Relations entre variétés, conditions environnementales et résistance à l’aflatoxine chez l’arachide (Arachis hypogaea L.)

Importance de la culture de l’arachide

L’arachide présente de nombreux avantages et perspectives intéressants pour les petits producteurs et les économies des pays du Sud sur les plans:
• agronomique: lié à l’introduction d’une légumineuse dans les rotations à forte dominance céréalière ;
• nutritionnel: lié à un apport lipidique et protéinique substantiel dans les régimes alimentaires à très forte dominance glucidique ;
• économique: lié à la diversité des produits arachidiers susceptibles d’être consommés ou vendus ainsi qu’à un marché porteur dont les cours se situent régulièrement à plus de 30% au-dessus de ceux du soja (SCHILLING, 2001). Les pays en développement (PED) assurent plus de 85% de la production mondiale. Les techniques utilisées sont: la culture manuelle avec recours à la traction animale; la faible consommation d’intrants onéreux; des rotations et des associations avec d’autres cultures dont en particulier les céréales. Par ces procédés de faibles investissements et de réduction du risque, les rendements sont généralement inférieurs à 1 tonne ha-1 (SCHILLING, 2001).
Elle figure parmi les oléoprotéagineux mondiaux. 95% des surfaces et 94% de la production sont assurés par les PED, dont respectivement 35% et 21% par l’Afrique (MAYEUX, 2001).
Pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, la culture de l’arachide est presque exclusivement réalisée au niveau des exploitations de type familial (petites surfaces) avec un rendement moyen en gousses de 700kg ha-1 . En comparaison, les systèmes de production à forte consommation d’intrants permettent d’atteindre un rendement moyen de 2400kg ha-1 , pouvant aller jusqu’à 5 voire 6 tonnes ha-1 (MAYEUX, 2001).
Elle est à la fois une culture de rente et une culture vivrière. Elle est aussi un produit de base très apprécié dans la sous-région. Source de protéines (25%) à bon marché, elle fournit une huile en quantité (environ 50% du poids de la graine) et de grande qualité. L’arachide est également consommée sous de multiples formes comme bouillie, grillée, pâte, «beurre», farine, tourteau et rentre dans la composition de snacks et de biscuits (MAYEUX, 2001).
La richesse énergétique de la fane en fait un produit très recherché pour l’alimentation des animaux.
L’intérêt de l’arachide ne repose donc pas uniquement sur ses caractéristiques agronomiques qui en font une plante rustique et bien adaptée mais également sur les nombreuses retombées économiques qu’elle peut générer (MAYEUX, 2001).
L’arachide représente environ 12% de la production mondiale des oléagineux alimentaires et au moins 5% des échanges internationaux des produits oléagineux (SCHILLING, 2002). La production en 2003 est estimée à 36 millions de tonnes dont la Chine et l’Inde représentent 59% de cette production (FAO, 2003). La production africaine est dominée par le Nigéria (2700000 tonnes), le Soudan (1200000 tonnes) et le Sénégal (900000 tonnes sur une superficie d’environ 830000 ha), (FAO, 2003).
Le commerce mondial des produits arachidiers (graines décortiquées, huile et tourteau) porte principalement sur les arachides de confiserie et de bouche (graines triées, salées et grillées).
Les graines décortiquées exportées représentent 1200000 tonnes contre 350000 tonnes pour l’huile (DIMANCHE, 1995).
Le marché de l’arachide, en constante augmentation offre des débouchés intéressants pour les producteurs et a doublé en dix ans. Il est dominé par deux pays : la Chine (38%) et les EtatsUnis (19%). L’Europe occidentale importe à elle seule 600000 tonnes de graines décortiquées (BRG, 1999).
Au Sénégal, l’arachide occupe une superficie de 830994 ha des terres emblavées durant la campagne 2002-2003 (DSDIA/DAPS/MAE, 2003) et tient une place importante dans l’économie sénégalaise. En effet, le secteur arachidier représentait 80% des exportations du pays en 1960. Au lendemain des indépendances, la production de l’arachide a subi des fluctuations importantes. On note une augmentation importante de la production en 1975 (1400000 tonnes) puis un déclin progressif à partir des années 1980.
Cette baisse est due à une conjugaison de facteurs : pluviométrie irrégulière à partir des années 1970, cultures traditionnelles à petite échelle peu mécanisées, apparition de parasites et de maladies, pauvreté des sols, manque de mesures d’encouragement et insuffisance de capital semencier. Cela a pour conséquence une forte chute des exportations (10%) en 1995 et une sous utilisation de l’outil industriel (SONACOS) dont la capacité de trituration est aux alentours de 900000 tonnes, liée à l’insuffisance de la production (FREUD et al., 1997).
Actuellement la filière arachide sénégalaise, orientée à près de 95% vers la filière trituration huile/tourteau se heurte à la concurrence d’autres huiles provenant notamment des pays du
Nord à agriculture fortement subventionnée. On assiste aussi à un développement de la trituration artisanale de l’arachide. Celle-ci conduit à l’obtention d’une huile très prisée en milieu rural et d’un tourteau utilisé aussi bien en alimentation humaine qu’animale. Ces produits font l’objet d’un important commerce de détails dans les marchés ruraux.
Ce phénomène qui prend de plus en plus d’ampleur en milieu rural pose un problème de santé publique dans la mesure où la matière première utilisée ainsi que les produits qui en dérivent sont fortement suspectés de contamination par l’aflatoxine (GAYE, 1997 ; ROUZIERE et al., 1997).
Le Sénégal souhaite diversifier sa production en développant les exportations d’arachide de bouche, produit pouvant concurrencer les fruits secs du Nord tels que l’amande ou la noisette.

