Régulation des facteurs Mdm2 et FoxOs dans la réponse angio-adaptative à l’obésité

Régulation des facteurs Mdm2 et FoxOs dans la réponse angio-adaptative à l’obésité

 Les deux premières études de ce travail de thèse ont mis en avant le rôle de l’axe de régulation Mdm2-FoxOs sur l’angio-adaptation du tissu adipeux à l’obésité et à l’exercice. Au cours de l’obésité survient une augmentation de l’expression de FoxO1 et 3α, induisant un frein angiostatique dans le tissu adipeux blanc viscéral et sous-cutané. À l’exercice, l’expression de Mdm2 est significativement augmentée, permettant la levée de l’inhibition angiostatique exercée par FoxOs dans ces deux tissus. Les mécanismes moléculaires, au sein de la cellule endothéliale du tissu adipeux, qui permettent d’expliquer la surexpression de FoxO1 et 3α lors du développement de l’obésité, ainsi que l’augmentation de Mdm2 à l’exercice, restent encore inexplorés. La régulation des facteurs FoxOs dans la cellule endothéliale semble fortement dépendante de leurs états de phosphorylation au niveau des résidus sérines et thréonines (Milkiewicz et al. 2011). Cette régulation, essentiellement sous la dépendance d’Akt, fait qu’en état déphosphorylé les protéines FoxOs sont stabilisées et localisées au niveau nucléaire, où elles peuvent agir en tant que facteurs de transcription. Après phosphorylation par Akt, FoxO1 et 3α sont séquestrés dans le cytosol et dégradés (Puig & Mattila 2010; Tzivion et al. 2011). L’expression de Mdm2, très largement étudiée dans les cellules tumorales, est soumise à un grand nombre de régulations transcriptionnelles et post-transcriptionnelles (Zhao et al. 2014). Une des régulations les plus importantes de Mdm2 intervient au niveau protéique. En condition physiologique, Mdm2 s’auto-ubiquitinyle en même temps que ses cibles, conduisant à sa propre dégradation (Wade et al. 2010). Mais la phosphorylation de Mdm2 sur ses résidus sérines166/186 par Akt vient contre-carrer ce processus et induire la stabilisation cytosolique et la translocation nucléaire de Mdm2 (Zhou et al. 2001; Ogawara et al. 2002; Joshi et al. 2014). La protéine Akt influence donc positivement la stabilisation de Mdm2 et négativement celle de FoxOs. La voie de signalisation PI3K-Akt, dont dépend justement la phosphorylation d’Akt, est inhibée chez l’obèse dans la cellule endothéliale, notamment à cause de la réduction de la réponse cellulaire à l’insuline (Duncan et al. 2008). La réduction de l’activation d’Akt pourrait donc expliquer l’augmentation de l’expression endothéliale de FoxOs au cours l’obésité (Qi et al. 2015), alors qu’une augmentation de celle-ci pendant l’exercice serait en mesure d’induire une augmentation de Mdm2, couplée à une régulation négative de FoxOs. Parmi les mécanismes cellulaires capables d’inhiber la voie PI3K-Akt, l’enzyme PTEN joue un rôle important. Elle catalyse la réaction inverse de PI3-K, permettant la transformation Étude n°3 217 du PIP3 en PIP2 et réduisant ainsi l’activation d’Akt (Pal et al. 2012). L’activité enzymatique de PTEN dépend de sa localisation membranaire. C’est dans ce contexte que nous avons étudié la molécule ECSCR (endothelial cell surface expressed chemotaxis and apoptosis regulator), appelée anciennement ARIA ou ECSM2. ECSCR est une protéine transmembranaire très préférentiellement exprimée dans les cellules endothéliales et notamment celles du tissu adipeux (Huminiecki & Bicknell 2000; Armstrong et al. 2008; Akakabe et al. 2013). Elle possède un rôle pro-apoptotique (Ikeda et al. 2009), mais également des propriétés anti-angiogéniques (Koide et al. 2011a). La régulation d’ECSCR est essentiellement post-transcriptionnelle, au travers d’un processus de glycosylation, qui permet un ancrage de la protéine à la membrane plasmique, nécessaire à son activité (Shi et al. 2011; Wu et al. 2012b). La forme glycosylée et active d’ECSCR possède un poids moléculaire d’environ 60 kDa. Les formes immatures déglycosylées (ou partiellement déglycosylées) d’ECSCR ont un poids moléculaire compris entre 21.6 et 50 kDa (Armstrong et al. 2008).

