Rachis et disque intervertébral
Les données anatomiques et biochimiques présentées ici sont issues de la consultation de différents ouvrages [ 16,95 ,96].
Présentation générale
Le rachis est classiquement séparé en trois régions distinctes, tant sur le plan fonctionnel qu’anatomique :les régions cervicale, thoracique, et lombaire .
On dénombre 23 disques placés entre chaque vertèbre le long du rachis, seule l’articulation entre l’atlas et l’axis au niveau cervical supérieur en est exempte.
Deux vertèbres adjacentes sont liées entre elles par le disque intervertébral en antérieur, les deux processus articulaires en postérieur, et le système ligamentaire. Les plateaux cartilagineux recouvrent la structure discale au-dessus et au-dessous, et séparent le spongieux du disque dont l’apport nutritionnel dépend de la porosité du cartilage. Rappelons en effet que le tissu discal n’est pas vascularisé.
Sept ligaments sont liés à une unité fonctionnelle (ensemble de deux vertèbres et des tissus de liaison) : les ligaments jaune, capsulaire, interépineux, supraépineux, longitudinal antérieur, longitudinal postérieur et intertransverse. Ils sont arrangés de façon à ne subir que des forces de traction, les seules auxquelles ils peuvent résister.
Biochimie
Comme tout tissu conjonctif, le disque intervertébral contient d’une part des cellules spécialisées responsables de la biosynthèse, d’autre part une matrice extracellulaire constituée d’une substance fondamentale et de fibres.
La matrice possède des propriétés chimiques, physiques et mécaniques umques, adaptées à la fonction de l’organe qu’elle génère. Ainsi, elle peut être rigide pour l’os, élastique pour les vaisseaux sanguins, compressible pour le cartilage, ou liquide pour le fluide synovial. Ces propriétés dépendent essentiellement de la teneur relative en fibres, eau ou macromolécules, ainsi que de l’arrangement relatif des composants entre eux. La matrice osseuse est de plus amplement calcifiée, ce qui la rend opaque aux rayons X et permet l’étude des os par radiographie. Parmi les fibres du tissu conjonctif, on distingue l’élastine, principalement dans l’artère et le ligament, et le collagène, protéine la plus abondante du corps humain. La substance fondamentale amorphe emplit l’espace entre les fibres et les cellules de biosynthèse. Elle est formée de fluide interstitiel, de protéoglycanes et de glycoprotéines. Les cellules de biosynthèse, ou fibroblastes, prennent le nom particulier de chondrocytes pour le cartilage ou le disque intervertébral, et d’ostéoblastes pour l’os. Le fluide interstitiel est un mélange d’eau, de gaz dissous, de petites protéines et de métabolites. Il est libre de se mouvoir et peut ainsi échanger des nutriments avec des fluides externes au tissu qu’il compose.
Les protéoglycanes sont les macromolécules majeures de la substance fondamentale. Ils peuvent prendre de multiples formes, du monomère isolé à l’agrégat multiple. Ils sont constitués d’un filament de protéine sur lequel viennent s’accrocher des sucres, les glycosaminoglycanes. Le filament protéinique du monomère représente 5% de la molécule, tandis que les glycosaminoglycanes (GAG), principalement des chaînes de chondroïtine-sulfate et kératane-sulfate, en composent les 95% restants. Les agrégats sont ensuite formés par l’attache des monomères à un filament d’acide hyaluronique grâce à des protéines de liaison. Celui-ci se comporte comme l’épine dorsale de l’agrégat. L’une des propriétés remarquables de ces chaînes est qu’elles contiennent un grand nombre de charges négatives, qui tendent à repousser les formations adjacentes et à déployer la molécule. Ceci leur permet de remplir un large volume au sein de la matrice, et d’interagir avec le fluide et le collagène pour assurer certaines propriétés mécaniques.
A ce jour, on répertorie 19 types de collagènes différents, dont seuls les trois premiers sont fibrillaires. Les disques intervertébraux contiennent principalement des fibres de type I et II. Les collagènes sont caractérisés par une formation en triple hélice de trois polypeptides identiques ou différents, appelés des chaînes α . Chacune d’entre elles est une succession d’acides aminés groupés par trois, avec la glycine toujours placée en troisième position. Les deux acides aminés restants de la séquence sont souvent de la lysine et de l’hydroxyproline. La présence de cette dernière (environ 14% de la macromolécule) est d’ailleurs le plus souvent utilisé dans les études souhaitant quantifier la teneur en collagène, puisqu’elle n’apparaît dans aucune autre protéine [23]. Bien qu’une fibre isolée n’ait jamais été testée en traction, il est évident que la propriété mécanique la plus remarquable du collagène est sa résistance en tension.
