RECHERCHE DE NOUVEAUX FACTEURS GENETIQUES ASSOCIES AUX CARDIOMYOPATHIES DILATEES

RECHERCHE DE NOUVEAUX FACTEURS
GENETIQUES ASSOCIES AUX CARDIOMYOPATHIES DILATEES

APPROCHE MOLECULAIRE DES CARDIOMYPATHIES 

Les causes génétiques de ces pathologies se dévoilent progressivement grâce aux avancées considérables et récentes de la génétique moléculaire. Dès 1990, des études moléculaires sont menées pour les cardiomyopathies hypertrophiques avant d’être étendues aux phénotypes dilatés et restrictifs. Les cardiomyopathies arythmogènes du ventricule droit quant à elles, n’ont été étudiées d’un point de vu génétique qu’à partir de 2002. L’ensemble de ces études génétiques a révélé une grande hétérogénéité génétique, c’est-à-dire que de multiples gènes peuvent être impliqués dans le développement des cardiomyopathies. Des mutations ont ainsi été identifiées dans divers gènes du sarcomère (CMH, CMD) ; du cytosquelette (CMD) ; des jonctions intercellulaires ; la desmine, la transthyrétine, le fibrinogène A ou le gène HFE (pour les CMR). Cette hétérogénéité génétique peut impliquer que diverses mutations résultent en un même phénotype mais également que plusieurs gènes soient impliqués dans le développement de la maladie. Les études génétiques sont de plus rendue compliquées par l’intervention de facteurs environnementaux dans la mise en place du phénotype ce qui classe la plupart des cardiomyopathies dans le domaine des maladies multifactorielles. Bien souvent les gènes de susceptibilités ne sont pas encore identifiés, et en outre, lorsqu’ils le sont, leurs mécanismes d’action dans la maladie restent souvent hypothétiques. Le travail présenté au sein de ce manuscrit, traitera spécifiquement de l’étude des cardiomyopathies dilatées.

LES CARDIOMYOPATHIES DILATEES (CMD) 

Généralités 

Les cardiomyopathies dilatées (CMD) sont des affections sévères caractérisées par une dilatation des ventricules avec une altération de la contractilité du myocarde qui peut conduire au développement d’une insuffisance cardiaque et à la mort subite. C’est d’ailleurs la principale indication de transplantation cardiaque {Dec, 1994 ; Everly, 2008}. Cette maladie touche les deux sexes et toutes les tranches d’âge, {Maron, 2006 ; Roger, 2011}, sa prévalence est de 1 adulte sur 2500 avec une fréquence plus élevée chez les hommes que chez les femmes {Codd, 1989}. Chez l’enfant, l’incidence annuelle est de 0,57 cas pour 100 000, et là encore elle semble être plus élevée chez les garçons que chez les filles. Bien que la physiopathologie des CMD soit encore mal comprise {Taylor, 2006}, elle est considérée comme multifactorielle impliquant des facteurs environnementaux et la présence d’une forte prédisposition génétique {Jefferies, 2010}. 

Etiologie

 Les causes de CMD sont multiples. Elles peuvent être d’une part, d’origine toxique (médicamenteuse, alcoolique), virale et/ou auto-immune, ou, d’autre part, avoir une origine génétique. Dans le cas où la maladie est d’origine génétique on va distinguer la forme dite « familiale », touchant différents membres d’une même famille, de la forme dite « sporadique » ou après enquête génétique, aucun autre membre de la famille d’un malade que ce soit de sa génération ou de générations antérieures n’est atteint. Les études génétiques portant sur l’identification des gènes impliqués dans les pathologies humaines ont débuté depuis des décennies mais se sont surtout orientées vers l’identification des gènes impliqués dans le développement de forme monogénique et familiale des maladies. En effet lorsque l’on s’intéresse aux maladies multifactorielles, beaucoup plus fréquemment sporadiques, les études sont rendues beaucoup plus difficiles du fait de l’hétérogénéité génétique et environnementale. 

