Radioprotection appliquée au contrôle non destructif par radiographie industrielle
GÉNÉRALITÉS SUR LES CONTRÔLES NON DESTRUCTIFS ET SUR LES RAYONNEMENTS IONISANTS
Les contrôles non destructifs
Une méthode de Contrôle Non Destructif (CND) est une technique qui permet de caractériser l’état d’intégrité d’une pièce, sans la dégrader ou sans affecter son comportement futur. [2, 3] Il permet de garantir la qualité et la sécurité des biens et des personnes. Une grande variété de méthodes existe et permet de détecter des anomalies internes ou de surfaces, de déterminer la composition ou la structure des matériaux, ou bien encore de mesurer certaines propriétés physiques. Les anomalies susceptibles d’être repérées peuvent être : 9 Les anomalies introduites pendant l’élaboration de la matière première. 9 Les anomalies introduites lors du processus de fabrication. 9 Les anomalies des installations en service (fatigue, corrosion, fissure). Ces méthodes de contrôle sont utilisées lors de la mise en service sur chantier, en production ou bien en maintenance, que ce soit sur les matériaux, les assemblages, les équipements ou les installations. [4] Les méthodes de CND ont fait l’objet d’un très fort développement à partir du début des années 70, pour répondre aux exigences de sécurité des composants de l’industrie nucléaire en France, en Europe, au Japon et aux USA. Les progrès technologiques réalisés ont permis d’introduire ces méthodes dans d’autres secteurs où les contraintes de sécurité devenaient de plus en plus répandues et imposées par des normes, codes, voire textes de loi : industrie pétrochimique, industrie de raffinage, domaines de l’aéronautique et aérospatial, industrie automobile, composants électriques et électroniques. Ces méthodes se sont introduites petit à petit dans d’autres secteurs, notamment l’industrie agroalimentaire et pharmaceutique à partir des années 90. La mise en œuvre des CND dans diverses branches de l’industrie a coïncidé avec d’importants progrès des CND eux- mêmes. Ces progrès portent sur trois aspects : • La technique : amélioration de la finesse de détection des défauts. • L’interprétation des contrôles : il n’est pas possible de fabriquer des ensembles exempts de défauts ! Il faut alors s’entendre pour accepter les défauts les moins dangereux et réparer les autres (ou rebuter la pièce entière). Des « codes d’acceptations des défauts » de plus en plus précis sont établit de nos jours. ~ 11 ~ Mémoire de DEA Constance Guignane DIONE • L’organisation des services de CND des grandes entreprises : ces services en relation avec le client, prennent la décision d’acceptation, de réparation ou de rebut. Ces décisions peuvent être prises au niveau d’un lot de pièces dans le cas d’une fabrication en série. Dans le cas d’une fabrication en petit nombre, de telles décisions sont parfois prises au niveau d’une pièce ou même d’un défaut particulier. [5] L’utilisation appropriée d’une technique de CND dépend : De la nature et de la structure de la matière, De la forme de « l’objet » (complexe ou non) De la cadence requise, Du mouvement de l’objet (régulier ou non) De la nature et des dimensions des « défauts » à détecter, Du coût (investissement en matériel et temps de contrôle) De la qualification des agents tant sur le plan opératoire (réalisation de l’essai), que sur l’interprétation des résultats. Les techniques de CND prennent en compte la physique des phénomènes utilisés. Elles sont fondées sur des interactions avec la matière, qui peuvent être mécaniques (ultrasons, émission acoustique) ou électromagnétiques (lumière, infrarouges, rayon X ou gamma). Pour chaque type de sollicitation de la matière (mécanique, électromagnétique) et chaque domaine fréquentiel, différents modes d’acquisitions sont utilisés : mesure de l’onde réfléchie (c’est le cas de l’échographie ultrasonore), de l’onde diffusée (cas du contrôle par diffusion Compton des rayons X), de l’onde transmise (contrôle radiologique). Selon les cas, l’information mesurée est un signal, un spectre ou une image. Les méthodes de CND peuvent être classées en deux familles : 9 Les méthodes dites « volumiques », qui peuvent détecter des défauts en profondeur dans tout le volume de l’objet pouvant atteindre des épaisseurs de plusieurs dizaines de cm, voire quelques mètres. Les deux principales méthodes volumiques sont la radiologie par rayons X ou gamma (voire dans certains cas particuliers par neutrons), et les méthodes ultrasonores. 9 Les méthodes dites « superficielles », qui ne sont sensibles qu’aux défauts proches de la surface des objets (quelques millimètres en profondeur seulement), ou uniquement débouchant. Comme exemples de méthodes classiques, on a : la magnétoscopie, le courant de Foucault et le ressuage. D’autres méthodes de CND existent comme : la méthode infrarouge qui utilise une caméra infrarouge et permet de déceler des points chauds à la surface d’un objet. L’émission acoustique appartient aussi à la famille des CND. L’introduction de sources LASER a permis également l’émergence de nouvelles méthodes CND optiques, superficielles, comme l’interférométrie speckle, l’holographie et la shearographie. Un LASER de forte puissance est également une source possible d’ondes ultrasonores dans les matériaux, ce qui est prometteur pour le contrôle ultrasonore sans contact. [6] Notre étude porte sur la radiographie industrielle par gammagraphie qui est une méthode volumique. Elle est réalisée à l’aide d’appareils contenant une source radioactive scellée appelé projecteurs gamma qui sont classifiés suivant leur mobilité en trois classes : • Classes P : Projecteur portable, conçu pour être déplacé par une ou plusieurs personnes. Sa masse totale ne doit pas dépasser 50 Kg. • Classe M : Projecteur mobile, le projecteur est conçu pour être déplacé facilement par un moyen approprié, par exemple un chariot. • Classe F : Projecteur fixe, Le projecteur est installé d’une façon fixe ou avec une mobilité restreinte dans le local de travail (casemate). 2. Les rayonnements ionisants Un rayonnement est dit « Ionisant » lorsqu’il est susceptible de provoquer l’arrachement des électrons périphériques de la matière. Pour cela, il est nécessaire que l’énergie du rayonnement incident soit suffisante pour arracher un électron, c’est-à-dire que cette énergie soit supérieure à l’énergie de liaison minimale des électrons du milieu. Les rayons ionisants sont de natures et de sources variées, et leurs propriétés dépendent en particulier de la nature des particules constitutives du rayonnement et de leur énergie. Les rayonnements ionisants peuvent être classés en deux types. Cette distinction se justifie par le fait que les interactions, en raison de leurs mécanismes, sont fondamentalement différentes même si les conséquences sont sensiblement identiques. Nous avons ainsi : – Les rayonnements directement ionisants : ce sont les particules chargées (particules α, β+ , β- , les protons et les fragments de fissions) ; – Les rayonnements indirectement ionisants : qui concernent les rayonnements électromagnétiques (rayonnements gamma, X et de freinage) et les particules non chargées (les neutrons et les neutrinos).
