiques sont observées quelque soit le temps passé depuis la préparation de l’échantillon concerné : la physique est invariante par translation dans le temps. Dans le cas d’un syst`eme vitreux, cette invariance par translation dans le temps est brisée, c’est-a`-dire les propriétés dépendent fortement de l’ˆage et de l’histoire de l’échantillon. En particulier, un syst`eme “vieux” relaxe beaucoup plus lentement qu’un syst`eme jeune, d’o`u le terme “vieillissement”. Dans un syst`eme vieillissant, les quantités a` deux temps dépendent donc explicitement de ces deux temps, et non de leur seule différence. Ainsi, il est possible (au moins dans des expériences de pensée…) de déterminer l’ˆage du syst`eme par des mesures adéquates.
Brisure d’ergodicité
Lorsqu’un syst`eme est `a l’équilibre thermique, il n’évolue plus que par des fluctua-tions qui sont dues a` des échanges d’énergie avec son environnement et qui tendent `a décorréler le syst`eme d’un état dans lequel il était a` un instant précédent. Un syst`eme vitreux évolue tr`es lentement et naturellement reste corrélé pendant de tr`es grands temps. Une telle corrélation est un signe de brisure d’ergodicité : le syst`eme n’ex-plore qu’une région restreinte de l’espace des configurations possibles. Par exemple, imaginons un syst`eme ferromagnétique de tr`es grande taille préparé dans un état d’aimantation par spin m > 0 `a basse température. Du fait de sa grande taille, le syst`eme en question va rester bloqué pendant un temps tr`es grand (qui croˆıt exponentiellement avec la taille) dans la région de l’espace des configurations d’ai-mantation positive et l’aimantation va fluctuer autour de sa valeur moyenne. La brisure d’ergodicité est due ici a` une brisure de symétrie. Cependant, la corrélation entre les états du syst`eme a` deux temps différents tend rapidement vers zéro lorsque la différence de ces temps grandit. Inversement, si l’on prépare le syst`eme dans un état d’aimantation nulle – et que l’on ne brise pas la symétrie par renversement de tous les spins par des conditions limites particuli`eres ou un champ extérieur – celui-ci va garder une aimantation nulle et évoluer par croissance de domaines de spins de mˆeme orientation. Plus ses domaines vont ˆetres grands, plus lentement ils évolueront ; le syst`eme reste corrélé sur de longs temps : il vieillit. Cependant, a` tr`es grands temps cette corrélation disparaˆıt. Lorsque comme dans cet exemple la corrélation reste non nulle longtemps avant de disparaˆıtre lentement, on parle de “brisure faible d’ergodicité” ; si cette corrélation reste non nulle sans jamais décroˆıtre a` zéro, on parle de “brisure forte d’ergodicité”.
Cette brisure faible d’ergodicité est clairement a` l’origine de la brisure de l’inva-riance par translation du temps. Elle est aussi a` l’origine de la perte de l’équilibre thermodynamique puisque le syst`eme n’explore pendant le temps de l’expérience qu’une région souvent tr`es restreinte de l’espace des configurations.
Edwards et Anderson ont introduit un param`etre qEA pour quantifier cette corrélation a` grands temps [10], appelé ainsi “param`etre d’Edwards-Anderson”. Schématiquement, ce param`etre prend la valeur 0 si deux états du syst`eme séparés par un tr`es grand temps sont totalement décorrélés et la valeur 1 s’ils sont enti`erement corrélés (c’est-a`-dire identiques). La définition de ce param`etre dépendant du mod`ele considéré, nous y reviendrons plus tard.
Dynamique “hors d’équilibre”, température effective
Avant de décrire une dynamique hors d’équilibre, commen¸cons par rappeler suc-cinctement les propriétés d’une dynamique a` l’équilibre thermodynamique.
Equilibre thermodynamique
Du point de vue dynamique, l’équilibre thermodynamique est caractérisé par :
– la stationnarité ;
– l’invariance par translation du temps ;
– le théor`eme de fluctuation-dissipation (FDT).
