REGULATION DU SECTEUR DE L’ELECTRICITE

REGULATION DU SECTEUR DE L’ELECTRICITE

L’organisation physique et spatiale du secteur électrique malien

Selon Economides (1996), un réseau est un bien système c’est-à-dire un ensemble d’entités complémentaires destiné à la production d’un service. Pour Curien et Gensollen (1992), un réseau est une interconnexion spatiale d’équipements compatibles. Les industries de réseau électriques sont celles destinées à la production et à l’acheminement de l’électricité. Elles sont composées de trois segments qui sont le segment de la production, le segment de transport et celui de la distribution.

L’organisation du segment de la production

La production est l’opération par laquelle une source d’énergie primaire est transformée en électricité (Kane, 2009). Cette conversion peut être directe (énergie éolienne, hydraulique, etc.) ou indirecte (cycle thermodynamique, etc.). Régulation du secteur de l’électricité au Mali, Partenariat Public-Privé et Ouverture à la Concurrence 18 Il faut noter que toutes les énergies primaires sont convertibles en électricité (Martin et Gicquel, 1992). La production d’électricité peut être organisée à l’intérieure d’une seule entreprise ou réalisée par des producteurs indépendants. Elle est caractérisée par deux types de spécificité d’actifs. La première est liée aux lourdes infrastructures très capitalistiques ayant une très longue durée de vie et difficilement redéployables à d’autres activités que la production d’électricité. La seconde est liée au caractère non stockable de l’électricité. L’absence de stockage implique que l’on doive disposer en permanence de moyens de réserve qui permettent de gérer en temps réel les écarts entre les quantités prévues et les quantités effectivement consommées et produites (Percebois, 2003). Le Mali dispose d’un potentiel énorme sous exploité en source de production d’électricité notamment en hydroélectricité. Pour preuve, plus d’une vingtaine de sites hydroélectriques de moyenne et de grande capacité ont été identifiés à travers le territoire national pour une puissance totale d’équipement de 1150MW et un productible annuel moyen d’environ 5600 GWh. De ce potentiel, seulement 21% étaient aménagés en 2009. A cet énorme potentiel hydroélectrique, il convient d’ajouter aussi l’existence d’un potentiel important en énergie solaire, l’irradiation solaire, bien repartie sur le territoire est de l’ordre de 5 à 7 KWh/m2/jour, et en énergie éolienne, la vitesse du vent dans les zones sahéliennes et sahariennes du pays varie de 3 à 7 m/s en moyenne annuelle. La société Energie du Mali (EDM-SA), principal concessionnaire du service public de l’électricité, est chargée de la production, du transport, de la distribution et de la commercialisation de l’énergie électrique sur l’ensemble de son périmètre qui couvre 99 localités dont seulement 39 déjà électrifiées. Elle Régulation du secteur de l’électricité au Mali, Partenariat Public-Privé et Ouverture à la Concurrence 19 détenait jusqu’en 2010 le monopole de l’achat en gros d’énergie électrique sur l’ensemble du territoire national. EDM-SA alimente ses nombreux clients en électricité à travers trois systèmes électriques qui sont : le système électrique interconnecté de Bamako, le système isolé alimenté par des centrales diesel et le système isolé raccordé au réseau électrique ivoirien. Le système électrique interconnecté de Bamako assure l’alimentation en électricité de 18 grandes localités (voir la liste des localités dans les annexes). Ce système, d’une puissance installée de 240,47 MW en 2007, se compose de 6 centrales dont 4 centrales hydroélectriques (Sélingué, Sotuba, Manantali et Félou) et deux centrales thermiques (Darsalam et Balingué). Le système isolé, d’une puissance totale installée de 43,6 MW en 2007, comprend 19 localités (voir la liste des localités dans les annexes) électrifiées par des groupes fonctionnant au diesel. Le système électrique isolé raccordé au réseau ivoirien approvisionne en énergie électrique les localités de Kadiolo et de Zégoua. Ces deux localités sont alimentées à travers une ligne électrique Moyenne Tension de 30 kV.

