QUESTIONS-RÉPONSES SUR Le cadre juridique DES CONTRATS DE PRESTATION
ET DE SOUS-TRAITANCE DANS LA SECURITE PRIVEE
RAPPEL DE LA REGLEMENTATION
Les donneurs d’ordre publics peuvent utilement consulter le « Guide de bonnes pratiques en matière de marchés publics » annexé à la circulaire du 14 février 2012, signée notamment par le ministre chargé de l’économie et des finances. Les donneurs d’ordre privés et publics peuvent consulter le guide « Choisir le meilleur rapport qualité-prix – Guide pour l’attribution des marchés de services de surveillance et de sécurité privée » établi par la Confédération européenne des services de sécurité (CoESS).
La réglementation relative au travail illégal
Le travail illégal est constitué de six fraudes énumérées à l’article L. 8211-1 du code du travail, recherchées et constatées par les agents de contrôle mentionnés à l’article L. 8271-1-2 du même code, notamment par les inspecteurs et contrôleurs du travail, les officiers et agents de police judiciaire (Police et Gendarmerie) et les inspecteurs de l’URSSAF.
Travail dissimulé
C’est le fait de :
– ne pas déclarer une activité professionnelle (art. L.8221-3 du code du travail qui définit le travail dissimulé par la dissimulation d’activité),
– ne pas déclarer un salarié ou ne déclarer qu’une partie des heures de travail effectuées par un salarié (art. L.8221-5 du code du travail qui définit le travail dissimulé par la dissimulation d’emploi salarié).
La dissimulation d’activité peut être relevée dès lors que :
– l’immatriculation aux registres obligatoires n’a pas été requise,
– les déclarations fiscales et sociales n’ont pas été faites,
– l’activité est poursuivie après refus d’immatriculation ou radiation.
La dissimulation d’emploi salarié peut être relevée dès lors que :
– la déclaration préalable à l’embauche (DPAE) n’a pas été effectuée,
– le bulletin de paie n’a pas été remis au salarié,
– le bulletin de salaire comporte un nombre d’heures de travail inférieur à celui correspondant au temps de travail réel du salarié,
– la déclaration annuelle des données sociales (DADS) n’a pas été faite, les bordereaux de cotisations de sécurité sociale sont inexistants ou ont été minorés, les déclarations fiscales n’ont pas été effectuées.
Le manquement intentionnel à l’une ou plusieurs de ces obligations peut caractériser l’infraction de travail dissimulé. Dans le cas contraire, il ne s’agit pas d’un délit de travail dissimulé mais d’une contravention pour défaut de DPAE ou défaut de remise de bulletin de paye, par exemple.
Travail dissimulé : auteur (s) de l’infraction
– L’employeur, personne physique et/ou morale qui n’a pas procédé aux formalités obligatoires, ou qui a fait appel à un faux travailleur indépendant.
– La personne physique ou morale (tout donneur d’ordre) qui a fait appel sciemment, directement ou par personne interposée, à une personne exerçant un travail dissimulé.
Travail dissimulé : sanctions pénales encourues
L’exercice d’un travail totalement ou partiellement dissimulé et le fait de recourir sciemment, directement ou par personne interposée, aux services de celui qui exerce un travail dissimulé constituent des infractions pénales passibles des mêmes sanctions (art. L. 8221-1 du code du travail).Les personnes physiques encourent trois ans d’emprisonnement et une amende maximale de 45 000 € (art. L. 8224-1 du code du travail). Si la victime est un mineur, la sanction pénale est portée à cinq ans d’emprisonnement maximum et une amende maximale de 75 000 € (art. L. 8224-2 du code du travail).Les personnes physiques encourent également des peines complémentaires pouvant être prononcées par le juge pénal (affichage, publication, confiscation des matériels ou des produits, interdiction d’exercer, exclusion des marchés publics pour une durée de cinq ans au plus, etc. – art. L. 8224-3 du code du travail).Les personnes morales encourent également les peines principales prévues aux articles 131-38 et 131-39 du code pénal pouvant être prononcées par le juge pénal (notamment exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus), ainsi qu’une amende maximale de 225 000 € (art. L. 8224-5 du code du travail).
