REACTION D’ADDITION DE MICHAEL
Présentation de quelques grandes familles d’organocatalyseurs
Les organocatalyseurs peuvent être classés en quatre grandes familles qui sont les alcaloïdes de quinquina, les thio-urées, les squaramides et les urées.
Alcaloïdes du quinquina
Les quinquinas sont des alcaloïdes ongmaires d’Amérique latine, découvert par des missionnaires espagnols à partir de la poudre des jésuites [7]. Ils sont constitués de deux couples diastéréoisomères : quinine/quinidine, cinchonine/cinchonidine et leurs dérivées. Ces alcaloïdes ont révolutionné la catalyse asymétrique de par leurs structures portant des groupes fonctionnels hautement pré-organisés et pouvant être facilement dérivés afin d’optimiser leurs comportements stéréosélectives dans une réaction. Dans une réaction organocatalysée par les cinchonas la fonction alcool et 1′ azote assurent la formation du réseau de liaisons d’hydrogènes afin d’organiser et stabiliser 1 ‘état de transition. R Quinine: R= OMe Cinchonidine: R=H Cupreine: R= OH R Quinidine: R=OMe Cinchonine: R=H Cupreidine: R=OH R -isoquinidine: R=OMe -isocupreidine: R=OH Figure 3: les squelettes des couples diastéréoisomères de ces alcaloïdes et de quelques dérivés Kobbelgaard et al ont criblé différents alcaloïdes du quinquina. Ils montrent que le choix de l’alcaloïde du quinquina a un impact remarquable sur l’énantiosélectivité des réactions, avec des excès énantiomèriques allant jusqu’à 83%. La sélectivité de la quinine s’avère très faible, alors que la quinine donne des énantiosélectivités plus prometteuses et favorise l’énantiomère opposé, comme prévu. Les meilleurs résultats sont obtenus avec la cupreine ou alcaloïde de cinchona de Deng, ce dernier étant le catalyseur optimal en 2004 pour 1’ addition du malonate de méthyle sur différents nitrooléfines avec des excès énantiomèriques supérieurs à 80% [8]. Une inversion de l’énantiosélectivité s’est produite avec la quinidine, bien que ces deux catalyseurs aient des stéréochimies identiques du site de liaison [9]. Ces alcaloïdes, donneurs de liaisons d’hydrogènes ont étés identifié comme catalyseurs efficaces d’imines simples vers divers adduits nucléophiles énantiosélectifs [10]. Ce qui a permis à Mannich d’effectuer sa première réaction organocatalysée entre l’imine et le malonate en présence de quinine portant une fonction thio-urée donnant un excè énantiomerique de 99% (schéma 4) [11]. 5 Schéma 4: réaction entre le malonate et l’imine 0 N H R1 HN R2 ) + R1 R2 R2 0 R 1 = Alyle ou Alkyle Rdt: 99°/o Rz = CH3 ou Alyle ee: 99°/o
Les thio-urées
La découverte selon laquelle les donneurs de liaisons d’hydrogènes chiraux favorisent efficacement les réactions énantiosélectives d’intermédiaires cationiques a permis 1998 à Jacobsen de rapporter la synthèse et l’application en catalyse asymétrique des premières thiourées chirales dérivées des bases de Schiff [12]. Takemoto anticipa le fait que l’introduction d’un site basique sur un catalyseur possédant une fonction thio-urée pourrait produire une interaction systématique entre ces deux fonctionnalités et que la faible acidité des thio-urées par rapport aux acides de Lewis métalliques pourrait être surmontée par cette modification. L’aminothio-urée bi fonctionnelle pourrait être utilisée de manière efficace pour une large gamme de réactions nucléophiles · diastéréosélectives et énantiosélectives telles que l’addition de Michael de composés 1,3- dicarbonyle à des nitro-oléfines, la réaction aza-Henry de nitroalcénes à des N-terbutoxycarbonyle imines et l’hydrazination de bêta-céto esters cycliques. Il analysa ce catalyseur dans de plus amples détails et rapporta une étude complète deux ans plus tard. Il décrivit en 2003 la première addition de Michael du malonate d’éthyle sur les nitrooléfines organocatalysée par cette thio-urée chirale bi fonctionnelle. Schéma 5: Addition conjuguée du malonate avec les nitrooléfines catalysée par une thio-urée bi fonctionnelle chirale. 0 3 H H R ~ 10 °/o _….N……_ + ~N02 ———– O Toluene OEt 6 EtO~O O OEt N02 R 1 Il réussit à montrer que la fonction thio-urée et l’amine tertiaire doivent être simultanément présentes sur le catalyseur pour des réactivités ct des sélectivités optimales. Il obtient ces conclusions en réalisant la même réaction d’addition de Michael mais avec diverses espèces dont les activités furent ensuite comparées à celle du catalyseur nouvellement développée ce qui ouvre la voie sur l’organocatalyse à base de thio-urée chirale [13]. Q·.,.,NHAo /N » »‘- A B Ac = acétyle Système catalytique Temps Rendement Ee A 24H 17% – B 24H 14% 35% c 24H 57% – Figure 4: étude de la structure du catalyseur Avec 1’ évolution de la catalyse organique de nombreuses thio-urées furent élaborées, qui . sont obtenues par modulation de la partie aromatique afin de faire varier l’acidité des protons sur les atomes d’azotes. L’augmentation de la force d’interaction entre le catalyseur et les substrats est due à l’encombrement et à la basicité de l’intermédiaire par condensation de différentes amines sur l’isothiocyanate de 3,5-bis-trifluoro méthyl phényle [14].
