Représentations sociales et pauvreté
Les conditions sociales d’existence
Caractéristiques générales de la population des bidonvilles
Généralement, cette section nous servira à dresser un profil sociologique de la population vivant dans les bidonvilles et pourra à cet effet nous aider à mieux comprendre leur situation et leur représentation.
Classes d‟âge
Notre population « fille » est composée d‟individus de classes d‟âge différentes qui représentent à peu près l‟ensemble des habitants qui vivent sur les lieux d‟investigation d‟après ce que l‟on a pu observer au moment de la descente. Ainsi, 3 grandes classes d‟âge possibles ont été établies afin de regrouper tous les enquêtés de notre recherche. Le graphique N° 1 représente la catégorisation par classe d‟âge des individus enquêtés selon qu‟ils soient « enfants », « jeunes » ou « personnes âgées ». Admettons que ceux-ci ne constituent que des catégories construites pour le besoin de l‟analyse. On ne considère pas par exemple la subdivision que peut contenir la classe des jeunes qui peut être sous-catégorisée avec les adolescents et les jeunes ainsi que les adultes si l‟on parle de la conception plutôt classique de ceux-ci. Graphique N° 1 : Distribution par classe d’âge de la population d’investigation Sources : notre propre investigation : Septembre-Octobre 2013 La probabilité de connaitre une situation économique et sociale précaire et de vivre dans des conditions plus ou moins inadmissibles humainement est plus ou moins forte chez les jeunes et les moins jeunes. Sur ce graphique, on peut lire que plus de 82 % (soit 24 individus sur les 29), dont 20 % de moins jeunes et plus de 60 % de jeunes de l‟échantillon connaissent au moment de l‟enquête une situation économique et sociale précaire. Sur ce, nous tenons à préciser qu‟un individu parmi les 30 interrogés déclarait ne pas connaitre son âge exact, ce qui fait que nous n‟avons que 29 interlocuteurs sur ce graphique. D‟un point de 20,68% 62,06% 17,24% Moins de 15 ans 15 à 45 ans 45 ans et plus 39 vue macrosociologique et macroéconomique, l‟affluence des jeunes et moins jeunes dans la masse de population qui vit dans des bidonvilles pourrait venir de l‟instabilité ou de la lacune au niveau du système économique et du marché de l‟emploi. En effet, plus, un pays ou une région observe un taux élevé de chômage, moins il y a redistribution du revenu par le biais du travail. Ce qui sous-entend qu‟une minorité de population détient un pouvoir de domination sur une grande partie de celle-ci en disposant en sa possession la grande partie de la production. Ce qui rejoint Marx avec sa théorie du grossissement du capital et l‟accroissement du paupérisme (Marx, K. 1919). Or, le fait qu‟on soit à la fois jeune et pauvre peut être aussi vu comme la suite logique d‟une difficulté à laquelle un individu a vécu depuis son enfance. En d‟autres termes, faute de ne pas avoir été financé comme il se doit dans ses études ou ses projets individuels, il y a forte chance qu‟on soit confronté à l‟âge adulte à des difficultés peut être encore pires que celles de l‟enfance. C‟est ce que l‟extrait suivant tend à confirmer en stipulant que : « Si les enfants sont socialisés dans un milieu qui reste en permanence défavorisé, la probabilité est grande qu’ils connaissent à l’âge adulte des difficultés comparables à celles de leurs parents » (Paugam, S., 2013 :103) Lorsqu‟un individu est confronté à la pauvreté à un moment donné de sa vie, plusieurs facteurs manifestes et latents peuvent être à l‟origine, les conditions de l‟apprentissage et de la socialisation en fait partie, mais il peut y avoir encore bien d‟autres. C‟est ainsi qu‟il convient maintenant de considérer un autre indicateur constitué par le niveau d‟instruction des individus qui vivent dans les bidonvilles.