LES CHAMPIGNONS AFLATOXINOGENES

Généralités sur l’aflatoxine

En 1960, en Grande Bretagne (région de Londres) des dizaines de milliers de dindes moururent d’une maladie inconnue appelée « maladie X des dindes ». Les autopsies démontrèrent une nécrose importante du foie et une prolifération des conduits biliaires. Par la suite on a découvert que la cause était l’incorporation d’arachide provenant du Brésil à la nourriture et que le facteur responsable était l’aflatoxine produite par Aspergillus flavus, un champignon ubiquiste et banal (BOTTON et al., 1990 ; BOUCHETet al., 1999). De nos jours on connaît plusieurs aflatoxines (B1, B2, G1, G2,…) qui sont extrêmement toxiques et très hautement cancérigènes. Les doses létales à 50% sont inférieures au milligramme par kilogramme pour le rat. Les aflatoxines sont synthétisées principalement par A. flavus et A. parasiticus mais A. flavus apparaît plus agressif que A. parasiticus dans l’infestation des graines d’arachide. Les colonies des deux espèces diffèrent au microscope et sont facilement distinguées en utilisant des conditions standard de culture. De plus A. flavus produit de l’acide cyclopiazonique qui n’a pas été détecté chez A. parasiticus (HORN et al., 1995).
L’aflatoxine n’est pas entièrement détruite par l’organisme animal et une proportion non négligeable peut se retrouver dans la viande et dans le lait du bétail ayant consommé des tourteaux contaminés. 1% des aflatoxines cancérigènes ingérées par une vache se retrouve sous forme de dérivés hydroxylés, les aflatoxines M1 et M2 (M pour milk) également dangereuses (BOUCHET et al., 1999).
Au Sénégal, c’est en 1977, à l’occasion d’un conseil interministériel que la création d’un groupe de travail «aflatoxines» devant étudier le problème et proposer des solutions fut décidée. Des études menées ont révélé une contamination de l’huile d’arachide et des tourteaux artisanaux, graines et pâtes alimentaires mais également celle du niébé, du lait, des aliments de bétail etc (SALL, 1998).
Ces champignons, A. flavus Link ex Fries et A. parasiticus Speare appartiennent à la classe des Deuteromycètes ou Champignons Imparfaits ou encore «Fungi Imperfect»; à l’ordre des Hyphales et au genre Aspergillus. On compte au sein de ce genre une vingtaine d’espèces dont les plus importantes sont: A. niger, A. candidus, A. fumigatus, A. nidulans, A. ochraceus, A. terreus, A.versicolor (RICHARD-MOLARD, 1982 ).
A. flavus et A. parasiticus sont des champignons saprophytes qui se développent sur des organes morts ou sur des tissus quiescents sans activité métabolique notable. Ils peuvent aussi se comporter en parasites facultatifs (PETIT, 1990). Ce parasitisme est décelé lorsque qu’ils envahissent les plants d’arachide directement ou lorsqu’ils attaquent des tissus rendussensibles par le stress environnemental (déficit hydrique, attaques d’insectes, de nématodes…). L’exemple le plus frappant connu est «l’aflaroot» dont les symptômes sont des taches sur les cotylédons et le développement d’une moisissure vert-jaune. Les plantules pourrissent 4 à 8 jours après germination de la graine (SUBRAHMANYAM et al., 1992)

