Règles du droit public international

Une définition restrictive de la fonction de ministre des Affaires étrangères transcendée par le droit international coutumier

« La République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit public international. Elle n’entreprendra aucune guerre dans des vues de conquête et n’emploiera jamais ses forces contre la liberté d’aucun peuple. » [Alinéa 14, Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 »] « La Cour fait (…) observer qu’un ministre des Affaires étrangères, responsable de la conduite des relations de son État avec tous les autres États, occupe une position qui fait qu’à l’instar du chef de l’État et du chef du Gouvernement il se voit reconnaître par le droit international la qualité de représenter son État du seul fait de l’exercice de sa fonction (…) ». [C.I.J., Affaire relative au mandat d’arrêt du 11 avril 2000 (République démocratique du Congo c. Belgique), 14 février 2002, Paragr. 53]. 1060. Au regard du droit international coutumier le président de la République française, le Premier ministre et le ministre des Affaires étrangères sont les organes emblématiques d’un même spectre chromatique. Incarné en la Commission du Droit Internationale (C.D.I.), le « législateur » international les considère « comme ayant, du fait de leur charge et de leurs fonctions, le pouvoir d’agir pour leur État lorsqu’ils négocient, rédigent, authentifient ou signent un traité. En ce qui concerne les ministres des Affaires étrangères, le fait a été expressément reconnu par le Cour permanente de Justice internationale dans l’affaire du statut juridique du Groenland oriental, à propos de la « Déclaration Ihlen » »2439. En l’espèce, l’autonomie d’action du ministre des Affaires étrangères sur la scène diplomatique est affirmée dans le contexte spécifique de la codification des règles coutumières qui fondent et ordonnent les relations conventionnelles des États. De manière spécifique, la C.D.I. enracine la présomption de représentativité du ministre dans la célèbre Affaire du Groenland Oriental rendue par la Cour Permanente de Justice Internationale (C.P.J.I.) en 1933.

Novatrice pour le juge international de l’époque, cette solution passée à la postérité sous l’appellation de « Déclaration IHLEN »2440 est une réalité que les ministres des Affaires étrangères et les présidents du Conseil de la IIIème République expérimentent depuis la fin du XIXème siècle2441. Cependant, la consécration prétorienne du pouvoir d’engagement seconde moitié du XXème siècle : celle de l’influence grandissante de la vie internationale sur la conduite de la politique extérieure des États d’une part ; celle de l’indexation constitutionnelle de l’action des représentants de l’État dans l’ordre international, d’autre part. A ce titre, le caractère éminent que la pratique constitutionnelle française attribue au pouvoir de coordination du chef du Quai d’Orsay, que ce soit au plan administratif ou politique, lui confère presque naturellement un rôle de premier plan dans l’articulation harmonieuse de ces deux problématiques. A tout le moins, l’étude des sources juridiques de sa fonction aménage- t-elle une perspective originale dans l’observation des mutations du concept de « représentation » au niveau de l’ordonnancement juridique international. Son assouplissement y est affirmé en des termes plus manifestes qu’en droit constitutionnel français. A ce titre, l’article 7 de la Convention de Vienne de 1969 et plus encore, sa portée coutumière, constitueraient un point d’appui à ne pas négliger pour tout chef du Quai d’Orsay désireux de légitimer son influence dans l’orientation de la politique étrangère française.

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Ainsi, le Professeur Alain PELLET demeure convaincu que « (…) les gouvernements se Néanmoins, d’un point de vue méthodologique, on reconnaît avec la doctrine spécialisée que le fait de partir d’une conception politique nationale pour éclairer un pan du droit international – en l’espèce, l’instrumentalisation juridique des relations extérieures des États – constitue « une méthode peu fréquente dans la littérature française du droit  diplomatique française contraire aux dispositions de la Convention suffirait à ôter tout effet contraignant à l’article 7 de la Convention. Le régime de la représentativité du ministre des Affaires étrangères se trouverait alors aligné sur celle de n’importe quel autre ministre, dans l’ordre international public. Il lui faudrait, notamment, justifier formellement de son habilitation à représenter la France. De fait, la présomption de représentativité qui lui est reconnue de plein droit à l’article 7 (a) peut tomber plus facilement que celle qui aura fait l’objet d’une consécration conventionnelle par voie de ratification. constitutionnel»2446. C’est, donc, dans un contexte d’ouverture du Droit que l’on choisit d’inscrire l’analyse de la représentativité internationale du ministre des Affaires étrangères.

Dans cette optique, la portée extensive que le droit international positif confère au rôle diplomatique du ministre sera d’autant moins contraignante à l’égard de la pratique constitutionnelle française que la primauté du droit politique interne sur le droit international est coutumièrement affirmée dans les relations entre États. Sur ce dernier point, la pratique diplomatique internationale a été étoffée par des éléments conceptuels et matériels qui seraient de nature à atténuer la dimension éminemment instrumentale que la tradition constitutionnelle française promeut depuis l’Ancien Régime (Section I). C’est sur l’enrichissement hypothétique que l’affirmation juridique de la représentativité du ministre des Affaires étrangères peut apporter au droit des relations extérieures de la France, que l’on conclura l’étude de la contemporanéité de sa fonction (Section II).

 

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