Le parc de production du système interconnecté

Composé de 8 centrales dont 4 centrales hydroélectriques et 4 thermiques, le système interconnecté de Bamako est alimenté en continue par un parc d’une capacité totale de 295,47 MW dont 53% hydroélectrique et 47% thermique. Le tableau ci-après donne la composition du parc de production de ce système interconnecté. Régulation du secteur de l’électricité au Mali, Partenariat Public-Privé et Ouverture à la Concurrence 20 Tableau1 : puissance installée du système interconnecté Centrales Nombre de groupes Puissance totale installée, MW Centrale hydroélectrique de Sélingué 4 46,24 Centrale hydroélectrique de Sotuba 2 5,7 Centrale hydroélectrique de Félou 1 0,68 Centrale hydroélectrique de Manantali 5 104 (200)* Centrale thermique de Darsalam 6 38,4 Centrale thermique de Balingué 8 32,45 Centrale thermique Aggreko – 13 Centrale SOPAM-SA – 55 Total 26 295,7 * Part du Mali : 52% de la capacité totale (200 MW) Source : EDM-SA I.2.1.1.1. La centrale hydroélectrique de Sélingué Mise en service depuis le 31 août 1980 et réhabilitée entre 1998 et 2000, la centrale hydroélectrique de Sélingué, se situe à environ 130 km au Sud de Bamako sur le Sankarani un affluent du fleuve Niger. Elle est équipée de 4 groupes Kaplan de 11,56 MW chacun soit un total de 46 MW environ. Elle a une capacité de rétention saisonnière de 2 milliards de mètre cube et une production moyenne annuelle de 198 GWh en année sèche, 225 GWh en année moyenne et de 250 GWh en année humide. Le productible mensuel maximal est généralement enregistré au mois d’octobre et est de l’ordre de 27 GWh. Durant la période 2001 à 2008, la centrale hydroélectrique de Sélingué a produit en moyenne par an 220,30 GWh. Particulièrement pour l’année 2008, la production a été de 247,43 GWh, avec une maximale mensuelle de 34 GWh enregistrée au mois d’octobre. De la courbe de production 2008, on note qu’aux mois de septembre, octobre et novembre, la centrale a enregistré une production record de 34 GWh dépassant largement la normale de 27 GWh. Tableau 2 : les indicateurs de capacité de la centrale de Sélingué Puissance installée, MW Productible année humide, GWh Production 2007, GWh Production 2008, GWh Production moyenne 2001 à 2008 GWh 46,24 250 226,80 247,43 220,30 Source : EDM-SA Régulation du secteur de l’électricité au Mali, Partenariat Public-Privé et Ouverture à la Concurrence 21 Du tableau ci-dessus, on constate que l’année 2008 a été une année humide. La production a été légèrement en dessous (moins de 1%) du productible d’une année humide fixé à 250 GWh. Elle a dépassé de 9% la production de 2007 qui est de 226,8GWh et de 12% la production moyenne annuelle (220,30 GWh) enregistré sur la période 2001 à 2008. 

La centrale hydroélectrique de Sotuba

Située juste en aval de Bamako sur le fleuve Niger, la centrale hydroélectrique de Sotuba est dotée de 2 groupes Kaplan d’une capacité de 2,85 MW chacun. Ces groupes ont été mis en service en 1966 et réhabilités en 1990. Le productible annuel moyen de la centrale est de 32.8 GWh en année sèche, 34,8 en année moyenne et 35,7 GWh en année humide. Tableau 3 : indicateurs de capacité de la centrale hydroélectrique de Sotuba Puissance installée, MW Productible année humide, GWh Production 2007, GWh Production 2008, GWh Production moyenne 2001 à 2008 GWh 5,7 35,7 35,58 34,48 32,68 Source : EDM-SA En 2008, la production d’énergie électrique de la centrale de Sotuba a été d’environ 34,50 GWh, soit une baisse de plus de 3% par rapport à la production enregistrée en 2007 (35,58 GWh), un dépassement de 5% du productible d’une année sèche (32,80 GWh) et une hausse de 5,52% par rapport à la production annuelle moyenne de 2001 à 2008 (32,68 GWh). 

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La centrale hydroélectrique de Félou

Elle a été installée depuis 1972 et réhabilitée en 1992. Elle ne comprend qu’un seul groupe de type FRANCIS et de puissance nominale de 680 KW. Depuis 2002, la centrale de Félou est sous exploitée, son taux d’exploitation se situait Régulation du secteur de l’électricité au Mali, Partenariat Public-Privé et Ouverture à la Concurrence 22 autour de 5% en 2007. Il faut noter que cette centrale doit être mise hors service avec la construction de la nouvelle centrale Félou 2. Tableau 4 : les indicateurs de capacité de la centrale de Félou Puissance installée, MW Productible max enregistré, KWh Production 2007, KWh Production 2008, KWh Production moyenne 2001 à 2008 KWh 0,68 4941,11 180,8 184,8 1145,79 Source : EDM-SA 

La centrale thermique de Darsalam

La centrale thermique de Darsalam constitue une des plus vieilles centrales du système. Elle est composée de 9 groupes qui fonctionnent au DDO d’une puissance nominale totale de 43,96 MW. A cause de la vétusté de ses installations qui est à la base de nombreuses pannes, la centrale thermique de Darsalam est de moins en moins sollicitée ces dernières années. Par exemple en 2008 on a enregistré une réduction de près de 74% de la production de cette centrale par rapport à celle de 2007 et une baisse de 54% par rapport à la moyenne de la période 2001 à 2008. 

La centrale de Balingué

Elle est l’une des nouvelles installations de l’EDM. Elle dispose de 8 groupes dont 3 mis en service en 2000, 1 en 2001 et 4 en 2007 pour une capacité totale de 33 MW. La production d’électricité de la centrale est en progression depuis 2001 date de mise en service du quatrième groupe. Cette production a connu une hausse de 13% entre 2007 et 2008 passant de 104,42 GWh à 118,21 GWh. 