Biologie et développement des champignons aflatoxinogènes

Les moisissures du Genre Aspergillus sont des organismes pluricellulaires dont l’appareil végétatif, le thalle, est formé d’un long filament ramifié et souvent cloisonné appelé hyphe. En début de croissance, l’ensemble des hyphes est un mycélium visible à l’œil nu qui se présente comme une sorte de feutrage à la surface des graines colonisées. La structure filamenteuse du thalle lui permet de coloniser les substrats solides. Par leur ubiquité et leur possibilité d’adaptation physiologique à diverses conditions environnementales, ces champignons sont très redoutables sur les graines, notamment lors du stockage (ZAMBETTAKIS, 1996). A. flavus et A. parasiticus se reproduisent par voie asexuée en formant des spores qui prennent naissance au niveau des hyphes spécialisées (conidiophores) dont la longueur varie entre 300 et 500 µm (MILDLETON et al., 1994). Chaque conidiophore se termine par une tête globuleuse garnie de phialides portant chacune un chapelet de conidies pulvérulentes. Les thalles d’Aspergillus diffèrent les uns des autres par la pigmentation des organes de reproduction qui sont colorés en noir, vert, jaune ou en brun. Un thalle peut produire une dizaine de millions de spores sur une graine. En conditions bioclimatiques favorables, la spore produit un premier filament mycélien qui en se ramifiant donne naissance à une colonie présentant un amas mycélien de forme circulaire à partir duquel se différencient progressivement les conidiophores et les colonies de la nouvelle génération. Le cycle s’effectue en 48 heures, mais généralement il s’étale sur 5 à 10 jours (RICHARD-MOLARD, 1982). Les spores, entourées d’une paroi cellulaire résistante et disposant de substances de réserves accumulées au cours de la conidiogénèse, constituent les organes de conservation des champignons aflatoxinogènes en conditions défavorables. Au fur et à mesure que les conditions environnementales deviennent extrêmes, ces champignons produisent des sclérotes, forme de vie ralentie encore plus durable (DIENER et DAVIS, 1986).

Aliments attaqués par les champignons aflatoxinogènes

Selon BOUCHET et al., (1999), A. flavus et A. parasiticus sont des contaminants très courants des arachides et des céréales. Les produits attaqués sont : des céréales (riz, maïs, sorgho, blé); des légumineuses (niébé); des oléagineux (coprah, coton); des fruits secs (amandes, pistaches); des tubercules (manioc, patate douce); des produits animaux (œufs, lait, viande fromage) selon BA (1990) et SALL (1998).