Hétérogénéité génétique et phénotypique 

Génétique des formes monogéniques

 Les formes familiales, et donc génétiques, de la maladie, sont le plus souvent monogéniques et représentent 20 à 35% des cas de CMD {Grunig, 1998 ; Goerss, 1995}. Elles sont caractérisées par une grande hétérogénéité, que ce soit au niveau des modes de transmission, des différentes formes cliniques, ou bien du point de vue de la multiplicité des gènes et loci impliqués. – Mode de transmission Les formes familiales se transmettent dans 80 à 90% des cas selon un mode autosomique dominant (AD) {Mestroni, 1999}. Cependant diverses études ont rapporté une transmission récessive liée à l’X {Bione, 1996 ; Vesel, 2003 ; Towbin, 1993} touchant essentiellement de jeunes garçons, et plus rarement un mode de transmission mitochondrial {Zhang, 2003} ou autosomique récessif {Arbustini, 1998 ; Mestroni, 1999} . – Phénotype Une analyse plus précise du phénotype montre qu’au sein même des formes à transmission AD, une stratification existe : les CMD « isolées » (forme la plus fréquente) et les CMD associées à des troubles de la conduction et/ou à des myopathies. Il existe également une hétérogénéité allélique au sein des CMD puisqu’en fonction de la mutation présente au sein du gène impliqué le phénotype clinique peut varier. C’est par exemple le cas pour les mutations affectant les Desmines {Li, 1999}. Ceci ajoute un élément de complexité supplémentaire dans la compréhension de ces maladies. – Pénétrance et expressivité variable La pénétrance de la maladie est incomplète, c’est-à-dire qu’un individu porteur d’un génotype à risque ne va pas forcément développer le phénotype, et de plus l’expressivité est variable. En effet, des individus de même génotype n’expriment pas tous le phénotype à un même degré. Mangin et al {Mangin, 1999}, évaluent la pénétrance des CMD au sein de familles françaises atteintes de CMD à transmission AD, à 72% chez l’adulte. Selon les mêmes auteurs, l’âge de survenue de la maladie est significativement influencé par l’âge et le sexe. – Génétique moléculaire Un grand nombre de gènes ou loci ont été identifiés comme étant impliqués dans le développement de la maladie. En 2000, Towbin et al. répertorient des mutations associées à la maladie dans plus de 20 gènes {Towbin, 2000}. A l’heure actuelle plus de 30 gènes sont recensés comme étant associés à la maladie {Hershberger, 2011}. Il existe donc une grande diversité dans les causes génétiques incriminées {Shaw, 2002}. Cependant peu d’études valident de véritables voies physiopathologiques, seules des hypothèses sont émises quant aux mécanismes potentiels d’action des gènes incriminés. Ainsi dans le cadre des CMD à transmission AD, les mutations identifiées touchent : – des gènes codant des protéines du sarcomère (unité fondamentale de la contraction de toutes les cellules du muscle strié) identiques à celles impliquées dans les CMH (MYBPC3, MYH7, TNNT2, TNNI3, TPM1, ACTC). Les mutations dans ces gènes pourraient altérer la production de la force contractile mais également altérer sa transmission d’un sarcomère à un autre {Seidman, 2001}. – des gènes codant des protéines du cytosquelette (dystrophine, _-sarcoglycanes…) et des protéines des filaments intermédiaires (desmine), et pouvant altérer la transmission de la force contractile {Olson, 1998 ; Schonberger, 2001}, cette dernière serait alors moins bien transmise par les protéines filamenteuses porteuses de mutation. – des gènes codant des protéines nucléaires (émerine, lamines A/C) qui pourraient altérer notamment la stabilité nucléaire ainsi que d’autres protéines qui pourraient affecter différents mécanismes intervenant dans la fonction cardiaque comme la signalisation calcique {Schmitt, 2003} ou l’apoptose {Wencker, 2003}. Parmi les gènes décrits (tableau 1), et contrairement aux CMH, aucun d’entre eux ne prédomine, la fréquence des mutations au sein de ces gènes est souvent <1% et leur analyse ne permet de trouver l’anomalie causale que dans une faible proportion de patients {Hershberger, 2011}. Récemment, une étude portant sur le séquençage à haut débit du gène de la Titine chez des sujets atteints de cardiomyopathie dilatée, des sujets atteints de cardiomyopathies hypertrophiques et des sujets contrôles, a identifié des mutations dans les CMD. Cependant, les mutations tronquantes (mutations conduisant à la formation d’un codon stop prématuré aboutissant à la formation d’une protéine tronquée) surviennent dans environ 25% des cas familiaux de la maladie, dans 18% des cas sporadiques mais sont aussi présentes chez les sujets contrôles {Herman, 2012}. A ce jour il n’existe donc aucune preuve d’un défaut moléculaire généralisé pour ces maladies. L’ensemble de ces résultats suggère l’existence d’autres gènes qu’il reste à identifier. 