Discussion

Au vu de ces résultats, il semblerait que l’obésité, même si elle n’augmente pas l’expression protéique d’ECSCR, induise une glycosylation et une localisation membranaire préférentielle d’ECSCR dans le tissu adipeux blanc. Le développement de l’obésité serait donc corrélé avec une activation accrue d’ECSCR dans le tissu adipeux blanc. Cette activation est concomitante avec l’augmentation de l’expression de PTEN, qui en s’associant avec ECSCR devrait être en mesure d’inhiber la voie PI3-K/ Akt au niveau membranaire. Cette inhibition est retrouvée dans le tissu adipeux viscéral épididymal où le ratio P-Akt/Akt est significativement réduit à l’obésité. En revanche, la voie PI3-K/Akt des cellules endothéliales du tissu adipeux sous-cutané ne semble pas affectée par l’augmentation ECSCR/PTEN au niveau membranaire avec un ratio P-Akt/Akt qui reste inchangé à l’obésité. Malgré cela, il semblerait que dans le tissu adipeux viscéral, l’augmentation de la glycosylation et de l’activation d’ECSCR à l’obésité soit à l’origine d’une inhibition d’Akt. Celle-ci aurait pour conséquence l’augmentation de l’expression de FoxOs au cours du développement de l’obésité (Qi et al. 2015) et la dégradation de Mdm2 (Joshi et al. 2014) , ainsi qu’une diminution de la stimulation du VEGF-A par la voie mTOR (Soumya et al. 2013). Il pourrait résulter de ces changements d’expression la survenue d’un microenvironnement antiangiogénique et d’une raréfaction capillaire dans le tissu adipeux. De façon intéressante, il a été observé chez des souris présentant une activation forcée d’ECSCR, un phénotype adipeux très proche de celui de nos souris obèses sédentaires, avec une hypertrophie tissulaire, une réduction de la phosphorylation d’Akt couplée à une réduction du ratio capillaire par adipocyte et une augmentation de l’inflammation (Akakabe et al. 2013). Cette analogie tend à confirmer notre hypothèse selon laquelle l’augmentation de la localisation membranaire d’ECSCR dans la cellule endothéliale, chez l’obèse, pourrait être à l’origine du défaut angiogénique retrouvé dans le tissu adipeux. L’absence de réduction du ratio P-Akt/Akt, en réponse à l’augmentation d’ECSCR/PTEN au niveau membranaire dans le tissu adipeux sous-cutané, peut éventuellement être expliquée par le fait que nos mesures d’expressions protéiques ont été réalisées sur tissus adipeux entiers. Alors qu’ECSCR est essentiellement exprimé dans les cellules endothéliales (Huminiecki & Bicknell 2000; Armstrong et al. 2008), PTEN et Akt sont pour leur part des protéines ubiquitaires et donc exprimées dans le tissu adipeux par d’autres types cellulaires, et notamment le plus important quantitativement, les adipocytes. Les Étude n°3 223 adipocytes sous-cutanés sont connus pour avoir une plus grande sensibilité à l’insuline que les adipocytes viscéraux (Ibrahim 2010), avec notamment une plus grande densité de récepteurs à l’insuline (Franck et al. 2007). Cette sensibilité pourrait être à l’origine d’une suractivation plus importante de la voie PI3-K/Akt dans les adipocytes sous-cutanés, permettant de contrebalancer l’activité inhibitrice de PTEN sur la phosphorylation d’Akt. Ce mécanisme compensateur dans les adipocytes sous-cutanés pourrait donc expliquer le non changement du ratio P-Akt/Akt dans le tissu adipeux sous-cutané entier chez l’obèse. À noter que, malgré son faible niveau expression adipocytaire en comparaison avec les cellules endothéliales, ECSCR en fixant PTEN est en mesure d’inhiber la régulation insulino-dépendante du processus de lipolyse au sein de l’adipocyte blanc (Kilari et al. 2015). 

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