Travail dissimulé : sanctions civiles encourues
Si l’infraction est constatée par procès-verbal :
– le travailleur indépendant doit s’acquitter auprès du RSI des cotisations et contributions sociales.
– l’employeur doit payer les salaires et accessoires, ainsi que les cotisations et contributions sociales sans qu’aucune mesure de réduction ou d’exonération des cotisations ou de minoration de l’assiette des cotisations ne puisse être appliquée (art. L.242-1-1 du code de la sécurité sociale). Il devra également les pénalités et majorations de retard. Il doit s’acquitter des dettes fiscales éventuelles;
– si aucun élément ne permet de connaître la rémunération versée au salarié ou la période d’emploi, alors l’assiette des cotisations est évaluée forfaitairement à six fois la rémunération mensuelle minimale (art. L. 242-1-2 du code de la sécurité sociale);
– les réductions et exonérations de cotisations sociales sont annulées et doivent donc être remboursées pour la période pendant laquelle a été constaté le délit de travail dissimulé, dans la limite de la prescription applicable, soit les cinq dernières années (art. L. 133-4-2 du code de la sécurité sociale).
Par ailleurs, en cas de verbalisation de son prestataire ou de son sous-traitant au titre du travail dissimulé, la solidarité financière d’un maître d’ouvrage ou d’un donneur d’ordre peut être engagée s’il n’a pas procédé aux vérifications relatives à son prestataire ou à son sous-traitant, ou s’il a été condamné pour avoir eu recours sciemment à une personne exerçant un travail dissimulé (art. L. 8222-2 du code du travail).
En outre, le fait de participer, en tant que complice, au délit de travail dissimulé commis par un prestataire ou un sous-traitant peut entraîner l’annulation des exonérations et réductions de cotisations applicables aux rémunérations versées aux salariés employés par le donneur d’ordre, pour chacun des mois au cours desquels sa complicité est constatée (art. L. 133-4-5 du code de la sécurité sociale).
Marchandage
Toute opération de fourniture de main-d’œuvre à but lucratif qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne, ou d’éluder l’application des dispositions de la loi, du règlement ou de conventions ou accords collectifs de travail, est constitutive du délit de marchandage (art. L. 8231-1 du code du travail).
Marchandage : auteur (s) de l’infraction
L’utilisateur de la main-d’œuvre illégalement fournie, ainsi que le fournisseur, pour complicité.
Marchandage : sanctions pénales encourues .Le fait de commettre le délit de marchandage est puni de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 30 000 € (art. L. 8234-1 du code du travail). La complicité est punie de la même façon.
Peines complémentaires éventuelles :
– interdiction de sous-traiter de la main-d’œuvre pendant une durée de deux à dix ans; le fait de méconnaître cette interdiction, directement ou par personne interposée, est puni d’un emprisonnement de douze mois et d’une amende de 12 000 €.
– affichage de la décision aux portes de l’établissement de l’entreprise et publication dans les journaux.
Autre sanction
En cas de délit de marchandage, l’employeur encourt la fermeture administrative provisoire (trois mois maximum) de l’établissement, accompagnée, le cas échéant, de la saisie à titre conservatoire du matériel professionnel. Cette fermeture ne peut entraîner ni rupture ni suspension du contrat de travail, ni aucun préjudice pécuniaire à l’encontre des salariés concernés (art. L. 8234-3 nouveau issu de l’article 88 de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité – LIIN).Les personnes morales encourent également les peines principales prévues aux articles 131-38 et 131-39 du code pénal pouvant être prononcées par le juge pénal (notamment exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus), ainsi qu’une amende maximale de 150 000 € (art. L. 8234-2 du code du travail).
Marchandage : sanctions civiles encourues
– Nullité du contrat commercial passé entre les deux entreprises (pour illicéité de l’objet).
– Transfert à l’entreprise utilisatrice de la prise en charge des salaires et des charges sociales.
– Requalification de la convention de prestation de service en véritable contrat de travail au préjudice de l’entreprise utilisatrice. Dans ce cadre, le salarié peut obtenir réparation du préjudice résultant du défaut d’application du statut collectif par l’entreprise utilisatrice.