Le niveau d‟instruction
Ce que nous allons tenter de montrer ici, c‟est que : quand on est pauvre, il y a une forte chance qu‟on soit quelqu‟un qui n‟a pas reçu une éducation assez poussée du moins dans la majeure partie des cas. Sur ce, trois catégories d‟individus ont étaient établies à partir des résultats obtenus de l‟investigation. C‟est ainsi que nous avons pu les classer en : « sans instruction » (ou non scolarisé), en « niveau primaire » et en « niveau secondaire premier cycle » (c’est-à-dire jusqu‟en classe de 3e ), les personnes ayant dépassé ce dernier niveau étant inexistantes dans notre échantillon. Le tableau N°3 nous livre en gros la distribution par niveau d‟instruction de notre « population » d‟investigation Ainsi donc, 6 individus sur 10 enquêtés n‟ont pas réussi à entrer en 6e si aucun des 4 restants n‟est arrivé en Seconde. Le fait d‟être à la fois pauvre et pas assez éduqué va plutôt de pair d‟après ce que ce tableau nous livre. Ce que nous tenons à préciser ici c‟est que le faible niveau d‟instruction constitue bel et bien une caractéristique majeure de la couche qui se trouve à la dernière strate de la communauté. Le fait que pauvreté et faible niveau d‟éducation vont souvent ensemble est aussi constaté et ressenti au niveau individuel à en croire ce qu‟avance l‟interviewée ci-après qui témoigne que : « (…) mes parents n’avaient plus les moyens d’assurer mes frais d’études, alors, j’ai décidé d’aller travailler pour leur venir en aide à l’éducation de mes cadets mais malheureusement…!» F 24, mariée, 1 enfant, niveau 6e , n° 16. (originaire d‟Antsirabe, arrivée à Ampefiloha il y a 1 an et demi après avoir travaillé comme domestique et que l‟employeur lui a refusé son droit de salaire ici à Antananarivo, désormais, elle a perdu tout contact avec sa famille qui ne sait même pas qu‟elle a quitté son travail et qu‟elle s‟est mariée) Le cas de cette jeune femme témoigne le fait que pauvreté et faible niveau d‟instruction vont souvent ensemble surtout en milieu rural lorsqu‟on est dans l‟impossibilité de continuer ses études, situation familiale oblige. Ce phénomène est plus ou moins confirmé dans les rapports officiels dont l‟EPM 2010 qui stipule que: « Les ménages pauvres accusent en général un taux de décrochage scolaire plus fort par rapport aux ménages aisés, notamment aux niveaux collège et lycée. (INSTAT, 2010 : 11) Par ailleurs, certains auteurs et chercheurs de différentes disciplines des sciences sociales voisines de la sociologie ont pu à certaines mesures démontrer cette corrélation qui existe entre niveau d‟éducation et niveau de précarité et/ou de pauvreté. C‟est ainsi par exemple que Christophe Zaepfel et Raymond Boudon concluent respectivement dans les extraits suivant que : « Le parcours scolaire apparaît donc comme cause et conséquence partielles mais prépondérantes de la précarité/pauvreté. En termes de politiques publiques, ces différents résultats suggérèrent l’importance de mettre en place des mesures visant les enfants issus de ménages rencontrant des difficultés socio-économiques, afin de faire augmenter leurs chances de réussite scolaire et d’échapper au cycle de reproduction des difficultés socioéconomiques. » (Zaepfel, C. 2012) Et « Le processus générateur des inégalités sociales devant l’enseignement peut finalement être décrit diachroniquement par le schéma suivant: l’héritage culturel a pour effet que, à une certaine étape du cursus scolaire, la valeur scolaire tend en moyenne à décroître avec le statut social de la famille; de même le retard tend à être plus fréquent à mesure que le statut social de la 41 famille est plus bas. Ensuite, la position sociale affecte les paramètres du processus de décision et contribue à accentuer les inégalités. » (Boudon, R. 1979 : 106-113) Une autre variable doit être aussi prise en considération lorsqu‟on parle de couche sociale défavorisée. La taille du ménage élevée est attribuée surtout à la classe populaire. En fait, nous nous sommes demandés pourquoi, les parents vivant dans des situations de très fortes difficultés se permettent encore d‟avoir beaucoup d‟enfants malgré la brutalité de la vie en général et celle de la leur en particulier.
INTRODUCTION GENERALE |