Principe de la radiographie industrielle
Comme dans le domaine médical, les rayonnements ionisants sont utilisés dans l’industrie pour obtenir des images internes de pièces métalliques, de soudures ou de structures en béton, à des fins de contrôle, sans les altérer. La radiographie est une des méthodes de contrôles non destructifs employés dans l’industrie pour analyser et visualiser les défauts internes d’une pièce. Elle peut être réalisée à l’aide de générateurs de rayons X ou de projecteurs gamma. [8] A l’origine, un rayonnement incident provenant d’un générateur de rayons X ou d’un radioélément artificiel subit une perte d’intensité lors de son passage à travers un matériau. Il s’en suit un phénomène d’absorption ou de dispersion des rayons X ou gamma par l’objet exposé. L’intensité du rayonnement perdue dépend des caractéristiques de la radiation, de la densité du matériau et de l’épaisseur traversée. [9] Le récepteur radiographique analogique seul utilisé dans nos industries présentement, est constitué de film argentin placé sous l’objet à examiner. Ce récepteur fixe le rayonnement émergent, ce qui se traduit par une différence de noircissement (densité) sur le film développé par voie chimique (manuelle ou automatique). Cette différence de densité fixe le contraste de l’image radiographique. Ce contraste permet à l’interprète de distinguer les zones d’absorptions différentes et d’en déduire la présence de défauts, suivant la charte d’interprétation des clichés EN 25 817 (voir Annexe 1). Figure 1: Principe de la radiographie [9] ~ 14 ~ Mémoire de DEA Constance Guignane DIONE La qualité d’image radiographique est prépondérante pour la détection des défauts. L’énergie de rayonnement élevée confère aux rayons X ou gamma la propriété de pouvoir pénétrer et de traverser des corps opaques à la lumière ordinaire. A l’intérieur de la matière, l’intensité diminue selon la loi d’absorption (loi de Béer-Lambert). • Dans le cas d’un objet homogène nous pouvons écrire la relation suivante : (1) Où I0 est l’intensité incidente en Ampère (A) I est l’intensité transmise en Ampère(A) x est l’épaisseur de l’objet en mètre (m) μ est le coefficient d’atténuation en (m-1) • Si l’objet à traverser est hétérogène, c’est-à-dire que μ est une fonction dépendant de la localisation dans l’objet, il faut alors additionner les coefficients d’atténuation des différents constituants rencontrés sur la distance parcourue. Ce qui donne : (2) Le coefficient d’atténuation dépend de la composition, de la densité de l’objet traversé et de la longueur d’onde du rayonnement utilisé. Il augmente très fortement avec le numéro atomique des éléments chimiques constituant le matériau absorbant. Dans la pratique, on utilise surtout le coefficient d’atténuation massique . La loi d’atténuation s’applique aussi au débit de dose absorbé suivant la formule : (3) Avec D0 le débit de dose absorbée incident (Gy/s) Dt le débit de dose absorbée transmis (Gy/s) x est l’épaisseur de l’objet en mètre (m) μ est le coefficient d’atténuation ou d’absorption linéique en (m-1) Cette loi telle qu’elle est énoncée précédemment ne tient pas en compte le rayonnement diffusé or ce dernier est une réalité omniprésent quelque que soit le couple rayonnement/matière. La prise en compte de ce rayonnement diffusé donne : (4) Avec B : le coefficient de Built up factor ou facteur de renforcement du rayonnement diffusé B est toujours supérieur à 1 (B>1) et augmente pour un matériau donné, avec l’accroissement de l’épaisseur et/ou la baisse de l’énergie des photons. Seule l’expérience permet de déterminer les coefficients B car les interactions rayonnement/matière sont purement probabilistes.
Rappel des interactions des rayonnements gamma avec la matière
On distingue cinq types d’interactions mettant en jeu un transfert d’énergie entre un photon gamma et les atomes du milieu matériel, dont les trois processus principaux sont : l’effet photoélectrique, l’effet Compton et la création de paires. Effet photoélectrique C’est l’interaction d’un photon avec un électron du cortège électronique. Cette interaction concerne essentiellement les photons de faible énergie et se traduit par la disparition, pour l’atome cible, de l’un de ses électrons qui devient libre. Ce mécanisme conduit à la création d’une paire d’ions comprenant l’atome ionisé (chargé positivement) et l’électron mis en mouvement (chargé négativement).
INTRODUCTION |