Résistivité électrique des roches

De nos jours, la connaissance des différents paramètres (géométrie, écoulement, perméabilité, teneur en eau) qui caractérisent les réservoirs en eau dans le sous-sol est devenue une nécessité pour leur identification ou protection contre d’éventuelles sources de contaminations (biseau salé, nitrate, hydrocarbures). Par exemple, l’écoulement d’une nappe souterraine est souvent déterminé à l’aide de méthodes in situ en puits. Malheureusement ces méthodes sont intrusives et ne donne qu’une vision partielle de l’objet étudié (réservoir) du fait d’un nombre limité de forages d’un coût élevé (Tezkan et al., 2005).

Dans un tel contexte, les méthodes géophysiques telles que la tomographie électrique, la magnétotéllurique ou le géoradar peuvent apporter des informations importantes sur les caractéristiques des nappes (Binley et al., 2002; Slater et al., 2002) sur un grand volume du sous-sol. Ces méthodes constituent une alternative aux méthodes in situ en puits. Elles sont non intrusives et faciles à mettre en oeuvre pour un coût relativement modéré. Ces méthodes peuvent être réalisées en surface ou en sub-surface dans les forages.

La tomographie électrique est largement utilisée dans le domaine de l’hydrogéologie. Son objectif est la caractérisation des propriétés électriques intrinsèques du sol. Elle consiste à injecter dans l’objet étudié un courant électrique à l’aide de 2 électrodes et de mesurer la différence de potentiel qui en résulte à l’aide d’une autre paire d’électrodes. Ce champ de potentiel mesuré est une fonction de la distribution de la conductivité électrique (ou la résistivité électrique) du sous-sol. Cette opération d’injection et de mesure du potentiel est répétée en déplaçant les électrodes (courant et potentiel) et on obtient une série de mesures qu’il s’agit de modéliser afin d’obtenir un modèle électrique du sous-sol. Ainsi, l’imagérie 2D très utilisée de nos jours en tomographie électrique consiste à restituer une section verticale de la résistivité à l’aide de méthodes d’inversion.

Malgré son utilisation répandue en hydrogéologie, l’imagerie électrique 2D présente des limitations, en particulier dans les milieux à géométrie complexe tels que les milieux volcaniques qui sont des milieux géologiques le plus souvent tri-dimensionnels (3D). Depuis une vingtaine d’années, les méthodes d’imagerie électrique suscitent un intérêt grandissant dans d’autres domaines tels le génie civil, l’archéologie et l’environnement pour détecter des défauts sur des édices (ssures), des cavités, des vestiges historiques, ou délimiter des polluants. Une alternative à l’imagerie électrique 2D est l’imagerie électrique 3D qui permet de fournir des résultats qui reflètent mieux la réalité de l’objet imagé.

L’utilisation de l’imagerie électrique 3D était jusque là limitée par les ressources en informatique car une interprétation tri-dimensionnelle consiste à collecter un grand nombre de données sur une grille régulière dans les deux directions (x,y) et de discrétiser le sous-sol en grand nombre de blocs. Ainsi, l’inversion d’un grand nombre de données et de paramètres nécessite des outils informatiques performants et rapides. Mais avec l’arrivée sur la marché des processeurs de plus en plus puissants, l’imagerie électrique 3D est devenue une réalité et quelques travaux ont été réalisés (Park and Van, 1991; Ellis and Oldenburg, 1994; Zhang et al., 1995; Bentley and Gharibi, 2004; Tsourlos, 2004; Gunther, 2004; Chambers et al., 2007; Santos and Sultan, 2008). Néanmoins, elle reste utilisable sur des volumes de données assez restreints du fait du temps de calcul.

Résistivité électrique des roches

Définition de la résistivité électrique

La résistance électrique R est définie par la loi d’Ohm en mesurant la diérence de potentiel ∆V induite entre deux points d’un conducteur par la circulation d’un courant électrique d’intensité I entre ces deux points : R =∆V / I

En effet, d’après la loi d’Ohm, la différence de potentiel ∆V induite dans un conducteur est proportionnelle au courant électrique I qui traverse ce conducteur. La résistance R est la constante de proportionnalité entre ces deux paramètres. La résistance R est exprimée en ohm (Ω), l’intensité du courant électrique I en Ampères (A) et la différence de potentiel ∆V en Volts (V). La résistivité électrique peut être définie comme étant la mesure de la dificulté qu’a un courant électrique à passer au travers d’un conducteur. La résistivité électrique d’un volume cubique d’un matériau conducteur isotrope et homogène mesurée entre deux plaques conductrices et parallèles est donnée par :ρ =R × A / L

où ρ est la résistivité électrique du matériau exprimée en Ohm.m, A est l’aire de la section transversale des plaques conductrices (m² ) et L est la distance de séparation entre les deux plaques conductrices (m). La résistivité électrique est une propriété intrinsèque du matériau conducteur et elle ne dépend donc pas des dimensions des plaques conductrices et de leur distance de séparation. La réciproque de la résistivité électrique est la conductivité électrique qui s’exprime en Siemens par mètre (S.m⁻¹).