Le théor`eme de fluctuation-dissipation est une conséquence de l’équilibre ther-modynamique, et il doit donc ˆetre vérifié pour que la distribution d’équilibre corres-ponde a` la distribution de Boltzmann-Gibbs. Si l’on prend l’exemple d’un syst`eme magnétique décrit par un un champ scalaire φ(x, t) au point x et `a l’instant t, il s’écrit `a température T : ∂t0Cc(x, t; x0, t0) = T R(x, t; x0, t0) (2) o`u la fonction de corrélation connexe et la réponse a` un champ externe sont respectivement : Cc(x, t; x0, t0) = hφ(x, t)φ(x0, t0)i − hφ(x, t)ihφ(x0, t0)i (3) et δhφ(x, t)i R(x, t; x0, t0) = , (t0 < t) (4) δh(x0, t0)
On définit usuellement la réponse a` un champ infinitésimal constant agissant a` partir de l’instant t0 (ou réponse intégrée) : χ(x, t; x0, t0) = dt00 R(x, t; x0, t00) (5)
Violation du théor`eme de fluctuation-dissipation
Lorsqu’un syst`eme est hors d’équilibre thermodynamique, le théor`eme de fluc-tuation-dissipation n’est plus vérifié. Dans un syst`eme vitreux, la dynamique étant tr`es lente, on peut observer une séparation des échelles de temps [11] :
– localement, le syst`eme est sensible a` l’agitation thermique, c’est-a`-dire ses fluc-tuations locales sont rapides et typiques d’un syst`eme a` l’équilibre thermique. Ainsi, la dynamique a` temps courts, dominée par des mouvements locaux, est une dynamique d’équilibre ;
– la dynamique a` temps longs s’op`ere par des mouvements collectifs tr`es lents impliquant un grand nombre d’objets (particules, spins, etc). Ces structures de grande échelle servent en quelque sorte de “squelette” a` la dynamique, puisque toutes les configurations parcourues pendant un grand intervalle de temps “s’appuient” sur cette structure qui n’évolue quasiment pas. Ainsi ces mouvements a` grande échelle, qualifiés de structuraux, ne sont pas régis par les “lois” de la dynamique a` température T .
La résolution de la dynamique lente du mod`ele p-spin sphérique par Cugliandolo et Kurchan [12] a permis de quantifier cette séparation des échelles de temps. En effet, ils ont montré que dans la limite o`u les deux temps t et t0 sont tr`es grands1, tout en étant eux-mˆemes tr`es séparés, la dérivée ∂t0C(t, t0) de la corrélation et la réponse R(t, t0) sont toujours proportionnelles, le coefficient de proportionnalité n’étant plus T mais Tef f > T , la “température effective”. Ainsi, lorsque t, t0 → ∞, l’ensemble des points de coordonnées (C(t, t0), χ(t, t0)) est une courbe paramétrée par t constituée de deux droites de pentes 1/T lorsque t − t0 ¿ t0 et 1/Tef f lorsque t − t0 À t0. L’appellation “température” effective est justifiée dans la mesure o`u il a été montré que Tef f vérifie des propriétés d’une vraie température [13, 14]. En effet, celle-ci ne dépend pas de la paire {observable + champ conjugué} utilisée dans le FDT. De plus, cette température contrˆole le sens des flux de chaleurs les plus lents et peut ˆetre mesurée par un thermom`etre, a` condition que celui-ci soit sensible a` des grandes échelles de temps.
