Revue de littérature économique (1980-2012)
Les travaux de Feldstein-Horioka (1980) La thèse de Feldstein-Horioka (F-H) est considérée comme un des plus importants puzzles en économie. Elle a provoqué d’innombrables débats sur la question liée aux mesures de l’intégration financière.
En fait, ces auteurs ont publié, en 1980, un test sur l’intégration financière qui porte sur l’estimation de la corrélation entre l’épargne et l’investissement en respectant l’hypothèse selon laquelle la mobilité des capitaux est parfaite. F-H affirment que dans ce cas,
« il ne devrait y avoir aucun lien entre l’épargne domestique et l’investissement domestique car l’épargne dans chaque pays réagit aux opportunités d’investissement à l’échelle mondiale, tandis que l’investissement dans ce pays est financé par le pool du capital mondial »
Le test de F-H consiste donc à déterminer l’existence d’une corrélation entre l’épargne et l’investissement à partir de l’équation suivante : S où I/Y représente le ratio d’investissement sur le produit intérieur brut (PIB). S/Y le ratio d’épargne sur le PIB.
Le paramètre β est le coefficient qui a jusqu’alors retenu l’attention d’une abondante littérature. Ce coefficient de F-H (appelé aussi coefficient de rétention de l’épargne) permet d’évaluer le lien entre l’épargne domestique et l’investissement domestique. Certains auteurs le considèrent également comme le degré d’intégration financière.
De nombreuses études empiriques montrent que sa valeur estimée est comprise entre 0 et 1, mais techniquement, comme le soulignent Flandreau 1Caesar R. (1989), op cit, p 161. 2Feldstein M., et Horioka C. (1980), « Domestic Saving and International Capital Flows », The Economic Journal, Vol. 90, p 317.
intégration des systèmes financiers
une nécessité impérieuse et Rivière (1999), rien n’empêche de trouver un paramètre estimé au-delà de cet intervalle1. Selon le test de F-H, sous l’hypothèse nulle que l’économie est fermée, i.e. sous l’hypothèse de très faible mobilité du capital, le coefficient β est unitaire.
Inversement, dans un environnement économique caractérisé par une très forte mobilité de capitaux, le coefficient β prend une valeur faible, sachant qu’une hausse du taux d’épargne dans un pays donné entraîne une augmentation de l’investissement dans tous les autres pays.
Dans un cas extrême, si l’intégration est complète, l’épargne et l’investissement ne sont pas corrélés et si les chocs résiduels sont indépendants, alors β=0. Travaillant sur une base de 16 pays* pour les années 1960-1974, Feldstein et Horioka trouvent un coefficient de 0.887. Ce coefficient (non significativement différent de 1) a conduit les auteurs à rejeter l’hypothèse d’intégration financière complète β=0.
En somme, la thèse de F-H a été initialement présentée comme une mesure simple de la mobilité internationale du capital pour déterminer l’importance de l’intégration financière dans la croissance d’une économie. Mais elle a montré aussi que cette intégration peut générer un grave problème de soutenabilité résultant des déséquilibres survenus entre investissements et épargne. Les résultats auxquels ont abouti les travaux de Feldstein-Horioka n’avaient,
toutefois, pas fait l’unanimité puisque certains économistes, les trouvant un peu surprenants, avaient émis des doutes quant à leur pertinence. Selon ces derniers, le contenu analytique de la thèse en question faisait défaut. D’ailleurs, les relations entre épargne nationale et épargne extérieure peuvent créer un contexte de nature à contredire les résultats obtenus de manière empirique par les auteurs de la thèse citée plus haut.
La non-mobilité impliquée par cette thèse peut n’être que la conséquence de la soutenabilité externe de l’économie. Il est permis de dire que ce test de Feldtein et Horioka, à l’origine d’une montée de boucliers en raison des conclusions étonnantes auxquelles il a abouti (les auteurs ont fourni un résultat qui allait dans le sens d’une faible intégration mesurée),
a eu le mérite de provoquer une série de réactions ayant grandement contribué au développement d’une littérature prolifique qui s’est attelée à réconcilier (au travers de l’amélioration de Intégration des systèmes financiers : une nécessité impérieuse la rigueur du traitement statistique), l’estimation du paramètre β avec l’idée (fausse) que l’on se faisait du degré d’intégration financière. Deux courants se sont formés dans la « bataille littéraire » qui s’est engagée pour montrer le caractère aléatoire des résultats de cette thèse controversée.
Le premier, intensif, représenté par Obstfeld (1986) ; Dooley, Frankel et Mathieson (1987) ; Bayoumi (1990) ; Tesar (1991) s’est surtout penché sur les lacunes de la méthode suivie par Feldstein et Horioka de manière à rectifier le tir en faisant baisser le coefficient d’intégration estimé. Plusieurs modifications ont été apportées par ces auteurs sur les données prises en considération par Feldstein et Horioka.
Ainsi, ils ont modifié l’interprétation du paramètre β qui est, a priori, contenu entre les deux valeurs polaires 0 (complète intégration) et 1 (intégration nulle)*.
Le second avec Eichengreen (1992b) ; Zevin (1992) et Taylor (1995) a développé l’approche de F-H. Ces auteurs ont tenté une mise en perspective historique des estimations du degré d’intégration. Cette étude pionnière a ouvert la voie à d’autres travaux qui ont apporté d’importants changements dans les niveaux d’intégration estimés1.