Les squaramides
Les squaramides ont été étudiés dans la reconnaissance moléculaire comme organocatalyseurs chiraux pour des transformations asymétriques. Ces molécules présentent également une capacité de liaisons hydrogènes donneurs ou accepteurs. En raison de leurs structures uniques et leurs applications larges, les squaramides ont encore un grand potentiel à explorer dans la catalyse asymétrique. À notre connaissance, il n’existe aucun rapport sur le développement de nouveaux catalyseurs bi fonctionnels à base de squaramide-amine facilement obtenu par combinaison de deux squelettes, pyrrolidine privilégié et des alcaloïdes quinquina reliés par un moti~ de squaramide, illustré dans le schéma 6 [15]. 7 Schéma 6: préparation de squaramide-amine chirale bi fonctionnelle en trois étapes Première étape: H% :::-:, ~ ~ ~~ »‘ »‘ »OH –1-« )_P_P-h3_,_o_IA_D_, __ ., dppa, THF, 25″C 2 ») PPh3, H20 Quinine Deuxième étape: 0 0 _):(a–+ F3CYCF3 1 48h .0 méthanol, temp. amb. NH2 Troisième étap.e: 0~0 CF3 )=\_ A · CH2CI2, r.t.,50-56h -a-N~ H CF3 Ce catalyseur bi fonctionnel à base de squaramide est révélé très efficace pour la réaction de Michael à la fois de mono et dicétone avec une large gamme de nitroalcènes, donnant de hauts rendements avec d’excellentes énantiosélectivités et diastéréosélectivités. Néanmoins, cette méthodologie fut appliquée avec succès à diverses nitrooléfines aromatiques électroniquement neutres, enrichies ou appauvries, mais également aliphatiques malgré des rendements plus modestes (Schéma 7) [16). 8 Schéma 7: Addition de Michael asymétrique du 2-amidocyclobutanone avec les nitrooléfines catalysée par les squaramides. R~N02 + R = aromatque, hétéroaromatiq ue, Aliphatque. La combinaison de la pyrrolidine avec un alcaloïde de quinquina joue un rôle très important sur stéréo contrôle de cette addition de Michael. Pour évaluer l’utilité des squaramides pour la catalyse asymétrique, plusieurs dérivées chirales substituées différentes ont été synthétisés. L’unité structurelle pyrrolidine peut également être remplacée par des fonctionnalités appropriées telles que 3,5-bis (trifluorométhyl) benzylamine, 2-amino-1 ,2-diphényl-éthanol et prolinol. Ce qui conduit à une variété de molécules à base squaramide.
Les urées
L’urée en tant qu’organocatalyseur à acide de Bronsted fut découverte dès 1988 par Jacobsen après l’obtention d’un complexe en acide- base de Lewis stabilisé par liaisons hydrogènes suite à la co-cristallisation d’urées aromatiques et des cétones. Les premières urées chirales ne furent élaborées et appliquées en synthèse asymétrique que dix ans plus tard par Jacobsen. L’efficacité de l’urée en tant que sous-unité réceptrice dépend de la présence de deux fragments NH polarisés proches, capables de chélater un anion sphérique ou de donner deux liaisons hydrogènes parallèles aux atomes d’oxygène d’un carboxylate ou d’un oxo anion. Cette conception très modulaire a produit une multitude de variantes optimisées pour différentes réactions. De nombreuses modifications portées sur la molécule et la variation du substituant azoté permettent 1 ‘introduction d’ accordable acide de Bronsted [17]. Figure 5: catalyseur à base d’urée de Jacobsen 9 L’historique de l’addition de Michael organocatalysée des dérivées 1,2- dicarbonylées sur les nitroolefines montre l’intensité des efforts fournis au fil du temps pour l’élaboration de systèmes catalytiques plus ou moins complexes afin de développer des méthodologies désormais bien établies [18]. Les réactions de Michael sont depuis longtemps les meilleures voies permettant d’étudier l’efficacité des organocatalyseurs, ce qui a permis à Chen, Kim, Hamada et Ellman d’étudier les activités de certaines dérivées d’urées en utilisant ces réactions d’additions [19]. ·’ N N’ 1 # 1 1 /N, H H CF3 Ellman Figure 6: les catalyseurs à base d’urées utilisés par Ellman et Chen dans la réaction d’addition de Michael: Chapitre II : présentation de la réaction d’addition de Michael 11-1 Généralités L’addition de Michael ou addition 1 ,4 est un outil de synthèse pour former des liaisons carbone-carbone, mais aussi des liaisons carbone-azote nommées aza-Michael, carboneoxygène nommé oxa-Michael et carbone-soufre nommé sulfa-Michael. Cette addition est connue depuis les années 1883 avec Komnenos. Mais c’est en 1887 que Arthur Michael donna son nom à la réaction entre le malonate de diéthyle et le cinnamate d’éthyle en présence d’éthanolate de sodium d’où le nom Addition de Michael (schéma 8) [20]. Schéma 8: Réaction entre le malonate de diéthyle et le cinnamate d’éthyle EtON a + Ph 11-2 Mécanisme de la réaction d’addition de Michael La réaction d’addition de Michael, le plus souvent catalysée par une base (ou un agent de transfert de phase), nécessite deux partenaires de synthèse : un donneur de Michael possédant un caractère nucléophile et un accepteur de Michael, généralement un système a, ~-insaturé. Les accepteurs de Michael sont des composés possédant une double liaison conjuguée avec un groupement électro-attracteur qui peut être un nitrile, un nitro, une cétone ou ester. Alors que 10 les donneurs de Michael à caractère nucléophile, sont en général des substrats portant des méthylènes activés par un ou des groupements électro-attracteurs, leur conférant ainsi un caractère acide. Cette réaction se fait selon le mécanisme suivant [21].
Remerciements |