Dans d’autres mod`eles de verres de spins en champ-moyen, comme le mod`ele de Sherrington-Kirkpatrick [15], la température effective varie en fonction de la valeur de C(t, t0) (toujours avec t, t0 → ∞ et t − t0 À t0), le syst`eme présentant alors une hiérarchie d’échelles de temps complexe. Depuis, cette construction d’une température effective a été effectuée dans de nombreux syst`emes vitreux. Il a été observé en particulier dans les verres struc-turaux et les verres collo¨ıdaux que lorsque le temps passé dans la phase vitreuse est grand, la courbe de (C(t, t0), χ(t, t0)) paramétrée par t est constituée de deux droites, dont la pente croˆıt avec t0 et s’approche de 1/T quand t0 → ∞, c’est-a`-dire la température effective dépend du temps tw passé dans la phase vitreuse, et Tef f décroˆıt vers T lorsque tw augmente a` l’infini [16]. En effet, lorsque tw croˆıt, le syst`eme est de plus en plus proche de l’équilibre, et en particulier, lorsque tw dépasse le temps d’équilibration, Tef f rejoint T (`a condition qu’il n’y ait pas eu de cristallisation auparavant). La température effective ainsi observée correspond qualitativement `a la “température fictive” introduite par Tool en comme la température a` laquelle le syst`eme g`ele dans une expérience de refroidissement lent. Comme expliqué précédemment, cette température dépend du taux de refroidisse-ment, donc du temps passé `a chaque température dans la phase vitreuse.
Il existe également des situations sans vieillissement o`u le FDT est violé et une température effective existe ; Berthier et al. ont montré l’existence d’une température effective dans des liquides cisaillés [17, 18], dans lesquels le flot de cisaillement brise le bilan détaillé. Berthier et Barrat ont calculé Tef f pour de nombreuses observables, et ont vérifié que celle-ci ne dépend pas de l’observable choisie [19, 20] ; ils ont également proposé d’utiliser une particule traceur comme “thermom`etre” pour mesurer Tef f [19].
Rajeunissement et mémoire
Récemment, des expériences de cycles en température, semblables a` celles ef-fectuées par Kovacs dans des polym`eres en [21, 22], ont été effectuées dans divers matériaux vitreux, allant des verres de spins [23, 24] aux verres structu-raux, en passant par les milieux granulaires [25] et les verres polym`eriques [26] ou collo¨ıdaux [27]. Ces expériences mettent en évidence des effets de “rajeunissement” et de “mémoire” qui constituent des indices supplémentaires qui sous-tendent l’exis-tence d’un comportement universel dans la phase vitreuse.
Rajeunissement
Considérons par exemple un verre de spins a` température Ti supérieure `a Tg , c’est-`a-dire dans la phase paramagnétique. Refroidissons-le jusqu’`a TA < Tg , avec une vitesse de refroidissement constante γ. Si l’on mesure la susceptibilité alterna-tive χ(ω) a` une pulsation ω donnée (c’est-a`-dire la réponse `a un champ sinuso¨ıdal de pulsation ω), celle-ci décroˆıt progressivement avec T . A TA, laissons le syst`eme évoluer pendant un temps suffisant sans changer de température. Pendant ce temps, le syst`eme vieillissant, χ(ω) continue a` diminuer. Reprenons ensuite le processus de refroidissement `a vitesse γ. On observe que χ(ω) ne diminue plus mais au contraire augmente pendant un certain temps, jusqu’`a approximativement rejoindre la valeur qu’elle aurait eue a` la mˆeme température sans la période d’attente `a TA. Puis χ(ω) rediminue en suivant l’évolution qu’elle aurait suivie si cette attente n’avait pas eu lieu. En d’autres termes, l’effet du redémarrage du refroidissement est d’abord d’effacer le vieillissement subit `a TA ; c’est le “rajeunissement”.
Mémoire
Continuons l’expérience précédente. Une fois une température Tb < TA – suffi-sante pour que le rajeunissement soit complet – atteinte, effectuons le parcours en sens inverse en réchauffant le syst`eme `a vitesse γ. Si l’évolution était réversible, on devrait suivre dans le sens inverse l’évolution obtenue en refroidissant constamment, a` vitesse γ entre Ti et TB . Or, `a l’approche de TA, χ(ω) subit une lég`ere diminution par rapport `a l’évolution prévue puis la rattrape un peu apr`es avoir quitté TA. C’est le phénom`ene de mémoire, ou effet “Kovacs” [21, 22, 23, 24].