Marchandage : sanctions administratives encourues
Les sanctions administratives sont les mêmes que pour le travail dissimulé : voir supra.
Prêt illicite de main-d’œuvre
Le prêt de main-d’œuvre à but lucratif est une activité réglementée et strictement réservée au travail temporaire pour l’essentiel et, secondairement, aux agences de mannequins, au travail à temps partagé, au portage salarial, à certaines activités sportives, et à la mise à disposition de salariés auprès d’organisations professionnelles ou syndicales. Les opérations de prêt exclusif de main-d’œuvre à but lucratif réalisées hors de ce cadre sont illégales (art. L. 8241-1 du code du travail).
Prêt illicite de main-d’œuvre : auteur (s) de l’infraction
Pour ce délit, l’utilisateur de la main-d’œuvre illégalement prêtée ainsi que le prêteur sont considérés comme des co-auteurs de l’infraction. Les sanctions pénales sont les mêmes que pour le marchandage : voir supra (art. L. 8243-1 et L. 8243-2 du code du travail). Les sanctions administratives sont les mêmes que pour le travail dissimulé: voir supra.
Prêt illicite de main-d’œuvre et travail dissimulé
De plus, s’il est établi qu’il existe un lien de subordination entre l’entreprise utilisatrice et les salariés prêtés frauduleusement, l’entreprise utilisatrice est alors reconnue comme étant l’employeur de ces salariés (cas de transfert du lien originel de subordination), et peut être poursuivie pour travail dissimulé parce qu’elle n’a pas procédé à la déclaration de ces salariés.
Emploi d’étranger sans titre de travail
Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service, ou employer, pour quelque durée que ce soit, un étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France (art. L. 8251-1 du code du travail).Il s’agit de l’infraction consistant, pour un employeur français, à embaucher, à employer ou à conserver à son service sur le territoire national, un salarié ressortissant d’un pays tiers à l’Union européenne ou à l’Espace économique européen, ou un salarié citoyen d’un Etat membre soumis à période transitoire (Bulgarie et Roumanie jusqu’au 31 décembre 2013) non titulaire d’un titre l’autorisant à travailler en France. Ces ressortissants peuvent être en règle concernant le séjour, sans être autorisé à exercer une activité professionnelle. Une autorisation de travail est obligatoire pour qu’ils puissent être embauchés directement par une entreprise en France (« emploi direct »).En outre, nul ne peut, directement ou indirectement, recourir aux services d’un employeur d’un étranger sans titre.
Emploi d’étranger sans titre : sanctions pénales encourues
L’emploi d’un étranger sans titre de travail et le recours, direct ou indirect, à l’emploi d’un étranger sans titre sont passibles des mêmes sanctions (art. L. 8256-2 du code du travail).Les personnes physiques encourent cinq ans maximum d’emprisonnement et une amende maximale de 15 000 € .La loi (art. 74 de la LIIN) exonère de cette sanction l’employeur qui, sur la base d’un titre frauduleux ou présenté frauduleusement par un salarié étranger, a procédé, sans intention de participer à la fraude et sans connaissance de celle-ci, à la déclaration auprès des organismes de sécurité sociale et à la vérification auprès des administrations compétentes du titre autorisant cet étranger à exercer une activité salariée en France. Les peines encourues sont portées à dix ans d’emprisonnement maximum et une amende maximale de 100 000 € lorsque l’infraction est commise par une bande organisée. L’amende est appliquée autant de fois qu’il y a de salariés étrangers concernés (art. L. 8256-2 du code du travail).Peines complémentaires : interdiction d’exercer une activité, exclusion des marchés publics pour une durée de cinq ans au plus, confiscation d’objets, affichage, fermeture de locaux, interdiction de droits civiques, de séjour, confiscation de biens, interdiction de séjour pour une durée de cinq ans au plus. Les personnes morales encourent également les peines principales prévues aux articles 131-38 et 131-39 du code pénal pouvant être prononcées par le juge pénal (notamment exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus), ainsi qu’une amende maximale de 75 000 € appliquée autant de fois qu’il y a de salariés étrangers concernés (arts. L. 8256-7 et L. 8256-8 du code du travail).