Les cellules mères, ou chondrocytes, sont volumineuses, arrondies et situées dans de petites logettes. Elles réalisent la synthèse et la dégradation de tous les composants de la matrice extra-cellulaire du tissu. Bien que la plupart des mécanismes ne soient pas encore connus, il apparaît clairement que la composition matricielle influence la fréquence de synthèse du chondrocyte : une perte en collagène, une diminution du taux de protéoglycanes, ou une variation de concentration d’acide hyaluronique altère ses fonctions. Ce phénomène pourrait provenir de signaux mécaniques transmis à la membrane de la cellule par la matrice à travers des variations de tension. Durant la période de croissance, les chondrocytes prolifèrent rapidement et synthétisent de grands volumes de matrice. Ce processus ralentit à l’âge adulte et leur densité numérique diminue progressivement, limitant leur capacité à restaurer une matrice lésée.
Nucleus pulposus, annulus fibrosus et plateaux cartilagineux
Le disque intervertébral, élément fournissant à la fois flexibilité et stabilité au rachis, est composé de trois couches concentriques du centre vers la périphérie : le nucleus pulposus, l’annulus fibrosus interne et l’annulus fibrosus externe.
Nucleus pulposus
Le nucleus pulposus est un matériau gélatineux à forte teneur en eau, occupant une position centrale légèrement décalée en postérieur et représentant 30 à 60% de la surface totale. Son liquide constamment sous pression absorbe et répartit les charges et les chocs qui s’exercent sur les vertèbres. Possédant un grand nombre de cellules, principalement des chondrocytes, il est doté d’un métabolisme actif, assurant un renouvellement des protéoglycanes et du collagène. Celui-ci est essentiellement de type II. Les fibres changent graduellement de nature à mesure que l’on se rapproche radialement de l’annulus, composé de fibres de type 1.
La matrice extracellulaire du nucleus est biochimiquement équivalente à celle du cartilage [42], avec des fibres de collagène entremêlées à de larges molécules de protéoglycanes. La proportion d’eau chez l’adulte de 20 ans est évaluée à 80%, mais passe de 90% à la naissance à 70% après 60 ans [42]. Le taux de protéoglycanes peut baisser de 30% avec le vieillissement. Ces valeurs dépendent également du niveau de la vertèbre considérée. La pression intra-discale, variant fortement avec la posture adoptée, augmente jusqu’à l’âge de 40 ans, pour décroître progressivement ensuite.
Annulus fibrosus
L’ annulus fibrosus, puissant anneau fibreux qui enserre le nucleus, se compose de lamelles concentriques très précisément définies par Marchand et al. . Le nombre de couches distinctes varie avec la circonférence, avec un maximum en position latérale (25 couches) et un minimum en position postérieure (20 en moyenne). Ces valeurs diminuent de 20% avec l’âge. La partie postérieure de l’annulus, souvent siège de hernies, est donc moins résistante bien que renforcée par le ligament longitudinal postérieur. Les couches sont plus épaisses en interne qu’en externe, passant respectivement de 0.20 mm à 0.14 mm chez le sujet jeune; ces valeurs sont environ doublées pour les sujets âgés. Au sein d’une même couche, les fibres de collagène sont obliques et orientées d’environ 30 degrés par rapport au plan transverse, mais des variations locales très importantes sont constatées. Deux couches successives inversent l’ orientation de leurs fibres.
A mesure que l’on progresse du centre du disque vers sa périphérie, la proportion de collagène de type 1 augmente, pour devenir prédominante dans l’ annulus externe. Ainsi, cette partie est plus fibreuse et mieux ordonnée, avec une résistance en tension supérieure à l’annulus interne. Celui-ci, proche du noyau, est moins organisé et moins rigide. De la même façon, la proportion en eau décroît lorsqu’on atteint l’annulus externe [45].
La teneur en eau varie de 78% à la naissance à 70% en fin de vie, avec une valeur acceptée de 73% pour l’adulte d’âge moyen [33].
L’épaisseur de l’annulus représente 2/5 de la hauteur du corps vertébral en cervical, 1/5 en thoracique et 1/3 en lombaire [40]. L’annulus externe est directement fixé au corps vertébral par les fibres de Sharpey, tandis que l’annulus interne est en contact avec les plateaux cartilagineux.
INTRODUCTION |