Toxicité des aflatoxines

Selon BOUCHET et al., (1999), 300 espèces d’Aspergillus sont actuellement identifiées mais seule une dizaine sont pathogènes et responsables d’infections graves appelées aspergilloses. Selon ANDARY (1998), cité par SALL (1998), une mycotoxine est une exotoxine élaborée par des champignons, le plus souvent des moisissures, et qui provoquent chez l’homme ou les animaux des mutations pathologiques appelées mycotoxicoses qui ne sont ni infectieuses ni contagieuses.
De nos jours plus de 20 molécules d’aflatoxines qui ont une large gamme de distribution et un haut pouvoir contaminant sont identifiées. Les plus connues sont B1, B2 (fluorescence bleue aux UV 360 nm) synthétisées par A. flavus et G1, G2 (fluorescence verte aux UV 360 nm) synthétisées par A. parasiticus. L’aflatoxine B1 est toujours présente dans les contaminants primaires, c’est la plus abondante, la plus toxique mais également le cancérogène hépatique le plus actif par voie orale connu (SALL, 1998). Il est métabolisé et se retrouve dans le lait de mammifères en dérivés hydroxylés appelés aflatoxines M1 et M2 ; et selon DIMANCHE, (1997) la forme B est 20 à 50 fois plus toxique que la forme G. Les aflatoxines sont très stables (BOUCHET et al., 1999) et ne seraient pas dégradées par la cuisson (SALL, 1998).
Selon BA, (1990), 10 µg d’aflatoxine B1 kg-1 j -1 entraîne le développement d’un carinome hépatique chez le rat. Chez le macaque, 100 µg d’aflatoxine B1 kg-1 j -1 pendant trois semaines entraîne la mort de l’animal suite à des lésions hépatiques (proliférations cellulaires des canalicules biliaires et cirrhoses). L’aflatoxine augmente la perméabilité des mitochondries ce qui interrompt le transfert des électrons et entraîne secondairement un déclin de la respiration cellulaire (SALL, 1998). Selon FRAYSSINET (1982) et PIER (1986), la truie et les volailles se révèlent les plus sensibles avec des doses létales (DL50) inférieures à 10 mg kg-1 . Les monogastriques dont la dose létale (DL50) est comprise entre 1 et 10 mg kg-1 , sont plus sensibles que les polygastriques qui ont la possibilité d’induire des modifications moléculaires grâce à leur flore bactérienne capable d’ôter à ces substances leur potentiel de toxicité. PETIT et al., (1994) ont montré que l’intoxication par cette toxine se traduit chez l’homme ou l’animal par un affaiblissement général de l’organisme, une sensation de fatigue causée par la destruction du système immunitaire et la dégénérescence de certains organes et tissus.
L’absorption de faibles quantités d’aflatoxines induit un ralentissement de la croissance chez les jeunes sujets, une anorexie et dans les cas limites la mort. L’ingestion de doses moyennes conduit généralement à une intoxication chronique ; des quantités plus élevées provoquent une intoxication aiguë dont les manifestations rappellent les cas d’empoisonnements graves se caractérisant par l’anémie, la jaunisse, des diarrhées fréquentes, un disfonctionnement ou le cancer du foie.
Les aflatoxicoses aiguës ont rarement été signalées chez l’homme (SALL, 1998). Mais selon BA (1990), certains cas de toxicité ont été signalés en Inde suite à la consommation de maïs contaminé par l’aflatoxine.
Le pouvoir cancérigène des aflatoxines M1 et M2 est moindre; la gravité des intoxications est modulée par la durée, le niveau d’exposition et par des facteurs nutritionnels (alcool, malnutrition) ou sanitaire (hépatites, douves du foie) SALL (1998).
Pour les PED, compte tenu des conditions climatiques les plus favorables à la production de toxines dans les aliments et leurs ingrédients et compte tenu aussi des méthodes peu satisfaisantes de manutention des produits alimentaires, il est probable selon la FAO (cité par SALL, 1998) qu’une partie de la population de ces pays soit exposée à un certain degré d’intoxication par les aflatoxines.5. Aliments attaqués par les champignons aflatoxinogènes Selon BOUCHET et al., (1999), A. flavus et A. parasiticus sont des contaminants très courants des arachides et des céréales. Les produits attaqués sont : des céréales (riz, maïs, sorgho, blé); des légumineuses (niébé); des oléagineux (coprah, coton); des fruits secs (amandes, pistaches); des tubercules (manioc, patate douce); des produits animaux (œufs, lait, viande fromage) selon BA (1990) et SALL (1998).

Toxicité des aflatoxines

Selon BOUCHET et al., (1999), 300 espèces d’Aspergillus sont actuellement identifiées mais seule une dizaine sont pathogènes et responsables d’infections graves appelées aspergilloses. Selon ANDARY (1998), cité par SALL (1998), une mycotoxine est une exotoxine élaborée par des champignons, le plus souvent des moisissures, et qui provoquent chez l’homme ou les animaux des mutations pathologiques appelées mycotoxicoses qui ne sont ni infectieuses ni contagieuses.
De nos jours plus de 20 molécules d’aflatoxines qui ont une large gamme de distribution et un haut pouvoir contaminant sont identifiées. Les plus connues sont B1, B2 (fluorescence bleue aux UV 360 nm) synthétisées par A. flavus et G1, G2 (fluorescence verte aux UV 360 nm) synthétisées par A. parasiticus. L’aflatoxine B1 est toujours présente dans les contaminants primaires, c’est la plus abondante, la plus toxique mais également le cancérogène hépatique le plus actif par voie orale connu (SALL, 1998). Il est métabolisé et se retrouve dans le lait de mammifères en dérivés hydroxylés appelés aflatoxines M1 et M2 ; et selon DIMANCHE, (1997) la forme B est 20 à 50 fois plus toxique que la forme G.
Les aflatoxines sont très stables (BOUCHET et al., 1999) et ne seraient pas dégradées par la cuisson (SALL, 1998).

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