Le rajeunissement et la mémoire sont deux effets qui montrent de fa¸con specta-culaire que l’évolution d’un syst`eme vitreux `a un instant donné dépend fortement de son évolution aux instants antérieurs. Il existe maintenant de nombreux protocoles expérimentaux impliquant des combinaisons de ceux évoqués au-dessus, qui ont été réalisés dans le but de discriminer parmi les mécanismes et mod`eles de verres de spins disponibles, et `a venir [28, 29]. Nous rencontrerons ultérieurement des effets de ce type dans les milieux granulaires.
Plan et objectifs de la thèse
Cette thèse a pour objet l’étude des connexions qui existent naturellement entre plusieurs types de syst`emes vitreux, du fait de la prolifération des états métastables. En particulier, les milieux granulaires denses, dont l’appartenance à part entière a` la famille des matériaux vitreux n’est que récente, sont mis à l’honneur ; nous verrons comment les connaissances acquises dans l’étude des verres de spins permettent d’aborder des milieux aussi complexes que des empilements de grains.
Cette th`ese est découpée en deux parties. Dans la premi`ere partie, les états métastables dans les syst`emes vitreux, en particulier dans les verres de spins, sont étudiés. Le chapitre I constitue une introduction aux verres de spins et a` la des-cription de quelques uns des mod`eles les plus étudiés. L’accent y est mis sur les syst`emes a` connectivité finie, qui sont en quelque sorte les vedettes de cette th`ese, et les techniques de base permettant l’approche analytique des probl`emes y sont détaillées. Dans le chapitre II, la notion de métastabilité dans les syst`emes vitreux est introduite et discutée, ainsi que le lien entre la dynamique a` grand temps des syst`emes vitreux et le paysage d’énergie libre. Enfin, une partie importante de ce chapitre est consacrée aux méthodes utilisées pour dénombrer les minima locaux qui bloquent la dynamique a` température nulle. L’exemple des verres de spins sur des graphes aléatoires de connectivité fixe sera particuli`erement étudié.
La seconde partie est consacrée au rˆole des états métastables dans des mi-lieux athermaux tels que les milieux granulaires, en s’appuyant sur l’application des méthodes de la thermodynamique à de tels systèmes. Dans le chapitre III, après une brève introduction aux milieux granulaires, les expériences de vibration d’empi-lements granulaires sont décrites, ainsi que l’hypoth`ese introduite par Edwards pour caractériser les configurations visitées lors de ces expériences. Enfin, le chapitre IV, qui est le plus long, introduit un algorithme permettant de simuler une dynamique similaire a` celle des milieux granulaires vibrés, a` partir de mod`eles de verres de spins. Le mod`ele ainsi obtenu est utilisé comme un paradigme pour étudier le rˆole des états bloqués dans les syst`emes athermaux soumis a` des sollicitations externes. L’étude de mod`eles unidimensionnels, puis celle de mod`eles sur des graphes aléatoires sont menées a` bien afin de cerner les possibilités et les limitations de l’approche du type thermodynamique a` la Edwards. Pour conclure ce chapitre, le paradigme introduit au cours de cette th`ese est utilisé pour proposer des tests de cette approche, acces-sibles a` l’expérience.