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 Génétique des formes multifactorielles

 Les formes sporadiques de CMD constituent la majorité des cas (environ 70 %), et la maladie est considérée ici comme multifactorielle avec une composante génétique probable. Il n’existe pas de données précises, cependant, en 2001, le Docteur Charron {Charron, 2001} distingue deux types de gènes parmi les facteurs génétiques potentiellement impliqués dans ces formes multifactorielles, d’une part des gènes de prédisposition qui représenteraient des facteurs de risque de développer la maladie (tableau 2), d’autre part des gènes modificateurs qui moduleraient l’évolution et la sévérité de la maladie lorsque celle-ci est apparue. – Gènes de prédisposition associés aux CMD De nombreux gènes sont connus pour être impliqués dans les maladies cardiovasculaires. Afin d’établir une relation entre ces gènes et les cardiomyopathies dilatées, la méthodologie consiste habituellement à analyser des polymorphismes génétiques selon une stratégie dite « gène-candidat », souvent dans le cadre d’études cas-témoins. Le principe de cette stratégie sera développé dans la partie suivante. Plusieurs gènes de prédisposition ont ainsi été étudiés dans le cadre des CMD sporadiques afin d’identifier une éventuelle association d’un ou plusieurs de leurs polymorphismes avec la maladie. Les premières études de ce type ont analysé le gène de l’Enzyme de Conversion de l’Angiotensine I (ECA) à travers le polymorphisme I/D (insertion/délétion) situé dans l’intron 16 du gène, mais des résultats contradictoires ont été rapportés quant au rôle délétère du génotype homozygote DD. Dans les CMD aucune association n’a été trouvée. De même plusieurs gènes du système rénine-angiotensine, des récepteurs beta-adrénergiques, TNF alfa, TGF beta, … connus pour jouer un rôle dans les pathologies cardiovasculaires ont été étudiés mais ne se sont pas révélés associés aux CMD. En revanche d’autres études ont permis de suggérer l’association de gènes de prédisposition aux CMD.

Table des matières

INTRODUCTION5
LES CARDIOMYOPATHIES
1. HISTORIQUE ET DEFINITION
2. APPROCHE MOLECULAIRE DES CARDIOMYPATHIES
3. LES CARDIOMYOPATHIES DILATEES (CMD)
3.1 Généralités
3.2 Etiologie
3.3 Hétérogénéité génétique et phénotypique
3.3.1 Génétique des formes monogéniques7
3.3.2 Génétique des formes multifactorielles.9
STRATEGIES D’ETUDES GENETIQUES 10
1. STRATÉGIE D’ETUDE GÉNÉTIQUE DES FORMES FAMILIALES DE CMD. 10
2. STRATÉGIE D’ETUDE GÉNÉTIQUE DES FORMES MULTIFACTORIELLES DE
CMD11
3. PRINCIPE DES ETUDES D’ASSOCIATION
3.1 Stratégie d’association « gène candidat »
3.2 Stratégie « association génome entier » (GWAS)
4. LES BIOPUCES OU « MICRO-ARRAYS »
4.1 Historique et principe
4.2 Stratégie de sélection des polymorphismes
4.3 Applications
5. OJECTIF DE L’ETUDE

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