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La résistivité est un paramètre physique utile pour détecter des anomalies dans le sous-sol puisqu’elle varie sur plusieurs ordres de grandeurs. Dans la terre, seule la viscosité a une dynamique plus grande que la résistivité électrique. En sismique, la vitesse des ondes P varie de 300m/s dans l’air à 8000m/s dans le manteau. Par contre, la résistivité électrique varie entre 10⁻⁵ Ω.m pour les minéraux métalliques et 10⁷ Ω.m pour une roche sèche tel que le gabbro (Telford et al., 1990). Pour les sédiments non consolidés à température ambiante, la résistivité électrique varie entre quelques Ω.m et 10³ Ω.m.

Les paramètres physiques qui affectent la résistivité électrique

Dans un conducteur, le courant électrique peut circuler selon deux modes différents, soit par les électrons et on parle de conductibilité électronique, soit par les ions et on parle de conductivité ionique. En présence d’une phase fluide, les charges mobiles présentes dans les roches sont principalement des ions qui peuvent se déplacer de deux façons : (1) Ils peuvent circuler dans l’eau contenue dans les pores et on parle de conduction électrolytique. (2) Ils peuvent être également liés à la surface des grains où ils sont absorbés et on parle de conduction de surface. Dans les deux cas ce sont les ions qui assurent les 2 types de conduction. Ainsi, la conductivité globale est la somme de ces deux effets mais le dernier est négligeable sauf s’il y a présence d’argile dans le milieu (Tabbagh, 1995). Il existe une conductivité électronique pour certains minéraux particuliers comme :
♦ la pyrite, la galène
♦ la magnétite, l’hématite
♦ le graphite, l’or, l’argent ;

De fait, la conduction électrique dans les roches poreuse se fait principalement par transport ionique en présence d’eau. Cependant, il faut garder présent à l’esprit que le comportement électrique d’une roche dépend aussi de la matrice électriquement conductrice même si elle l’est peu. Pour une roche poreuse, la conduction électronique due à la matrice est négligeable devant la conduction ionique. Ainsi, pour une roche poreuse, on parlera d’une conductivité électrique de type électrolytique. Toutefois, une seconde conductivité de type électronique peut exister si la roche contient des impuretés comme les oxydes et les sulfures (Olhoeft, 1985).

La conductivité électrique d’un matériau poreux varie en fonction du volume, de l’arrangement des pores, de la conductivité électrique de l’eau d’imbibition et du volume occupé par celle-ci dans les pores. Par exemple dans les sédiments, la résistivité électrique va dépendre de la porosité, de la teneur en eau, de la concentration des matériaux dissous dans l’eau interstitielle, de la température (pour les structures très profondes), de la présence d’argile.

Table des matières

1 Rappels théoriques
1.1 Résistivité électrique des roches
1.1.1 Définition de la résistivité électrique
1.1.2 Les paramètres physiques qui affectent la résistivité électrique
1.1.2.1 Concentration en ions
1.1.2.2 Porosité
1.1.2.3 Teneur en eau
1.1.2.4 Température
1.2 Equations Fondamentales pour les méthodes électriques
1.2.1 La formulation de Maxwell pour l’électromagnétisme
1.3 Principe général des mesures
1.3.1 Résistivité apparente
1.3.2 Quadripôles
1.3.3 Les panneaux électriques
1.4 Sensibilité et Résolution spatiale
2 Inversion 2D/3D de données électriques à courant continu
2.1 Introduction
2.2 Inversion 1D latéralement contrainte
2.3 Méthodes d’inversions 2D/3D déterministes
2.3.1 Méthode par essai-erreur
2.3.2 Méthodes itératives
2.3.2.1 Méthode de Newton
2.3.2.2 Méthode de Gauss-Newton
2.3.2.3 Méthode Quasi-Newton
2.3.2.4 Autres méthodes d’inversion itératives
2.4 Méthodes stochastiques
2.5 Quelques exemples d’application utilisant les méthodes itératives
2.6 Inversion 3D de sondages électriques de type Schlumberger
3 Méthodologie
3.1 Introduction
3.2 Définition du problème direct
3.3 Choix de la méthode de discrétisation
3.3.1 Principe de la méthode des différences finies
3.4 Méthode de résolution du système
3.5 Choix de la paramétrisation d’un modèle
3.6 Inversion 3D
3.6.1 Introduction
3.6.2 Choix de stratégie de minimisation
3.6.3 Choix du modèle initial
3.6.4 Régularisation du problème inverse
3.6.5 Résolution ou fiabilité des solutions du problème inverse
3.7 Validation du code d’inversion 3D avec des données synthétiques
3.7.1 Exemple 1 : structure cubique dans un milieu homogène résistant
3.7.2 Exemple 2 : structure cubique dans un milieu homogène conducteur
3.7.3 Exemple 3 : structure en T dans un milieu homogène
3.7.4 Exemple 4 : deux anomalies dans un milieu homogène
3.8 Conclusion
4 Conclusion

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