L’étude des syst`emes vitreux et des milieux granulaires par l’approche a` la Ed-wards a été l’objet de nombreux travaux durant ces trois derni`eres années et est un sujet en plein développement. Ce mémoire est une tentative pour situer mes contri-butions a` cette étude dans un contexte général, et s’inscrit donc en complémentarité des publications qui en ont découlé, et qui sont compilées a` la fin. En particulier, les travaux concernant les verres de spins en champ moyen appartenant a` la classe des mod`eles orthogonaux (publications 7 et 8) n’ont pas été inclus ; de plus, un certain nombre de détails techniques n’ont pas été exposés, mais sont disponibles dans les publications qui jointes. A l’opposé, des points qui n’ont pas fait l’objet de publication ont été ajoutés dans le corps du mémoire. En particulier, le calcul de la complexité des états métastables par les méthodes des répliques et de la cavité est discuté en détail dans le chapitre II. J’ai jugé intéressant de le développer ici, étant donné que la connexion entre ces deux méthodes y est claire, contrairement `a ce qui ressort des publications dont elles ont fait récemment l’objet séparément (en parti-culier, la méthode des répliques est ici utilisable pour n’importe quelle distribution de couplages).
Comme expliqué plus haut, un verre de spins ne présente aucun ordre périodique. Dans un mod`ele avec désordre gelé, ceci s’exprime par mi = 0, o`u le surlignement indique le moyennage sur le désordre. Par contre, pour une réalisation donnée du désordre, les aimantations locales ne sont pas nulles, et en particulier, le recouvre-ment d’équilibre q = m2i est strictement positif. La signification de ce param`etre est la suivante. Dans un syst`eme vitreux, l’espace des phases est séparé en un nombre énorme de régions déconnectées, souvent appelées vallées (ces vallées sont les bas-sins d’attraction des différents minima). Le recouvrement q décrit la corrélation entre deux configurations typiques : il prend la valeur 0 s’il n’existe qu’une seule vallée (paramagnétique) et 1 si les vallées sont constituées d’une seule configuration. Le param`etre d’Edwards-Anderson, qui traduit la corrélation a` l’intérieur des vallées uniquement, est défini dynamiquement. La fonction d’auto-corrélation spin-spin1 est définie par C(t, tw ) = N1 i hsi(t)ihsi(tw )i. Si l’espace des configurations est divisé en régions bien séparées, la dynamique a` temps intermédiaires est dominée par le piégeage du syst`eme dans des vallées, de plus en plus profondes au fur et a` mesure que tw croˆıt. La dynamique a` temps courts est elle dominée par la relaxation au sein d’une vallée et celle a` temps tr`es long par des déplacement entre les vallées. La forme des fonctions de corrélations est montrée sur la figure (I.2) pour différentes valeurs de tw .
La brisure de symétrie de réplique
La relation entre la phase verre de spins et la forme tr`es rugueuse du paysage d’énergie a été quantifiée par Parisi via l’introduction de la brisure de symétrie de réplique [33]. En présence de désordre gelé, seules les moyennes (sur le désordre) des fonctions thermodynamiques “auto-moyennantes” ont une signification pertinente. Le terme “auto-moyennant” signifie qu’une quantité est naturellement moyennée par la limite thermodynamique, c’est-a`-dire lorsque la taille du syst`eme est infinie, la valeur de cette quantité ne dépend pas de la réalisation du désordre considérée [31]. En particulier, l’énergie libre est auto-moyennante, et la fonction thermodynamique a` calculer pour connaˆıtre les propriétés statiques du syst`eme est ln Z(β). Afin de calculer cette quantité, Edwards et Anderson ont utilisé la méthode des répliques, 2 Verres de spins `a connectivité finie Jusqu’ici, il a été question des mod`eles de verres de spins compl`etement connectés. La pertinence de l’image physique obtenue de ces mod`eles quant-a` la compréhension des verres de spins “réalistes”, c’est-a`-dire en dimension finie, demeure controversée. Les mod`eles a` connectivité finie ont été introduits afin de tenir compte du fait que chaque spin interagit avec seulement un nombre fini d’autres. Il existe plusieurs types de verres de spins a` connectivité finie. Dans le mod`ele de Viana-Bray [55, 56], le nombre de spins avec lesquels interagit un spin donné fluctue en suivant une loi de Poisson. Nous allons étudier ici des mod`eles a` connectivité3 c fixe, pour les-quels les spins sont situés sur un graphe aléatoire, dont chaque nœud est connecté a` exactement c autres nœuds.