Le barrage de Manantali

Le barrage de Manantali est un aménagement de l’OMVS à but multiple (irrigation, navigation, production d’électricité). Sa construction à durée près de 6 ans (de 1982 à 1988) et il n’a été mis en service qu’en 2001. La capacité de Régulation du secteur de l’électricité au Mali, Partenariat Public-Privé et Ouverture à la Concurrence 23 stockage de la retenue de Manantali est estimée à 11,3 milliards m3. Elle est équipée de 5 groupes de puissance unitaire de 40 MW pour un productible annuel moyen théorique de 807 GWh. La production de la centrale de Manantali est repartie entre les trois pays fondateurs de l’OMVS le Mali 52%, le Sénégal 33% et la Mauritanie 15%. Tableau 5 : les indicateurs de capacité du Barrage de Manantali Puissance installée Productible année sèche Productible année moyenne Productible année humide .

La centrale thermique d’Aggreko

C’est une installation privée appartenant à la société Aggreko. Il s’agit d’un producteur indépendant déjà présent au Sénégal et en Mauritanie. EDM a signé en 2007 un contrat d’achat d’énergie avec Aggreko pour pallier à l’insuffisance de sa production face à une demande croissante. Les quantités d’électricité livrées par Aggreko à EDM-SA varient selon les années en fonction du déficit de l’EDM qui dépend des fluctuations de la demande des consommateurs mais, surtout des aléas climatiques et technologiques. Ainsi, en 2007 Aggreko a livré 99,15 GWh à EDM-SA et 83 GWh en 2008 soit une baisse de 16 %. 

La centrale thermique de SOPAM/Energie

Il s’agit de la dernière-née des centrales thermiques du système interconnecté, elle a été inauguré le 14 octobre 2010 à l’occasion du cinquantième anniversaire de la création de l’EDM. Dotée d’une capacité de 55MW, elle est la plus grande centrale thermique du Mali en termes de capacité. Elle a été entièrement réalisée par un opérateur privé Burkinabè grâce à un montage financier de banques maliennes et burkinabè. Au-delà du renforcement des capacités du réseau électrique malien, la construction de cette centrale augure une nouvelle forme de Régulation du secteur de l’électricité au Mali, Partenariat Public-Privé et Ouverture à la Concurrence 24 Partenariat Public-Privé triangulaire entre l’Etat, les opérateurs privés et les institutions financières de la sous-région. 

Parc de production du système isolé

Les centres isolés, au nombre de 19, sont alimentés en électricité par 90 groupes électrogènes de taille relativement faible et comprise entre 80 KW et 1220 KW. La puissance totale du parc de production en 2008 de ces centres était de 50 MW environ et on estime leur rendement moyen à 255g de combustible par unité de KWh. 

Les achats d’électricité

Les principaux fournisseurs d’énergie électrique à la société d’énergie du Mali sont : ESKOM-SA (Manantali), Aggreko1 (Dakar) Aggreko 2 (Nouakchott) et la Côte d’Ivoire qui desserve les localités de Zégoua et de Kadiolo dans la région de Sikasso. En 2007, la quantité totale d’énergie électrique achetée par EDM-SA à ces différents fournisseurs se chiffrait à près de 396 millions de KWh, répartie comme suit : Manantali 294,4 GWh, soit 74,4% du volume total acheté ; Aggreko 99,2 GWh, soit 25% du volume acheté ; Côte d’Ivoire, 2,3 GWh, soit 0,5% du volume acheté. En 2008, les volumes achetés étaient respectivement de 380,67 GWh avec Manantali soit 81,60% du volume total acheté, 83GWh avec Aggreko, soit 17,80% et 2,75GWh avec la côte d’Ivoire soit 0,60% du volume total acheté. Régulation du secteur de l’électricité au Mali, Partenariat Public-Privé et Ouverture à la Concurrence 25 On remarque que le volume d’énergie achetée en 2008 a connu une hausse de 18% environ par rapport à son niveau de 2007. Cette hausse s’explique par une forte amélioration de la production de Manantali, qui a augmenté de 29,3%.  En conclusion, il faut noter que l’hydroélectricité reste la principale source d’alimentation en électricité au Mali. Elle occupe plus de 66% de la quantité d’énergie électrique produite ou achetée. Plus de 52% de l’électricité produite par les centrales de l’EDM est d’origine hydraulique. Les importations d’électricité sont marginales de l’ordre de 8,55% du volume total. Le système électrique interconnecté de Bamako participe à 88% du volume total d’énergie électrique achetée ou produite par EDM-SA alors que le système isolé n’y contribue qu’à hauteur de 12%.

Table des matières

Introduction
Chapitre I : Organisation et régulation du secteur de l’électricité au Mali
I. Evolution historique et institutionnelle
II. Les forces et faiblesses du modèle traditionnel d’organisation du réseau électrique
III. Règles théoriques et pratiques de la régulation
Chapitre II : Le partenariat public privé dans le secteur de l’électricité
I. Les différents contrats de partenariat public-privé
II. Les fondements théoriques du Partenariat public-privé
III. Le Partenariat Public-Privé dans le secteur de l’électricité au Mali
Chapitre III : L’ouverture à la concurrence
I. Les fondements de l’ouverture à la concurrence
II. La régulation de l’accès des tiers au réseau (ATR)
III. Faisabilité et viabilité de la concurrence dans le cas du Mali

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