Table des matières
Introduction
1 L’état vitreux
2 Perte d’équilibre et transition vitreuse
2.1 Transition vitreuse
2.2 Température de Kauzmann
2.3 Importance du taux de refroidissement
3 Quelques propriétés génériques de matériaux vitreux
3.1 Vieillissement, brisure d’ergodicité
a) Vieillissement
b) Brisure d’ergodicité
3.2 Dynamique \hors d’équilibre », température e®ective
a) équilibre thermodynamique
b) Violation du théorème de °uctuation-dissipation
3.3 Rajeunissement et mémoire
a) Rajeunissement
b) Mémoire
4 Plan et objectifs de la thèse
A états métastables dans les verres de spins
I Verres de spins
1 Introduction
1.1 Verres de spins continus
a) La brisure de symétrie de réplique
b) états purs
1.2 Verres de spins discontinus
a) Le modèle p-spin sphérique
b) Le scénario de la crise d’entropie
2 Verres de spins µa connectivité ¯nie
2.1 Statique par la méthode des répliques
a) Solution RS
b) Solution 1RSB
c) Signification de la brisure de symétrie de réplique
2.2 Autre systèmes µa connectivité finie
a) Problèmes d’optimisation
b) Autres applications des systèmes µa connectivité finie
II états métastables dans les systèmes désordonnés
1 Introduction
2 Définition de différents types d’états
2.1 Barrières d’énergie libre
2.2 Divers types de minima locaux
3 Relation entre les états métastables et la dynamique µa grands temps
3.1 Température effective, quasi-équilibre et quasi-états
3.2 Structures inhérentes, décomposition de Stillinger et Weber
4 Calcul de l’entropie configurationnelle
4.1 Calcul numérique
a) Par énumération exacte
b) Par l’approche des structures inhérentes
c) Par l’introduction d’un modèle auxiliaire
4.2 Calcul analytique
a) Approximation recuite
b) Calcul RS
5 Discussion des résultats
5.1 Comparaison entre les approximations
5.2 Discussion de la complexité
B états métastables dans les milieux granulaires
III Role des états métastables dans les milieux granulaires
1 Introduction aux milieux granulaires
1.1 Milieux granulaires secs
1.2 Empilements granulaires
1.3 Les états de la matière granulaire
a) Gaz, liquide, solide
b) Transition de blocage
2 Vibration des milieux granulaires
2.1 L’expérience de Chicago
a) Dispositif expérimental
b) évolution de la densité
c) Régime stationnaire
2.2 Quelques commentaires sur l’expérience de Chicago
3 états métastables et hypothèse d’Edwards
3.1 Mesure d’Edwards
3.2 Extension de la mesure d’Edwards aux systèmes vitreux
IV Taper des verres de spins
1 Analogie entre les verres de spins et les milieux granulaires
1.1 Algorithme de \tapping »
1.2 Dynamique de l’algorithme de tapping
a) Vers le régime stationnaire
b) Dynamique stationnaire
1.3 Mesure d’Edwards
2 Modèles unidimensionnels
2.1 La cha^³ne d’Ising
a) Dynamique des murs de domaines
b) Mesure d’Edwards
2.2 Modèle de déposition
a) Modèles unidimensionnels µa contraintes cinétiques
b) Description du modèle et des simulations
c) Mesure d’Edwards généralisée
2.3 Conclusion sur les modèles unidimensionnels
3 Transitions de phase et mesure d’Edwards
3.1 Dynamique de liens
3.2 Transitions de phase
a) Cas purement ferromagnétique
b) Transitions de phase et mesure d’Edwards
c) Conclusion sur les transitions de phase
4 Comment tester la mesure d’Edwards ?
4.1 Mesures dynamiques locales
4.2 Mesures statiques
a) Dynamique de tapping du modèle SK
b) Un test pour la forme canonique de la mesure d’Edwards
Conclusion
Bibliographie
Publications